,Ren6 Dujarric de la Rivi~re 1885-1969
Revue Fran~aise de Transfusion. T. XIII. N ° 1. - - 1970
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Le Professeur Reng DUJARRIC DE LA RIVIERE 1885-1969
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E Professeur Ren6 Dujarric de la Ri,vi6re, an,cien Membre ,du Gonseil de R6daction de notre revue, Mem,bre de notre Soci6t6, Sous.Directeur honoraire de l'Institut Pasteur, Pr6si.dent d e l'Acad6mie des Sciences et Pr6sident annuel de l'Institut de France, est d6e6d6 Neuilly le 28 no,vean~bre 1969. I1 6tait n6 h Ex,cideui.1, en Dordogne, ]e 19 avril 1885. AprSs avoir fait ses 6tntles m6dical.es ~ Bo.rdeanx, Lyon et Paris et s'Stre initi6 la Parasitologie clans le laboratoire du Pr. Blan, chard, il 6tait entr$ en 1910 h l'H6pital de l'Institut Pasteur, Institut qu'fl ne ,devait plus .quitter jusqu'h sa retraite en 1959. II avait successivement franchi tous les grades de la hi$rarehie pastorien.ne, nomm6 Assistant en 1913, Se,cr6taire G6n6ral en 1941, puis Sous-Directeur en 1946. Parall~lement, il devait acqu6rir en ,Sorbonne le grade de Do ctenr $s,Sciences, grace ~ sa th6se pr6sid6e p a r P o r t i e r en 1929. An cours de la guerre 1914-18, oh il m6rite la Croix de Guerre, a titre de MG deein de Bataillon an 45 '~ R6giment d'Infanterie, il revolt la direction du Laboratoire de la place de Calais et de la r6gion du Nord. I1 est parmi les premiers h examiner les vi,ctim~s des gaz toxlque,s .employ6s par les arm6es du Kaiser ;~i.1 :consacre a~cec le P.r.J. Leclercq une 6tntie anatomo-pathologique et bact$riolog~que des '16sions cans6es ~par ces gaz, pu,bli6e clans le Livre Blanc Fran~ais snr la guerre des gaz. Au c ours de l'6pid6mie de grippe de 1918, re ehercha~at l'intervention du bacille d6crit p a r Pfeiffer, 51 d6cide de s'inoculer ~ lui-mSme nn ~filtrat de s6rosit6s ,provenant des gripp6s ; en contra~etant la .grippe, il d6montre la nature filtrable du virus. Cette observation a 6t6 ra,pport$e h l'Acad.6mie des Sciences le 21 octo'bre 1918 ; '(elle est pn'bli6e clans le mSnae nnm6ro oh ,Charles Nicoll'e et Lebailly pr6sentent leurs
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rSsultats de transmission de grippe au singe et a l'homme). La grippe devait toujours rester pour M. Dujarric de la Rivi6re un sujet de pr6dilection et il organisait, avec Mile G. Cateigne, ~e 'Centre National d'6tude de la Grippe, qui .devait devenir un labo~atoire de r6fSrence de I'O.M.S. Dans le domaine de l'Immunologie, M. Dujarrie de la Rivigre a 6t,~ parmi les pr6curseurs. 'I1 s'est, d~s 1927 int6ress6 avec N. Kossovitch, la r~partition des groupes sanguins en ant'hro,pologie et ~ leur importance en m6decine l@ale. I1 a pu.bli6 en 1936 avec N. Kossovitch une monographie de 250 pages sur << Les Groupes Sanguins >> off Karl Landsteiner rappelle dans sa preface << l'hospitalit6 g6nSreuse >> dont il avait ~ l'o,bjet h l'Institut Pasteur, apr~s son d6part de Vienne. D~s 1936, il a'vait provoqu6 la cr.6ation au Mus6um d'un laboratoire d'6tude des .caract~res antig$niques qui diff6renci'ent les races et les esp~ces zoologiques mais ,c'est .surtout ~ partir de 194'5 qu'il de~zait contribuer au d~veloppement de ~Im.muno-hSmatologie humaine et compar6e. I1 devait ,c.onfier g l'un 'de nous ~la mission de dSvelopper les recherches darts le domaine des groupes sanguins de ]'homme et des animaux. Celles-ci devaient aboutir a une ,coop@ation tr~s 6troite avec le C.N.R.S., n o t a m m e n t avec la station de Physiologie animale, dirig6e par Ch. Thibault et ~ l'installation d'un laborat~ire de d6terruination des groupes sanguins des ,bo~id,6s. L'.$tude des ~chevaux d'6cnties cbl~bres d'evait permettre l'aequisition de connaissanc'es incontest6es dans l'immun'ologie 'des .fiquid6s. D'autres espg.ces animales devaient 6tre .6tudi6es : mouton, chgvre, porc, .chi'en, :chat, primates, poissons°
