Actualités pharmaceutiques Ř n° 501 Ř Décembre 2010
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Entretien
Le pharmacien est aussi le spécialiste du médicament vétérinaire Pour Jacky Maillet, président de l’Association nationale de la pharmacie vétérinaire d’officine (ANPVO), la profession pharmaceutique doit réaffirmer son rôle dans la dispensation du médicament vétérinaire. Ceci passe aussi par le renforcement de l’enseignement vétérinaire lors de la formation initiale.
Actualités pharmaceutiques : Qu’est-ce
qui vous a amené à créer récemment l’Association nationale de la pharmacie vétérinaire d’officine (ANPVO) ? Jacky Maillet : La création de l’ANPVO s’est imposée à la suite du constat dressé, fin 2008, par l’ensemble des instances et organisations professionnelles pharmaceutiques (Ordre, syndicats, Associations de pharmacie rurale (APR) et grossistes répartiteurs), de l’inapplication d’un certain nombre de nouvelles dispositions concernant la délivrance des médicaments vétérinaires telles que celles-ci avaient été reformulées par le décret dit “prescription délivrance” promulgué le 24 avril 2007. Certaines avancées contenues dans ce décret avaient nécessité six ou sept années de négociations entre les représentants des pharmaciens, des vétérinaires, des éleveurs et des pouvoirs publics.
Le mensuel de la formation pharmaceutique continue
actualités pharmaceutiques ISSN 0515-3700
n° 501 t Décembre 2010 t 25 €
dossier
Les médicaments des thromboses cardiovasculaires
compléments alimentaires dispensation
64076
Le portage des médicaments au domicile du patient
Rôles des probiotiques, prébiotiques et produits de fermentation au niveau du microbiote intestinal
Une version plus condensée de cet entretien à été publié dans le numéro 501 d’Actualités pharmaceutiques.
Il n’était donc pas question de tolérer que, dix-huit mois après leur entrée en vigueur, celles concernant plus spécifiquement la profession pharmaceutique demeurent sans suite sur le terrain en acceptant sans broncher de les passer simplement par pertes et profits. Par exemple, comment accepter que le principe du libre choix du dispensateur des médicaments, qui avait été très clairement réaffirmé par le décret, ne soit pas suivi d’effets sur le terrain ? Comment admettre, à cet égard, que la remise par le vétérinaire d’une ordonnance à l’issue de la rédaction du protocole de soins qu’il effectue chaque année n’ait strictement aucune répercussion sur le terrain alors que cela a été rendu obligatoire dans tous les cas où l’utilisation de médicaments préventifs figure dans ledit protocole ? Comment ne pas réagir alors que cette remise d’ordonnance à cet instant précis est pour l’éleveur, si ce n’est la seule, du moins une des seules options pouvant lui permettre de se rendre ensuite librement chez l’ayant droit de son choix pour la délivrance des médicaments prescrits ? Parmi les autres dispositions non appliquées du décret, il y avait aussi celles concernant le renouvellement des ordonnances. Les possibilités pour le vétérinaire d’user de la mention “renouvellement interdit” avaient, en effet, été substantiellement limitées afin de faciliter le renouvellement des délivrances de certains médicaments préventifs, comme les antiparasitaires et les vaccins, par les pharmaciens. Or, malgré cette limitation, force était de constater que dix-huit mois après l’entrée en application du décret, rien n’avait réellement changé. La mention “renouvellement interdit” figurait, et figure d’ailleurs toujours aujourd’hui, sans aucune limitation ni discernement sur la quasi-totalité des ordonnances quelle que soit la catégorie de médicaments prescrits. Cette pratique a, si ce n’est pour objet,
du moins pour effet, de fournir une information fallacieuse aux éleveurs, de telle sorte que ceux-ci se retrouvent privés d’une facilité qui leur est offerte de pouvoir faire renouveler la délivrance de certains médicaments courants auprès d’une officine. Ils se retrouvent, à tort, contraints de retourner chez leur vétérinaire qui accepte, bien entendu, de prescrire à nouveau les mêmes médicaments et profitent de cette situation pour capter la délivrance des médicaments. L’ANPVO a donc été créée sur la base de ce genre de constats et s’est employée, dès le début de l’année 2009, à ce que soient imposés à tous les acteurs du médicament vétérinaire des comportements beaucoup plus conformes à la réglementation. Parmi nos différentes démarches, je citerais la requête auprès du Conseil d’État que nous avons déposée en 2009 en vue de dire le droit sur la notion de remise obligatoire d’ordonnance à l’issue de la rédaction du protocole de soins. L’instruction de ce dossier est toujours en cours et nous attendons la décision avec une grande impatience. AP : Trouviez-vous que le médicament
