La fraude en médecine

La fraude en médecine

Éditorial De l’erreur a` la fraude dans les publications biome´ dicales en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/lpm www.sciencedirect.co...

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Éditorial

De l’erreur a` la fraude dans les publications biome´ dicales

en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/lpm www.sciencedirect.com

Presse Med. 2012; 41: 814–815 ß 2012 Publié par Elsevier Masson SAS.

Dossier thématique

La fraude en médecine Loïc Guillevin

AP–HP, hôpital Cochin, université Paris-Descartes, service de médecine interne, 75014 Paris, France

Correspondance : Disponible sur internet le : 9 août 2012

Loïc Guillevin, AP–HP, hôpital Cochin, université Paris-Descartes, service de médecine interne, 27, rue du Faubourg-Saint-Jacques, 75014 Paris, France. [email protected]

Fraud in medicine

I

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l faut se rendre à l’évidence, la fraude gangrène aussi le monde médical et scientifique. Lorsqu’on aborde le plagiat, le trucage des résultats, les publications amputées de résultats essentiels, chacun pense à la littérature, à la copie de produits de luxe, au vol de résultats de découvertes industrielles, mais personne n’imagine que les découvertes scientifiques, même de faible importance, puissent faire l’objet de fraudes. La science, notamment médicale, est essentielle au progrès, à la mise en place de nouveaux traitements et à l’amélioration globale de notre vie. Il est regrettable que quiconque ose truquer des résultats quels qu’ils soient, mais les défauts des hommes se manifestent aussi dans ce domaine. Le dossier thématique de ce numéro de La Presse Me´dicale le démontre. Si, à l’école primaire ou secondaire, il arrive qu’un élève « copie sur son voisin », l’arrivée des étudiants en faculté avec l’autonomie qu’elle confère et la découverte de plus grandes responsabilités individuelles, amplifie chez certains le phénomène de fraude. Annane et al. [1] montrent que le plagiat n’est pas exceptionnel et que la grande facilité qu’offrent les bases de données informatiques est utilisée par des étudiants férus de nouvelles techniques. Plus tard, il est parfois tentant « d’arranger » le résultat d’expériences scientifiques et les revues scientifiques de première importance publient régulièrement des rétractations d’articles aux résultats truqués [2]. On est d’ailleurs saisi d’effroi par l’audace de ces tricheurs qui savent que chaque chercheur essaiera de reproduire les résultats et que l’absence de concordance entre les résultats conduira, tôt ou tard, à démasquer la supercherie. Mais bien souvent la fraude est mineure, presque vénielle, consistant à « lisser » et à embellir les résultats [3]. Si le plagiat est facilement découvert, il faut reconnaître qu’il ne nuit pas aux malades ; par contre la torture des données et l’embellissement des résultats ont probablement des impacts sur les malades. Les règles mises en place par la communauté scientifique permettent en partie de prévenir ces dérives : par exemple, la déclaration des protocoles de recherche clinique sur des sites internationaux accessibles à tous, prévient la modification a posteriori des objectifs et des critères d’analyse. Il n’en demeure pas moins que les articles scientifiques sont parfois tellement optimistes que le lecteur finit par douter de leur véracité. En fait, cet embellissement des résultats n’est pas toujours le fait d’une fraude éliminant des résultats discordants. Elle est parfois tome 41 > n89 > septembre 2012 http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2012.07.001

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construite en amont, au moment même du concept de l’expérience scientifique ou de l’étude thérapeutique qui, plutôt que d’essayer de traiter les problèmes posés dans la vie réelle retient des critères de sélection permettant de mettre en évidence le résultat espéré. Cette attitude n’est habituellement pas considérée par les auteurs comme une fraude, alors qu’elle est inacceptable, au moins sur le plan moral. Le « péché par omission » existe toujours. Les revues mettent parfois en évidence des erreurs et fraudes, mais ce n’est pas leur rôle : les institutions doivent prendre des mesures pour éviter et détecter les fraudes. Comment remédier à cet état de fait et écarter, ou au moins limiter, la fraude dans les facultés, les laboratoires et les revues scientifiques ? Les solutions sont difficiles à mettre en oeuvre et les mesures doivent être prises très tôt, dès le début des études médicales. Deux types de mesure devraient être prises, les unes très générales visant à enseigner aux étudiants les objectifs et la finalité de la recherche, en essayant d’aller au-delà de « la publication à tout prix » et en développant les valeurs morales et scientifiques qui devraient sous-tendre la recherche et ses règles de diffusion. La deuxième mesure est l’utilisation des logiciels de détection des plagiats, qui bien qu’insuffisante, peut permettre d’améliorer la qualité des travaux des étudiants. Les revues scientifiques ont une responsabilité, notamment les plus prestigieuses, en publiant des articles recelant des erreurs

méthodologiques auxquelles elles confèrent, par seulement leur nom, une labellisation scientifique. Les rédacteurs et experts scientifiques doivent faire preuve d’esprit critique et ne pas hésiter à écarter les articles ne répondant pas aux critères méthodologiques requis. La publication des résultats négatifs d’une recherche serait aussi un moyen de limiter les enjeux d’une publication obligatoirement positive et encouragerait les auteurs à préparer leur recherche avec objectivité et à ne pas rechercher à tout prix parfois, la publication de résultats positifs, au risque de les « enjoliver ». La littérature est biaisée par la non-publication des études négatives et des publications multiples des études positives. Cependant, il ne faut pas sombrer dans l’angélisme : la fraude existe depuis des millénaires et dans tous les domaines ; malheureusement, la science n’y échappe pas. Les progrès technologiques ont modifié les moyens de frauder. La force des rédacteurs de revues et de la communauté scientifique est de connaître et de pouvoir utiliser les mêmes moyens techniques que les fraudeurs pour y remédier. Malgré toute la vigilance que nous pouvons avoir, c’est grâce à une morale individuelle que nous pourrons réduire voire, idéalement, supprimer la fraude dans le domaine scientifique.

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Déclaration d’intérêts : l’auteur déclare ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.

Références

[2]

Annane D, Annane F. Plagiats dans les facultés de médecine, et leur prévention. Presse Med 2012 (http://dx.doi.org/10.1016/ j.lpm.2012.02.048). Decullier E, Samson G, Huot L. Rétractations pour erreur et pour fraude. Presse Med 2012. http://dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2012.05.006.

tome 41 > n89 > septembre 2012

[3]

Seror R, Ravaud P. Embellissement des données : fraude a minima, incompétence ou un mélange des deux. Presse Med 2012. http:// dx.doi.org/10.1016/j.lpm.2012.05.004.

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[1]