IRM des atteintes macronodulaires hépatiques à mycobactéries

IRM des atteintes macronodulaires hépatiques à mycobactéries

J Radiol 2007;88:47-51 © Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2007 Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés article original digesti...

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J Radiol 2007;88:47-51 © Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2007 Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

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digestif

IRM des atteintes macronodulaires hépatiques à mycobactéries T Caramella (1), F Fuerxer (2), P Chevallier (1), E Cua (3), MC Saint Paul (4), F Dausse (1), S Novellas (1), C Gueyffier (5), P Brunner (2) et JN Bruneton (1)

Abstract

Résumé

MR Features of hepatic macronodular mycobacteriosis J Radiol 2007;88:47-51

L’atteinte mycobactérienne macronodulaire hépatique isolée est rare. Son diagnostic, difficile et méconnu, est le plus souvent évoqué après l’analyse histologique de biopsies ou de pièces opératoires. Le diagnostic de certitude, en dehors des rares cas où le germe est isolé, repose sur un faisceau d’arguments à la fois cliniques, biologiques et radiologiques. Nous rapportons, de manière rétrospective, l’aspect en IRM de dix lésions hépatiques développées chez cinq patients. L’IRM paraît sensible mais peu spécifique, avec des lésions pseudo tumorales présentant le plus souvent un hyposignal spontané en T1, un hypersignal en T2 et un très faible rehaussement périphérique de leur intensité aux phases portales et parenchymateuses d’une injection intraveineuse de complexes de Gadolinium en T1.

Hepatic macronodular mycobacteriosis is rare. Its diagnosis is challenging and is most often proposed on the basis of histological analysis. Final diagnosis, except for germ-proven cases, is made in conjunction with clinical, biological, and radiological arguments. We retrospectively report the MR features of ten hepatic lesions discovered on five patients. MRI is sensitive but has a low specificity in demonstrating pseudotumoral lesions most often exhibiting hypointensity on the T1-weighted sequence, hyperintensity on the T2-weighted sequence, and a slight rim enhancement after gadolinium-enhanced T1-weighted sequences. Key words: Magnetic Resonance Imaging. Liver. Mycobacterium infection.

es mycobactéries sont une cause rare d’atteinte infectieuse du parenchyme hépatique. Leur description en imagerie et en particulier par IRM a fait l’objet de peu de publications et sur des séries toujours limitées (1-5). Nous rapportons les aspects en IRM de dix lésions hépatiques développées chez cinq patients.

L

Matériel et méthode Nous avons recherché de manière rétrospective, sur une période allant de Janvier 1998 à Décembre 2005, sur la base de données du laboratoire d’Anatomie pathologique de notre institution, tous les patients chez lesquels était porté un diagnostic histologique d’atteinte hépatique à mycobactéries. Ont été inclus dans notre étude, dont

(1) Service d’imagerie médicale (Pr Bruneton), Centre Hospitalier Universitaire de Nice, Hôpital Archet II. (2) Service d’IRM (Dr Cucchi, Dr Mourou), Centre Hospitalier Princesse Grâce, Av Pasteur, 98000 Monaco. (3) Service des maladies infectieuses (Pr Dellamonica), (4) Service d’anatomopathologie (Pr Michiels), Centre Hospitalier Universitaire de Nice, Hôpital Archet II, 151 route de Saint Antoine de Ginestiere, BP 3079, 06202 Nice. (5) Service de gastroentérologie, Centre Hospitalier Régional de Cannes, Hôpital Les Broussailles, 15 av des Boussailles, 06400 Cannes. Correspondance : T Caramella E-mail : [email protected]

Mots-clés : Imagerie par résonance magnétique. Foie. Infection à mycobacterium.

