Gynécologie Obstétrique & Fertilité 32 (2004) 96–101
LETTRES À LA RÉDACTION Réponse de E. Aubény à l’éditorial de I. Nisand Comment diminuer le nombre des IVG en France ?> Gynécol Obstét Fertil 2003 ; 31 : 499–503 Tout d’abord, je voudrais saluer le courage d’Israël Nisand qui aborde, dans cet article, le sujet si peu traité dans les congrès et dans les journaux de gynécologie–obstétrique de l’IVG, bien que cet acte soit pratiqué couramment dans notre pays. Israël Nisand analyse avec beaucoup de compétence et d’une manière très intéressante l’épidémiologie en France des IVG. Mais, avec lui, on ne peut que regretter qu’il ne puisse s’appuyer que sur des statistiques peu récentes ; la dernière publication détaillée sur les IVG remonte à 1998 [1]. Comment, dans ces conditions, connaître les résultats de tant d’efforts déployés dans ce domaine et savoir dans quel sens il faut les poursuivre ? Les propositions faites par Israël Nisand pour diminuer le nombre des IVG recueillent l’assentiment de tous : remboursement de toutes les méthodes de contraception, allègement de la prescription médicale, en expliquant aux femmes la part due à la surveillance de la contraception et celle relevant du dépistage, information des adolescentes ; j’ajouterai information de toutes les femmes, en particulier des femmes de 18 à 25 ans qui ont le taux le plus important d’IVG et qui sont souvent mal informées. Cependant, les propositions faites par Israël Nisand me paraîtraient devoir être complétées par au moins une proposition découlant du fameux « Paradoxe Français », si bien analysé par Nathalie Bajos [2]. Les femmes françaises pratiquent la contraception moderne (63 % utilisent les pilules, 23 % ont recours aux stérilets), et pourtant le taux d’avortement en France est relativement stable à un taux important (15/1000). Elles font donc des erreurs dans leurs pratiques contraceptives : • erreurs dues à une mauvaise connaissance du mode d’action des contraceptifs (ex : arrêt lors de métrorragies sous pilules estroprogestatives) ; • erreurs dues à une contraception mal adaptée à leur mode de vie, à leur psychologie. Les équipes médicales et paramédicales devraient pouvoir aider les femmes à éviter ces erreurs en leur expliquant le mode d’action de leurs méthodes contraceptives, en les aidant à choisir une méthode adaptée à leur vie et à leur psychologie ; bref, en faisant que la femme choisisse une contraception qui lui convienne afin qu’elle la fasse sienne, qu’elle l’adopte. © 2003 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
C’est la meilleure garantie d’une bonne observance et donc d’une bonne efficacité, même si celle-ci, à nous médecins, ne nous paraît pas parfaite. Ce temps d’écoute des patientes lors de la prescription des contraceptifs me paraît extrêmement important pour faire diminuer le nombre d’IVG. C’est notre vœu à tous et en particulier à I. Nisand qui a le mérite dans ce texte de nous donner des pistes pour essayer d’y parvenir.
RÉFÉRENCES [1]
[2]
Leridon H, Oustry P, Bajos N, l’équipe COCON. La médicalisation croissante de la contraception en France. Population et Sociétés juillet–août 2002;381:1–4. Bajos N, Leridon H, Goulard H, Oustry P, Jof-Spira, the COCON Group. Contraception: from accessibility to efficiency. Human Reproduction 2003;18(5):994–9.
