Tumeur intrathoracique

Tumeur intrathoracique

Rec¸u le : 3 mars 2010 Rec¸u sous la forme re´vise´e : 10 mars 2011 Accepte´ le : 3 avril 2011 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com Que...

418KB Sizes 33 Downloads 97 Views

Rec¸u le : 3 mars 2010 Rec¸u sous la forme re´vise´e : 10 mars 2011 Accepte´ le : 3 avril 2011

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com



Quel est votre diagnostic ?

Tumeur intrathoracique M. Aubreta,*, L. Cassagnesa, G. Jeanninb, A. Naame´ec, A. Ravela, A. Greilb, L. Boyera a Service de radiologie B, CHRU Gabriel-Montpied, 58, rue Montalembert, 63000 ClermontFerrand, France b Service de pneumologie, CHRU Gabriel-Montpied, 58, rue Montalembert, 63000 ClermontFerrand, France c Service de chirurgie thoracique, CHRU Gabriel-Montpied, 58, rue Montalembert, 63000 Clermont-Ferrand, France

Observation Une masse tumorale basithoracique droite de 35  70 mm a e´te´ de´couverte chez une patiente de 66 ans, dans le cadre du bilan d’une de´compensation de BPCO. Cette le´sion, visualise´e

[()TD$FIG]

initialement sur un cliche´ thoracique standard (fig. 1), a donne´ lieu dans un premier temps a` un scanner thoraco-abdominopelvien sans puis apre`s injection de produit de contraste aux temps arte´riel et portal (fig. 2), puis a` une exploration par IRM (fig. 3).

[()TD$FIG]

Figure 2. Scanner thoraco-abdominopelvien, 30 secondes apre`s injection de produit de contraste iode´. Coupe axiale passant par la le´sion.

Figure 1. Cliche´ thoracique de face debout.

* Auteur correspondant. e-mail : [email protected] 0181-9801X/$ - see front matter ß 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. 10.1016/j.frad.2011.04.009 Feuillets de radiologie 2011;51:152-155

152

[()TD$FIG]

Tumeur intrathoracique

Figure 3. IRM se´quence T2 blade, coupe coronale sur la le´sion.

Quel est votre diagnostic ?

153

A. Magalie et al.

Feuillets de radiologie 2011;51:152-155

Diagnostic

La prise en charge chirurgicale de cette le´sion pleurale s’est ave´re´e impossible du fait de la de´gradation de l’e´tat respiratoire de la patiente, qui aboutissait a` son de´ce`s quelques semaines plus tard.

Il s’agit d’une tumeur fibreuse solitaire de la ple`vre.

Analyse de l’imagerie Le cliche´ thoracique de face (fig. 1) retrouvait une opacite´ tissulaire nettement supra-centime´trique de la base pulmonaire droite, en contact e´troit avec la coupole diaphragmatique droite, dont les contours ne sont pas efface´s sur cette incidence. Il n’existe pas d’e´panchement pleural. On visualise des hyper-clarte´s dans les deux champs pulmonaires pre´dominant aux sommets, faisant suspecter des le´sions emphyse´mateuses. Il n’existe pas de cardiome´galie. Un scanner thoraco-abdominopelvien sans puis apre`s injection de produit de contraste aux temps arte´riel et portal (fig. 2), e´tait re´alise´, sur lequel on retrouvait une masse, hypervascularise´e, et discre`tement he´te´roge`ne, aux contours nets, a` de´veloppement intrathoracique, en contact e´troit avec la coupole diaphragmatique droite. L’existence d’une le´sion e´galement hypervascularise´e du segment VIII he´patique, en contact e´troit avec la premie`re, faisait discuter une possible extension vers le foie. Afin de de´terminer les rapports exacts de la tumeur avec les structures voisines, et de distinguer une origine sus- ou sousdiaphragmatique, une IRM a e´te´ re´alise´e, (se´quences T1 et T2 dans les trois plans de re´fe´rence) (fig. 3). Elle retrouvait une masse bien de´limite´e reposant sur la coupole diaphragmatique droite, sans l’envahir, refoulant re´gulie`rement le parenchyme pulmonaire adjacent, sans ate´lectasie ni e´panchement pleural. L’anomalie du segment VIII he´patique correspondait a` un angiome sous capsulaire, totalement distinct de la masse intrathoracique. Des arte´riographies syste´mique et pulmonaire ont aussi e´te´ re´alise´es afin de pre´ciser les pe´dicules vasculaires alimentant cette formation tumorale. Toute la partie basse de la masse est apparue vascularise´e par un pe´dicule intercostal, et de fac¸on beaucoup plus limite´e par la premie`re arte`re lombaire droite. Toute communication avec la vascularisation arte´rielle ou veineuse pulmonaire e´tait e´carte´e. Ces caracte´ristiques angio-architecturales e´taient compatibles avec une tumeur d’origine pleurale. Compte-tenu de l’e´tat pre´caire de la patiente, contre-indiquant une chirurgie a` ce moment-la`, a e´te´ de´cide´ apre`s concertation pluridisciplinaire, la re´alisation d’une biopsie sous guidage scannographique, sous anesthe´sie locale, a` l’aide d’une aiguille coaxiale de 18 gauges. L’examen histologique et immuno-histochimique des pre´le`vements a retrouve´ des arguments orientant vers une tumeur fibreuse solitaire sans signe de malignite´. Les pre´le`vements montraient une prolife´ration tumorale ou` co-existaient des zones hyper et hypocellulaires. Sur les coupes en paraffine, les cellules e´taient intense´ment marque´es par les anticorps antivimentine et anti-C.D.34.

