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[3] Bouzinac A, Delbos A, Rontes O. Le repe´rage e´chographique pre´alable de la premie`re coˆte permet de pre´ciser le niveau de re´alisation du bloc paraverte´bral thoracique. Ann Fr Anesth Reanim 2012;31:571–2. [4] Marhofer D, Marhofer P, Kettner SC, Fleischmann E, Prayer D, Schernthaner M, et al. Magnetic resonance imaging analysis of the spread of local anesthetic solution after ultrasound-guided lateral thoracic paravertebral blockade: a volunteer study. Anesthesiology 2013;118:1106–12. [5] Porzionato A, Macchi V, Stecco C, Loukas M, Tubbs RS, De Caro R. Surgical anatomy of the pectoral nerves and the pectoral musculature. Clin Anat 2012;25:559–75. ˜ oz Gonza´lez F, [6] Sopena-Zubiria LA, Ferna´ndez-Mere´ LA, Valde´s Arias C, Mun ˜ ez Erna´ndez C. Thoracic paravertebral block compared Sa´nchez Asheras J, Iba´n to thoracic paravertebral block plus pectoral nerve block in reconstructive breast surgery. Rev Esp Anestesiol Reanim 2012;59:12–7. [7] Dı´az A, Ledesma B, Gilsanz F. Thoracic paravertebral block plus pectoral nerve block for mastectomy in a patient with advanced amyotrophic lateral sclerosis. Rev Esp Anestesiol Reanim 2014;61:172–3.
A. Bouzinac*, J.-J. Tournier, A. Delbos Service d’anesthe´sie, clinique Me´dipoˆle Garonne, 45, rue de Gironis, 31100 Toulouse, France J.-E. Be´rot Service de chirurgie gyne´cologique, clinique Me´dipoˆle Garonne, 45, rue de Gironis, 31100 Toulouse, France *Auteur correspondant Adresse e-mail :
[email protected] (A. Bouzinac) Disponible sur Internet le 2 octobre 2014 http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2014.06.011
Lidocaı¨ne intraveineuse : une utilisation croissante, mais pourtant hors AMM Intravenous lidocaine: An increasing but unauthorized prescription
I N F O A R T I C L E
Mots cle´s : Lidocaı¨ne Re´habilitation pre´coce postope´ratoire Se´curite´ AMM Keywords: Lidocaine Rapid postoperative rehabilitation Security Marketing authorization
L’administration intraveineuse de lidocaı¨ne a e´te´ utilise´e dans la prise en charge des pancre´atites aigue¨s et est propose´e pour pre´venir la douleur lie´e a` l’injection de propofol [1]. La lidocaı¨ne connaıˆt actuellement un regain d’inte´reˆt dans le cadre de la re´habilitation pre´coce postope´ratoire. En effet, de nombreux effets be´ne´fiques de l’administration intraveineuse de lidocaı¨ne ont e´te´ mis en e´vidence : proprie´te´s anti-inflammatoires [2], re´duction de la douleur et de la consommation de morphiniques en postope´ratoire, notamment en chirurgie digestive par voie laparoscopique [3] ou laparotomique [4], mais e´galement dans d’autres chirurgies, par exemple en chirurgie urologique [5]. Il a e´galement e´te´ montre´ des be´ne´fices en termes de re´duction du de´lai avant la reprise du transit [6] et de dure´e de se´jour hospitalier [7]. Plusieurs e´tudes ont par ailleurs montre´ que les taux plasmatiques de lidocaı¨ne apre`s administration IV sont infe´rieurs au seuil de toxicite´ [3], et ce malgre´ des perfusions prolonge´es, jusqu’a` 24 h [3].
