L’Arnett Inventory of Sensation Seeking (AISS) : validation et évaluation psychométrique chez une population de jeunes étudiants français

L’Arnett Inventory of Sensation Seeking (AISS) : validation et évaluation psychométrique chez une population de jeunes étudiants français

L’Encéphale (2010) 36, 366—372 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP MÉMOIRE ORIGINAL ...

124KB Sizes 0 Downloads 5 Views

L’Encéphale (2010) 36, 366—372

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP

MÉMOIRE ORIGINAL

L’Arnett Inventory of Sensation Seeking (AISS) : validation et évaluation psychométrique chez une population de jeunes étudiants franc ¸ais The Arnett Inventory of Sensation Seeking (AISS): A French-speaking validation and psychometric examination in young students N. Cazenave a,∗, L. Paquette b a b

EA 4156, centre d’études et de recherches en psychopathologie, CERPP, université Toulouse-Le Mirail, Toulouse, France Laboratoire de psychologie, « conduite automobile », université de Montréal, Montréal, Canada

Rec ¸u le 29 mai 2009 ; accepté le 16 septembre 2009 Disponible sur Internet le 11 mars 2010

MOTS CLÉS Recherche de sensations ; AISS ; Validation ; Jeunes adultes

KEYWORDS Sensation seeking; AISS; Validation; Young adults

Résumé Les propriétés psychométriques de l’Arnett Inventory of Sensation Seeking (AISS ; Arnett, 1994 [3]) ont été examinées dans un échantillon de la population franc ¸aise. Les participants sont au nombre de 621 jeunes adultes âgés de 18 à 28 ans. Les indices d’adéquation de l’analyse confirmatoire se révèlent satisfaisants pour un modèle à six items sur chacun des facteurs (intensité et nouveauté). De plus, les coefficients de corrélation de Pearson, donnés pour la relation entre les scores de l’AISS et de la SSS, supportent la validité convergente du questionnaire. Cependant, la consistance interne des deux sous-échelles, Intensité et Nouveauté, reste relativement faible, 0,621 et 0,567, respectivement, et 0,646 pour l’échelle totale. Néanmoins, ces résultats répliquent ceux d’autres recherches supportant la validité de construit de l’AISS dans une population germanique (Roth et Herzberg, 2004) [21] et espagnole (Ferrando et Chico, 2001) [11]. Finalement, les résultats de cette étude de validation psychométrique de l’AISS en langue franc ¸aise, paraissent satisfaisants. © L’Encéphale, Paris, 2010. Summary Introduction. — In French-speaking countries, the concept of sensation seeking has been most widely assessed using the Zuckerman Sensation Seeking Scale form V (SSS), since this instrument was validated (in French) more than 15 years ago. This instrument has received several criticisms which limit the internal and external consistencies. Indeed, five limitations of conception and form could reduce the fact that many researchers have found the SSSV to be valid and useful and, more importantly, the conclusions that can be drawn from studies in which it has been

∗ Auteur correspondant. OCTOGONE CERPP, université de Toulouse-le Mirail, pavillon de la recherche, 5, allées Antonio-Machado, 31058 Toulouse cedex 9, France. Adresse e-mail : [email protected] (N. Cazenave).

0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2010. doi:10.1016/j.encep.2010.01.002

L’Arnett Inventory of Sensation Seeking (AISS)