154

Discussion Les tumeurs fibreuses solitaires de la ple`vre sont des le´sions rares, qui repre´sentent moins de 5 % de toutes les tumeurs pleurales. Ces tumeurs ne sont pas lie´es a` l’exposition a` l’amiante et n’ont aucun lien avec les me´sothe´liomes pleuraux. Leur e´volution est be´nigne dans plus de 80 % des cas [1], mais reste toutefois cliniquement totalement impre´visible. Le terme de tumeurs fibreuses solitaires de la ple`vre a e´te´ introduit en 1931 par Klemperer et Rabin [2]. Stout les a de´finies par opposition aux formes diffuses et agressives de me´sothe´liomes e´pithe´liaux. Ces tumeurs sont symptomatiques dans environ 50 % des cas, sous forme de douleurs thoraciques, dyspne´e, toux ou syndromes parane´oplasiques. L’e´volution clinique reste impre´visible, avec moins de 20 % de formes malignes. Le traitement chirurgical est a` la base de la prise en charge. Le diagnostic par imagerie reste difficile, et ne peut eˆtre fait formellement que par l’analyse anatomopathologique, comme c’est le cas dans cette observation. Environ 50 % des patients sont asymptomatiques. Les symptoˆmes les plus souvent retrouve´s sont la dyspne´e, la toux, et les douleurs thoraciques. Les patients peuvent e´galement pre´senter des syndromes parane´oplasiques non spe´cifiques a` type d’oste´oarthropathie hypertrophiante pneumonique ou d’hypoglyce´mies lie´es a` la production d’IGF2 par la tumeur [3]. Dans le cas pre´sente´ ici, la patiente souffrait d’une de´compensation respiratoire sur insuffisance respiratoire chronique, rendant difficile l’e´valuation des re´percussions de cette masse tumorale sur le plan respiratoire. En revanche, aucun syndrome parane´oplasique n’a e´te´ constate´. La pre´sentation scannographique de ces tumeurs pleurales est dans la majorite´ des cas celle d’une masse bien limite´e, lobule´e, au contact d’une surface pleurale. Il existe souvent des zones hypodenses avant et apre`s injection correspondant a` de la ne´crose, en particulier dans les formes de grande taille [3]. Ces donne´es concordent avec celles de notre observation. Le diagnostic de certitude peut eˆtre obtenu soit par biopsie percutane´e, soit, si cette dernie`re n’est pas contributive, par analyse histologique de la pie`ce chirurgicale. L’analyse immuno-histochimique montre des prolife´rations tumorales avec alternance de zones hyper- et hypocellulaires. Les tumeurs fibreuses solitaires sont classe´es en formes be´nignes et malignes. Ces tumeurs sont ne´gatives pour la Ke´ratine et la prote´ine S100, et positives a` la vimentine. Mais le crite`re essentiel pour le diagnostic de ces tumeurs est le marquage intense par les anticorps anti-C.D.34 [3,4]. Ces donne´es concordent avec celles retrouve´es dans notre observation. La prise en

Tumeur intrathoracique

charge de ces tumeurs fibreuses solitaires de la ple`vre repose sur une exe´re`se chirurgicale comple`te, avec des marges de se´curite´ de 1 a` 2 cm si possible, facteur pronostique le plus important dans cette pathologie [4]. Un suivi a` long terme, clinique et radiologique, est indique´ en raison du risque de re´cidive [5,6]. Celui-ci apparaıˆt presque nul en cas de forme be´nigne de re´section comple`te, mais n’est pas ne´gligeable dans les formes malignes : deux cas de re´cidives sur 21 formes malignes dans l’e´tude de Magdeleinat et al. [5]. Aucune preuve du be´ne´fice d’un traitement adjuvant par radiothe´rapie ou chimiothe´rapie n’a e´te´ apporte´e.

De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.

Re´fe´rences [1]

[2]

Conclusion

[3]

Cette observation rapporte un cas rare de tumeur fibreuse solitaire de la ple`vre. Le diagnostic formel par imagerie de cette forme d’atteinte pleurale reste difficile. C’est l’examen immuno-histochimique de la pie`ce d’exe´re`se chirurgicale ou, comme c’e´tait le cas pour notre patiente, de la biopsie percutane´e, qui permet d’e´tablir le diagnostic. Le facteur pronostique majeur dans cette pathologie reste l’exe´re`se chirurgicale en marges saines.

[4] [5]

[6]

Rena O, Filosso PL, Papalia E, Molinatti M, Di Marzio P, Maggi G, et al. Solitary fibrous tumor of the pleura: surgical treatment. Eur J Cardiothorac Surg 2001;19:185–9. Klemperer P, Rabin CB. Primary neoplasm of the pleura: a report of five cases. Arch Pathol 1931;11:385–412. Lee SC, Tzao C, Ou SM, Hsu HH, Yu CP, Cheng YL. Solitary fibrous tumors of the pleura: clinical, radiological, surgical and pathological evaluation. Eur J Surg Oncol 2004;31:84–7. Lu C, Ji Y, Shan F, Guo W, Ding J, Ge D. Solitary fibrous tumor of the pleura: an analysis of 13 cases. World J Surg 2008;32:1663–8. Magdeleinat P, Alifano M, Petino A, Lerochais JP, Dulmet E, Galateau F, et al. Solitary fibrous tumors of the pleura: clinical characteristics, surgical treatment and outcome. Eur J Cardiothorac Surg 2002;21:1087–93. Takagi M, Kuwano K, Watanabe K, Akiba T. A case of recurrence and rapid growth of pleural solitary fibrous tumor 8 year after initial surgery. Ann Thorac Cardiovasc Surg 2009;15:178–81.

155