L’imagerie des prothèses de hanche : complications communes et spécifiques des différents couples de frottements

L’imagerie des prothèses de hanche : complications communes et spécifiques des différents couples de frottements

Journal d'imagerie diagnostique et interventionnelle 2020;3:47–66 Mise au point L'imagerie des prothèses de hanche : complications communes et spéci...

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Journal d'imagerie diagnostique et interventionnelle 2020;3:47–66

Mise au point

L'imagerie des prothèses de hanche : complications communes et spécifiques des différents couples de frottements Imaging of hip arthroplasty: Common and specific complications of different bearing couples C. Pelissou a A. Miquel a C. Phan a F. Paycha b A. Sautet c L. Arrivé a

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Service de radiologie, CHU de Saint-Antoine, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75012 Paris, France b Service de médecine nucléaire, CHU de Lariboisière, 2, rue Amboise-Paré, 75010 Paris, France c Service de chirurgie orthopédique, CHU de SaintAntoine, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75012 Paris, France Reçu le 27 juillet 2019 ; accepté le 4 octobre 2019 Disponible en ligne sur ScienceDirect le 7 janvier 2020

RÉSUMÉ

MOTS CLÉS

Introduction. – Actuellement, la durée de vie d'une prothèse totale de hanche (PTH) est de 15 à 20 ans. Les complications menant à une reprise chirurgicale sont par ordre de fréquence le descellement aseptique, la luxation, la fracture périprothétique, l'usure, les ostéolyses, le descellement septique, les douleurs et la fracture de l'implant. La fréquence de ces complications varie en fonction du couple de frottement utilisé. Un couple de frottement est défini par les matériaux des deux pièces de la prothèse qui entrent en contact l'une avec l'autre. Données récentes. – Pour augmenter la durée de vie des PTH et diminuer le risque de complication, différents couples de frottement ont été développés : métal-polyéthylène, céramique-polyéthylène, céramique-céramique et métal-métal. Cette mise au point présente : les différents types de prothèses actuellement utilisées ; les modalités d'imagerie des prothèses ; les complications les plus fréquentes communes à tous les couples de frottement ; les complications spécifiques à certains couples de frottement : l'usure du polyéthylène et la luxation intraprothétique de l'insert de polyéthylène pour les prothèses métal-polyéthylène et céramique-polyéthylène, la métallose et les pseudotumeurs pour les prothèses métal-métal, les fractures de tête ou d'insert en céramique et le « squeeking » pour les prothèses utilisant de la céramique. Conclusion. – La radiographie reste l'examen de routine dans la surveillance des PTH, mais le scanner est devenu la technique de référence en cas de PTH douloureuse, car il est plus performant pour l'analyse des ostéolyses périprothétiques, des fractures infraradiologiques, et pour le calcul des versions acétabulaire et fémorale. L'IRM est utile pour l'analyse des parties molles notamment en cas de pseudotumeur, l'échographie pour les conflits psoas-cupule et la ponction des collections périprothétiques, et enfin l'arthrographie pour le recueil de liquide articulaire en cas de descellement.

Prothèse de hanche Couple de frottement Complications

© 2019 Société française de radiologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDS Total hip arthroplasty Bearing couples Complications

Auteur correspondant. C. Pelissou, Service de radiologie, CHU de Saint-Antoine, 184, rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75012 Paris, France. Adresse e-mail : [email protected]

https://doi.org/10.1016/j.jidi.2019.10.002 © 2019 Société française de radiologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 47

C. Pelissou et al.

Mise au point SUMMARY

Introduction. – Total hip arthroplasty (THA) has a survivorship of 15–20 years. Complications leading to surgical revision are, in order of frequency: aseptic loosening, dislocation, periprosthetic fracture, wear, osteolysis, septic loosening, pain and implant fracture. The frequency of these complications depends on the bearing couples used. A bearing couple is defined by the materials of the two parts of the prosthesis that come into contact with each other. Recent findings. – To improve durability of the THA, different bearing couples have been developed: metal-on-polyethylene, ceramic-on-polyethylene, ceramic-on-ceramic and metal-on-metal. This update presents: the different types of arthroplasty; imaging modalities of arthroplasty; the most common complications common to all the bearing couples; the complications specific to certain bearing couples, in particular wear of polyethylene and intraprosthetic dislocation of polyethylene implant for metal-onpolyethylene and ceramic-on-polyethylene arthroplasty, pseudotumours for metal-on-metal arthroplasty, and ceramic fractures (head or insert) and squeeking for arthroplasty using ceramic. Conclusion. – X-ray remains the routine examination for THA monitoring, but it will often be necessary to use a CT scan for a better analysis of periprosthetic osteolysis, infra-radiological fractures, and for calculating acetabular and femoral versions. MRI is useful for soft tissue analysis (especially in the case of pseudotumour), ultrasound for psoas-cupular conflicts and puncture of periprosthetic collections, and arthrography for joint fluid collection in the event of loosening. © 2019 Société française de radiologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

INTRODUCTION L'arthroplastie par prothèse totale de hanche (PTH) est une intervention chirurgicale fréquente, avec environ 130 000 gestes programmés chaque année en France et plus d'un million dans le monde. Ces chiffres sont en constante augmentation du fait du vieillissement de la population [1]. En France, les indications de la PTH sont la coxarthrose (75,2 %), les fractures de l'extrémité supérieure du fémur (8,8 %), les dysplasies (4,6 %), l'ostéonécrose aseptique (4,5 %), et les coxopathies destructrices rapides (3,6 %) [2]. Le but de la chirurgie est la restauration de la mobilité et la diminution des douleurs. En France, l'âge moyen de l'intervention est de 70,6 ans avec une prédominance féminine (57 %) [2]. Le résultat fonctionnel de cette chirurgie est le plus souvent excellent avec une durée de vie actuelle des dernières prothèses évaluée à 15–20 ans. Les causes de reprises sont, par ordre de fréquence décroissante : le descellement aseptique (45 %), la luxation (12,4 %), la fracture péri-prothétique (10,5 %), l'usure et l'ostéolyse (8,7 %), le descellement septique (6,4 %), les douleurs (4,2 %), et la fracture de l'implant (3,2 %) [3]. Pour augmenter la durée de vie des PTH, différents couples de frottement ont été développés : métal-polyéthylène, céramiquepolyéthylène, céramique-céramique et métal-métal. En France, les couples de frottement implantés se répartissent en 41,7 % de métal-polyéthylène, 29,3 % de céramique-céramique, 25,3 % de céramique-polyéthylène, 2,7 % de métal-métal, et 1 % autre [2]. Les complications varient d'un couple à l'autre. Le but de ce travail est de présenter tout d'abord les différents types de prothèses, puis les modalités d'imagerie des prothèses, les complications communes à l'ensemble des prothèses pouvant mener à une reprise chirurgicale, et enfin les complications plus spécifiques à chacun des couples de frottement.

LES DIFFÉRENTS TYPES DE PROTHÈSE DE HANCHE Prothèse totale de hanche conventionnelle Définition La prothèse totale de hanche comporte un implant fémoral et un implant acétabulaire [4].