367

used (e.g; tautological relationships, a forced-choice format, language of some items is out-ofdate). Arnett thus developed a new measurement (Arnett Inventory of Sensation Seeking, AISS) based on a new conceptualization of sensation seeking, which is characterized by the need for novelty and intensity of stimulation, whereas sensation seeking, as developed by Zuckerman, is marked by a need for novelty and complexity of stimulation. The AISS has been translated and validated in Spanish and in German. Both studies found support for the bi-dimensional structure of the instrument. Currently, there is no French-speaking version of the AISS, and because of the cultural differences between English- and French-speaking populations, we cannot simply translate the instrument without examining the reliability and the factorial validity. Hence, we followed the seven steps of the cross-cultural validation methodology for psychological questionnaires presented by Vallerand. Method. — Questionnaires were distributed to 782 young adults. Out of these questionnaires, 737 (94%) were returned. One hundred and sixteen questionnaires were removed because of missing data. Thus, a total of 621 young adults were included in the study. They were aged from 18 to 28 years (M = 23.32, SD = 2.79). They completed the SSS and the AISS. We conducted a confirmatory factor analysis (CFA) on the data set, using Amos 6.0, to assess the validity of the bi-dimensional structure; we also examined the internal consistencies, and tested the potential gender differences. Results. — The analyses show that the fit indices, associated with the model with 20 items proposed by Arnett, were poor. We therefore had to modify it and delete some items in order to provide a more satisfactory account of the data. The fit indices from the confirmatory factor analysis were adequate for a two-factor structure with six items on each subscale. Pearson’s correlation coefficients supported convergent validity of the questionnaire. Internal consistency reliabilities Cronbach’s ␣ were calculated for each of the factors and for the total scale. The reliability coefficients for the Intensity and Novelty subscales were 0.621 and 0.567, respectively, whereas the reliability of the overall scale was 0.646. In order to assess the differences between both sexes, we carried out a multivariate analysis of variance with gender as independent variables, and intensity, novelty and the total score of the revised AISS as dependent variables. Men scored higher than women on the Total Scale and on the Intensity subscale, but no gender relationship was found on Novelty subscale. Discussion. — These findings replicated research supporting the construct validity and reliability of the AISS in previous psychometric examinations. The results of this preliminary study yielded sufficient support for the validity of the French translation of the AISS, but further analyses, such as test—retest reliability and discriminant validity should be conducted. © L’Encéphale, Paris, 2010.

Introduction La recherche de sensations, telle que définie par Zuckerman [26], est un trait de personnalité caractérisé par « la recherche de sensations et d’expériences variées, nouvelles, complexes et intense et par la volonté de prendre des risques physiques, sociaux, juridiques et financiers pour le seul but de l’expérience » (p. 27). De plus, « les individus qui ont un score élevé sur l’échelle de recherche de sensations participent à plusieurs types d’activités à risques aussi bien négatives que positives » ([11], p. 535). Par exemple, la consommation de drogues [15,16], la conduite automobile « dangereuse » [2,4], ainsi que les sports à risques [25]. « L’attrait pour l’éprouvé intense, pour une situation émotionnellement forte telle que le vertige, semble être le dénominateur commun de toutes ces conduites » ([21], p. 11). Dans les pays francophones, le concept de recherche de sensations est essentiellement évalué à partir de l’échelle éponyme développée par Zuckerman et al. [27]. Celleci a été validée en franc ¸ais il y a plus de 15 ans [8,9] et une analyse confirmatoire de l’outil soutient sa vali-

dité interne et son regroupement en quatre composantes [14]. La SSS-V est un auto-questionnaire de 40 items à choix forcés répartis en quatre sous-échelles de dix items chacune. La première dimension est la recherche de danger et d’aventures (Thrill and Adventure Seeking : TAS) qui mesure le désir de s’engager dans des sports ou activités comportant un danger ou un risque pour l’intégrité physique. La deuxième concerne la recherche d’expériences sensorielles (Experience Seeking : ES) qui évalue le désir de rechercher des nouvelles expériences à travers de rencontres atypiques, marginales. La troisième concerne la désinhibition (Disinhibition : DIS), en tant que comportement complètement libéré à travers la recherche de stimulations sociales et sexuelles. La quatrième concerne la susceptibilité à l’ennui (Boredom Susceptibility : BS) indiquant une aversion pour les expériences répétitives de tout ordre. La SSS a fait l’objet de plusieurs critiques [3,4,7,19,20,21,23] même si le consensus est clair : la recherche de sensations est corrélée positivement avec les comportements à risques. Cinq limitations de conception et de forme pourraient cependant réduire les validités