vétérinaire n’était pas suffisamment défendu par les organisations syndicales auparavant ? JM : Le Syndicat national de la pharmacie vétérinaire d’officine (SNPVO) qui exerçait ce rôle auparavant n’existait plus depuis plusieurs années. La pharmacie vétérinaire d’officine était représentée de manière disparate, non coordonnée. Elle ne disposait pas de réelle analyse sur la situation ni de véritable stratégie sur l’avenir. Les positions et discours de la profession sur la question vétérinaire n’étaient absolument pas audibles au niveau de nos partenaires vétérinaires et encore moins au niveau des administrations. Nous avions réellement besoin d’un outil spécifique et dédié, autant pour agir que pour réagir, d’où la création de l’ANPVO à l’initiative de trois syndicats [NDLR : FSPF,
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UNPF et USPO], de l’APR de l’Ordre nécessairement une lapalissade puisque national des pharmaciens, des sociétés le pharmacien est le seul professionnel à de distribution en gros de médicaments pouvoir exercer cet art. vétérinaires et aussi du laboratoire Pierre Au-delà de cette petite précision sémanFabre qui a joué un rôle tout à fait détertique, votre formulation n’en demeure pas minant pour fédérer tout le monde derrière moins extraordinairement révélatrice de la confusion actuelle entretenue savamcette idée. Notre stratégie est aujourd’hui très claire ; ment par une écrasante majorité de vétéelle s’articule autour de trois princirinaires ainsi que par ceux acquis à leur paux objectifs. cause, mais aussi, et c’est Il s’agit d’abord, Une bonne fois pour toutes, il faut beaucoup plus comme je l’ai inquiétant, par évoqué précéle savoir, le pharmacien dispense alors de nombreux demment, de que le vétérinaire délivre. Il y a là une pharmaciens. faire appliquer différence capitale pour la santé publique Permettez-moi la réglemende vous rappetation par les ler que l’acte vétérinaires mais aussi par les pharmaciens. Nous de dispensation est le cœur du métier de voulons aussi faire valoir l’importance pharmacien et que cela ne saurait être pour la santé publique de recourir de valablement confondu ou comparé avec façon beaucoup plus constructive et des prérogatives de simple délivrance significative à l’acte de dispensation. éventuellement dévolues à d’autres Enfin, nous avons pour troisième objet intervenants non-pharmaciens. Si vos lecteurs, a fortiori si ceux-ci sont de susciter l’intérêt des confrères pour la pharmaciens, devaient retenir une seule pharmacie vétérinaire qui, faut-il le rapchose de cette interview, il serait vraiment peler, demeure une partie intégrante de souhaitable que ce soit cela. Une bonne leur exercice. Le diplôme de pharmacien ouvre des fois pour toutes, il faut le savoir, le pharmadroits à son détenteur mais engendre cien dispense alors que le vétérinaire déliaussi des devoirs, au premier rang desvre. Il y a là une différence capitale pour la quels il y a celui de garantir une dispensasanté publique. D’un côté, il y a un contrôle tion de qualité quelle que soit la catégorie et une analyse pharmaceutique de l’ordonde médicaments concernée. nance, alors que, de l’autre, il s’agit d’une simple remise physique des médicaments. AP : Quelles sont vos propositions pour Chacun peut aisément comprendre qu’un prescripteur, quelle que soit sa qualité, ne promouvoir l’utilité de l’acte de dispenpeut pas valablement s’autocontrôler. sation des médicaments vétérinaires Cela étant précisé, et pour répondre un par le pharmacien ? peu plus précisément à votre question, JM : En premier lieu, sans vouloir être l’ANPVO saisira l’opportunité de chaque désobligeant pour les rédacteurs d’un dossier susceptible de bénéficier de ce journal pharmaceutique aussi sérieux type de raisonnement pour faire valoir le que le vôtre, il m’est impossible de ne pas attirer amicalement votre attention sur le bien-fondé de ses propositions en termes sens de votre expression « l’acte de disde santé publique. pensation de médicaments vétérinaires C’est, par exemple, le cas des discussions par le pharmacien », car celle-ci relève du actuelles autour de l’antibiorésistance ou pléonasme. de la maîtrise des résidus médicamenteux La dispensation par le pharmacien d’un dans l’environnement, mais il y en a beaumédicament, fût-il à usage vétérinaire, est coup d’autres.
