Lettres à la rédaction / Gynécologie Obstétrique & Fertilité 33 (2005) 361–366
Réponse de A. Agostini et B. Blanc à l’article de O. Le Dref et al.
Réponse de J.-H. Ravina à l’article de O. Le Dref et al.
Les fibromes utérins. Embolisation : pratiques actuelles.
Les fibromes utérins. Embolisation : pratiques actuelles. Gynecol Obstet Fertil 2004;32:1057-63
Gynecol Obstet Fertil 2004;32:1057-63
Il s’agit d’une mise au point très intéressante concernant les techniques et les résultats actuels de l’embolisation des artères utérines (EAU) dans le traitement des myomes. Les résultats de cette technique sont très prometteurs et semblent meilleurs que ceux obtenus avec la chirurgie. Il est regrettable qu’il n’existe à l’heure actuelle qu’une seule étude méthodologiquement acceptable comparant l’EAU et l’hystérectomie [1]. Les résultats de cette étude sont en faveur de l’EAU. Il serait souhaitable que des études similaires comparant EAU et myomectomie confirment les avantages de l’EAU. Ainsi, la place de l’EAU en cas de myome unique, par exemple, reste à déterminer. De même les résultats à long terme de l’EAU doivent être comparés à ceux de la myomectomie. Le principal problème de l’EAU est le devenir obstétrical des patientes traitées. Ce problème est abordée dans une revue exhaustive de la même équipe [2]. Le peu de données actuelles ne permet pas pour le moment de proposer l’EAU aux patientes qui désirent conserver leur fertilité [3].
RÉFÉRENCES [1]
Pinto I, Chimeno P, Romo A, Paul L, Haya J, de la Cal MA, et al. Uterine fibroids: uterine artery embolization versus abdominal hysterectomy for treatment a prospective, randomized, and controlled clinical trial. Radiology 2003;226:425–31.
[2]
Jacob D, Rafii A. L’embolisation des artères utérines dans le traitement des myomes utérins : état des lieux. Gynecol Obstet Fertil 2004;32:927–36.
[3]
ACOG Committee Opinion. Uterine artery embolization. Committee on Gynecologic Practice, American College of Obstetricians and Gynecologists. Obstet Gynecol 2004;103:403–4.
A. Agostini B. Blanc * Service de gynécologie–obstétrique, hôpital La Conception, 147, boulevard Baille, 13005 Marseille, France Adresse e-mail :
[email protected] (B. Blanc). Disponible sur Internet le 05 mai 2005 * Auteur correspondant. Gynécologie Obstétrique & Fertilité 33 (2005) 363 doi:10.1016/j.gyobfe.2005.04.014
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Lorsque j’ai adressé avec J.-J. Merland et al. notre « short report » au Lancet en 1995 [1], la réponse des deux reviewers a commencé par : on n’en a jamais entendu parlé. Quel chemin parcouru puisque cet article témoigne du développement mondial de la technique, comment ne pourrais-je pas m’en réjouir ! Cette importante revue de la littérature essentiellement anglo-américaine, souhaite faire le point de l’état de l’art, un objectif ambitieux quand il s’agit d’une technique récente et donc évolutive. Au plan technique les auteurs expliquent les progrès importants réalisés à partir de 1999 dans le choix des particules et la réduction de la zone embolisée limitée au strict territoire myomateux, ce qui a eu pour effet de faire disparaître une des complications rares mais particulièrement dommageable : la ménopause induite que nous préférons au terme de précoce (liée à l’âge 40 ans). Je n’insisterai pas plus sur l’aspect technique important mais un peu étranger au lectorat de la revue : les gynécologues. Précisons que dans des mains expertes la procédure d’embolisation dure 20 à 30 minutes et que le temps moyen d’irradiation est en ce qui concerne notre expérience [2] de huit minutes. C’est un geste simple et pratiquement sans complications d’ordre technique chez ces femmes jeunes aux vaisseaux normaux. Je limiterais mes commentaires à trois sujets : les indications, les complications et l’avenir de la méthode. Pour en comprendre les causes et les raisons, encore faut-il avoir une idée des conséquences d’une embolisation. L’obturation des vaisseaux nourriciers des fibromes induit une nécrose ischémique des fibromes visibles et de ceux qui ne le sont pas encore et qui ne sont pas accessibles au chirurgien, c’est en effet la seule explication possible à la rareté des récidives après embolisation réussie (1 % dans notre expérience de près de 1000 embolisations). Cette ischémie est suivie d’une réaction inflammatoire forte et proportionnelle au volume de la nécrose, à l’origine du syndrome dit de postembolisation très proche de la nécrobiose aseptique. Elle est sans traduction clinique en cas d’embolisation de myomes de faible volume. L’expérience montre que trois types de fibromes sont susceptibles d’induire des complications : les myomes volumineux de plus de 60/70 mm de diamètre (risque de syndrome post-embolisation), les myomes sous-séreux importants à forte expansion extérieure, non recouverts d’un myomètre protecteur, à l’origine d’adhérences intestinales et ovarotubaires, enfin les fibromes sous-muqueux, pédiculés ou à localisation intracavitaire prédominante, dont l’expulsion quasi certaine ouvre la porte à l’infection. Les indications découlent de ce constat et de la volonté de s’approcher du but toujours recherché et jamais atteint,