368 internes et externes de cet instrument [3,7,21]. Premièrement, plusieurs items considèrent la consommation d’alcool, des produits illicites et des risques sexuels. De tels comportements font l’objet de recherches précises utilisant justement ce questionnaire. Cela implique immanquablement des relations tautologiques [3,7,21]. Deuxièmement, le questionnaire utilise un format à choix forcé (réponse A ou B), ce qui peut frustrer et rendre perplexe les sujets qui se sentent correspondre à aucun des items proposés ou justement aux deux. Troisièmement, plusieurs items concernent des activités directement reliées à la force physique et l’endurance, ainsi il est très difficile de savoir si les différences observées par rapport à l’âge ne sont pas en réalité le fait de différences de force physique et d’endurance, qui tendent à diminuer avec l’âge. Quatrièmement, le langage utilisé pour certains items est dépassé et reflète les idiomes du temps où le questionnaire a été développé et construit en premier lieu, c’est-à-dire il y a plus de 30 ans. Cinquièmement, bien que la SSS soit reconnue comme étant valide et ayant une consistance interne et externe forte, plusieurs recherches [5,18,23] reportent toutefois une validité psychométrique modérée pour le trait général de recherche de sensations et faible pour les sous-échelles. Ainsi, à cause de ces facteurs de confusion, il devient difficile de justifier la relation qu’il existe entre la recherche de sensations et les conduites déviantes ou comportements à risques. Ainsi, un instrument alternatif de mesure de la recherche de sensations a été développé par Arnett [3] : l’Arnett Inventory of Sensation seeking (AISS). Cet instrument présente pour intérêt majeur le fait qu’il ait été construit à partir d’une nouvelle conceptualisation de la recherche de sensations. Selon Arnett [3], la recherche de sensations est non seulement un potentiel pour prendre des risques, mais est plus généralement une qualité pour rechercher l’intensité et la nouveauté dans une expérience. Elle peut être exprimée de multiples fac ¸ons dans la vie d’une personne. L’AISS est composé de 20 items, sans rapport avec l’âge ou des comportements antisociaux, divisés en deux sous-échelles de dix items chacune : Nouveauté et Intensité. Il serait plus fortement corrélé aux comportements à risques que la SSS-V [3,4]. Plus précisément, l’AISS est corrélé aux risques routiers, à la consommation de tabac et de marijuana [3], à l’agressivité et au vandalisme [4]. Néanmoins, l’AISS présente une limitation, dans le sens où les items n’ont pas été sélectionnés sur la base d’une analyse psychométrique. Ainsi, les alphas de Cronbach, tels que reportés par Arnett [3], sont faibles. La validité interne est de 0,70 pour le score total, et de 0,64 et 0,50 pour les sous-échelles d’Intensité et de Nouveauté, respectivement. D’autres recherches [1,6,11,19,20,25] reportent des consistances internes similaires, allant de 0,50 à 0,80 pour le score total, de 0,40 à 0,74 pour l’Intensité, et de 0,22 à 0,64 pour la Nouveauté. À notre connaissance, ce questionnaire a été traduit et validé dans une population germanique [21] et hispanique [11]. Il existe une recherche franc ¸aise ayant étudié la validité interne et prédictive de l’AISS [10]. Cependant, nous pensons que notre effort de traduction transculturel et l’examen psychométrique attenant seront complémentaires. De plus, nous présenterons l’outil dans sa version franc ¸aise afin qu’il puisse être utilisé.

N. Cazenave, L. Paquette

Méthodologie Participants Des jeunes adultes issus du milieu universitaire des académies de Reims et de Grenoble en France ont participé au protocole d’évaluation. Les unités de formation et de recherche (UFR) concernés étaient ceux de psychologie et de sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS). Nous avons procédé à la passation des questionnaires, sous la forme papier-crayon, en salle de cours lors de session de travaux dirigés. Chaque classe était composée d’une quarantaine d’étudiants. Ils ont complété volontairement et sans pression de temps les questionnaires sachant que leur anonymat et la confidentialité des résultats seraient respectés. Les instructions données avant de remplir les questionnaires étaient celles données dans les échelles originales. Sur les 782 questionnaires distribués, 94 % nous sont revenus soit 737. Cent seize questionnaires ont été exclus du fait de données manquantes. Ainsi, la population totale comprend 621 jeunes adultes ayant un âge compris entre 18 et 28 ans (M = 23,32, écart-type = 2,79). Arnett [2] décrit cette période d’âge comme étant des « adultes émergeants ». En effet, dans les sociétés occidentales, cette phase est une période distincte sur le plan démographique, subjectif, et en termes de l’exploration de son identité [6]. Dans notre population, nous recensons 59,3 % d’hommes (n = 368) et 40,7 % de femmes (n = 253).

