Image cavitaire intrathoracique trompeuse

Image cavitaire intrathoracique trompeuse

Image et diagnostic Image cavitaire intrathoracique trompeuse M. Bourguiba1, F. Chermiti Ben Abdallah1, I. Drira1, H. Fennira1, S. Maalej1, A. Ayadi2...

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Image et diagnostic

Image cavitaire intrathoracique trompeuse M. Bourguiba1, F. Chermiti Ben Abdallah1, I. Drira1, H. Fennira1, S. Maalej1, A. Ayadi2, F. Mezni2, H. Djilani3, A. Ben Kheder1

Observation

Fig. 1.

Radiographie de thorax de face : clarté du champ pulmonaire gauche avec niveau hydro-aérique et déviation médiastinale vers la droite.

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Service de pneumologie, Hôpital Abderrahmen Mami, Ariana, Tunisie. 2 Service d’anatomie pathologie, Hôpital Abderrahmen Mami, Ariana, Tunisie. 3 Service de chirurgie thoracique et cardiovasculaire, Hôpital Abderrahmen Mami, Ariana, Tunisie.

Madame J.T. âgée de 76 ans, aux antécédents de thoracotomie gauche il y a 20 ans pour une pathologie non précisée, est hospitalisée pour des douleurs thoraciques gauches associées à une toux grasse et des expectorations mucopurulentes évoluant depuis un mois. L’examen physique objective une fièvre à 38° C, une augmentation de la sonorité du champ pulmonaire gauche, une abolition du murmure vésiculaire à l’auscultation et des bruits du cœur perçus à droite. La radiographie thoracique (fig. 1), montre une cavité occupant la quasi-totalité du champ pulmonaire gauche avec un niveau hydro-aérique et en son sein des clartés finement cerclées. Les examens biologiques révèlent un syndrome inflammatoire et l’examen bactériologique des crachats ne montre pas la présence de germe. La recherche de bacilles acido-alcoolo-résistants (BAAR) dans les crachats est négative. La fibroscopie bronchique montre une compression extrinsèque de l’arbre bronchique gauche. L’échographie thoracique visualise une volumineuse collection contenant des échos de réverbérations, des clartés aériques piégées et des cloisons lâches dont la topographie évoque une localisation pleurale gauche. La TDM thoracique (fig. 2) objective une collection antérieure compressive de nature pleurale ou parenchymateuse, à double composante liquidienne et aérique. Elle renferme de multiples cloisons délimitant des logettes et entraîne un refoulement des structures médiastinales vers la droite.

Correspondance : I. Drira Service de pneumologie du professeur Ali Ben Kheder, Pavillon D, Hôpital Abderrahmen Mami de pneumophtisiologie, Ariana 2080, Tunisie. [email protected] Réception version princeps à la Revue : 02.03.2005. 1ère demande de réponse aux auteurs : 14.10.2005. Réception 3e version révisée : 02.08.2006. Acceptation définitive : 12.08.2006.

Rev Mal Respir 2006 ; 23 : 481-83 Doi : 10.1019/20064168

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M. Bourguiba et coll.

Devant ce tableau radio-clinique, un drainage thoracique écho-guidé est pratiqué. Le liquide drainé est d’aspect crémeux et épais. L’examen bactériologique et une recherche de BAAR sont négatifs. La radiographie thoracique ainsi que la TDM de contrôle montrent une légère diminution de la taille de la collection. Une intervention chirurgicale à visée diagnostique et thérapeutique est décidée. En peropératoire, on découvre une formation kystique de 15 cm occupant une partie du culmen et de la lingula s’étendant au contact de la coupole diaphragmatique. Aucune fistule n’est identifiée. Une résection complète de cette formation est réalisée. L’examen histologique (fig. 3) met en évidence une lésion kystique uniloculaire de 16 x 10 cm, arrivant au contact du muscle pariétal et à contenu purulent renfermant des polynucléaires altérés sans amas de germes. Elle est tapissée par un épithélium principalement de type respiratoire, parfois métaplasique qui s’invagine par endroits réalisant des pseudo-logettes. La paroi kystique renferme des faisceaux de fibres musculaires lisses, des structures glandulaires ainsi que des anneaux cartilagineux parfois calcifiés. Il s’agit d’un kyste bronchogénique intrapulmonaire géant compliqué.