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Il existe plusieurs types d'implant fémoral selon le degré de modularité allant de la tige monobloc (1 pièce) à la prothèse à col modulaire comportant une tige fémorale, un col modulaire et une tête (3 pièces). Les modèles les plus utilisés aujourd'hui sont les implants fémoraux à 2 pièces : 1 pièce comportant la tige et le col, et 1 pièce constituée par la tête. La modularité permet l'utilisation de différents composants, de différentes tailles, afin d'adapter la géométrie de la prothèse à l'anatomie de chaque patient. De plus, en cas de reprise, la révision de la prothèse peut être partielle. Les prothèses à col modulaire (3 pièces), introduisant une interface supplémentaire, ont été abandonnées en raison d'une augmentation des débris d'usure de métal. La tête est soit métallique, soit en céramique. Concernant l'implant acétabulaire, il est soit monobloc (métal ou polyéthylène), soit composé de deux parties : une cupule acétabulaire métallique (métal-back) dans laquelle est positionné un insert qui peut être constitué de polyéthylène, de céramique ou de métal. Le couple de frottement correspond à l'interface entre la tête fémorale et l'insert acétabulaire. Les quatre couples de frottement utilisés couramment sont :  métal-polyéthylène ;  céramique-polyéthylène ;  métal-métal ;  céramique-céramique. Si les informations concernant le couple de frottement ne sont pas disponibles, elles sont souvent déductibles sur le scanner (Fig. 1).

Mode de fixation Il existe deux modes de fixation des PTH : avec et sans ciment. On parle ainsi de PTH cimentée ou non cimentée. Si un seul des deux implants (acétabulaire ou fémoral) est cimenté, il s'agit alors d'une PTH hybride. La fixation des implants se fait de plus en plus souvent sans ciment : selon le rapport de la SOFCOT, 68 % des PTH posées en 2017 étaient non cimentées, 10 % cimentées, et 20 % hybrides [2]. L'utilisation du ciment assure la stabilité immédiate, mais la chirurgie est plus difficile en cas de reprise, où l'ablation de la totalité du ciment est nécessaire. En l'absence de ciment, la stabilité primaire (0–4 semaines) est assurée par l'ajustage mécanique de l'implant dans l'os, parfois associé à des vis. La stabilité secondaire

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Figure 1. PTH en scanner en fonction des différents couples de frottement. a : métal-polyéthylène ; b : céramique-polyéthylene ; c : métalmétal ; d : céramique-céramique.

(4–6 semaines) est assurée par la repousse osseuse au contact de l'implant, traduisant un phénomène d'ostéo-intégration. Cette repousse osseuse est favorisée par la présence d'un inducteur de l'ostéogénèse à la surface des prothèses (hydroxyapatite ou revêtement poreux).

Principe de la cupule à double mobilité Les prothèses totales de hanches peuvent être à simple mobilité (entre la tête fémorale et l'insert acétabulaire) ou à double mobilité. Les prothèses à double mobilité sont constituées :  d'une petite mobilité entre la tête prothétique (métal ou céramique) et l'insert de polyéthylène sphérique qui la recouvre. La tête est de petit diamètre afin de diminuer la surface d'usure ;  d'une grande mobilité entre l'insert et la cupule acétabulaire métallique. Le diamètre tête + insert correspond au diamètre de la tête native. Cette tête de grand diamètre permet à la fois d'augmenter l'amplitude articulaire et de diminuer le risque de luxation.

Prothèse totale de hanche de resurfaçage Elle se compose d'une pièce fémorale cimentée sur la tête fémorale après exérèse de la surface articulaire [5]. La tige centrale très courte s'arrête au col au lieu de descendre dans la diaphyse fémorale, et est positionnée en valgus d'environ 88 par rapport à l'axe anatomique du col (Fig. 2a). L'acétabulum est remplacé par un implant métallique. L'avantage principal de cette prothèse est la préservation du stock osseux, facilitant une éventuelle reprise ultérieure. Ses indications sont restreintes à une population spécifique : patients jeunes (<65 ans, et <55 ans chez la femme) et sportifs avec une coxarthrose. En France, seuls quelques centres sont autorisés à la pose de ces implants en raison du risque de fracture et des complications liées au couple métal-métal.

Prothèse cervico-céphalique Contrairement à la prothèse totale, seul est remplacé le versant fémoral [4].

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Figure 2. Radiographies des différents types de prothèse. a : prothèse de resurfaçage ; b : prothèse cervico-céphalique intermédiaire ; préservation du cartilage acétabulaire (flèche blanche) et grande cupule acétabulaire (flèche noire) ; c : prothèse totale de hanche ; absence de cartilage acétabulaire (flèche blanche).

Il en existe deux types :  la prothèse monobloc de Moore, peu utilisée de nos jours ;  la prothèse intermédiaire, comportant un implant fémoral dont la tête s'articule avec une cupule de polyéthylène protégée de l'usure par une calotte métallique. La cupule est mobile dans l'acétabulum natif, celui-ci conservant son revêtement cartilagineux (Fig. 2b et c). L'indication de ce type de prothèse est la fracture déplacée du col fémoral chez le sujet âgé. Il est important de savoir reconnaître ce type de prothèse, car la cupule n'étant pas fixée à l'acétabulum, il ne faudra pas décrire à tort de malposition d'un implant acétabulaire. Pour la différencier de la PTH conventionnelle, il faudra analyser :  le cartilage acétabulaire qui est visualisé dans les prothèses cervico-céphaliques, sauf si la tête prothétique a usé le cartilage et vient au contact de l'os sous-chondral (complication des prothèses cervico-céphaliques appelée « cotyloïdite ») ;  la cupule mobile qui présente une surface plus large et plus régulière que la pièce acétabulaire des PTH, dont la surface prothétique est anfractueuse et crénelée, parfois parsemée de trous de vis.

LES MOYENS D'IMAGERIE DES PROTHÈSES DE HANCHE Les radiographies Elles restent l'examen de référence de l'étude de la prothèse de hanche depuis la période postopératoire précoce jusqu'à la

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surveillance à long terme [6]. Elles doivent être reproductibles pour permettre une comparaison correcte des radiographies dans le temps et ainsi détecter précocement une complication. Le bilan radiographique est recommandé tous les 1 à 3 ans, même si le patient ne présente pas de gêne fonctionnelle, et de manière plus rapprochée en cas d'anomalie clinique et/ou radiographique débutante. Il comporte :  une radiographie du bassin de face debout, centrée au bord inférieur de la symphyse (soit plus bas que le cliché de bassin classique) pour couvrir toute la prothèse. Elle permet de juger de l'équilibre pelvien ;  une radiographie de face de la hanche, réalisée en décubitus, qui inclut les deux ou trois cm situés en dessous de l'extrémité distale de la tige fémorale ;  une radiographie de profil qui est habituellement un profil urétral. Celui-ci montre la tige fémorale de profil et la pièce acétabulaire de trois-quarts. Il peut être complété en fonction des indications par un faux profil de Lequesne ; ce dernier montre l'acétabulum de profil et permet une analyse de la partie postéro-caudale de l'interface os-implant acétabulaire. Les radiographies standard permettent l'évaluation du positionnement des implants. Les paramètres à analyser sont (Fig. 3) :  la longueur des membres inférieurs ;  le centre de rotation, qui doit être équivalent à celui de la hanche opposée. Il est évalué sur le cliché de face par la distance entre le centre de la tête fémorale et la ligne biischiatique d'une part, et entre le centre de la tête fémorale et l'arrière-fond acétabulaire d'autre part ;  l'inclinaison de l'implant acétabulaire, définie par l'angle formé entre le bord équatorial de la pièce (entre les bords

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Les ponts osseux ou « spotwelds » Ils correspondent à la formation d'os entre la surface d'une prothèse non cimentée et la surface endostée. Ils signent la bonne intégration de la prothèse (Fig. 5).

Le piédestal Il correspond à une condensation par ossification endostée située sous l'extrémité distale de la tige fémorale.