Outils En plus d’un questionnaire démographique, nous avons utilisé deux tests psychologiques afin d’évaluer certains traits de personnalité. L’Arnett Inventory of Sensation seeking (AISS : [3]) L’Arnett Inventory of Sensation seeking comporte un score global (20 items, score entre 20 et 80) et deux échelles de dix items chacune évaluant la recherche d’intensité (intensity seeking) et la recherche de nouveauté (novelty seeking). Les items sont présentés sous forme d’une échelle de Likert en quatre points allant de 1 (me correspond parfaitement) à 4 (ne me correspond pas du tout). La traduction du AISS a été réalisée à l’aide de la méthode transculturelle de validation proposée par Vallerand [24]. Cette dernière comporte sept étapes : • préparation de la version préliminaire ; • évaluation et modification de la version préliminaire ; • évaluation de la clarté des questions par un échantillon de la population lors d’un pré-test ; • évaluation de la validité concomitante du questionnaire ; • évaluation de la consistance interne ; • étude de la validité de construit ; • établissement de normes. La Sensation Seeking Scale [27] Cette échelle est composée de 40 items à choix forcé regroupés en quatre dimensions : la recherche de danger et d’aventure (TAS), la recherche d’expérience (ES), la désinhibition (DIS) et l’intolérance à l’ennui (BS). Un score total

L’Arnett Inventory of Sensation Seeking (AISS)

369

Tableau 1 Indices d’adéquation du modèle en deux facteurs de l’AISS à 12 items. Modèle

2

20 items 12 items

708 101

df 162 53

p < 0,0001 < 0,0001

GFI

AGFI

RMSEA

0,87 0,94

0,86 0,92

0,054 0,057

GFI : Goodness of Fit Index, AGFI : Adjusted Goodness of Fit Index, RMSEA : Root Mean Square Error Approximation.

de recherche de sensations est également calculé en additionnant les scores des quatre dimensions précédentes. La consistance interne est déterminée par le coefficient alpha de Cronbach (0,83 ≤ ˛ ≤ 0,86) [25—27].

Procédure Les jeunes adultes ayant accepté de participer à l’étude ont complété un questionnaire autorapporté d’une durée de cinq minutes. Ceux-ci ont été assurés de l’anonymat et de la confidentialité des résultats. Les échelles ont été administrées par la même personne dans tous les cas sans donner de pression de temps. Les instructions données avant de remplir le questionnaire étaient celles qui sont fournies dans l’échelle originale.

Analyse statistique Les données ont été analysées à l’aide des logiciels SPSS 14 et Amos 6 pour mesurer la validité de la structure bidimensionnelle du questionnaire. Nous avons suivi une stratégie identique à celle décrite par Haynes et al. [13] et par Roth et Herzberg [21]. La population totale a été séparée en deux au hasard grâce à la méthode de recherche aléatoire du logiciel SPSS. Le premier échantillon (Groupe 1) est composé de 310 participants (âge : M = 23,26, écart-type = 2,83), et le second échantillon (Groupe 2) de 304 participants (âge : M = 23,13, écart-type = 2,82). Les deux sexes sont répartis de manière égale dans chacun des échantillons. Nous avons procédé à une première analyse factorielle confirmatoire (AFC) à partir des données de l’échantillon 1 et ce, selon le modèle proposé par Arnett [3]. Nous avons utilisé la méthode Maximum Likelihood, afin d’estimer les paramètres. De plus, nous avons testé le modèle avec les Goodness of Fit Index (GFI), Adjusted Goodness of Fit Index (AGFI) et Root Mean Square Error Approximation (RMSEA).

