Kyste hydatique primitif de la cuisse chez un bodybuilder. À propos d’un cas et revue de la littérature

Kyste hydatique primitif de la cuisse chez un bodybuilder. À propos d’un cas et revue de la littérature

Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com Journal de Traumatologie du Sport 33 (2016) 107–109 Cas clinique Kyste hydatique primit...

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ScienceDirect www.sciencedirect.com Journal de Traumatologie du Sport 33 (2016) 107–109

Cas clinique

Kyste hydatique primitif de la cuisse chez un bodybuilder. À propos d’un cas et revue de la littérature Primary hydatic cyst in a bodybuilder’s thigh. Case report and review of the literature K. Rafiqi ∗ , A. Rafaoui , M. Sirrajelhak , A. Messoudi , H.A. Abouali , M. Rafai , M. Rahmi , A. Garch Service de chirurgie orthopédique et traumatologique P32, Casablanca, Maroc Disponible sur Internet le 26 avril 2016

Résumé La localisation musculaire de l’Echinococcus est très rare. La symptomatologie est souvent discrète et le diagnostic est confirmé par l’imagerie : échographie et/ou imagerie par résonance magnétique. Chez les bodybuilders, le diagnostic est plus difficile à cause de l’importance de la masse musculaire ; aussi, il est souvent fait au stade des signes fonctionnels. Le traitement est chirurgical. Les auteurs rapportent un cas de localisation isolée et primitive d’un kyste hydatique musculaire de la cuisse chez un sportif révélé par une sciatalgie. © 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´eserv´es. Mots clés : Kyste hydatique primitif ; Cuisse ; Chirurgie

Abstract Muscular localization of hydatid cyst is an uncommon event. Symptoms are often discrete. Diagnosis is confirmed by the imaging: ultrasonography and/or magnetic resonance imaging. The diagnosis is misleading in bodybuilders, because of the importance of muscle mass, and is often done at the stage of functional signs. The treatment is surgical. The authors report a case of primary and isolated localization of a muscular hydatid cyst of the thigh in a sport man revealed by sciatalgia. © 2016 Elsevier Masson SAS. All rights reserved. Keywords: Primary hydatid cyst; Thigh; Surgery

1. Introduction L’atteinte musculaire par l’Echinococcus est rare, même dans les pays endémiques où sa fréquence est estimée à moins de 3 % [1,2]. Le diagnostic est souvent tardif vu son caractère asymptomatique et l’évolution est lente. L’hydatidose des parties molles peut avoir plusieurs aspects en imagerie qu’il faut connaître afin de pouvoir poser le diagnostic en préopératoire et éviter la survenue de complications parfois graves [3,4].



Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (K. Rafiqi).

http://dx.doi.org/10.1016/j.jts.2016.03.008 0762-915X/© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´eserv´es.

Nous rapportons l’observation rare d’un kyste hydatique de la loge postérieure de la cuisse chez un bodybuilder amateur, révélé par des sciatalgies et une tuméfaction de la face postérieure de la cuisse. Cette observation nous montre la difficulté du diagnostic des tumeurs des parties molles chez les bodybuilders en dehors des signes fonctionnels. 2. Observation Il s’agit d’un patient âgé de 28 ans, bodybuilder amateur depuis 10 ans, ayant une notion de contact avec les chiens surtout durant l’enfance. Le début de la symptomatologie remonte à un an avec une sensation de paresthésies dans le trajet du

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Fig. 1. Aspect clinique du kyste hydatique (KH) à la face postérieure de la cuisse droite.

Fig. 3. Aspect peropératoire de la paroi kystique de grande taille.

2 ans, la surveillance clinique, échographique et biologique n’a pas objectivé de récidive locale ou viscérale. nerf sciatique. Par ailleurs, le sujet rapporte l’installation d’une tuméfaction de la face postérieure de la cuisse droite, augmentant progressivement de volume, qu’il avait pris pour un effet du bodybuilding. L’examen clinique notait une tuméfaction de 14/9 cm intéressant la partie moyenne de la face postérieure de la cuisse, sans troubles moteurs ni hypoesthésie d’aval (Fig. 1). L’examen abdominal ne montrait pas d’hépatomégalie ; l’examen pulmonaire était normal. L’échographie évoquait une formation liquidienne de grande taille. L’IRM montrait une image homogène d’aspect liquidienne en séquence pondérée T1 et un hypersignal en séquence pondérée T2, sans cloisons intrakystiques (Fig. 2) faisant évoquer un kyste hydatique musculaire. Le patient a bénéficié d’un bilan général recherchant une autre localisation : radiographie pulmonaire, échographie hépatique, éosinophilie ; les résultats se sont avérés normaux. La sérologie hydatique était négative. Une exérèse chirurgicale (périkystectomie) a été pratiquée (Fig. 3). Après un recul de

3. Discussion L’hydatidose est une maladie humaine causée par la larve de Taenia echinococcus, qui vit dans le tube digestif des chiens, domestiques ou sauvages, et d’autres animaux carnivores dont ils sont les hôtes définitifs. Les humains en sont les hôtes intermédiaires accidentels lorsqu’ils ingèrent des œufs de Taenia. C’est une maladie endémique dans de nombreux pays où moutons, chiens et hommes vivent en contact étroit, comme c’est le cas en Afrique du Nord [5]. Les deux localisations les plus fréquentes sont le foie (60 % des cas) et le poumon (20 % des cas). Il faut dire que ces deux organes constituent également un double filtre physiologique à la dissémination du parasite, rendant ainsi les localisations extrahépato-pulmonaires moins fréquentes. L’atteinte musculaire primitive est décrite dans la littérature pour la musculature de

Fig. 2. Aspect en imagerie par résonance magnétique (IRM) d’un kyste hydatique (KH) intramusculaire avec hyposignal en séquence pondérée T1 (a et b) et un hypersignal en séquence pondérée T2 (c).