l’objectif était de décrire les aspects en IRM de cette pathologie, tous les patients de cette première liste ayant eu également une IRM hépatique dans le mois précédant ou suivant le diagnostic histologique. Pour chacun des patients inclus dans l’étude, devait être également disponible un dossier médical complet comprenant en particulier l’observation clinique et le statut immunitaire et pulmonaire. Les IRM (Gyroscan NT-10, 1 tesla, Philips Medical Systems, Eindoven, Netherlands) comportaient des coupes axiales pondérées en Turbo spin-echo T2 (TR/ TE = 1800/80) avec saturation de la graisse (Spoiled Inversion Recovery), en écho de gradient T1 en phase et en opposition de phase (TR/TE en phase/TE en opposition de phase/angle de bascule = 245/6,9/ 3,4/80°), et en écho de gradient T1 (TR/ TE = 4/1.9) après injection intraveineuse de 0,1 mmol/kg de complexes de Gadolinium (Dotarem®, Guerbet, France) aux temps artériel, portal et parenchymateux. Pour deux patients étaient également disponibles des reconstructions en maximum intensity projection de séquences de cholangiopancréatographies réalisées en 3D TSE (TR/TE eff = 2000/700). L’analyse des IRM était effectuée en consensus par deux radiologues seniors expérimentés en pathologie hépatique.

La confirmation diagnostique a été portée sur les pièces opératoires ou les biopsies hépatiques analysées par un anatomopathologiste et/ou un biologiste senior spécialiste en pathologie hépatique.

Résultats

Données cliniques L’âge moyen de la population étudiée était de 67 ans (extrêmes : 40-82). Les symptômes à l’entrée correspondaient à un syndrome fébrile (2 cas), des douleurs de l’hypocondre droit (3 cas), et/ou à une altération de l’état général (3 cas). Pour un patient suivi pour une hépatopathie chronique, l’atteinte hépatique focale à mycobactéries était de découverte fortuite et un autre patient se présentait avec un tableau chirurgical à type d’angiocholite aiguë avec lithiase enclavée du bas cholédoque. Un patient avait déjà été hospitalisé 10 ans auparavant pour une tuberculose pulmonaire. Aucun n’était porteur d’un déficit immunitaire acquis ou congénital. Tous les patients se sont améliorés cliniquement sous traitement antibiotique spécifique en quelques semaines et avec disparition des lésions décrites en imagerie entre 2 et 6 mois après le début du traitement.

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Fig. 1 : a b-c

Sur le plan biologique, les transaminases étaient normales dans deux cas (40 %), élevées dans trois cas, (8 fois la normale pour un patient et 1,5 fois la normale pour les deux autres). Les gamma glutamyl transférases n’étaient normales que pour un patient et augmentées pour les quatre autres, entre 3 et 10 fois la normale. Les phosphatases alcalines étaient augmentées dans trois cas entre 3 et 4 fois la normale. La bilirubine totale et la conjuguée n’étaient augmentées que dans le cas d’angiocholite aiguë du fait de l’obstruction des voies biliaires. Enfin, un syndrome inflammatoire attesté par les valeurs de la protéine C réactive n’était présent que pour deux patients. Tous les patients ont eu un scanner thoracique, une fibroscopie bronchique et de multiples sérologies bactériennes. Ce bilan était dans tous les cas négatifs. L’IDR était positive pour deux patients dont celui ayant un antécédent de tuberculose pulmonaire.

IRM L’intervalle moyen entre l’IRM et la confirmation histologique était de 29,8 jours (171 j). Dix lésions, mesurant en moyenne 48 mm (extrêmes : 30-70 mm), étaient identifiées.

IRM Patient n° 2/Nodule n° 4 du segment VIII. Séquence T2 montrant un nodule en franc hypersignal homogène. Rehaussement homogène en T1 après injection de gadolinium.

Les résultats avant biopsie sont reportés dans le tableau I et illustrés par les figures 1 à 3. Les lésions étaient en hypersignal T2 dans 7 cas, et en hyposignal T1 dans tous les cas. La prise de contraste était progressive prédominant au temps portal et en périphérie de la lésion dans 7 cas. Il n’y avait aucune modification du signal sur les séquences en T1 en opposition de phase par rapport à la séquence en phase. Les lésions se situaient trois fois dans le foie gauche et sept fois dans le foie droit. Le

patient n° 4 présentait une lésion centro hépatique induisant une dilatation des voies biliaires intra-hépatiques prédominant à gauche.