indices d’ajustement associés au modèle proposé par Arnett [3] étaient faibles. Ils ont produit des résultats plus satisfaisants (2 = 213, df = 51, p < 0,001, GFI = 0,94, AGFI = 0,91, RMSEA = 0,07). Nous avons donc reconduit une analyse en nous fiant aux indices d’ajustement et aux coefficients de régression standardisés. Un modèle (Fig. 1) à six items sur chacun des facteurs (intensité et nouveauté) a été proposé. Les indices d’adéquation se révèlent satisfaisants (2 = 101, df = 53) et sont présentés dans le Tableau 1. Le GFI est la proportion de variances et covariances dont rend compte le modèle et est supérieur à 0,90, ce qui montre un ajustement adéquat. Le RMSEA est une mesure de la moyenne des variances et covariances résiduelles. Cette valeur est inférieure à 0,08, ce qui valide notre modèle. La Fig. 1 montre les coefficients de régression standardisés de l’AISS, tous sont significatifs au seuil p < 0,001. La corrélation entre les dimensions Nouveauté et Intensité est positive (r = 0,31), non significative à p = 0,05. Nous avons donc supprimé huit items. Les numéros 3 (patience), 5 (préparation), 13 (nourriture épicée), 15 (télé ou radio allumée pendant la réalisation d’autres tâches) pour la recherche de nouveauté ; et les numéros 2 (nager dans l’eau froide), 4 (écouter la musique forte), 10 (jouer à des jeux d’argent), 14 (travailler sous pression) pour la recherche d’intensité.

Consistance interne La version franc ¸aise de l’AISS comprend 12 items. La consistance interne donnée par les alphas de Cronbach a été calculée pour chacun des facteurs et pour l’échelle totale. Les alphas sont de 0,621 pour l’Intensité, de 0,567 pour la Nouveauté et de 0,646 pour l’échelle totale. Ces coefficients sont présentés dans le Tableau 2. Bien que relativement bas, les ␣ de Cronbach sont comparables avec les recherches antérieures.

Différence par rapport à l’âge Il n’y a aucune différence significative concernant la variable âge et autant sur le score global que sur les deux dimensions.

Résultats Structure interne Les indices d’ajustement ont été examinés afin de déterminer la propension avec laquelle les données correspondaient au modèle. En ce qui nous concerne, le modèle testé ne produit pas une représentation adéquate des données (Tableau 1). Cette analyse n’avait d’ailleurs pas été conduite par Arnett [3]. Dans la validation allemande, Roth et Herzberg [21] ont eux aussi testé si l’AISS montrait la structure en deux facteurs telle que supposée. Ils ont trouvé que les

Figure 1

Analyse confirmatoire de l’AISS.

370 Tableau 2

N. Cazenave, L. Paquette Consistance interne pour l’AISS en 12 items. Moyenne de l’échelle si l’item est supprimé

Nouveauté 1 7 9 11 17 19 ␣ de Cronbach = 0,567 Intensité 6 8 12 16 18 20 ␣ de Cronbach = 0,621

Variance de l’échelle si l’item est supprimé 9,74 9,09 9,21 8,12 9,83 8,11

0,21 0,20 0,40 0,37 0,18 0,38

0,53 0,54 0,46 0,45 0,54 0,45

12,82 12,79 13,32 13,88 13,56 14,16

11,54 11,37 10,75 10,50 10,45 9,81

0,26 0,27 0,35 0,37 0,35 0,48

0,61 0,60 0,57 0,56 0,57 0,52

Dans le but d’analyser les différences entre les sexes, nous avons procédé à des analyses de la variance (Anova). Le score des hommes est significativement plus élevé que celui des femmes sur l’échelle totale, F(1, 620) = 84,27, p < 0,001, et sur l’échelle Intensité, F(1,620) = 117,31, p < 0,001 ; mais aucune différence significative n’apparaît sur l’échelle de Nouveauté.

En plus du questionnaire AISS, les participants et participantes ont rempli la SSS qui a été utilisée afin de mesurer la validité concourante. Selon les résultats présentés par Arnett [3], le score total de l’AISS et les deux échelles (Intensité et Nouveauté) corrèlent significativement et positivement avec le score total de la SSS et les quatre échelles. Arnett [3] reporte des corrélations entre les scores totaux de chacune des échelles à 0,41 et allant de 0,08 à 0,47 pour les échelles. Nous avons évalué la validité convergente de l’AISS grâce aux corrélations paramétriques de Bravais—Pearson. Les résultats présentés dans le Tableau 3 montrent une cor-

Validité convergente de l’AISS. AISS total

Intensité

Nouveauté

**

*

0,22* 0,16 0,37** 0,05 (n.s.) 0,02 (n.s.)

