Le syndrome de choc toxique staphylococcique

Le syndrome de choc toxique staphylococcique

CAS © Masson, Paris. Ann. Fr. Anesth. Reanim., 3 : 3 0 9 - 3 1 1 , 1984. CLINIQUE Le syndrome de choc toxique staphylococcique Staphylococcal toxic...

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CAS

© Masson, Paris. Ann. Fr. Anesth. Reanim., 3 : 3 0 9 - 3 1 1 , 1984.

CLINIQUE

Le syndrome de choc toxique staphylococcique Staphylococcal toxic shock syndrome P. BOULI~TREAU *, M.J. RAY *, M. BRET *, G. CARRET **, J.P. FLANDROIS ** * Service de Reanimation, et ** Laboratoire de Bacteriologie, HEteI-Dieu, F 69288 Lyon Cedex 1

R(=SUMI~ : Une observation de choc toxique staphylococcique survenu chez une femme de 31 ans est rapportEe. Les caractEristiques cliniques habituelles du syndrome sont retrouvEes : survenue en pEriode menstrueUe, hyperthermie, choc, Eruption cutanEe. L'Evolution, marquee par un Ged~me pulmonaire interstitiel et une insuffisance rEnale anurique nEcessitant l'Epuration extrarEnale, se fait vers la guErison avec persistance d'une insuffisance rEnale rdsiduelle au 4 ~ mois. Un Staphylococcus aureus est isolE aux niveaux vaginal, nasal et trach6al. I1 est producteur d'entErotoxines A et F, responsables des sympt6mes de la maladie_

ABSTRACT : The case of a 31 year old woman with staphylococcal toxic shock syndrome is reported. The usual clinical characteristics were found : it began during a menstrual period, and she presented with a state of shock, a high fever and a cutaneous eruption. Its evolution was marked by pulmonary interstitial oedema and acute renal failure requiting dialysis; the patient recovered but residual renal failure was still present four months later. A Staphylococcus aureus was isolated from vaginal, nasal and tracheal cultures. It produced enterotoxins A and F, which were responsible for the symptoms.

Depuis la description du <~toxic shock syndrome ~ par TODD et coll. en 1978 [8], plusieurs publications anglo-saxonnes ont fait 6tat de cas semblables, pour la plupart des femmes en p6riode menstruelle [4, 7] mais aussi dans d'autres circonstances [3]. En France, une dizaine de cas seulement ont 6t6 rapportEs. L'observation rapportEe ici est caractErisEe par la gravit6 de l'atteinte rEnale.

paumes des mains, parsem6e de Vdsicules (fig. 1);conjonctivite bilatErale; pression artErielle h 90/60 mmHg; pouls 1 2 0 c . m m - l ; oed~me pulmonaire bilateral majeur de type interstitiel, nEcessitant la ventilation artificielle avec pression positive rEsiduelle expiratoire; anurie; obnubilation. L'Etude hEmodynamique avant mise sous pression positive expiratoire montre un index cardiaque h 5,3 1 - min - j - m -2, un index systolique ~ 45 ml - m -2, une pression capillaire pulmonaire tl 7 mmHg (sous ventilation assistEe), des resistances artErielles systEmiques 866 d y n - m -2, un shunt droit-gauche h 17 %. Sur le plan biologique, de nombreuses anomalies sont relevEes : hyperleucocytose avec polynuclEose (11,8 giga - 1-I leucocytes, 70 % polynuclEaires neutrophiles) et myE16mie; coagulation intravasculaire diss6minEe avec produits de degradation de la fibrine entre 80 et

OBSERVATION Cette femme de 31 ans pr6sente sur son lieu de travail le 11.01.1983, alors qu'elle est en pEriode menstruelle, une douleur progressive de l'Epaule droite avec quelques nausEes. Un examen medical pratique le 13_01.1983 ne montre rien de particulier_ Le tableau clinique s'aggrave le 15_01.1983 : oed~me douloureux de l'Epaule droite et de la paroi thoracique, douleur de l'hypochondre droit, diarrh~e et vomissements, dyspnEe d'effort, Eruption 6rythEmateuse s'Etendant progressivement de l'Epaule ~ la paroi thoracique et abdominale_ Le 18_01.1983, l'existence d'une hyperthermie ~ 39 °C, d'un tableau de choc (hypotension, tachycardie, oligurie) et d'une defense abdominale justifie une laparotomie : celle-ci ne met en Evidence qu'un 6panchement sEreux intrapEritonEal de moyenne abondance. La malade est admise en p&iode postopEratoire immediate dans le service de r~animation. A l'entrEe, l'Etat clinique est tr~s sErieux : temperature ~i 39 °C, Eruption scarlatiniforme s'Etendant du tronc, aux cuisses et aux

Requ le 16 septembre 1983; accept6 sous forme rEvisEe le 26 janvier 1984.

Fig. 1. - - Aspect de l'Eruption cutanEe a l'entrEe.

Tires a part: P. BoulEtreau.

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P. BOULI~TREAU ET COLL.

Fig. 2. - - Desquamation secondaire (8° jour).