La redistribution des contraintes (« stress shielding »)

Figure 3. Radiographie du bassin de face chez un patient suivi pour PTH gauche. Ligne AB : ligne bi-ischiatique. Double flèche pleine : centre de rotation horizontal, défini par la distance entre le centre de la tête fémorale et la ligne bi-ischiatique, doit être équivalent des deux côtés. Double flèche-tirets : centre de rotation vertical, défini par la distance entre le centre de la tête fémorale et la ligne biischiatique, doit être équivalent des deux côtés. Angle a : inclinaison frontale de l'acétabulum, définie par le plan entre le plan équatorial de la cupule acétabulaire (bord supérieurs et inférieurs de la cupule acétabulaire) et la ligne bi-ischiatique. Elle doit être comprise entre 308 et 508. Flèche noire : offset fémoral, défini par la distance entre le centre de la tête fémorale et l'axe médian de la diaphyse fémorale, normalement comprise entre 41 mm et 44 mm.

supérieur et inférieur de la cupule) et la ligne passant par les « U radiologiques » ou la ligne bi-ischiatique : la normale étant autour de 458 ;  l'offset fémoral (distance séparant le centre de la tête fémorale de l'axe médian de la diaphyse fémorale) normalement compris entre 41 mm et 44 mm ;  la tige fémorale qui doit être centrée dans le fût diaphysaire. Les radiographies permettent également l'évaluation des interfaces os-ciment ou os-implant. Pour localiser précisément les anomalies, on utilise la classification de Gruen et d'Amstutz pour le fémur et la classification de De Lee et Charnley pour l'acétabulum. La première définit 7 zones péri-prothétiques sur la radiographie de hanche de face numérotées de 1 à 7, et 7 zones sur la radiographie de profil numérotées de 8 à 14. La deuxième définit trois zones péri-prothétiques (I à III) de face (Fig. 4).

DÉFINITIONS SÉMIOLOGIQUES RADIOGRAPHIQUES [7] Le liseré Un liseré est un espace clair souligné par une mince ligne dense, signifiant un vide radiologique. Il peut siéger à l'interface prothèse-ciment ou ciment-os (pour les prothèses cimentées) et à l'interface prothèse-os pour les prothèses non cimentées. Ce liseré n'est pas pathologique s'il est fin (moins de 2 mm d'épaisseur), régulier, et stable dans le temps.

Il s'agit d'un remodelage osseux induit par un transfert des contraintes physiologiques, suite à l'implantation d'une prothèse. Les contraintes n'étant plus absorbées en région métaphysaire proximale du fémur (zone 1 de Gruen), il en résulte une déminéralisation osseuse dans cette région. La redistribution des contraintes peut entraîner une hypertrophie de la corticale le long de la tige fémorale, le plus souvent en regard de son extrémité inférieure (Fig. 5). Le même phénomène peut concerner l'acétabulum avec une déminéralisation qui peut s'observer en zone II de Lee et Charnley.

Le calcar ou éperon de Merkel Il correspond à la corticale médiale et proximale du fémur. Sur un fémur sans prothèse, cette zone correspond au passage de l'axe préférentiel des contraintes physiologiques depuis la zone acétabulaire jusqu'au fût diaphysaire. La substitution par un col prothétique va induire des modifications dans la distribution de ces contraintes et en particulier au niveau du calcar, qui va se remodeler (s'atrophier ou s'hypertrophier).

Le scanner Il est de plus en plus utilisé depuis l'avènement des nouveaux protocoles de réduction des artéfacts de durcissement du faisceau engendrés par le matériel prothétique (reconstruction itérative, double-énergie avec calcul d'image virtuelle monochromatique, et algorithmes de réduction des artefacts métalliques — MAR) [8]. C'est aujourd'hui l'examen de référence en cas de prothèse douloureuse sans explication radiographique. C'est également l'examen de première intention pour les mesures de version du matériel prothétique, même s'il n'est pas réalisé en charge. Il permet une analyse fine des interfaces os-ciment ou os-prothèse, notamment lorsqu'une reprise prothétique est envisagée. Pour la mesure de l'antéversion fémorale, il faut prendre soin de réaliser l'acquisition jusqu'aux condyles fémoraux.

L'IRM Elle est peu utilisée en pratique courante en France, en raison de sa faible disponibilité et des artéfacts engendrés par le matériel prothétique. Cependant, de nouvelles séquences d'acquisitions dites « MARS, Metal Artifact Reduction Sequence », disponibles en routine y compris à 3T, ont été développées afin de réduire ces artéfacts. Les principales sont connues sous les noms de View Angle Tilting (VAT), Multiacquisition Variable Resonance Image Combination (MAVRIC), Slice Encoding for Metal Artifact Correction

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Figure 4. a : radiographie de face : classification de Gruen et d'Amstutz pour le fémur (zones 1 à 7) et classification de DeLee et Charnley pour l'acétabulum (zone I à III) ; b : radiographie de profil : classification de Gruen et d'Amstutz (zone 8 à 14).

(SEMAC). Son apport dans l'étude des parties molles est certain [8].

prothèse-os (qui signerait le descellement), et mieux analyser une éventuelle collection opacifiée par le contraste.

L'échographie

Les examens de médecine nucléaire

Le matériel prothétique peut être différencié des surfaces osseuses, car il est hyperéchogène et s'accompagne d'échos de répétition, contrairement aux surfaces osseuses qui interrompent le faisceau ultrasonore. Les performances de l'échographie restent cependant dépendantes de l'opérateur et de l'échogénicité du patient. Elle est surtout utilisée pour l'évaluation des parties molles péri-prothétiques (en particulier les tendinopathies, les conflits psoas-prothèse et les pseudotumeurs), et pour guider les prélèvements et les biopsies.

Il existe différents types de scintigraphie en fonction du traceur radio-pharmaceutique injecté.

L'arthrographie L'arthrographie est peu pratiquée. Son indication est la ponction-aspiration articulaire, notamment en cas de suspicion d'infection. Si une injection intra-articulaire de produit de contraste est réalisée, elle est couplée à un scanner afin de rechercher un passage de produit de contraste à l'interface

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La scintigraphie osseuse aux 99mTcbisphosphonates [9] Aujourd'hui, la scintigraphie osseuse planaire squelette entier est complétée systématiquement par une SPECT/CT aux temps tissulaire (5 min post-injection) et osseux (2–4 h postinjection). Une SPECT/CT couple la Single Photon Emission Tomography (SPECT) qui correspond à une tomoscintigraphie, au scanner (CT). Ce couplage présente des avantages techniques (correction des artéfacts d'atténuation, de diffusé, et de volume partiel) ; il permet de localiser plus précisément l'hyperfixation et d'effectuer une quantification volumique de celle-ci ; il améliore la spécificité de la technique grâce à la prise en compte de la sémiologie TDM. Une hyperfixation peut

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Figure 5. « Spotwelds » et « Stress Shielding » chez un patient à 3 mois de la mise en place d'une PTH non cimentée. a : radiographie de face : hypertrophie de la corticale en faveur d'une redistribution des contraintes ou « Stress Shielding » (flèche blanche) ; b : radiographie de profil : « Spotwelds » en faveur d'une bonne intégration de la prothèse (flèche noire) ; c : scanner : « Spotwelds » (flèche noire) et « Stress Shielding » (flèche blanche).

révéler un descellement mécanique ou septique, une fracture de l'implant ou péri-prothétique, une ossification des parties molles active, un « stress shielding », une pseudarthrose du grand trochanter ou une tendinopathie du moyen glutéal. En cas de hanche douloureuse, la scintigraphie osseuse permet d'innocenter la PTH en détectant des diagnostics différentiels comme une fracture récente par insuffisance osseuse (rachis lombaire, aileron sacré, os iliaque, cadre obturateur).