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Ř Jacky Maillet, président de l’Association nationale de la pharmacie vétérinaire d’officine (ANPVO).
AP : En quoi la dissociation de la prescription et de la délivrance des antibiotiques pourra-t-elle permettre de diminuer l’antibiorésistance ? JM : À travers cette question, je suppose que vous faites allusion aux propositions récentes de l’Ordre national des pharmaciens qui viennent d’être adressées au Comité national de coordination pour un usage raisonné des antibiotiques en médecine vétérinaire qui est en cours de mise en place. Bien que n’étant pas le porte-parole du Conseil national de l’Ordre des pharmaciens (CNOP) dans cette affaire, je crois cependant pouvoir dire que selon notre Ordre, le fonctionnement actuel du système de délivrance des antibiotiques vétérinaires est hautement perfectible car il est entaché d’un conflit d’intérêt latent. Le prescripteur est aussi le vendeur dans la quasi-totalité des cas. Afin d’optimiser le fonctionnement du système et de contribuer utilement aux objectifs de réduction des consommations d’antibiotiques fixés par le comité, l’Ordre des pharmaciens propose, en effet, de mieux exploiter le potentiel de la dispensation pharmaceutique, tel que cela existe en médecine humaine. Au-delà de l’exemple convaincant de la médecine humaine, des travaux appliqués à la médecine vétérinaire existent dans certains pays avec, notamment, un exemple probant au Danemark. Une baisse de 40 % de la consommation d’antibiotiques a été enregistrée dans la filière porcine après quelques années seulement d’exclusion de toute possibilité de conflit d’intérêt chez les prescripteurs vétérinaires.
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mais considère que cette position pragLa fonction de contrôle de l’ordonnance matique et modérée qui est la sienne par le pharmacien, dissociée très claipourrait s’avérer rapidement obsolète rement de l’acte de prescription, est, selon notre institution ordinale, un en cas d’autisme absolu de la profession gage important de meilleure maîtrise. vétérinaire. Que dirait-on, en effet, si demain les Nos amis vétérinaires doivent le commédecins prescrivaient et délivraient prendre, ni le Code de la santé publiles antibiotiques ? que, ni le droit du commerce, ni le droit de la concurrence ne justifient de tels L’ANPVO souscrit naturellement à cette comportements. initiative du CNOP mais s’en distingue néanmoins sur un point important c a r n o u s a ff i rLa fonction de contrôle de l’ordonnance mons qu’une telle par le pharmacien, dissociée très clairement proposition se de l’acte de prescription, est, selon notre institution saurait être totaordinale, un gage important de meilleure maîtrise lement pertinente si celle-ci ne résulte pas d’une action concertée avec la profession AP : Ne convient-il pas quand même de vétérinaire. mieux encadrer la délivrance des médiConsciente de l’impact négatif qu’une caments vétérinaires quand on voit les telle mesure ne manquerait pas de prodifférentes affaires qui accablent officiduire sur l’économie des entreprises naux et vétérinaires (kétamine, clenbuvétérinaires et convaincue par ailleurs térol, Gabbrovet®...) ? de l’absolue nécessité de maintenir un JM : Bien sûr, ces affaires révèlent une maillage vétérinaire réellement opégrande incompétence de la part de rationnel, l’ANPVO considère en effet certains confrères. Certaines d’entrequ’une réflexion globale incluant toutes elles, notamment celles concernant les parties concernées, est un préalable le détournement d’usage de la kétaabsolument incontournable avant tout mine, entrent même dans la catégorie changement éventuel. du grand banditisme. Comme je vous l’ai déjà dit, l’ANPVO, qui œuvre pour AP : Comment garantir véritablement anoblir l’acte de dispensation en médeun libre recours à l’officine pour la cine vétérinaire, ne saurait trouver de délivrance des médicaments vétéricirconstances atténuantes à ce genre naires aux éleveurs et propriétaires d’agissements, c’est tout simplement d’animaux ? consternant. Ces affaires lamentables ont néanmoins JM : En faisant simplement appliquer la un mérite : celui de nous inciter à faire réglementation existante. Nous savons en effet qu’un éleveur sur trois déplore œuvre importante de pédagogie et à metde ne pas pouvoir choisir le circuit phartre en place une formation digne de ce nom pour nos confrères, à commencer maceutique pour la dispensation des par les plus jeunes d’entre eux dans les médicaments et nous savons en même facultés. temps que cela résulte du fait que la quasi-totalité des vétérinaires refusent Pour l’affaire du Gabbrovet®, dont je rapde prescrire s’ils ne délivrent pas les pelle qu’elle ne concerne pas les pharmédicaments. maciens, nous prenons acte des pourIl y a là une entrave délibérée, voire même suites engagées à l’encontre de quelques parfois revendiquée, au principe du libre lampistes vétérinaires, mais considérons choix du dispensateur, qui nous préocnéanmoins qu’il s’agit plus de règlements cupe beaucoup. de comptes locaux que d’actions signifiL’ANPVO ne remet pas en cause le stacatives ayant une réelle portée en matière tut de propharmacien du vétérinaire de santé publique.