0,47 0,27* 0,21* 0,02 (n,s,) 0,09 (n.s.)

rélation modérée entre les scores totaux de l’AISS et de la SSS à 0,47, entre l’échelle d’Intensité de l’AISS et la TAS de la SSS à 0,42, ainsi qu’entre l’échelle de Nouveauté et l’échelle ES de la SSS à 0,37. Finalement, il n’y a pas de corrélation significative entre les autres échelles et sous-échelles. Cependant, on trouve aussi une corrélation modérée entre l’échelle d’Intensité et de Nouveauté à r = 0,42, p < 0,01 (Tableau 4).

Discussion

Validité convergente

SSS total TAS ES Dis BS

Alpha de Cronbach si l’item est supprimé

13,56 13,33 12,37 13,53 13,47 12,94

Différence par rapport au sexe

Tableau 3

Corrélation si l’item est supprimé

0,25 0,42** 0,19* 0,01 (n.s.) 0,07 (n.s.)

Arnett Inventory of Sensation Seeking (AISS), Sensation seeking Scale (SSS), Thrill and Adventure Seeking (TAS), Experience Seeking (ES), Disinhibition (Dis), Boredom Susceptibility (BS). * p < 0,05, ** p < 0,01.

Le propos de cette étude était d’examiner les propriétés psychométriques de la traduction franc ¸aise de l’Arnett Inventory of Sensation Seeking dans une population de jeunes adultes. Il a été supposé que ce questionnaire serait un instrument valide afin de mesurer la recherche de sensations pour une population franc ¸aise de jeunes adultes. Les résultats de l’analyse factorielle confirmatoire supportent la validité de construit de l’AISS et suggèrent que l’échelle est mieux représentée par une version en 12 items à deux facteurs. Ces résultats sont clairement consistant avec les études de Roth et Herzberg [21] et de Haynes et al. [13] dans lesquelles une solution à deux facteurs a été obtenue pour l’AISS après avoir retiré huit et sept items, respectivement. Les analyses des données ne supportent pas totalement la validité interne des échelles de l’AISS. Elles indiquent qu’un travail plus approfondi est nécessaire. La structure générale apparaît être adéquate mais des problèmes restent à résoudre avec certains des items. Les alphas de Cronbach sont faibles montrant une consistance interne modérée. Ces résultats concordent pourtant très fortement avec les résultats d’études précédentes faisant l’examen psychométrique du questionnaire [3,12,21]. Ceux-ci ne peuvent donc pas être attribués à un problème de traduction dans lequel les items auraient contracté une autre signification. D’autres explications peuvent nous permettre de comprendre ce manque de consistance interne.

L’Arnett Inventory of Sensation Seeking (AISS) Tableau 4

371

AISS version franc ¸aise.

Pour chacune des caractéristiques ou descriptions suivantes, indique à quel point chacune est vraie pour toi en encerclant le chiffre approprié Ne me correspond pas du tout Ne me correspond pas vraiment Me correspond un peu Me correspond parfaitement 1 2 3 4 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12

Je peux concevoir qu’il serait intéressant de se marier à une personne originaire d’un pays étranger Je trouve qu’il est agréable et excitant de donner un spectacle ou de parler devant un groupe Si je me rendais à un parc d’attractions, j’irais dans les montagnes russes et d’autres manèges à haute vitesse J’aimerais voyager dans des endroits étranges et lointains Je ne jouerais jamais à des jeux d’argent même si je pouvais me le permettre J’aurais aimé être l’un des premiers explorateurs d’un territoire inconnu J’aime les films où il y a beaucoup d’explosions et de poursuites Ce serait intéressant d’être témoin d’un accident de voiture Au restaurant, je pense qu’il est mieux de commander un plat que l’on connaît déjà Dans un endroit élevé, j’aime la sensation de me tenir près du bord et de regarder en bas Si on pouvait visiter gratuitement une autre planète ou la lune, je serais parmi les premiers à réserver une place Je peux comprendre qu’il doit être excitant de participer à une bataille dans une guerre

