1LESNOUVELLES NlCHESTECHNOLOGlQUES1
Les biocapteurs ti petits pas Alliant e’lhnents biologiques et appareillage de mesure klectronique, les biocapteurs constituent un outil original d’analyse des concentrations en mole’cules dans diffbrents milieux. PAR ANNE-LAURE MONNIER Journaliste a Paris.
es biocapteurs, mini-appareils de mesure reposant sur la reconnaissance moleculaire, suscitent depuis 20 ans un grand interet, mais ne semblent pas connaitre le succes escomptt. 11s ne manquent pourtant pas d’applications potentielles : analyses sanguines ou urinaires dans le secteur medical, controle des pro&d& dans l’industrie alimentaire, ou encore mesure des polluants dans le secteur environnemental (v&r Biofutur [I9971 171,33-36). Le principe de base des biocapteurs repose sur la combinaison dun Cl& ment biologique (cellule, enzyme, etc.), dun convertisseur de signal et dun appareil tlectronique de mesure. L’Clement biologique, par exemple l’enzyme glucose oxydase, plongi dans un milieu tel que le sang, se lie a une molecule pour laquelle il a de l’affinite, ici le glucose. La reaction qui s’ensuit s’accompagne de l’imission d’un signal qui est converti par l’appareil de mesure en une valeur de concentration. L’interet majeur d’un biocapteur, par rapport a un systtme classique de mesure, est d’&tre tres selectif vis-avis de la substance h mesurer : les interactions biologiques antigtneanticorps, ou enzyme-substrat sont des liaisons hautement specifiques.
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l Las capteurs ataulactate
au gh~cose
C’est dans le secteur medical que l’on trouve le plus grand - et presque l’unique - succes commercial des biocapteurs : celui des biocapteurs de glucose, permettant de mesurer la glycemie (taux de glucose) dans le sang ou les urines. Du Glucometer de Bayer au Gluco Touch de Life Scan (Johnson & Johnson), en passant par le Glucotrend de Roche Diagnostics, on ne compte plus les firmes qui commercialisent des appareils d’autosurveillance de la glycemie destines aux diabetiques. Pierre Coulet, de l’universite Claude-Bernard (Lyon I, Villeurbanne) qui a participi au debut des an&es 1980 a la mise au point du ccglucoprocesseur >) de la societt franqaise Soleanacussel 94 BlOFUTLlR194
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Novembre1999
rachetee depuis par Radiometer Medical (Copenhague, Danemark) puis par la firme Danaher, et qui a pris le nom de Radiopleter Analytical (Villeurbanne) -, explique l’evolution de la fabrication de ces biocapteurs : e Pour des questions de rentabilitt, les premiers biocapteurs, comme celui du glucose sanguin, se devaient d’8tre rkutilisables Li maintes reprises. Depuis l’e’mergence du virus du sida, le cahier des charges a radicalement changt : on cherche surtout ci produire des biocapteurs h usage unique, pour biter toute contamination entre deux utilisateurs. Par ailleurs, une demande forte de bandeDe la taille d’un stylo, ces biocapteurs lettes ri usage unique s’est sont surtout utilis& en milieu hospitalier. de’veloppe’e chez les particuliers. * Les methodes de fabrication des biocapteurs a glucose ont done evolue : pas&es a eux : une douzaine sur les 24 actuell’echelle industrielle, elles s’appalement disponibles en France. rentent desormais a la serigraphie Parallelement a ces home tests i (screen-printing). Ainsi, les ilecusage unique, se sont developpes des trodes recoivent des depots succesappareils a usage rip&t destines au sifs de couches, dont l’une contient milieu hospitalier~ : le biocapteur, de l’enzyme specifique du glucose, la taille d’un stylo, Porte a son extrepuis sont decouples en pastilles, mite une pastille plaquee contre le qui seront placees sur les bandeditecteur. PlacCe dans un flux, la paslettes a usage unique utilisees par tille peut servir plusieurs fois avant les particuliers. d’@tre changee. De nouveaux appaCes appareils ont pour but de renreils sont commercialisis aujourseigner le patient sur la stabilite de d’hui, comme le capteur glucose/lacsa glycemie, eminemment fluctuantate de Radiometer Analytical, qui te, qui doit se situer dans une comprend un biocapteur pour gamme de valeurs allant de 0,7 a chaque metabolite sanguin, et per1,l g de glucose par litre de sang. met done d’effectuer toute une strie On tolere done de ces appareils 15 a de mesures biologiques sur un m&me 20 % d’imprtcision, puisque le but tchantillon de sang. recherchi est essentiellement de deceler les situations critiques dans l chccolat ou eitea 1 Dans le secteur agroalimentaire, les lesquelles le diabetique doit aller consulter. Cependant, en mars derbiocapteurs ont plus de difficultis a nier, l’bgence francaise de securite s’implanter : leur manque de precisanitaire des produits de Sante sion, constate dans les mesures de (AFSSAPS, ex-Agence du medicataux de glucose, constitue un obstacle ment) decidait, apres avoir reevalue a leur utilisation par les industriels. la precision de ces appareils porEn effet, la normalite d’un taux de tables, de suspendre la mise sur le sucre n’est plus une gamme de marche des plus anciens d’entre valeurs, mais une valeur bien definie,