Il faut quand même rappeler que ce médicament est autorisé dans d’autres pays européens et qu’il est sans doute le seul traitement réellement efficace contre la cryptosporidiose du veau. AP : Que penser du test de délivrance
d’amoxicilline à un lapin nain alors que ce médicament lui est contre-indiqué et qu’aucun pharmacien n’a relevé le problème ? JM : Cette question rejoint la précédente et appelle de ma part une réponse similaire. Sur le fond, c’est une affaire navrante. Sur la forme, un certain nombre de confrères considère qu’il subsiste une possibilité de poursuivre le vétérinaire qui a prêté son diplôme et sciemment établi une fausse prescription en vue de jeter ostensiblement le discrédit sur toute une profession de santé. Ces faits sont effectivement répréhensibles. Pour autant, l’ANPVO considère que cette initiative du journal La Dépêche vétérinaire1 témoigne plus d’un très mauvais plaidoyer pro domo s’employant à vouloir démontrer l’indémontrable, à savoir que pour distribuer les médicaments, le vétérinaire seul est mieux que le couple vétérinaire + pharmacien. Le risque que cette enquête puisse ternir, même superficiellement, l’image de notre profession, est proche de zéro. Mais là encore, nous comprenons bien qu’il y a tout lieu d’inciter les pharmaciens à se former sérieusement afin d’être totalement irréprochables. Cela étant dit, je profite de votre question pour préciser ici un point de droit que la méthode retenue pour piéger nos quelques confrères parisiens soulève. Il faut, en effet, savoir que si les confrères concernés par cette enquête avaient refusé d’honorer l’ordonnance [NDLR : il n’y en a eu aucun], ils auraient éventuellement engagé aussi leur responsabilité. En fait, la législation actuelle autorise le vétérinaire à prescrire un médicament à usage humain pour des animaux – comme c’était le cas ici avec l’amoxicilline 5 mg/mL – dès lors qu’il considère qu’il n’existe pas de traitement approprié disponible en pharmacie vétérinaire pour
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le cas considéré. Dans ce cas très précis, le vétérinaire est totalement souverain, il n’est pas tenu de justifier son choix de médicament, pas même auprès d’un pharmacien. Au final, dans le cas qui nous intéresse, les pharmaciens ont, sans le savoir, eu raison de dispenser l’amoxicilline pour le lapin Clochette. C’est incroyable, mais c’est comme ça. AP : Pensez-vous que les équipes officinales soient suffisamment formées pour assurer la dispensation des médicaments vétérinaires en toute sécurité ? JM : La formation initiale des pharmaciens à la faculté en matière de médicaments vétérinaires est pratiquement inexistante. Celle des préparateurs en pharmacie l’est tout autant. Je ne vous cache pas qu’il n’y a pas lieu d’être fier d’un tel constat. Pour moi, une telle impasse dans le cursus universitaire des pharmaciens est une véritable énigme. Cette omission constitue bien plus qu’une simple erreur, il s’agit d’une inconséquence incroyable de tout notre système d’enseignement qui organise malgré lui les conditions d’une lente dépossession du pharmacien des médicaments, de tous les médicaments, au profit d’autres circuits de distribution beaucoup moins éthiques qui n’en demandent vraiment pas tant. Pour ce qui nous concerne, nous essayons, avec nos faibles moyens, de réinstaurer les diplômes d’université de pharmacie vétérinaire. Une initiative est en cours de finalisation à Lyon, d’autres pourraient suivre ailleurs prochainement. Nous avons aussi le projet de nous rapprocher des doyens de fac aussi rapidement que possible afin de les sensibiliser à cette problématique qui est vraiment tout sauf secondaire. AP : Pourquoi la Commission euro-
péenne souhaite-t-elle modifier la directive “médicaments vétérinaires” ? JM : La Commission a en effet lancé une consultation sous forme de questionnaire en ligne en vue de procéder à une éven-