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la paroi thoracique [6], le grand pectoral [7], le sartorius [8], le quadriceps [9] et le glutéus [10]. Chez le sportif, l’atteinte musculaire a été décrite dans un cas dans la cuisse, révélée par une cruralgie et non pas par la tuméfaction [11]. Chez notre patient bodybuilder, le motif de consultation était des paresthésies dues à la compression du nerf sciatique par le kyste. L’IRM est l’examen de choix en pathologie hydatique des parties molles. Elle permet, grâce à sa haute résolution en contraste, de mieux étudier l’extension locorégionale de la lésion et ses rapports avec les pédicules vasculonerveux, tout en offrant une analyse minutieuse des parois kystiques [2,11,12]. La ponction biopsie échoguidée ou scannoguidée peut être utile au diagnostic dans les cas douteux et atypiques sans risques majeurs pour beaucoup d’auteurs [2,4,10]. Cependant, les résultats des analyses microscopiques de la biopsie à l’aiguille ne sont pas toujours concluants [14]. Le traitement de l’échinococcose musculaire est chirurgical. La technique de choix est la périkystectomie, emportant le kyste en entier sans effraction de sa paroi. Des mesures de précaution peropératoires utilisant des champs imbibés de sérum salé hypertonique sur les berges de la plaie permettent de prévenir la dissémination locale du scolex [6,10,11,13,14]. L’intérêt du traitement médical par les dérivés de benzimidazole (albendazole) dans les localisations solitaires de l’appareil locomoteur reste discuté en raison de leur mauvaise diffusion dans le liquide kystique [11]. Ce traitement est réservé aux cas inopérables ou en complément de la chirurgie lorsque le kyste s’est compliqué de rupture [1,10,14]. 4. Conclusion Le kyste hydatique musculaire est une tumeur rare, à développement lent. Il faut penser à ce diagnostic, surtout chez des sujets originaires d’un pays à endémie enlevée. L’IRM constitue le moyen d’imagerie le plus utile en pathologie hydatique des parties molles. La périkystectomie est le traitement de choix mais le meilleur moyen pour lutter contre la maladie hydatique, quelle que soit sa localisation, reste la prévention.

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Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts. Références [1] Kazakos CJ, Galanis VG, Verettas DA, Polychronidis A, Simopou- los C. Primary hydatid disease in femoral muscles. J Int Med Res 2005;33: 703–6. [2] Cissé AM, Nassar I, Hammani L, Dafiri R, Imani F. Hydatidose primitive et étendue de la cuisse : aspect radiologique inhabituel. J Radiol 2002;83:1778–80. [3] Meddeb N, Bachrouch N, Elleuch M, Sahli H, Cheour E, Labib S, et al. Kyste hydatique des adducteurs de la cuisse. Aspect IRM, à propos d’un cas. Bull Soc Pathol Exot 2001;94:106–8. [4] Alouini Mekki R, Mhiri Souei M, Allani M, Bahri M, Arifa N, Jemni Gharbi H, et al. Kyste hydatique des tissus mous : apport de l’IRM (à propos de trois observations). J Radiol 2005;86:421–5. [5] Dawson JL, Stamatakis JD, Stringer MD, Williams R. Surgical treatment of hepatic hydatid disease. Br J Surg 1988;75:946–50. [6] Alvarez-Sala R, Gomez de Terreros FJ, Caballero P. Echinococcus cyst as a cause of chest wall tumor. Ann Thorac Surg 1987;43:689–90. [7] Abdel-Khaliq RA, Othman Y. Hydatid cyst of pectoralis major muscle. Case report and note on surgical management of muscle echinococcosis. Acta Chir Scand 1986;152:469–71. [8] Rask MR, Lattig GJ. Primary intramuscular hydatidosis of the sartorius. Report of a case. J Bone Joint Surg 1970;52A:582–4. [9] Ozkoc G, Akpinar S, Hersekli MA, Ozalay M, Tandogan R. Primaryhydatid disease of the quadriceps muscle: a rare localization. Arch Orthop Trauma Surg 2003;123:314–6. [10] Combalia A, Sastre S. Kyste hydatique du muscle glutéal. Deux cas. Revue de la littérature. Rev Rhum 2005;72:851–7. [11] Amar MF, Chbani B, Lahrach K, Marzouki A, Boutayeb F. Kyste hydatique primitif de la cuisse révélé par une cruralgie (à propos d’un cas). J Traumatol Sport 2010;27:146–8. [12] Durakbasa MO, Kose O, Islam NC, Kilicoglu G. A primary hydatid cyst of the gracilis: a case report. J Orthop Surg 2007;15:118–20. [13] Hammami T, Noomane F, Ketata M, Ganneme Y, Nasr M, Zouari K, et al. Kyste hydatique musculaire de la cuisse. À propos de trois observations. Rev Chir Orthop Reparatrice Appar Mot 2002;88:193–6. [14] Daoudi A, Loudiyi WD, Elibrahimi A, Elmrini A, Chakour K, Boutayeb F. Le kyste hydatique sous-cutané solitaire de la région glutéale : une localisation inhabituelle. À propos d’un cas. Ann Chir Plast Esthet 2008;53:448–51.