Premièrement, Arnett [3] n’a pas sélectionné les items du questionnaire sur la base d’une analyse psychométrique, par exemple, Arnett [3] n’a pas procédé à une analyse factorielle. Il s’est contenté de reporter les alphas de Cronbach qui ne démontraient pas une consistance interne forte de l’échelle. Deuxièmement, « le construit de recherche de sensations couvre des domaines du comportement qui ne sont pas présumés être très fortement homogènes » ([21], p. 212). Troisièmement, la nouvelle conceptualisation de la recherche de sensations présentée par Arnett [3] ne couvre peut-être pas tous les aspects du construit, ou en sousestime une partie. Les recherches futures devraient prendre en compte ces hypothèses dans le but d’améliorer la consistance interne de cet outil. Roth et Hezberg [21] suggèrent « d’examiner dans quelles mesures une augmentation du nombre d’items conduirait à de meilleurs résultats » (p. 212). Concernant les différences de genre, le score des hommes a été trouvé significativement plus haut que celui des femmes, sur l’échelle totale de l’AISS et sur l’échelle Intensité. Il n’y avait, en revanche, aucune différence significative sur l’échelle Nouveauté entre les deux sexes. Ces résultats sont similaires à ceux des études antérieures [3,21]. De plus, ils confirment les différences usuelles de genre — qui est une variable pouvant être prise pour un indicateur fiable de la validité de construit — trouvées dans les études antérieures utilisant l’AISS [17,22] ou la SSS [5,27]. D’un autre côté, les coefficients de corrélation de Bravais—Pearson pour la relation entre les scores de l’AISS et les scores de la SSS supportent la validité convergente du questionnaire. La SSS était le questionnaire le plus évident à utiliser pour évaluer cette validité concomitante. Comme prévu, le score total de l’AISS partage une corrélation modérée avec le score total de la SSS, du fait que les items

1

2

3

4

1

2

3

4

1

2

3

4

1 1 1 1 1 1

2 2 2 2 2 2

3 3 3 3 3 3

4 4 4 4 4 4

1

2

3

4

1

2

3

4

1

2

3

4

mesurent le même construit. Aussi, il y avait une corrélation modérée entre l’échelle d’Intensité et l’échelle TAS de la SSS et entre l’échelle Nouveauté et l’échelle ES de la SSS. Cependant, les corrélations anticipées entre les autres échelles et/ou sous-échelles n’ont pas été confirmées comme elles l’ont été dans l’étude de Arnett [3].

Conclusion En lien direct avec les conclusions des études précédentes [11,13,21], la traduction franc ¸aise de l’AISS peut être utilisée. Elle a une validité suffisante et un rationnel logique [25]. Néanmoins, nous postulons que la recherche de sensations pourrait être un construit multidimensionnel composé de plus de facteurs que ceux proposés par Arnett [3] ou par Zuckerman et al. [27]. Les questionnaires AISS et SSS seraient des indices composites du trait de personnalité de recherche de sensations au lieu d’être des échelles mesurant le construit dans son ensemble. En effet, les sous-dimensions ne semblent pas être unidimensionnelles, en tout cas, pour l’AISS. Toutes les études de validation transculturelles l’ont démontré et ont procédé à une suppression des mêmes items. De plus amples recherches seront nécessaires afin d’évaluer la validité des dimensions spécifiques des questionnaires évaluant la recherche de sensations.

Références [1] Andrew M, Cronin C. Two measures of sensation seeking as predictors of alcohol use among high school males. Pers Ind Diff 1997;22:393—401.