La scintigraphie aux polynucléaires neutrophiles (PNN) autologues radiomarqués Elle est indiquée dans le diagnostic de descellement septique lorsque la scintigraphie osseuse est positive. L'exploration nécessite une première étape de prélèvement sanguin, séparation et marquage des polynucléaires neutrophiles, suivie de leur réinjection. Le protocole d'imagerie comporte en règle une SPECT/CT à 4 h post-injection puis 24 h post-injection.

La scintigraphie médullaire aux colloïdes Elle peut être couplée à la scintigraphie aux PNN lorsqu'il existe un doute diagnostique entre un abcès ostéo-médullaire juxta-PTH et un îlot de régénération médullaire [10].

La PET-CT au 18F-FDG Elle est régulièrement utilisée dans le diagnostic des descellements septiques par les services de médecine nucléaire n'abritant pas d'unité de radiomarquage cellulaire. En effet elle est plus simple à mettre en œuvre puisqu'elle suit schématiquement le même protocole que pour les indications oncologiques et rhumatologiques.

LES COMPLICATIONS COMMUNES À L'ENSEMBLE DES PTH Le descellement aseptique Le descellement aseptique est la complication la plus fréquente des prothèses totales de hanche, responsable de douleurs et de gêne fonctionnelle. Il correspond à la perte de fixation d'une prothèse cimentée ou bien à l'absence ou la perte secondaire de l'ostéo-intégration d'une prothèse non cimentée. Il est dû au développement d'une membrane « synoviale » ou « fibreuse », secondaire à la migration des synoviocytes le long des interfaces os-implant et/ou os-ciment. Les synoviocytes libèrent des cytokines stimulant les ostéoclastes et provoquent alors une résorption osseuse adjacente. Le descellement aseptique peut être :  mécanique : par mauvaise fixation primaire de la prothèse, choc violent, défaut de conception ;  biologique (plus fréquent) : par le développement d'une ostéolyse péri-prothétique induite par les débris d'usure. La quantité de débris d'usure et leur conséquence sur l'os péri-prothétique dépend du couple de frottement [11]. Il est fondamental d'effectuer une étude comparative avec les clichés antérieurs. Les signes radiographiques affirmant le descellement d'une prothèse sont (Fig. 6) :  une mobilisation de la prothèse (migration crâniale et verticalisation de la pièce acétabulaire, migration caudale de la pièce fémorale) ;  un liseré radiographique qui apparaît secondairement ou se majore sur les clichés successifs. Il siège à l'interface prothèse-ciment ou ciment-os pour les prothèses cimentées et à l'interface prothèse-os pour les prothèses non cimentées.

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Figure 6. Les trois signes radiographiques de descellement. a : 1er patient : PTH métal-métal non cimentée. Liseré de 2 mm le long de la tige fémorale (flèches blanches). Absence d'imageries antérieures ; b : 1er patient : radiographie de contrôle à 1 an. Majoration du liseré avec géodes de résorption endostée le long de la tige fémorale (flèches blanches), en rapport avec un descellement ; c : 2e patient : PTH métal-polyéthylène, hybride, cimentée sur le versant acétabulaire. Liseré péri-prothétique de 2 mm (flèche blanche) ; d : 2e patient. Radiographie de contrôle à 1 an. Verticalisation de la cupule acétabulaire en rapport avec un descellement (flèche blanche) ; e : 3e patient : PTH métal-polyéthylène, hybride, cimentée sur le versant acétabulaire ; f : 3e patient : radiographie de contrôle à 1 an. Apparition d'une fracture du ciment en rapport avec un descellement (flèche blanche).

On le considère comme pathologique si son épaisseur est supérieure à 2 mm. Cependant, un liseré non évolutif de plus de 2 mm d'épaisseur n'est pas pathologique et un liseré inférieur à 2 mm peut l'être s'il progresse ;  une fracture du ciment [12].

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Pour les prothèses non cimentées, le « descellement » peut être une absence d'ostéo-intégration de la prothèse, se traduisant cliniquement par des douleurs dans les 2 premières années suivant l'implantation de la prothèse. Des scores de

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fixation radiographique pour les pièces fémorale et acétabulaire ont été établis, qui prennent en compte différents paramètres. La fixation est considérée comme acquise ou non en fonction du score obtenu [7,13]. Elle est de plus en plus fréquemment obtenue avec les revêtements de surface modernes et notamment l'hydroxyapatite. Les signes indiscutables de non-ostéo-intégration sont :  un liseré péri-prothétique évolutif comme pour les prothèses cimentées ;  la migration de l'implant : caudale ou en varus pour l'implant fémoral, et verticalisation pour l'implant acétabulaire. D'autres signes ont une valeur diagnostique moindre, car ils peuvent refléter une simple adaptation osseuse au matériel prothétique :  une hétérogénéité et une résorption de l'os spongieux adjacent au matériel ;  une hypertrophie des corticales de la diaphyse fémorale à la partie distale de l'implant fémoral, difficiles à distinguer d'un phénomène de « stress shielding » ;  un remodelage du calcar (résorption ou au contraire hypertrophie). Les descellements sont sous-estimés en radiographie et le recours au scanner s'avère alors nécessaire. C'est l'examen de choix. Il permet :  d'analyser plus précisément la périphérie des implants dans les différents plans, à la recherche des signes décrits plus haut ;  de mieux détecter et caractériser les ostéolyses péri-prothétiques et de les différencier des déminéralisations observées lors des mécanismes de « stress shielding » ;  d'étudier le capital osseux avant reprise chirurgicale. D'autres examens peuvent être utiles dans cette indication :  l'IRM met en évidence un liseré irrégulier hyperintense en T2 péri-prothétique de plus de 2 mm d'épaisseur (correspondant à la membrane fibreuse et à la résorption osseuse), entouré d'une fine ligne en hyposignal T2, sans œdème médullaire ou des parties molles [14]. Elle participe au bilan étiologique du descellement, en recherchant une ostéolyse granulomateuse ou des arguments pour un sepsis :  la scintigraphie osseuse est surtout intéressante pour sa valeur prédictive négative [9]. Elle permet en effet, en l'absence d'hyperfixation tissulaire et osseuse, de stopper les investigations. Le caractère pathologique d'une hyperfixation dépend de facteurs liés à l'intervention (prothèse cimentée ou non, date de la chirurgie), et de la configuration des anomalies SPECT : localisation, étendue, intensité, positivité à la phase tissulaire, nombre des hyperfixations visibles à la phase osseuse. Toute hyperfixation au temps tissulaire dans un délai supérieur à 3 mois après la pose de prothèse est pathologique. Une hyperfixation au temps osseux est pathologique après 1 an pour les prothèses cimentées, et après 2 ans pour les prothèses non cimentées. Typiquement, en cas de descellement aseptique, il existe une hyperfixation intense (4  N) à la phase osseuse, précédée par une hyperfixation concordante en localisation à la phase tissulaire (Fig. 7).