Résultats histologiques Les analyses histologiques ont été réalisées pour un patient sur une pièce opératoire de segmentectomie et sur des biopsies hépatiques pour les autres. Pour tous les patients, l’histologie mettait en évidence des lésions de granulome giganto cellulaire. Chez qua-

Tableau I Aspect en IRM des macronodules hépatiques à mycobactérie. Patient 1

2

3

4

5

# lésion

Taille (mm)

Contours

T1 In / Out phase

1

30

Nets

Hyposignal

Hypersignal

périphérique

2

30

3

40

Hyposignal

Hypersignal

homogène

4

50

Nets Nets

Hyposignal

Hypersignal

périphérique

Flous

Hyposignal

Isosignal

périphérique

Flous

Hyposignal

Hypersignal

périphérique

5

70

6

60

7

60

8

40

9

30

10

70

Nets

T2

Rehaussement au temps portal

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Fig. 2 : a b-c

IRM Patient n° 3/Nodule n° 5 sous capsulaire du segment VIII. Séquences T2 montrant un nodule en hypersignal hétérogène. Prise de contraste périphérique en T1 après injection de gadolinium.

tre patients s’y associait de la nécrose, décrite comme caséeuse pour deux d’entre eux. La coloration de Ziehl Nielsen était négative dans tous les cas. Une péliose était notée chez trois patients et de la fibrose dans trois cas. Pour les deux patients pour lesquels le diagnostic de tuberculose hépatique avait été évoqué au préalable de la biopsie, un prélèvement complémentaire avait été envoyé en bactériologie pour analyse. La culture revenait positive après 90 jours à Mycobacterium Fortuitum pour un patient. La recherche de mycobactérie par PCR n’a jamais été réalisée.

étude de 92 cas de ponctions biopsies hépatiques réalisées chez des patients atteints de tuberculose pulmonaire, identifient des lésions granulomateuses dans 20 cas. L’atteinte la plus fréquente se fait sous forme micronodulaire (8). L’atteinte isolée hépatique sous forme d’une masse ou tuberculome est rare. Ce diagnostic est le plus souvent méconnu et confondu avec une atteinte tumorale primitive ou secondaire hépatique. L’infection hépatique naîtrait probablement des ganglions para aortiques ou portaux et atteindrait le foie par le système porte ou l’artère mésentérique supérieure (9).

Discussion

Diagnostic positif

Physiopathologie

L’expression clinique de l’atteinte tuberculeuse est très polymorphe et peut aller de l’absence de symptôme à un tableau d’hépatite sévère avec ictère et insuffisance hépatocellulaire (6). Le diagnostic positif est difficile car il nécessite la mise en évidence de bacilles acido-alcoolo résistants. La coloration de Ziehl Nielsen n’est positive que dans 0 à 45 % des cas, la cul-

La tuberculose hépatique s’associe habituellement à une tuberculose active pulmonaire ou une miliaire tuberculeuse. 15 % des tuberculoses pulmonaires ont ainsi une atteinte associée abdominale, le plus souvent sous forme ganglionnaire (25 à 93 %) (6). Morere et al. (7) dans une J Radiol 2007;88

ture est longue (90 jours) et n’est rentable que dans 10 à 60 % des séries, alors la recherche de mycobactéries par PCR serait plus souvent contributive, dans au moins 57 % des cas (9). Néanmoins, pour plupart des auteurs (1-3, 8, 10-13), le diagnostic peut être porté soit devant la présence de granulomes hépatiques associés à une atteinte tuberculeuse documentée d’un autre organe, en particulier le poumon, soit quand la symptomatologie clinique et radiologique régresse après mise en route d’un traitement antituberculeux, d’autant plus que l’antibiothérapie initiale était un échec (9). Dans notre étude, seule une culture s’est révélée positive mettant en évidence une mycobactérie atypique. Le diagnostic a donc, pour les quatre autres cas, été présumé sur un faisceau d’arguments cliniques et histologiques.