160 mg • l 1, facteur II 50 %, proaccElErine 42 %, 136 giga • 1 - 1 thrombocytes qui s'abaissent h 14 giga-1-1 trois jours plus tard; troubles ioniques associant hypokaliEmie (3,7 mmol. l-t), . hypocalcrmie (1,67 mmol . 1-1) et hypophosphorEmie (0,85 mmol - 1-1); insuffisance rdnale : u r E e sanguine 27 mmol • 1-1 et crratininEmie ~ 435 ~tmol - 1-1; atteinte hrpatique et musculaire : bilirubine totale 80 p,mol. 1-1, SGOT 100 UI - 1-1, SGPT 45 UI ' 1-1 , CPK 1 740 UI • 1-1 , myoglobinEmie 2 000 ~tg • 1 1. Le choc est traitE par un remplissage vasculaire associ6 h la dopamine et ~ la trinitrine injectable. Le traitement anti-infectieux l'aveugle comprend une antibiothErapie par cEfotaxime et dibrkacine. Le 20.01.1983, les cinq hdmocultures pratiquEes avant l'institution de toute antibiothErapie restent stEriles, de m~me que le liquide cEphalo-rachidien. Par contre, les prEl~vements d'entrEe mettent en Evidence un Staphylococcus aureus au niveau vaginal, nasal et tracheal. L'antibiothrrapie initiale est donc remplacEe par l'oxacilline, poarsuivie pendant 13 jours h la dose de 2 g - 2 4 h -1. L'Evolution secondaire est la suivantc : l'Etat hrmodynamique se stabilise progressivement et cesse d'&re inquiEtant le 22.01.1983; la radiographic pulmonaire se normalise rapidement; le sevrage de la ventilation assistEe et l'extubation sont possibles au 10~jour; la temperature drcrolt; par contre, l'insuffisance rrnale anurique persiste, ndcessitant six sEances d'hrmodialyse: la reprise de diur~se n'est observEe qu'h partir du 15° jour. L'6ruption 6volue des les premiers jours d'hospitalisation vers une desquamation d'aspect variable selon les zones : nrcrose Epidermique de type Lyell au niveau du bras droit et du thorax (fig. 2), grands larnbeaux au niveau des extrEmitEs des doigts, desquamation plus fine sur le reste du corps. La malade peut quitter le service de reanimation trois semaines apr~s son admission. Quatre mois apr~s le debut de la maladie, l'azotEmie et la crratininrmie restent ElevEes, h 9,9 mmol - 1-1 et 141 btmol - 1-1 , respectivement; une hypergammaglobulinEmie avec ElEvation des IgG survenue secondairement (3° semaine) est en voie de regression. L'hypothrse d'une arthrite staphylococcique de l'Epaule ~ l'origine de la maladie peut ~tre Elimin6e en l'absence de signes radiologiques. COMMENTAIRES

Cette observation est caractrristique d ' u n choc toxique staphylococcique. Elle r r u n i t les critrres proposes par SHANDS et coll. [7] pour affirmer le d i a g n o s t i c : 6tat de choc sEvEre accompagn6 de temperature suprrieure h 39 °C, Eruption scarlatiniforme diffuse avec

desquamation secondaire, manifestations multiviscrrales (au moins trois a p p a r e i l s ) : digestive, musculaire, muqueuse, r6nale, h6patique, neurologique, h6matologique, ionique. Chez cette malade, toutes ces atteintes sont pr6sentes ~ u n degr6 variable. L'atteinte rEnale est particuli~rement grave et prolongre. Elle nEcessite plusieurs srances d ' h r m o d i a l y s e , ce qui paraR exceptionnel dans la litt6rature : TODD et coll. [8] d6crivent 1 malade sur 3 ayant dQ subir l ' h 6 m o d i a l y s e et REINGOLD et coll. [5] 4 malades sur 54_ Les circonstances de survenue sont classiques. Le choc toxique staphylococcique peut survenir chez tout sujet pr6sentant u n e infection locale h Staphylococcus aureus [5-8]. Mais la majorit6 des observations concerne des femmes en p6riode menstruelle, la porte d'entrEe 6tant vaginale [3, 4, 7]. L'utilisation de tampon p6riodique, facteur de risque habituel, n ' e s t pas incrimin6e ici. Le Staphylococcus aureus est r e c o n n u depuis longtemps c o m m e agent pathogrne. Les hEmocultures sont habituellement st6riles mais le germe est retrouv6 dans les pr61~vements locaux. Dans cette observation, u n Staphylococcus aureus est isol6 sur trois pr616vements (vagin, nez, trach6e). I1 s'agit de souches identiques de m~mes s6rotypes (a5 h2 m l ) et de m~mes lysotypes (29.52.80). Elles prrsentent les caract6ristiques des souches reli6es aux chocs toxiques staphylococciques concernant l'antibiotype et le lysotype [1-3]. Elles srcr~tent de l ' e n t r r o t o x i n e A et de l'ent6rotoxine F, marqueur du choc toxique staphylococcique. Cette exotoxine, appelre quelquefois ~ pyrogenic exotoxin C ~ [6], est en effet sEcr6tre par plus de 93 % des souches associ6es au syndrome, alors q u ' e l l e n ' e s t rencontrre que chez moins de 5 % des souches t6moins [2, 3, 6] " elle est diffrrente des toxines responsables du Lyell staphylococcique [3]. L ' e x p r r i m e n t a t i o n animale suggrre que la plupart des manifestations du choc peuvent 8tre attribu6es ~ l'effet pyrog~ne de cette toxine