372 [2] Arnett J. Still crazy after all these years: Reckless behaviour among young adults ages 23—27. Pers Ind Diff 1991;12:1305—13. [3] Arnett J. Sensation seeking: a new conceptualization and a new scale. Pers Ind Diff 1994;16:289—96. [4] Arnett J. Sensation seeking, aggressiveness, and adolescent reckless behavior. Pers Ind Diff 1996;20:693—702. [5] Ball IL, Farnill D, Wangeman JF. Sex and age differences in sensation seeking: Some national comparisons. Br J Psychol 1984;75:257—65. [6] Bradley G, Wildman K. Psychological predictors of emerging adults’ risk and reckless behaviors. J Youth Adolesc 2002;31:253—65. [7] Carton S. La recherche de sensations : Quel traitement de l’émotion ? Psychotropes-Revue Inter des toxicomanies et des addictions 2005;11:121—44. [8] Carton S, Jouvent R, Widlocher D. Cross-cultural validity of the Sensation seeking Scale: development of a French abbreviated form. Eur Psychiatry 1992;7:225—34. [9] Carton S, Lacour C, Jouvent R, Widlocher D. Le concept de recherche de sensations : traduction et validation de l’échelle de Zucherman. Psychiatry Psychobiol 1989;5:39—44. [10] Desrichard O, Vos P, Bouvard M, et al. The French version of the Arnett Inventory of Sensation Seeking: internal and predictive validity. Pers Ind Diff 2008;44:1673—83. [11] Ferrando PJ, Chico E. The construct of sensation seeking as measured by Zuckerman’s SSS-V and Arnett’s AISS: A structural equation model. Pers Ind Diff 2001;31:1121—33. [12] Ficher S, Smith GT. Deliberation affects risk taking beyond sensation seeking. Pers Ind Diff 2004;36:527—37. [13] Haynes CA, Miles NV, Clements K. A confirmatory factor analysis of two models of sensation seeking. Pers Ind Diff 2000;29:823—39. [14] Loas G, Verrier A, Flament M, et al. Factorial structure of the sensation seeking scale — form V: confirmatory factorial analyses in nonclinical and clinical samples. Can J Psychiatry 2001;46:850—5. [15] Michel G. La prise de risque à l’adolescence. Pratiques sportives et usage de substances psycho-actives. Paris: Masson; 2001.

N. Cazenave, L. Paquette [16] Michel G, Le Heuzey MF, Purper-Ouakil D, Mouren-Simeoni MC. L’addiction au risque. Alcohol Addict 2003;25:7—15. [17] Powell J, Hardoon K, Derevensky JL, Gupta R. Gambling and risk-taking behavior among university students. Subst Use Misuse 1999;66:487—95. [18] Ridgeway D, Russell JA. Reliability and validity of the sensation seeking scale: psychometric problems in form V. J Consult Clin Psychol 1980;48:662—4. [19] Roth M. Validation of the Arnett Inventory of Sensation seeking (AISS): efficiency to predict the willingness towards occupational chance, and affection by social desirability. Pers Ind Diff 2003;35:1307—14. [20] Roth M, Hammelstein P, Brahler E. Beyond a youthful behavior style — Age and sex differences in sensation seeking based on need theory. Pers Ind Diff 2007;43:1839—50. [21] Roth M, Herzberg PY. A validation and psychometric examination of the Arnett Inventory of Sensation seeking (AISS) in German adolescents. Eur J Psychol Assess 2004;20: 205—14. [22] Roth M, Schumacher J, Brahler E. Sensation seeking in the community: Sex, age and sociodemographic comparisons on a representative German population sample. Pers Ind Diff 2005;39:1261—71. [23] Rowland GL, Franken RE. The four dimensions of sensation seeking: a confirmatory factor analysis. Pers Ind Diff 1986;7:237—40. [24] Vallerand RJ. Vers une méthodologie de la validation transculturelle de questionnaire psychologiques: implications pour la recherche en langue franc ¸aise. Can Psychol 1989;30: 662—80. [25] Zarevski P, Masuric I, Zolotic S, et al. Contribution of Arnett’s Inventory of Sensation seeking and Zuckerman’s Sensation seeking Scale to the differentiation of athletes engaged in high and low risk sports. Pers Ind Diff 1998;25:763—8. [26] Zuckerman M. Behavioral expressions and biosocial bases of sensation seeking. New York: Cambridge University Press; 1994. [27] Zuckerman M, Eysenck SBG, Eysenck HJ. Sensation seeking in England and America: Cross cultural, age, and sex comparisons. J Consult Clin Psychol 1978;46:139—49.