Une ,part i,mportante des conceptions et des rSsultats a ~t~ r.6sum6e dans l'ouvrage publi6 en 1953 avec l'un d'e nous sous ,le titre <>. E n 1952, M. Dujarric de la Rivi~re apportait son soutien ~ la r6atisation des programmes d e transplantation r~nale exp6rimentale .chez le chien avec R. Oudot puis N. Simonsen. ~Le X ° 'Congrgs Europ6en sur ,<( Les Groupes Sanguins et le polymorphlsme ,biochimi,que des animaux >> tenu ~ Paris en 1966, dev'ait en 'lui eonfiant la Pr$sidence d ' h o n n e u r ~6moigner du r61e qu'il avait jou~. I1 devait Stre en 1947 le fondateur du p r e m i e r eours d'Immunologie crg,6 en France et dont il .confia la direction a R. Laporte. I1 avait montr6, d$s 1930, que les ph6nomgnes biologiques peuvent reposer snr des m6.canismes physieo-chimiques. Une monographie
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traitant de ce sujet avait 6t6 pr6fae6e par d'Arsonval. Les globules rouges sont, pour Dujarric de la Rivi6re, sus, ceptibles d e joner p a r leur pouvoir d'absorption un r f l e non n6gligeable dans ~es ph6nom6nes i.m. munitaire,s. Les toxines des ehampignons devaient ~tre aussi pour M. Dujarrie de la Rivibre l ' o b j e t de long~es .6tudes. C'est ainsi q u ' i l m o n t r a 1'action neutralisatriee de la p a r o i ~ d'estomae de ta,pin sur le poison des amani~es et mis au point u n s6rum th6rapeutique. I1 r a p p o r t a .son exp6rience dans deux ouvrages << Le poison des amanites mortell.es >> et, a'vec Roger Heim, << Les c b a m p i g n o n s toxiques >>. Dans le domaine de la Bact6riologie, M. Dujarrie .d.e la Rivibre s'6tait particulibrement oecup6 des m6ningocoques avec E t i e n n e Roux, des spiroch6toses avec Mme Kolo~chine-Erbert et .des sal~monelles. I1 fut, ~ u n m o m e n t oh 'les relations 6taient encore diffieiles, un grand voyageur. I1 avait bien eonnu l'es laboratoires d ' O u t r e - R h i n avant 1914 'et a~cait fair de fr6quents voyages e n Am6rique du l~ord et au Moyen Orient p o u r y 6tudier les services de quarantaine h Alexandrie et au lazaret d'E1 Thor. I1 a vait a.equis ainsi une grande .com.p6tence en mati6re d'hygi6ne p ub~ique et lots de la cr6ation de l'Organisation Mondiale de la Sant,6, fl avait .6t6 tout naturellement d6sign6 comme repr6sentant de la France h la session inaugurale ; il ,devait ensuite y exercer des 'fonctions d'Expert. .I1 avait cr66 n n Service d'Hygi6ne E x p 6 r i m e n t a l e ~ l'Institut Pasteur et mis au p o i n t h 'P6rigueux le plan du 'C.entre HospitMier auquel on a donn6 son n o B . On .doit h M. D n j a r r i c de la Rivi~re la Fondation, avec Jules Border de ,]a Soiei6t6 I n t e r n a t i o n a l e de Microbiologie en 1930. Sa va'ste et profonde .culture et tant de brillantes qualit6s ont permis h N[. Dujarric ,de la Rivi~re d ' a b o r d e r de nom'brenx doma~nes. On lui dolt de trbs belles 6tudes sur Lavoisier, ainsi que sur Cuvier et Buf'fon. La s y m p a t h i e q u ' i l t6moignait h tons ses interlocuteurs, sa .courtoMe, son affabilit6, lui ont vclu d'6tre sollicit6 p o u r le Conseil d'Administration ou ]e B u r e a u de nombreuses Soei,6t6s Savantes. I1 rut ensuite, tout natnrelle,ment d6sign6 ~eomme Pr6sident des Soci6t6s F ran~aises de ]VIicrobiologie, de Mycologie, de Pathotogie compar6'e, Membre de l'Acad6mie Nationale .de M6decine en 1945, M e m b r e .de l'A,cad6mie des Sciences en 1954 et devenu Pr6sident de cette A.cad~mie en 1969, l'ann6e oh la pr6siden*ce de l'Institut de France revenait h cette section.
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11 pTit la parole en public ,pour la derni6re lois le 27 oeto,bre 1969 h la S6ance annuelle des cinq Acad6mies. I1 devait ~tre emport~ en .quelques jours sans l~ouvoir parachever la mission ,qu'il s'6tait donn6e. ~lom,brcux sont ceux .qui garderont le souvenir de l'a,eeueil affable de M. Dujarric de la Rivi~re, de son in6puisable culture et ,lui sofont reconnaissants de l'aid'e infatiga,ble qu'il leur a apport6e. A. EYQUEM et J. NI. FINE.