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et les normes de fabrication europtennes ne tolerent pas plus de 3 % d’erreur sur le taux de sucre d’un yaourt ou d’un jus de fruit. S’ajoute h cela un probleme de reproductibilite des r&hats : pour parvenir a remplacer les lourds appareillages de mesure utilises sur les chaines de fabrication, les biocapteurs se doivent de donner une mesure exacte en une seuleutilisation. Un industriel ne prend generalement qu’une mesure, pour ne pas perdre de temps dans la chaine de fabrication. Certaines branches de I’industrie agroalimentaire utilisent d’ores et deja des biocapteurs, essentiellement pour la mesure des sucres (glucose, saccharose, fructose) : c’est le cas de la filiere chocolatiere, qui produit des chocolats alleges en sucres, et de I’industrie de la pomme de terre, plante dont le taux de sucres est un indicateur de maturite. Lorsqu’un lot de pommes de terre arrive a l’usine, la mesure du taux de glucose fournie par les biocapteurs permet d’orienter ces tubercules soit vers la chaine de fabrication des frites - qui ne toltrent pas trop de sucre car il brunit a la cuisson -, soit vers celle des purees. Mais comme le souligne Nabil El Murr, directeur de recherche a I’uni-
versite de Nantes, et auteur d’un brevet de fabrication d’electrodes de biocapteurs aujourd’hui commercialise par la societe britannique Gwent Sensor Ltd : ) La recherche se penche tgalement sur les biocapteurs des toxines alimentaires, fond& sur une detection immunologique, et qui allegeraient les tests actuellement pratiques par injection sur des souris. l Des biocapteurs vivants Les biocapteurs pourraient aussi beneficier a la protection de l’environnement, par exemple pour mesurer les polluants, essentiellement les fertilisants et les pesticides. Au niveau europeen, des laboratoires travaillant sur les biocapteurs desti-
nes a l’environnement se sont regroup& sous l’egide d’une structure de coordmation, Bioset, c&e en I 997. L’Cquipe d’Anne-Lise Btienne (Pcole normale superieure, Paris), par exemple, met au point des cyanobacteries pour evaluer la pollution de l’eau : ces organismes sont gedtiquement modifies pour produire une luminescence en presence de phosphate, d’azote et de fer, qu’elles utilisent comme nutriments. <
Sites Web l
Bioset
www.cranfield.ac.uk/ biotech/bioset.htm www.cranfield.ac.uk/ biotech/bioproj.htm l Australian Membrane and Biotechnology ResearCn Institute www.ambri.com.au/ institute/indexcontent.html l Entreprises ww.abbottdiagnostics. corn/systems-tests/ www.biomon.com/ biosenso.html www.lifescan.com wwv. medisense.co.uk/ wwwradiometeranalyticalcorn/ www.roche.com/ diagnostics/
Rhparer la moelle 6pinihe De nouvelles biotechnologies me’dicales donnent me hew d’espoir aux paraplkgiques. e fauteuil roulant sera-t-i1 bientot relegue au musee de l’histoire de la medecine ? C’est le but des entreprises de biotechnologie qui travaillent sur la reparation de la moelle Cpiniere, voie nerveuse logte dans la colonne vertebrale empruntee par les signaux tlectriques &hang& entre le cerveau et les muscles. Lorsqu’un choc violent est inflige aux vertebres, la moelle epiniere peut itre section&e, ce qui provoque la mort des neurones et la coupure des axones (les <>)qu’elle contient. Quelques jours plus tard, une caviti remplie de liquide, le cyst, s’est formee sur le lieu de la lesion. En Europe, p&s de 300 000 personnes sont paralysies suite a une lesion de la moelle tpiniere, le plus souvent apres un accident de voiture.
Jusqu’a maintenant, on ne disposait d’aucune therapie et la recherche portait surtout sur des methodes compensatrices. Plusieurs start-ups, comme Neuromedics, c&e en 1996 a Montpellier, ou Neuromotion Inc, d’Edmonton (Canada), se sont lan&es dans la conception de microstimulateurs chirurgicalement implantables au niveau des muscles. Grace aux recents progres de la neurobiologie cellulaire, une veritable reparation de la moelle k&e peut desormais Etre envisagee. La premiere approche vise B emp&her l’extension de la lesion dans les jours qui suivent l’accident, en utilisant des molecules bloquant la mort cellulaire par apoptose. Les grands groupes pharmaceutiques travaillent
dans cette direction, puisque toutes les pathologies neurodegeneratives impliquent un processus d’apoptose. Plus originale, CarboMed Inc, une firme fondee en 1990 a Brentwood (Tennessee, &tats-Unis), a montre qu’un agent inhibant la neovascularisation, produit normalement par les streptocoques, ralentit l’extension du cyst chez le rat (I). La seconde approche vise a stimuler la repousse des axones 1CsCs.Acorda Therapeutics, une firme basee i Hawthorne (New York, Btats-Unis) qui aspire a devenir le leader du march& de la reparation de la moelle, a ainsi engage le developpement preclinique de deux molecules : un anticorps monoclonal qui bloque l’action des inhibiteurs de la croissance axoBIOFUTUR 194
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PAR t’&COlAb CHEVAS~W
!w-LOUIS Journaliste 2 Montpellier.
f1)A.W. Wamil eta). il988) Proc. Nat/ Acad. Sci. USA 22, 13188-13192.