En parallèle, il nous semblait pertinent tuelle modification de la directive “médid’instaurer un minimum de cohérence caments vétérinaires” qui date de 2001. entre les molécules autorisées sans Cette consultation est bien entendu très ordonnance en médecine humaine et importante pour l’avenir de la distribution les mêmes utilisées avec ordonnance en au détail des médicaments vétérinaires médecine vétérinaire. en Europe. C’est la raison pour laquelle Enfin, nous avions également comme il nous est apparu indispensable d’y parobjectif d’inclure dans cette nouvelle ticiper afin de faire valoir un point de vue liste certaines molécules d’utilisation que la Commission n’a pas nécessairetrès courante, telles que les vermifuges, ment l’habitude d’entendre : celui des certains anti-parasitaires externes (APE), pharmaciens. Dans le questionnaire proposé par la antilaiteux, etc., qui présentent l’avantage Commission, peu de points concernaient d’être atoxiques ou peu toxiques, et dont la dispensation des médicaments. C’est la délivrance est actuellement soumise à pourquoi il nous est apparu, de façon prescription préalable obligatoire. totalement convergente avec l’ensemble Cette liste devrait permettre de légaliser des autres organisations pharmaceutiques une grosse partie de l’activité vétérinaire européennes, qu’il convenait de produire dans les officines. Je rappelle en effet via le Groupement pharmaceutique de qu’un pharmacien est aujourd’hui pasl’union européenne (GPUE) et parallèlesible de deux ans de prison et 30 000 € ment au questionnaire, un argumentaire d’amende pour la délivrance d’un spécifique et dédié émanant de tous les vermifuge. pharmaciens exerçant dans l’ensemble des pays-membres. AP : Les discussions avec les vétériC’est ainsi que l’ANPVO, mais aussi l’Ornaires ont-elles été faciles pour cela ? dre français des pharmaciens, a participé JM : Une fois n’est pas coutume, ce dossier a été porté conjointement et de à l’élaboration d’un document estampillé façon totalement GPUE qui s’intitule décrispée par les The retail distribution Pour ce qui nous concerne, pharmaciens et of veterinary mediles vétérinaires. cines in Europe: a nous essayons, avec nos La concertation a highly perfectible faibles moyens, de réinstaurer été rapide et vraisystem. les diplômes d’université ment constructive. Ce document a été de pharmacie vétérinaire La délivrance de adressé à la Comcertaines substanmission au printemps dernier. Il vise ces qui étaient exoprincipalement à démontrer l’importance nérées sera désormais soumise à presde la complémentarité prescripteur-discription obligatoire et la délivrance de pensateur en médecine vétérinaire. certaines autres qui étaient jusqu’alors soumises à ordonnance préalable ne le sera plus. Chacun y trouve son compte, AP : Par ailleurs, pourquoi vouloir modifier la liste des molécules vétérinaires les pharmaciens, les vétérinaires, la santé exonérées ? publique et la santé animale. Par exemple, nous avons bien volontiers JM : Cette liste de substances destinées aux animaux de compagnie datait de accepté de ne pas intégrer le lopéramide 1986. Elle contenait des molécules obsodans la liste des substances exonérées car il s’agit d’une substance potentiellelètes et inusitées en médecine vétérinaire, ainsi que de nombreuses sub stances ment très toxique pour certaines races de antibiotiques dont la dispensation sans chien [NDLR : déficientes dans le gène ordonnance n’est vraiment pas justiMDR1]. Et les vétérinaires ont tout aussi fiée compte tenu des problèmes d’antifacilement accepté que l’ensemble des biorésistance que nous connaissons vermifuges oraux pour chiens et chats aujourd’hui actuellement disponibles sur le marché