Diagnostic différentiel Le granulome tuberculoïde est caractérisé par la présence de cellules épithélioïdes, de cellules géantes ou cellules de Lan-

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a b c d

Fig. 3 : a b c d

IRM Patient n° 4/Nodule n° 6. Vaste plage centre sur le segment VIII en hyposignal modéré T1, non visible en T2. Après injection de gadolinium, prise de contraste périphérique au temps portal. La dilatation des voies biliaires est confirmée par la séquence de bili-IRM.

ghans et de lymphocytes en couronne périphérique. Il n’est pas en soi spécifique et peut se retrouver dans d’autres pathologies. Une étude de McCluggage (14) a recensé sur 30 ans l’ensemble des étiologies granulomateuses hépatiques. Les étiologies étaient : infectieuses (Mycobactérioses, Brucellose, Mycoses, Shistosomiase), métaboliques (surcharge en Cuivre/Maladie de Wilson), inflammatoires (Sarcoïdose, Cirrhose biliaire primitive) et néoplasiques (Lymphome). Un bilan complémentaire sera donc toujours nécessaire pour éliminer chacune de ces hypothèses, ce qui fut le cas pour tous les patients de cette étude rétrospective.

Aspects en imagerie Les descriptions du tuberculome hépatique en imagerie sont peu nombreuses et le plus

souvent ce sont des descriptions échographiques et/ou scannographiques. En échographie, le tuberculome est le plus souvent hypo échogène mais des nodules hyperéchogènes ont déjà été décrits (15, 16). En scannographie les nodules apparaissent classiquement hypodenses sans rehaussement ou avec un faible rehaussement périphérique après injection iodée (15). A notre connaissance, moins de dix observations en IRM de tuberculomes hépatiques ont été rapportées dans la littérature (1-5). L’aspect classiquement admis est une lésion en hyposignal T1 et iso ou hyposignal T2. Après injection il existe un discret rehaussement en couronne périphérique (4, 13, 15). Dans notre étude, le rehaussement était dans tous les cas absent ou faible après injection intra veineuse de Gadolinium. Quand il était présent, il s’agissait le plus

souvent d’un rehaussement périphérique prédominant aux temps portal et tardif de l’injection. Aucune lésion n’avait une séméiologie évocatrice d’une lésion spécifique hépatique et l’aspect inhabituel avait justement amené à poursuivre les investigations dans l’hypothèse d’une lésion maligne. Le signal lésionnel en T2 était le plus souvent élevé. Ces données sont en accord avec les cas précédemment décrits dans la littérature récente. L’hyposignal T1 spontané semble constant (2, 3, 11). En T2, les descriptions sont variables, le signal pouvant être diminué (2, 3, 11) ou augmenté (3, 12). Yuji et al. (1) discutent les raisons possibles d’un hyposignal T2. Il pourrait être en relation avec la présence de fibrose, de calcifications ou de radicaux libres (1). Dans ce dernier cas, l’aspect serait alors à rapprocher des tuberculomes cérébraux qui apparaissent classiqueJ Radiol 2007;88

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ment en hyposignal T2 pour cette même raison (17). D’autres auteurs rapportent une lésion en hypersignal T2 du fait d’une composante kystique (3) ou nécrotique liquidienne (11). Dans notre cas, et ainsi que l’évoquent Fan et al. (2), l’hypersignal T2 est très certainement à rapprocher de la présence même de tissu granulomateux. L’intensité du signal serait modulée par les remaniements inflammatoires, la fibrose et la nécrose associées, pouvant refléter la même forme physiopathologique à des stades évolutifs différents (5). De plus, les séquences que nous avons pratiquées en T2 étaient systématiquement associées à une saturation de la graisse (18) contrairement aux protocoles rapportés par d’autres auteurs (25). De ce fait, des lésions décrites en iso ou hyposignal T2 dans d’autres études, se seraient peut être révélées en hypersignal après saturation de la graisse, la caractérisation du signal se faisant par rapport au foie sain adjacent.

Conclusion L’atteinte mycobactérienne macronodulaire hépatique isolée est rare et l’IRM se révèle peu spécifique pour son diagnostic positif. L’aspect le plus fréquent est celui d’un nodule en hyposignal T1, hypersignal T2 et possédant un très faible rehaussement périphérique après injection intraveineuse de gadolinium prédominant à la phase portale et tardive.

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