Le descellement septique Le descellement septique peut être aigu (moins de 3 mois après la chirurgie initiale), subaigu (entre 3 mois et 24 mois) ou tardif (au-delà de 24 mois) de diagnostic plus difficile en raison

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d'une évolution à bas bruit et de la normalité des radiographies à la phase initiale. Les clichés standard montrent les mêmes signes que pour le descellement aseptique, associés à d'autres éléments permettant de suspecter le caractère septique du descellement (Fig. 8) :  atteinte bipolaire du descellement ;  liseré péri-prothétique extensif et rapidement évolutif ;  géodes de résorption endostées souvent volumineuses ;  appositions périostées plurilamellaires. Dans un cas sur deux la radiographie ne montre pas de signe typique ; elle sera alors complétée par un scanner, dont l'analyse osseuse est plus performante et qui permettra d'étudier les parties molles à la recherche d'un épanchement ou d'une collection. Les collections des parties molles ont une valeur prédictive positive (VPP) de 100 % et l'absence d'épanchement intra-articulaire une valeur prédictive négative (VPN) de 96 % [15] (Fig. 8). Les autres examens pouvant être utiles dans cette indication sont :  l'échographie pour l'analyse des parties molles, qui peut en outre guider une ponction d'un épanchement ou d'une collection ;  l'IRM pour l'analyse des parties molles (synovite, épanchement articulaire, collections, fistules cutanées, adénopathies) et de l'os (ostéolyse péri-prothétique, œdème osseux). Le liseré et les ostéolyses péri-prothétiques du descellement septique sont, contrairement au descellement aseptique, associées à un œdème osseux qui s'étend volontiers au périoste et aux parties molles péri-prothétiques [16] ;  la SPECT/CT aux polynucléaires marqués [9]. Elle est réservée aux infections du squelette appendiculaire et ne peut être utilisée pour le squelette axial en raison de la biodistribution physiologique et pathologique des PNN radiomarqués. En conséquence, la coxo-fémorale étant une articulation rhizomélique, trait d'union entre le squelette axial et le squelette appendiculaire, seul le descellement septique de la composante fémorale sera mis efficacement en évidence par l'exploration scintigraphique. En cas de doute entre abcès ostéo-médullaire et îlots de régénération médullaire, la scintigraphie médullaire aux colloïdes peut être réalisée à 24 h de la scintigraphie aux leucocytes marqués. Les images sont acquises 1 à 2 h après injection des colloïdes radiomarqués. Les abcès ostéo-médullaires correspondent à un phénomène de remplacement médullaire ; à ce titre ils déterminent une hyperfixation leucocytaire contrastant avec une hypofixation des 99mTc-colloïdes. Les îlots de régénération médullaire correspondent à un phénomène d'hyperactivité médullaire focal, fréquent à proximité d'une arthroplastie ; ils sont responsables d'une hyperfixation leucocytaire congruente à l'hyperfixation des 99mTc-colloïdes ;  la PET/CT au 18F-FDG. Elle est utilisée en cas d'indisponibilité ou de contre-indication de la scintigraphie aux leucocytes marqués. Un hypermétabolisme limité à une partie de la cupule ou de la pièce fémorale n'a pas de valeur pathologique. Un descellement est évoqué s'il existe un hypermétabolisme étendu et intense de l'ensemble de la cupule ou de la pièce fémorale, avec extension de la fixation dans les parties molles [9]. À ce jour, il n'existe pas d'étude prospective publiée comparant la SPECT/CT aux leucocytes radiomarqués et la PET/CT au FDG.

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Figure 7. Descellement aseptique en SPECT-CT. Patiente de 50 ans, PTH gauche posée il y a 12 ans pour ostéonécrose aseptique. Depuis 5 ans, gêne puis douleur de la hanche gauche. a : radiographie de face considérée comme normale. b–d : SPECT/CT aux 99mTcbisphosphonates à la phase osseuse : hyperfixation intense de l'acétabulum correspondant aux zones I, II et III de Lee et Charnley.

Le caractère septique du descellement sera confirmé par la ponction articulaire de la hanche ou d'une collection, avec analyse du contenu cellulaire (titrage des leucocytes et du pourcentage des polynucléaires) et mise en culture. Ils peuvent être réalisés sous contrôle radiographique, échographique ou scanographique. Il est primordial de distinguer le descellement septique du descellement aseptique, car sa prise en charge est radicalement différente : elle consiste en l'ablation du matériel, le débridement articulaire, une antibiothérapie, et un changement de prothèse en 1 ou 2 temps.

La luxation Prothèse classique (simple mobilité) La luxation de hanche est une des causes principales de révision précoce des prothèses, avec une incidence de 0,2 % à 10 % après une première prothèse de hanche et

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de 10 à 25 % après une première révision prothétique. Elle se définit par la perte de contact entre la tête prothétique et la cupule acétabulaire. La luxation, le plus souvent postérieure, peut survenir :  soit précocement, dans un délai de 3 mois post opératoire, de bon pronostic, avec faible risque de récidive. Elle est favorisée par une hypotonie musculaire et une amyotrophie, une mobilisation intempestive, ainsi que par la voie d'abord chirurgicale (abord postérieur ou postéro-latéral). Le risque de luxation est plus faible lorsque l'on utilise une tête fémorale de grand diamètre ou une prothèse à double mobilité ;  soit tardivement, au-delà de 3 mois, de moins bon pronostic, à haut risque de récidive. Elle est le plus souvent multifactorielle (facteurs liés au patient et à la chirurgie), mais doit faire rechercher :  une malposition des implants prothétiques ;  un descellement de la prothèse (septique ou aseptique) favorisant la migration des implants ;

L'imagerie des prothèses de hanche : complications communes et spécifiques des différents couples de frottements

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Figure 8. Descellement bipolaire septique d'une PTH métal-polyéthylène hybride, cimentée sur le versant acétabulaire. a : radiographie de face : liseré à l'interface ciment-os > 2 mm de la pièce acétabulaire (flèches noires) et verticalisation de la cupule (flèche blanche). Géodes endostées à la pointe de la tige fémorale en zone 5 de Gruen (tête de flèche noire), plage d'ostéolyse en zone 7 de Gruen (tête de flèche blanche) et appositions périostées plurilamellaires de la diaphyse fémorale (flèche noire et blanche) ; b : scanner en coupe coronale et fenêtre osseuse : mêmes signes avec meilleure visualisation d'une plage d'ostéolyse de l'acétabulum en zone III de Delee et Charnley (flèche courbe) et des appositions périostées plurilamellaires (flèche noire et blanche). L'atteinte bipolaire, l'ostéolyse évolutive, les appositions périostées plurilamellaires sont évocateur d'un descellement d'origine septique ; ce qui a été confirmé par la ponction articulaire réalisée sous guidage scanner.

 une pseudarthrose lâche du grand trochanter ;  une amyotrophie des muscles pelvitrochantériens. Le diagnostic de luxation repose sur les radiographies avec clichés de face et de profil afin d'apprécier le sens du déplacement antérieur ou postérieur. Après réduction, l'imagerie recherche un défaut de positionnement des implants :  une inclinaison excessive par rapport à l'horizontale de la cupule acétabulaire sur la radiographie de face, dont la valeur normale est proche de 458 ;  une version acétabulaire inadéquate mesurée sur le scanner, la mesure sur la radiographie étant peu reproductible (Fig. 9). La version acétabulaire est évaluée par l'angle formé par la droite unissant les bords antérieur et postérieur de la cupule acétabulaire et la droite passant par la perpendiculaire à la ligne bi-ischiatique : il existe normalement une antéversion de 58 à 258 ;  une version inadéquate du col fémoral prothétique. Elle correspond à l'angle formé par la ligne passant par la corticale postérieure des condyles fémoraux (ligne bi-condylienne postérieure) et la ligne passant par l'axe du col : il existe normalement une antéversion de 108 à 208. Une antéversion excessive augmente le risque de luxation antérieure et une insuffisance d'antéversion le risque de luxation postérieure.