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au mieux. En tout état de cause, pour ne soient plus soumis à prescription l’ANPVO, l’utilisation, même maîtrisée, obligatoire. de ce nouvel outil devra se faire obligaLa nouvelle liste est actuellement entre les mains des experts de l’Agence natiotoirement à périmètre constant des ayants nale de sécurité sanitaire de l’alimentadroit actuels de la délivrance des médication, de l’environnement et du travail ments vétérinaires. (ANSES) pour avis et devrait faire l’objet Pour ce qui est du risque d’une libéralisad’un arrêté ministériel dans les mois à tion de la distribution des médicaments venir. vétérinaires vers les grandes et moyenIncontestablement, il s’agit là d’une nes surfaces (GMS), il convient à mon avis de ne pas être trop inquiet. Le médiavancée significative pour l’ensemble de cament vétérinaire, a fortiori lorsqu’il est nos confrères qui vont désormais avoir destiné aux animaux de rente, n’est pas la possibilité de développer au grand et ne sera jamais jour une activité une marchanfortement génédise comme les ratrice de marge. Internet est d’ores et déjà autres. Il est, et Je rappelle qu’un une réalité dans le domaine restera, soumis à Français sur deux du médicament vétérinaire prescription oblipossède un animal qu’il est difficile d’ignorer mais gatoire, car cela de compagnie et est inscrit dans que quatre millions qu’il est néanmoins urgent d’encadrer la directive eurode personne franpéenne, ce qui chissent chaque est un obstacle absolument déterminant jour la porte d’une officine. pour contrer toute éventuelle velléité dans AP : Existe-t-il un risque de voir la le sens d’une libéralisation. grande distribution ou différents sites Par ailleurs, si, comme nous y travaillons à Internet revendiquer la vente de médil’ANPVO, le marché français demeure de caments vétérinaires ? façon réellement effective aux mains de trois ayants droit avec, en corollaire, une JM : Internet est d’ores et déjà une réalité possibilité tout aussi effective de saine dans le domaine du médicament vétérinaire qu’il est difficile d’ignorer mais qu’il concurrence entre eux, alors je ne vois pas est néanmoins urgent d’encadrer. Les très bien la nécessité d’ouvrir encore plus risques de dérives inhérentes à ce type le marché, sauf à déstabiliser totalement de commerce préoccupent beaucoup les un équilibre ayant démontré son utilité, et professions vétérinaires et pharmaceutià accepter toutes sortes de répercussions ques. Le taux de contrefaçons est une de santé publique que cela ne manquerait source d’inquiétude importante pour les pas d’engendrer. professionnels de santé que nous sommes. Les pouvoirs publics et l’ensemble AP : Finalement, le développement du des organisations professionnelles sont marché du médicament vétérinaire conscients des risques et des enjeux. Une n’est-il pas une réponse aux difficultés réflexion est actuellement en cours. Elle économiques que rencontre actuelledevrait déboucher sur des propositions ment l’officine ? très concrètes susceptibles d’intégrer le JM : Globalement, il faut bien le reconnaîphénomène Internet tout en le maîtrisant tre, la part de marché de 6,5 % détenue
par les pharmaciens ne représente pas un enjeu de survie pour la profession. Pour autant, cette activité de pharmacie vétérinaire est, je vous l’affirme, absolument déterminante dans un certain nombre de cas et le sera d’autant plus demain dans certaines zones rurales, celles qui seront touchées de plein fouet par le phénomène quasi irréversible de la désertification médicale. L’état actuel des finances publiques et des comptes sociaux nous incite, par ailleurs, à penser que bon nombre de confrères, y compris parmi les plus citadins, auraient certainement tout à gagner à mieux considérer cet aspect de leur monopole. Le développement de la pharmacie vétérinaire d’officine est donc bel et bien une réponse possible aux difficultés rencontrées par la profession aujourd’hui. Néanmoins, je le répète ici avec force, le facteur économique ne doit pas occulter les grands défis de santé publique auxquels les pharmaciens se doivent absolument de participer pour mieux y répondre. La dispensation d’un médicament est, à cet égard, une étape essentielle qu’il convient absolument de ne pas brader en médecine vétérinaire.
Propos recueillis par Sébastien Faure Maître de conférences des Universités, Faculté de pharmacie, Angers (49)
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Note 1. Si Clochette pouvait ressusciter ! La Dépêche Vétérinaire, n° 1094, du 16 au 22 octobre 2010.