A` l’occasion d’un projet d’e´tude portant l’administration intraveineuse de lidocaı¨ne, nous avons e´te´ confronte´s au proble`me du choix du produit. En effet, la lidocaı¨ne est commercialise´e en France sous deux formes : d’une part, le chlorhydrate de lidocaı¨ne 2 % ou 5 % (Xylocard1) du laboratoire AstraZeneca, ayant l’autorisation de mise sur le marche´ (AMM) pour une administration IV, mais seulement dans le cadre du traitement et de la pre´vention des troubles du rythme ventriculaire menac¸ant le pronostic vital, notamment a` la phase aigue¨ de l’infarctus du myocarde ; d’autre part, le chlorhydrate de lidocaı¨ne 1 % ou 2 % du laboratoire Aguettant, destine´ a` l’anesthe´sie par infiltration et l’anesthe´sie locore´gionale. Son utilisation par voie intraveineuse est formellement contre-indique´e, comme en atteste le re´sume´ des caracte´ristiques du produit (RCP) fourni par le laboratoire, ainsi que la mention « ne pas injecter en IV » pre´sente sur les flacons. Or il n’existe aucune diffe´rence entre les excipients de ces deux spe´cialite´s pharmaceutiques, qui pourrait justifier que la seconde soit contre-indique´e en IV. De plus, quel que soit le produit utilise´, leur administration dans le cadre de la re´duction des douleurs postope´ratoires et de la re´habilitation pre´coce se fait donc hors AMM. Nous avons donc re´alise´ un audit aupre`s des services de chirurgie digestive des CHU de France me´tropolitaine afin de faire un e´tat des lieux de l’utilisation de la lidocaı¨ne dans cette indication, et plus particulie`rement des produits utilise´s. Cette enqueˆte de pratique, re´alise´e par sondage te´le´phonique aupre`s des me´decins anesthe´sistes-re´animateurs et internes de ces services, a mis en e´vidence que parmi les 44 CHU de France me´tropolitaine interroge´s, 28 (64 %) utilisent de la lidocaı¨ne par voie IV en chirurgie digestive a` vise´e antalgique et de re´habilitation pre´coce. Parmi ces 28 centres, 19 (68 %) utilisent de la lidocaı¨ne 1 ou 2 % Aguettant, 7 (25 %) utilisent du Xylocard1 a` 2 ou 5 % et 2 centres (7 %) utilisent les deux produits indiffe´remment. Les protocoles utilise´s sont extreˆmement variables d’un CHU a` l’autre. Le plus souvent, l’administration consiste en un bolus de 1,5 mg/kg a` l’induction suivi d’une perfusion continue a` la dose de 2 mg/kg/h en perope´ratoire puis 1,33 mg/kg/h pendant la dure´e de se´jour en SSPI voire pendant 24–48 h selon les possibilite´s de surveillance postope´ratoires de chaque e´tablissement. Dans un grand nombre de cas, la lidocaı¨ne est utilise´e en cas de contreindication ou d’e´chec de re´alisation d’une analge´sie pe´ridurale. Tre`s peu de complications ont e´te´ rapporte´es, les trois principales e´tant d’ordre neurologique : signes neurologiques subjectifs et un cas de convulsions suite a` un bolus involontaire de lidocaı¨ne par absence de valve antireflux. A` ce jour, de nombreuses e´tudes cliniques attestent de l’efficacite´ et de la se´curite´ de l’administration de lidocaı¨ne par voie IV lorsque les conditions et modalite´s d’administration sont respecte´es. Or il semble que l’industrie pharmaceutique n’ait pas suivi ces progre`s scientifiques en termes d’AMM, mettant les praticiens dans une situation de´licate sur le plan me´dico-le´gal et pouvant porter pre´judice a` la re´alisation d’e´tudes cliniques sur l’utilisation d’un me´dicament en dehors de son AMM, voire meˆme d’une manie`re formellement contre-indique´e dans la RCP du produit. Un positionnement des socie´te´s savantes permettrait-il de faire e´voluer les choses ? ˆ ts De´claration d’inte´re Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article.