Les kystes bronchogéniques résultent du développement autonome et retardé d’un bourgeon cellulaire détaché de l’arbre trachéo-bronchique entre le 20e et le 40e jour de la vie embryonnaire [1]. Ils représentent 44,8 % des kystes médiastinaux [2] et la localisation est intrathoracique dans 84 % des cas [1]. Ils peuvent rester asymptomatiques jusqu’à l’âge adulte et la découverte peut être fortuite à l’occasion d’un examen

radiologique. Ce mode évolutif peut expliquer la découverte d’un kyste géant à un âge tardif [3]. La fièvre, la toux, les expectorations mucopurulentes voire hémoptoïques sont généralement en rapport avec une communication entre le kyste et l’arbre bronchique, mais ceci n’a pas été confirmé chez notre patiente. En effet, la fistule bronchique n’est pas toujours identifiée [4]. Plusieurs auteurs ont décrit des observations de kystes bronchogéniques géants avec différents aspects à la radiographie du thorax : une opacité homogène de tonalité hydrique arrondie ou ovalaire, une opacité avec un niveau hydro-aérique ou une image aérique kystique sous tension [3, 4]. Le kyste bronchogénique pulmonaire apparaît souvent à la TDM thoracique comme une masse arrondie, bien limitée, uniloculaire à paroi fine, de densité liquidienne et non rehaussée par le produit de contraste. Dans le cas de notre patiente, la radiographie thoracique a montré la présence de multiples clartés finement cerclées à l’intérieur même de la cavité kystique, expliquées a posteriori par l’invagination de la paroi en intrakystique. Plusieurs diagnostics différentiels sont évoqués devant cette présentation radiologique. La présence d’une fièvre à 38° C et d’un syndrome inflammatoire biologique peut faire suspecter une pleurésie purulente enkystée, un abcès pulmonaire ou une bulle d’emphysème infectée. Le diagnostic de kyste hydatique est envisagé, car la patiente est originaire d’une région de forte endémie hydatique. Une tumeur maligne nécrosée peut également être discutée mais paraît peu probable car la TDM thoracique ne montre pas de masse tissulaire. Le traitement de référence du kyste bronchogénique est l’exérèse chirurgicale complète en raison des risques de dégé-

Fig. 2.

Fig. 3.

Coupe scannographique en fenêtre parenchymateuse : collection antérieure gauche liquidienne et aérique, de 17 x 13 x 9 cm contenant des logettes.

Volumineux kyste arrivant au contact du muscle pariétal, tapissé par un épithélieum de type respiratoire, s’invaginant et réalisant des pseudologettes (HE x 100). Encart : Présence d’un anneau cartilagineux dans la paroi kystique (HE x 200).

Discussion

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nérescence et de récidive [2]. Compte tenu de ses antécédents de thoracotomie gauche, il est probable que notre patiente ait présenté une récidive liée à une résection incomplète d’un kyste bronchogénique.

Conclusion Nous rapportons l’observation d’une femme de 76 ans présentant un kyste bronchogénique géant de présentation radiologique inhabituelle, avec gigantesque collection liquidienne et surtout aérique.

Références 1

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Lemarié E, Diot P, Droz JP, Ruffié P : Tumeurs médiastinales d’origine embryonnaire. Editions techniques.- Encycl. Med. Chir. (Paris- France) Pneumologie, 6-047-D-40, Cancérologie, 60-6-710-A-10, 1993 ; 11p. Takeda S, Miyoshi S , Minami M, Ohta M, Masaoka A, Matsuda H : Clinical spectrum of mediastinal cysts. Chest 2003 ; 124 : 125-32. Basoglu A, Celik B, Sengul AT : Giant parenchymal bronchogenic cyst mimicking hydropneumothorax. J. Thorax Cardiovasc Surg 2003 ; 126 : 1201-02. Tarpy SP, Kornfeld H, Moroz K, Lazar HL : Unusual presentation of a large tension bronchogenic cyst in an adult. Thorax 1993 ; 48 : 951-2.

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