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d’un traitement qui ne connaît que le succès et ignore les effets secondaires. Il y a donc deux types d’embolisation. Celle qui est une aide à la chirurgie et s’adresse à des situations complexes d’utérus volumineux déformés par des fibromes de volume important. Cette association embolisation chirurgie permet d’éviter de nombreuses hystérectomies, mais ces traitements successifs doivent s’inscrire dans un délai très court si l’on ne veut pas s’exposer à la survenue des complications que nous venons de signaler. Différer la chirurgie de plusieurs semaines me paraît, à la lumière de mon expérience, être un très mauvais choix. L’embolisation isolée et curative se trouve à mes yeux indiquée chaque fois que le volume des fibromes est inférieur à 60 cc (50 mm de diamètre). Les résultats que nous avons obtenus [2] sont si remarquables qu’ils ouvrent des horizons thérapeutiques nouveaux qui seront exposés en conclusion. Quant aux fibromes pédiculés sous-séreux de très petits volumes ils peuvent être négligés ainsi que les sous-muqueux préalablement traités par résection lorsqu’ils s’inscrivent dans le cadre des utérus polymyomateux. Tous les auteurs s’accordent sur le faible taux de complications induites par ce nouveau traitement peu invasif puisqu’il ne nécessite ni anesthésie générale, ni ouverture de l’abdomen, ni incision du myomètre. En ce qui concerne les aménorrhées induites par l’embolisation elles procèdent de physiopathologies différentes. Celles d’origine utérine transitoires ou définitives sont la conséquence de la nécrose de la muqueuse soit liée à l’embolisation elle-même (utérus multimyomateux à localisation sous-muqueuse), soit secondaire à l’infection au cours de l’expulsion d’un fibrome. Elles sont devenues très rares (1 %) mais n’ont pas disparu à l’inverse des ménopauses induites. L’analyse théorique présentée par les auteurs est logique et plausible, elle ne correspond pas en un point à ce que nous avons constaté. À l’occasion de chirurgie post-embolisation, nous avons (autorisés par nos patientes) effectué des biopsies ovariennes au niveau du hile. Nous n’avons jamais retrouvé de particules (12 cas), ce qui montre que l’éventualité de ménopauses par embolisation directe des ovaires est une éventualité rare, mais certaine, puisque opérant plusieurs années plus tard et pour une pathologie différente une de nos premières embolisations (1993), l’examen des ovaires a révélé la présence de particules. Depuis fin 1999 nous n’avons plus constaté de ménopauses précoces [2]. La dernière partie de cette lettre sera donc consacrée à l’avenir. Il devient de plus en plus évident que l’embolisation des fibromes utérins, technique mini-invasive efficace et sûre aux avantages multiples et indiscutables sur la chirurgie, ouvre une ère nouvelle dans le traitement de cette pathologie fréquente. Elle remet en cause le bien-fondé de nos pratiques actuelles fondées sur la règle de ne traiter que les fibromes symptomatiques, ce qui revient à traiter tôt ceux qui ont une expression clinique précoce et à traiter tard ceux dont le volume est à l’origine de la symptomatologie. En clair, les femmes qui souffrent tôt de ménorragies conserveront leur utérus grâce à l’embolisation ; quant à celles dont
les fibromes seront éloignés de la cavité, elles en connaîtront une manifestation tardive par des troubles de compression dus à leur volume important, à la surprise des patientes et la confusion des gynécologues, situation qui n’aura d’autre solution que la chirurgie. Comme tous les fibromes passent par une étape où ils ont un faible volume, que l’embolisation peut à ce stade les guérir sans risques il ne faut pas être doué d’un grand sens de l’anticipation pour comprendre que cette technique va offrir pour la première fois une possibilité de traitement préventif. Pourquoi attendre qu’une situation se complique quand on peut en assurer la prévention ! Nous imaginons les critiques et les cris d’effroi des plus conservateurs de nos collègues : « c’est la porte ouverte à tous les traitements inutiles et donc dangereux ». Nous pouvons les rassurer car ce n’est pas parce qu’un fibrome sera diagnostiqué qu’il devra être traité, mais sa tendance évolutive pourra être mesurée et si sa croissance est rapide traité. Demain le rôle du gynécologue sera de détecter tôt les femmes porteuses de fibromes par des échographies régulières tous les trois à quatre ans et de proposer à ces patientes en fonction de leur âge, du temps de doublement du ou des fibromes, soit de se limiter à une surveillance soit de les traiter par un moyen simple : l’embolisation. Beaucoup penseront qu’il s’agit d’une extrapolation hasardeuse. Nous pensons que cette révolution est inéluctable, et sommes confiants dans le verdict du temps.
RÉFÉRENCES [1] [2]
Ravina JH, et al. Arterial embolisation to treat uterine myomata. Lancet 1995;346:671–2. Ravina JH, et al. Traitement par embolisation des léiomyomes utérins de volume modéré. Bull Acad NatleMéde 2004;188:1173–83 [N°7].
J.-H. Ravina 81, rue d’Amsterdam, 75008 Paris, France Adresse e-mail :
[email protected] (J.-H. Ravina). Disponible sur Internet le 05 mai 2005 Gynécologie Obstétrique & Fertilité 33 (2005) 363–364 doi:10.1016/j.gyobfe.2005.04.004
Réponse de H. Fernandez à l’article de O. Le Dref et al. Les fibromes utérins. Embolisation : pratiques actuelles. Gynecol Obstet Fertil 2004;32:1057–63
Le Dref et al. font une excellente mise au point de synthèse sur les pratiques actuelles de l’embolisation dans le traitement des fibromes.