Ces valeurs doivent cependant être interprétées avec précaution en raison de la grande variabilité des mesures retrouvées par les différentes études, et de l'origine souvent multifactorielle des luxations [17].

Prothèse à double mobilité Dans les prothèses à double mobilité, la luxation « classique » est définie par la perte de contact entre l'insert en polyéthylène qui recouvre la tête prothétique, et la pièce acétabulaire. La fréquence de ce type de luxation est faible par rapport à celle des luxations des prothèses à simple mobilité. En revanche, est née avec ce type de prothèse une nouvelle complication : la luxation intraprothétique du polyéthylène [18]. Elle est définie par la perte de contact entre la tête métallique et l'insert en polyéthylène. Elle se produit dans deux situations :  de façon précoce après l'implantation de la prothèse, lors de la réduction d'une luxation classique. La tête prothétique réintègre l'implant acétabulaire, mais l'insert de polyéthylène reste luxé dans les parties molles. C'est le mécanisme le plus fréquent. Le diagnostic est évoqué devant une excentration de la pièce fémorale par rapport à la pièce acétabulaire ; l'insert de polyéthylène migré dans les parties molles

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 soit en per-opératoire ; elles concernent surtout les prothèses sans ciment (ancrage métallique par impaction réalisée en force) et les révisions prothétiques ;  soit à distance de l'opération. Ce sont les plus fréquentes : il s'agit volontiers de fractures spontanées (ou induites par un traumatisme minime) précédées d'une période de douleur mécanique. Les facteurs de risque sont les patients âgés et ostéoporotiques. Elles sont également favorisées par un descellement prothétique, une ostéolyse péri-prothétique ou un mécanisme de redistribution des contraintes entraînant une déminéralisation osseuse du fémur proximal ou de la région péri-acétabulaire. On distingue :  les fractures fémorales péri-prothétiques : ce sont les plus fréquentes [19]. Elles sont décrites par la classification de Vancouver (Tableau I). Cette classification précise la localisation anatomique de la fracture par rapport à l'implant, si l'implant est encore fixé à l'os ou s'il est descellé, et la qualité osseuse autour de l'implant (Fig. 11) ;  les fractures de l'acétabulum péri-prothétique : elles sont beaucoup plus rares [20]. Elles peuvent être iatrogènes lors de la mise en place de l'implant, compliquer une ostéolyse granulomateuse ou bien-être secondaires à une chute.

Les ostéolyses péri-prothétiques granulomateuses

Figure 9. Subluxation de la pièce fémorale sur malposition de la cupule acétabulaire chez un patient porteur d'une PTH non cimentée métal-polyéthylène. a : radiographie du bassin : subluxation de la tête fémorale prothétique ; b : scanner en coupe axiale : subluxation antérieure de la tête fémorale et antéversion excessive de la cupule acétabulaire. L'angle de version acétabulaire est mesuré à 418 versus 228 pour la hanche native à gauche.

est responsable d'une image « en bulle de savon » plus facile à identifier sur le scanner (Fig. 10) ;  de façon tardive après l'implantation de la prothèse, par usure de la collerette de rétention de l'insert (la collerette de rétention est un anneau d'épaisseur variable faisant partie de l'insert, qui permet de maintenir en place la tête prothétique). Cette forme, dans laquelle l'insert reste solidaire de la pièce acétabulaire, n'est pas précédée par une manœuvre de réduction d'une luxation classique. La luxation intraprothétique est irréductible et nécessite toujours un traitement chirurgical et une révision de la prothèse.

Les fractures péri-prothétiques Les fractures péri-prothétiques surviennent :

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Le mécanisme physiopathologique responsable du granulome est une réaction immunologique aux particules de débris d'usure provenant de la prothèse (métal, polyéthylène, ciment, céramique). Ces débris d'usure sont phagocytés par les macrophages, ce qui engendre, par un phénomène d'activation ostéoclastique et d'inhibition ostéoblastique, la constitution d'un granulome macrophagique responsable d'une ostéolyse péri-prothétique. La présence de débris d'usure n'entraîne pas toujours une ostéolyse, mais celle-ci est d'autant plus susceptible de se développer que la quantité de particules est importante. Ces ostéolyses péri-prothétiques peuvent se compliquer d'un descellement ou d'une fracture. Les facteurs de risque d'usure et donc d'ostéolyse sont :  l'activité du patient. Les jeunes patients actifs ont des taux d'usure plus importants ;  le type de polyéthylène. Le polyéthylène conventionnel s'use davantage que le polyéthylène hautement réticulé ;  le couple de frottement utilisé. L'usure est plus importante pour le couple métal-polyéthylène (Fig. 13) que pour les autres couples (Fig. 14b et 15). Les radiographies ont une faible sensibilité pour la détection des granulomes (en particulier pour la localisation acétabulaire). On recherche une ou plusieurs lésions géodiques à contours nets de taille progressivement croissante, au sein de l'acétabulum ou au versant endosté de la corticale fémorale. Les radiographies sont la plupart du temps complétées par un scanner ou une IRM [21] pour une évaluation plus précise des lésions et du stock osseux résiduel. En scanner le granulome apparaît comme une ostéolyse géographique nettement limitée de forme ronde ou ovale, uni- ou multi-loculaire ; la corticale au contact peut être amincie, soufflée ou localement détruite. L'IRM montre une lacune en hypersignal STIR limitée par un liseré hypointense, parfois entourée d'un œdème osseux, mais sans

Mise au point

L'imagerie des prothèses de hanche : complications communes et spécifiques des différents couples de frottements

Figure 10. Luxation intraprothétique (PTH à double mobilité métal-polyéthylène), d'origine traumatique, survenue lors de la réduction d'une luxation. a : radiographie de hanche de face : luxation de la grande mobilité avec présence de l'insert en polyéthylène toujours fixé sur la tête fémorale (flèche blanche) ; b : radiographie après réduction de la luxation ; c : scanner en coupe coronale et fenêtre osseuse : ascension de la tête fémorale, l'insert en polyéthylène n'est plus en place (flèche blanche) ; d : scanner en coupe coronale et fenêtre parties molles : luxation de l'insert en polyéthylène dans les muscles glutéaux (flèche blanche).

Tableau I. Classification de Vancouver. Types

Localisation de la fracture

A

Région trochantérienne

Sous-types Ag : grand trochanter AL : petit trochanter

B

Autour ou juste distale à la tige

B1 : tige fixée B2 : tige descellée B3 : tige descellée et qualité osseuse inadéquate

C

Bien distale à la tige

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Figure 11. Fracture péri-prothétique de type B1 selon la classification de Vancouver, chez une patiente porteuse d'une prothèse intermédiaire de hanche gauche. a : radiographie de hanche de face : pas de fracture visible ; b : scanner en coupe coronale et fenêtre osseuse : fracture de la diaphyse fémorale passant par la tige fémorale prothétique (flèche blanche). Pas de signe de descellement ; c : radiographie de contrôle. Déplacement de la fracture (flèche blanche).

extension de celui-ci aux parties molles, contrairement aux ostéolyses septiques. Selon la tolérance clinique, l'étendue de la destruction et l'existence d'un descellement associé, on optera pour une surveillance ou une révision de prothèse.