E. Aubény 10, rue du Docteur-Lancereaux, 75008 Paris, France Adresse e-mail :
[email protected] (E. Aubény). >
doi of original article 10.1016/S1297-9589(03)00121-8. Gynécologie Obstétrique & Fertilité 32 (2004) 96 doi:10.1016/j.gyobfe.2003.11.007
Réponse de H. Fernandez à l’article de J.-H. Ravina et al. Embolisation des fibromes utérins : résultats sur 454 cas.> Gynécol Obstét Fertil 2003 ; 31 : 597-605 Ravina et al. [1] rapportent les résultats d’une série rétrospective d’embolisation de fibrome chez 454 patientes ce qui représente à ce jour une des séries les plus importantes publiées. L’objectif de ce travail était de déterminer l’efficacité de l’embolisation et la conclusion est : « l’embolisation des artères utérines offre pour la première fois une réelle alternative à l’hystérectomie ». Si je suis amené à réagir à cet article ce n’est pas en opposant à la technique d’embolisation qui probablement va trouver sa place dans notre arsenal thérapeutique et en particulier comme le notent les auteurs chez des patientes présentant des pathologies associées type ASA III ou IV (38 patientes dans leur série) ou des patientes ayant déjà été
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opérées de fibrome et dont l’hystérectomie n’est probablement pas la solution surtout si elles sont jeunes (89 patientes dans la série publiée). Cependant, je réagis car il existe des règles pour valider des nouvelles techniques thérapeutiques qui tiennent compte de la médecine fondée sur les preuves. Cette evidence based medicine des Anglo-Saxons n’est ni un phénomène de mode, ni un jeu intellectuel mais, la seule façon de pouvoir publier des résultats qui se doivent d’être crédibles pour valider nos apparentes certitudes et, toute nouveauté qu’elle soit médicale ou chirurgicale doit être soumise à un essai randomisé. Ainsi, si l’on se réfère aux critères de cette médecine fondée sur les preuves, l’article de Ravina et al. a un niveau de recommandation classé C pour une échelle de A à D et un niveau de certitude à 4 pour une échelle internationale de 1 à 5. Malheureusement, cette problématique de résultats des données par rapport à son interprétation objective n’est pas discutée dans cet article. En effet, lorsqu’on observe que dans 62 % des cas, il y a entre un et trois fibromes et que, dans 60 % des cas, le diamètre des fibromes est ≤ 60 mm, on peut s’étonner de lire dans la conclusion de cet article que l’embolisation est une alternative à l’hystérectomie. En effet, je ne vois pas comment dans ces situations, il existe une indication d’hystérectomie, au mieux une indication de traitement chirurgical conservateur que celui-ci soit fait par résection hystéroscopique, cœlioscopie ou laparotomie. Hors, ces points ne sont pas discutés et seul, un essai thérapeutique randomisé en stratifiant les patientes sur leurs symptômes, sur le nombre des fibromes et leur taille, pourrait répondre réellement à la question sur la place réelle de l’embolisation dans notre nouvelle stratégie de prise en charge des fibromes symptomatiques. De plus, des conclusions artificiellement optimisées vont amener un développement de la technique et Spies [2] a montré que le taux de complications est inversement proportionnel à l’expérience de l’opérateur. Il faut donc pouvoir maîtriser totalement la place réelle de l’embolisation pour rendre cette technique réalisable par tous les radiologues. Broder et al. [3] ont étudié à long terme le résultat entre myomectomie et embolisation. Les auteurs montrent que les patientes embolisées ont significativement plus de traitement invasif dans un délai de trois à cinq ans après la procédure. Ceci amène donc à discuter de la place réelle de l’embolisation chez les femmes jeunes, que le traitement du fibrome ait été indiqué pour infertilité ou pour la persistance d’une symptomatologie clinique amenant à proposer un traitement chirurgical. Le taux de complications observé dans toutes les séries est toujours inférieur à 10 % [4]. Mais, si le taux d’hystérectomie est faible et le taux d’aménorrhée définitive un peu plus fréquemment observé chez des femmes au-delà de 43 ans, on ne peut omettre leur existence car, dans leurs indications, les auteurs manquent notablement de prudence chez les femmes jeunes.
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Le nombre de grossesse après embolisation publié est encore faible et Goldberg [5] retrouve un taux de césarienne de 58 % identique à la série de Ravina [1] avec un taux de prématurité élevé de 28 %. Sur ce dernier point l’article de Ravina est flou car son taux d’accouchement prématuré dans sa série de 454 patientes est plus faible que celui annoncé dans la série précédente de 286 patientes [6]. Où est l’erreur ? Enfin, il faut discuter du taux d’hémorragie de la délivrance dont la fréquence semble notamment augmenté après embolisation pour fibrome. En conclusion, l’embolisation pourrait s’adresser aux myomes symptomatiques interstitiels chez des patientes ne souhaitant pas être opérées ou à risque chirurgical voire de principe. Des indications ainsi définies limitent la place de l’embolisation dans la stratégie thérapeutique des alternatives à la myomectomie. On peut donc s’interroger si l’embolisation est une alternative à la myomectomie. C’est sûrement le cas, si le myome est symptomatique chez une femme sans désir de grossesse et, dans ce cas, existe-t-il réellement une place à un traitement conservateur ? Actuellement, si un désir de grossesse persiste, ce qui est de plus en plus fréquent compte tenu de l’âge tardif des grossesses, il n’existe pas de données claires dans la littérature pour accepter l’embolisation sans qu’une vraie étude multicentrique randomisée puisse nous donner des vrais éléments d’information pour nos patientes.
RÉFÉRENCES [1]
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[4]
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H. Fernandez Service de gynécologie-obstétrique, hôpital Antoine-Béclère (AP-HP), 157, rue de la porte-de-Trivaux, 92141 Clamart cedex, France Adresse e-mail :
[email protected] (H. Fernandez). >
doi of original article 10.1016/S1297-9589(03)00188-7. Gynécologie Obstétrique & Fertilité 32 (2004) 96–97 doi:10.1016/j.gyobfe.2003.11.010