Lettres a` la re´daction / Annales Franc¸aises d’Anesthe´sie et de Re´animation 33 (2014) 548–553
Re´fe´rences [1] Jalota L, Kalira V, George E, Shi YY, Hornuss C, Radke O, et al. Prevention of pain on injection of propofol: systematic review and meta-analysis. BMJ 2011;342:d1110. [2] Hollmann MW, Durieux ME. Local anesthetics and the inflammatory response: a new therapeutic indication? Anesthesiology 2000;93:858–75. [3] Kaba A, Laurent SR, Detroz BJ, Sessler DI, Durieux ME, Lamy ML, et al. Intravenous lidocaine infusion facilitates acute rehabilitation after laparoscopic colectomy. Anesthesiology 2007;106:11–8 [discussion 5–6]. [4] Cassuto J, Wallin G, Hogstrom S, Faxen A, Rimback G. Inhibition of postoperative pain by continuous low-dose intravenous infusion of lidocaine. Anesth Analg 1985;64:971–4. [5] Koppert W, Weigand M, Neumann F, Sittl R, Schuettler Jr, Schmelz M, et al. Perioperative intravenous lidocaine has preventive effects on postoperative pain and morphine consumption after major abdominal surgery. Anesth Analg 2004;98:1050–5. [6] Marret E, Rolin M, Beaussier M, Bonnet F. Meta-analysis of intravenous lidocaine and postoperative recovery after abdominal surgery. Br J Surg 2008;95: 1331–8. [7] Herroeder S, Pecher S, Schonherr ME, Kaulitz G, Hahnenkamp K, Friess H, et al. Systemic lidocaine shortens length of hospital stay after colorectal surgery: a double-blinded, randomized, placebo-controlled trial. Ann Surg 2007;246: 192–200.
M. Mure-Zamparini*, A.-L. Fiant, T. Filipov, F. Flais, F. Fobe, J.-L. Hanouz Poˆle anesthe´sie-re´animations, Samu, Smur, CHU de Caen, avenue de la Coˆte de Nacre, 14000 Caen, France *Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (M. Mure-Zamparini).
Disponible sur Internet le 2 octobre 2014 http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2014.06.010
Syste`me de boucle ferme´e pour l’optimisation he´modynamique perope´ratoire : l’anesthe´sie a encore a` apprendre de l’ae´ronautique Closed loop goal directed fluid therapy: Anesthesia still has a lot to learn from aviation I N F O A R T I C L E
Mots cle´s : Boucle ferme´e Automatisation Biais cognitifs Keywords: Closed loop Automation Cognitive bias
Nous avons lu avec inte´reˆt le travail de Rinehart et al. [1] concernant l’utilisation d’une boucle ferme´e pour l’optimisation he´modynamique perope´ratoire, ainsi que l’e´ditorial y faisant re´fe´rence [2]. Celui-ci soulevait entres autres les de´licats proble`mes pose´s par toute boucle ferme´e : la fiabilite´ du parame`tre de re´troaction, et la place de l’ope´rateur humain, place fondamentale en particulier en cas de de´faillance du premier. L’anesthe´sie, qui a de´ja` tire´ des lec¸ons inestimables du mode`le ae´ronautique, devrait sans doute pour cette proble´matique spe´cifique continuer a` puiser dans celui-ci afin de re´pondre en partie a` ces proble`mes, ou au moins de sensibiliser tous les acteurs a` leur existence. Ce processus DOIs des articles originaux: http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2013.11.016, http://dx.doi.org/10.1016/j.annfar.2014.01.010