Le conflit psoas-cupule Ce conflit est dû à un contact anormal entre le tendon iliopsoas et le rebord antérieur de la cupule acétabulaire lorsque celui-ci n'est pas recouvert par l'acétabulum osseux (Fig. 12). Le scanner en coupe axiale est la technique de référence pour authentifier et mesurer le débord antérieur de la cupule. L'échographie peut elle aussi objectiver le débord antérieur ; elle recherche une bursite du tendon ilio-psoas, et guide l'infiltration diagnostique et thérapeutique.

LES COMPLICATIONS SPÉCIFIQUES DES COUPLES DE FROTTEMENT Complications du couple de frottement métalpolyéthylène : usure et ostéolyses Le couple métal-polyéthylène est composé d'une tête en métal et d'un insert en polyéthylène. Il s'agit historiquement du

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Figure 12. Conflit psoas-cupule en échographie. Débord de la cupule acétabulaire (grosse flèche blanche), refoulant le tendon de l'ilio-psoas (fines flèches blanches).

L'imagerie des prothèses de hanche : complications communes et spécifiques des différents couples de frottements

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Figure 13. Usure et ostéolyse péri-prothétique chez une patiente porteuse d'une PTH métal-polyéthylène douloureuse. a : radiographie de hanche de face : ascension de la tête fémorale traduisant une usure du polyéthylène (flèche noire) ; b : scanner en coupe coronale et fenêtre osseuse : usure du polyéthylène (flèche noire), et plage d'ostéolyse acétabulaire péri-prothétique en zone I de Delee et Charnley (flèche blanche). Absence de signe de descellement.

premier couple de frottement, qui représente la référence. Son taux de survie est de 85 % à 20 ans et 78 % à 30 ans. La complication principale est l'usure du polyéthylène, qui est inéluctable, et progresse de 0,1 mm par an environ. L'usure est le plus souvent asymptomatique jusqu'à un stade avancé. Elle est révélée par les radiographies comparatives, sous la forme d'une excentration progressive de la tête fémorale dans l'acétabulum. Chez le patient symptomatique l'exploration est complétée par un scanner ; celui-ci précise la topographie exacte de l'usure et recherche des lésions ostéolytiques associées, parfois méconnues par les clichés standard (Fig. 13a et b). Il peut révéler une tuméfaction synoviale en rapport avec une synovite ou un épanchement articulaire. L'IRM est également utile pour l'analyse de ces ostéolyses et pour la recherche d'une synovite induite par l'usure du polyéthylène. L'épaississement synovial est de signal faible à intermédiaire en T2, souvent similaire à celui des muscles [14]. La synovite est parfois volumineuse ; elle peut alors distendre la capsule articulaire, et se développer dans les bourses périprothétiques, notamment celle du psoas.

Complications du couple de frottement métalmétal : métallose et pseudotumeurs Ce type de prothèse est composé d'une tête et d'une cupule de métal. Le couple de frottement métal-métal a été développé pour les prothèses de resurfaçage et pour les prothèses conventionnelles, pour lesquelles on distingue les têtes fémorales de grand diamètre (>36 mm) et de petit diamètre (<32 mm). Ce couple a été développé pour répondre aux besoins des sujets jeunes, en raison d'une usure plus faible que pour les prothèses métal-polyéthylène. L'utilisation de têtes fémorales de grand diamètre avait pour but d'améliorer la stabilité et de réduire le risque de luxation. Malheureusement les débris d'usure engendrés par les prothèses métal-métal à tête de grand diamètre sont à l'origine de complications spécifiques qui ont conduit à leur abandon suite à un rapport de l'HAS en 2013 ; les patients porteurs de ce type d'implants font l'objet d'une surveillance particulière. Le risque est moindre avec les prothèses à tête de petit diamètre. On désigne par le terme de métallose les dépôts de particules métalliques dans les tissus péri-prothétiques. Ces particules

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Mise au point

C. Pelissou et al.

Figure 14. Métallose et pseudotumeurs chez un patient porteur d'une PTH métal-métal, hybride, cimentée sur le versant fémoral, douloureuse. a : échographie : masse hypoéchogène avec renforcement postérieur (liquidienne) des parties molles de la cuisse ; b : scanner en coupe coronale et fenêtre osseuse : plage d'ostéolyse péri-acétabulaire étendue (flèche blanche), liseré autour de la pièce fémorale à l'interface ciment-os (flèche noire) et lyse du calcar (tête de flèche noire). ; c : scanner en coupe coronale et fenêtre partie molles : masses de densité liquide bilatérales (flèche noire) avec débris métalliques en leur sein (flèches blanches) ; d et e : IRM en coupe coronale T2 FAT SAT et T2 : masses liquidiennes multiples contenant des débris métalliques et des zones tissulaires nécrotiques en hyposignal T2 : — avec paroi fine < 3 mm, de type I de la classification de Hauptfleisch (flèche blanche) — avec paroi > 3 mm, de type II de la classification de Hauptfleisch (flèche noire).

peuvent par ailleurs déclencher une activation macrophagique responsable d'ostéolyses, mais également de masses des tissus mous, décrites sous différents termes « Adverse Local Tissue Reactions » (ALTR), « Adverse Reactions to Metal Debris (ARMD) » ou « pseudotumeurs ». Ces pseudotumeurs peuvent apparaître à court, moyen et long terme après l'implantation et ne sont pas forcément symptomatiques. Bien que la majorité des pseudotumeurs soit associée à un taux d'usure élevé des implants prothétiques, une minorité ne s'accompagne pas d'une usure importante ; on incrimine alors

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une réaction d'hypersensibilité retardée au métal, connue sous le nom d'Aseptic Lymphocyte-Dominated Vasculitis-Associated Lesion (ALVAL) [22]. L'aspect macroscopique est celui de tumeurs jaunes grisâtres avec des composantes kystiques. En histologie ces pseudotumeurs sont constituées de nécrose du tissu conjonctif avec des zones kystiques, des particules métalliques, des macrophages ainsi que des agrégats lymphocytaires et des plasmocytes. Il existe une corrélation entre l'élévation des ions chrome et cobalt dans le sang et la sévérité des pseudotumeurs ; en

L'imagerie des prothèses de hanche : complications communes et spécifiques des différents couples de frottements

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Figure 15. Fracture compliquant une prothèse céramique-céramique. a : 1er patient. Radiographie initiale ; b : 1er patient. Contrôle pour douleur brutale de la hanche sans notion de traumatisme : fragment de céramique migré (flèche blanche), ascension et excentration de la tête fémorale (flèche noire) ; c : 1er patient. Scanner en coupe coronale et fenêtre osseuse : confirmation d'un fragment de céramique migré (flèche blanche) avec tête en céramique intègre (flèche noire) en rapport avec une fracture de l'insert cétabulaire en céramique ; d : 2e patient. Douleur de hanche droite suite à un traumatisme chez un patient porteur d'une prothèse de hanche céramique-céramique. Radiographie : fragment de céramique à la jonction tête-col (flèche blanche) ; e : 2e patient. Scanner en coupe coronale et fenêtre osseuse : fracture de la tête en céramique (flèche noire) avec fragments de céramique migrés (flèche blanche).