[31. Le traitement par u n antibiotique antistaphylococcique r6sistant aux p6nicillinases doit 6tre institu6 rapidement, ce qui pr6vient le risque de rrcidives [3, 4]. Celles-ci sont drcrites surtout chez les f e m m e s ayant pr6sent6 une toxi-infection en p r r i o d e menstruelle, et surviennent alors au drcours des menstruations suivantes [7]. Cette malade n ' a pas pr6sent6 de signes de rrcidive d a n s ' l e s quatre mois suivants. BIBLIOGRAPHIE

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Mannitol causes compensatory cerebral vasoconstriction and vasodilation in response to blood viscosity changes, - - J.P. Muizelaar, E.P. Wei, H.A. Kontos, D.P. Becker. J. Neurosurg., 59" 822-828, 1983. L'abaissement de la pression intracr&nienne sous I'action du mannitol par diminution du contenu hydrique cerebral ou extraction du LCR n'est pas prouve. Les auteurs avancent comme m6canisme possible la reduction du volume sanguin cerebral (VSC) consecutive a la vasoconstriction. L'experimentation est menee chez des chats (n=20), endormis (30 mg - kg -1 de penthobarbital), curarises (5 mg de gallamine) et en ventilation contrSlee Paco2 constante (environ 30 mmHg). PECO2 (capnographe) et Paco2 sont surveillees en continu. Un volet cr~nien permet la mesure du diametre arteriolaire pial et de la pression intracr&nienne; ces deux parametres sont correles a la viscosite sanguine avant et apres administration de 1 g - kg 1 de mannitol. Apres mannitol, la viscosite diminue jusqu'a - 2 3 % 10 min, avec un rebond de 10 % vers 75 min; le diametre vasculaire diminue de - 1 2 % en moyenne a 10 min, avec une reaugmentation de +12 % & 75 min. Le taux d'abaissement est identique a celui obtenu en hyperventilation jusqu'a une Paco~ de 19mmHg. La pression intracr~nienne apres mannitol baisse de - 2 8 % ( - 2 6 % en hyperventilation); a 75 min, elle montre un rebond de 40 %. Ainsi la correlation entre viScosite sanguine, diametre vasculaire et pression intracr&nienne apparaTt tres etroite. La vasoconstriction arteriolaire sous mannitol (1 g - kg 1) peut (~tre due a une action directe du produit sur le capillaire (non prouvee), a une vasoconstriction secondaire a un hypometabolisme (non demontre), & une augmentation de pression sanguine avec vasoconstriction par autoregulation myogenique reactionnelle (en fait, la faibie augmentation de la pression arterielle s'etale a la fois sur les temps de vasoconstriction et de vasodilatation cerebrale); la vasoconstriction pourrait enfin ~tre due & un effet sur Paco~, mais cette derniere augmente sous mannitol (par un effet de stimulation cardiaque), ce qui

est generateur de vasodilatation et non de vasoconstriction. Les auteurs proposent donc la baisse de viscosite sous mannitol comme cause de la vasoconstriction, selon le schema suivant: baisse initiale de la viscosite, qui entraTne une baisse des resistances et une augmentation passagere du debit sanguin cer6bral (DSC); celle-ci am61iore I'epuration des metabolites acides, d'ou vasoconstriction arteriolaire et retour a la normale du DSC (autoregulation m6tabolique) qui expliquent la baisse de la pression intracr~nienne. Ainsi, pour un VSC de 63 ml (60 % sur le secteur veineux et 40 % ou 25 ml sur le versant arteriel), une vasoconstriction de 12 % correspond a une reduction du VSC de 23 %, soit 5,8 ml pour le secteur arteriel. Un changement de volume de 1 ml pouvant a I'etat pathologique modifier la pression intracr~nienne de + 7 a + 8 mmHg, on comprend I'impact 6ventuel sur la pression intracr&nienne d'une reduction du VSC sous I'action du mannitol. Ce schema d'action du mannitol est Iogique dans la mesure ou le postulat de depart - - augmentation initiale de tres courte duree du debit sanguin cerebral - - est prouve, mais il suppose une autoregulation metabolique intacte... Dans le m6me esprit, les auteurs attribuent le rebond a une reascension de la viscosite sanguine ~ baisse du DSC --, acidose vasodilatation ~ hypertension intracr~nienne. Le schema propose : viscosite ~ DSC ~ metabolisme, est original dans la mesure ou I'on n'invoque plus d'hypothetiques transferts hydriques d'origine osmotique au travers d'une barriere hematocerebrale peu permeable I'eau. Une analyse precise et suivie des variations de la viscosite sanguine deviendrait alors un parametre precieux de surveillance sous mannitol. B. ROQUEFEUIL.