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est de´ja` de´bute´ puisque des notions de psychologie cognitive initialement applique´es a` l’aviation ont montre´ leur validite´ en anesthe´sie [3]. Depuis plusieurs anne´es, l’automatisation des cockpits civils et militaires a montre´ une efficacite´ inde´niable. Mais, loin de re´soudre tous les proble`mes, ceux-ci ont e´te´ en quelque sorte de´place´s. Le risque est en effet re´el (et de´crit a` de nombreuses reprises) de survenue de biais cognitifs particuliers et d’alte´ration de la situation awareness [4], voire pire, de diminution de la compe´tence (ou de retard a` sa mise en œuvre) lie´s a` l’automatisation, en cas de de´faillance de celle-ci [5], avec les conse´quences ne´gatives que l’on imagine. Ce d’autant que l’automatisation du processus conside´re´ est importante [6]. Certes, « les patients ne sont pas des avions et les docteurs ne sont pas des pilotes » [7], mais pilotes comme me´decins sont simplement humains, et, du fait de l’automatisation, seront soumis aux meˆmes ale´as inhe´rents a` la structure et au fonctionnement du cerveau pre´ce´demment e´voque´s. Ceci pourrait engendrer de nouvelles menaces potentielles pour la se´curite´ des patients. Sans nier l’inte´reˆt et les progre`s potentiels de ces dispositifs, car des boucles bien conc¸ues vont sans doute apporter a` la pratique de l’anesthe´sie ce qu’elles ont apporte´ en ae´ronautique et bien d’autres domaines, force est toutefois de constater que nous devons eˆtre attentifs a` ne pas tomber dans des e´cueils que d’autres ont subi et a` capitaliser sur l’expe´rience et les lec¸ons de´ja` apprises par ailleurs. Enfin, comment envisager que l’ope´ rateur humain de´tecte efficacement la de´faillance ou la non-validite´ du parame`tre de re´troaction de la boucle, et donc reprenne la main, alors meˆ me que ce parame`tre est souvent partiellement compris et mal utilise´ dans la pratique quotidienne ? Paradoxalement, alors meˆ me que la boucle peut assurer une diminution de la charge de travail et de la charge cognitive des cliniciens, son imple´mentation ne´cessitera une connaissance parfaite des parame` tres de re´troaction et de leurs limites, afin d’assurer une se´ curite´ optimale en cas de de´faillance. Une pe´ dagogie renforce´ e sera donc de mise si l’on envisage la diffusion de ces techniques. Ces parame`tres de re´troaction, de´ja` utilise´s en pratique courante comme indicateurs de l’e´tat physiologique des patients et guidant (pas seuls) la conduite a` tenir, tels les indices dynamiques de pre´charge-de´pendance, ne sont pas parfaits, et cela pourrait constituer une chance : ils doivent forcer les cliniciens a` continuer a` inte´grer d’autres parame`tres dans leur de´cision sous peine de graves erreurs d’appre´ciation. Ce constat restera valable lorsque ces indices seront utilise´s dans des syste`mes de boucle en pratique quotidienne. De´claration d’inte´reˆts Les auteurs de´clarent ne pas avoir de conflits d’inte´reˆts en relation avec cet article. Re´fe´rences [1] Rinehart J, Le Manach Y, Douirir H, Lee C, Lilot M, Canales C, et al. First closedloop goal directed fluid therapy during surgery: a pilot study. Ann Fr Anesth Reanim 2014;33:e35–41. [2] Futier E, Lefrant JY. Syste`me de boucle ferme´e pour l’optimisation he´modynamique perope´ratoire : l’anesthe´siste doit rester aux manettes. Ann Fr Anesth Reanim 2014;33:151–2. [3] Stiegler MP, Neelankavil JP, Canales C, Dhillon A. Cognitive errors detected in anaesthesiology: a literature review and pilot study. Br J Anaesth 2012;108:229–35. [4] Schulz CM, Endsley MR, Kors EF, Gelb AW, Wagner KJ. Situation awareness in anesthesia: concept and research. Anesthesiology 2013;118:729–42. [5] Cummings M. Display design in the F/A 18 Hornet. Ergonomics in design. Fall 2003;11:16–19, http://dx.doi.org/10.1177/106480460301100405.