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Mise au point revanche le dosage sanguin ne permet pas de prédire le risque de survenue d'une pseudotumeur [23]. Le bilan radiographique est la plupart du temps normal en cas de pseudotumeur. L'échographie met en évidence une masse solide, liquidienne ou mixte avec renforcement postérieur, non vascularisée au Doppler, limitée par une paroi d'épaisseur variable. L'échographie est le moyen de guidage idéal pour une ponction ou une biopsie. En revanche, elle peut être négative quand les pseudotumeurs sont de petite taille. C'est l'IRM avec les techniques de réduction des artéfacts métalliques qui reste l'examen de choix (Fig. 14). La communication des pseudotumeurs avec l'articulation est inconstamment visualisée. Leur développement peut être antérieur dans la bourse de l'ilio-psoas, latéral dans la bourse trochantérienne ou postérieur au contact du nerf sciatique. Il existe plusieurs classifications, mais la plus utilisée est celle de Hauptfleisch qui distingue 3 types [24] :  type I : lésions kystiques (hyposignal T1, hypersignal T2) à paroi fine < 3 mm en hyposignal T2 ;  type II : lésions kystiques (hyposignal T1, hypersignal T2) à paroi épaisse > 3 mm en hyposignal T2 ;  type III : lésions à prédominance solide (en hyposignal T2, de signal variable en T1) contenant des débris métalliques et du tissu nécrotique. La sévérité des symptômes et le taux de reprise prothétique augmentent avec la taille et le type de pseudotumeur (du type I au type III). L'injection de gadolinium n'est pas obligatoire : elle ne montre pas de rehaussement intralésionnel, mais il peut exister une fine prise de contraste de la paroi. Les formes kystiques des pseudotumeurs sont difficiles à différencier des collections infectieuses des parties molles, et il est donc nécessaire de corréler l'ensemble des anomalies au bilan biologique et la clinique. Parfois, il faudra aller jusqu'à la ponction  biopsie pour conclure. L'IRM permet également de faire le bilan des destructions musculaires et tendineuses péri-articulaires, d'évaluer l'atteinte osseuse (ostéolyses et œdème osseux) et de rechercher une compression vasculonerveuse. Le scanner est une alternative à l'IRM en particulier en cas de contre-indication de celle-ci. Il peut mettre en évidence des débris métalliques macroscopiques au sein des pseudotumeurs, et présente l'avantage d'analyser plus précisément les ostéolyses péri-prothétiques. Bien que beaucoup plus fréquentes pour les couples de frottement métal-métal, la métallose et les pseudotumeurs peuvent également se voir :  pour les couples métal-polyéthylène lorsque l'usure ou la migration du polyéthylène entraîne un contact anormal entre le métal de la tête fémorale et le métal-back de la cupule acétabulaire [25] ;  pour les prothèses à col modulaire (quel que soit le couple de frottement) en raison de phénomènes corrosifs au niveau des zones de jonctions col/tête et tige/col. C'est pour cette raison que les prothèses à col modulaire ne sont plus utilisées aujourd'hui [26] ;  dans les cas de reprise prothétique par métal-polyéthylène dans les suites d'une fracture de la tête ou de l'insert en céramique. Les particules de céramique résiduelles de la première prothèse s'interposent entre les nouvelles surfaces de frottement et sont responsable d'une usure « abrasive »

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du métal lors de la mise en place de la 2e prothèse, appelé « usure à troisième corps » [27].

Complications du couple de frottement céramique-céramique : fracture et « squeaking » C'est le couple de frottement qui présente le plus faible taux d'usure et donc d'ostéolyse induite par l'usure, d'où son indication préférentielle chez les sujets jeunes. Cependant, ce matériau a une capacité de déformation moindre d'où le risque plus élevé de fracture de l'implant, (0,04 % dans l'étude de Migaud et al. [28]). Les fractures concernent soit la tête fémorale, soit plus rarement l'insert acétabulaire. Les fractures de la tête fémorale en céramique se révèlent par une douleur violente brutale suivie d'une impotence fonctionnelle totale. Elles surviennent pour des traumatismes réels ou lors d'une activité physique intense, mais aussi parfois pour un traumatisme mineur ou simplement lors des activités physiques de la vie quotidienne. Les fractures de l'insert acétabulaire en céramique peuvent être asymptomatiques jusqu'à ce qu'elles se déplacent. Elles ne sont pas associées à un épisode traumatique. Les facteurs favorisant possibles sont une antéversion excessive de la cupule acétabulaire et une mauvaise implantation de l'insert dans le métal-back. En radiographie, les fractures de l'insert peuvent être méconnues si le fragment n'est pas déplacé, et il faudra avoir recours au scanner pour en faire le diagnostic (Fig. 15a–c). Les fractures de la tête fémorale sont plus faciles à reconnaître que celles de la cupule. Elles se traduisent par la migration de petits fragments radio-opaques autour du col prothétique parfois associée à une excentration de la pièce fémorale. Le diagnostic est d'autant plus facile que la migration est importante (Fig. 15d et e). Le scanner est systématique avant la prise en charge chirurgicale pour :  préciser l'origine des fragments, (l'insert, tête fémorale ou les deux) ;  rechercher des signes de descellement ou un mauvais positionnement des implants, qui nécessiteraient leur changement dans le même temps. En l'absence de traitement l'évolution est défavorable en raison de la libération de particules de céramique à l'origine d'ostéolyses [27]. Dans tous les cas, une synovectomie complète avec résection des fragments de céramique fracturés est nécessaire avant le remplacement prothétique pour éviter l'usure précoce de la nouvelle prothèse. Une autre complication sans traduction à l'imagerie de ce couple de frottement est le « squeaking » (grincement de la prothèse), dont l'incidence est estimée à 3 % [29]. Bien que son origine exacte soit toujours débattue, l'imagerie doit rechercher une fracture des composants prothétiques, et un mauvais positionnement des implants, notamment une cupule trop verticale.

Complications du couple de frottement céramique-polyéthylène : fracture de céramique et usure Leur durée de vie est supérieure à celle du couple métalpolyéthylène.

L'imagerie des prothèses de hanche : complications communes et spécifiques des différents couples de frottements

Il est composé d'une tête en céramique, et d'une cupule en polyéthylène. Ses complications sont l'usure du polyéthylène (et donc le développement à plus ou moins long terme d'ostéolyses péri-prothétiques) et la fracture de céramique. Le risque d'usure est supérieur à celui des prothèses céramique-céramique, mais inférieur à celui des prothèses métalpolyéthylène [30]. Le risque fracturaire de la tête en céramique est plus faible que pour le couple céramique-céramique.

CONCLUSION Du fait de l'augmentation du nombre d'implantations de PTH, le suivi régulier en imagerie de ces prothèses fait aujourd'hui partie intégrante de l'exercice du radiologue. La connaissance des différents types de prothèses et des couples de frottement permet une meilleure compréhension de leurs éventuelles complications. Ces complications sont souvent intriquées entre elles, l'apparition de l'une favorisant l'autre ; on sait par exemple que la métallose et l'usure du polyéthylène induisent les ostéolyses, qui sont à l'origine d'un descellement, qui lui-même est un facteur de risque de luxation et de fracture. Il est donc important de les connaître et de les rechercher systématiquement. Si la radiographie est l'examen de routine permettant de contrôler le positionnement des implants et de surveiller l'état osseux environnant, il faudra souvent avoir recours au scanner pour une meilleure analyse des ostéolyses péri-prothétiques, des fractures infraradiologiques (de contrainte ou de céramique) et pour le calcul des versions acétabulaires et fémorales. L'IRM sera surtout utile pour l'analyse des parties molles en cas de pseudotumeurs et d'infection, et l'échographie pour le diagnostic des conflits psoas-cupule et la ponction des collections.

Points à retenir  Complications communes à tous les types de prothèse : descellement aseptique, descellement septique, luxations, fractures et ostéolyses.  Complications propres aux prothèses métal-polyéthylène : usure du polyéthylène, ostéolyse périprothétique.  Complications propres aux prothèses céramiquepolyéthylène : fracture de la céramique, usure du polyéthylène, ostéolyse péri-prothétique.  Complications propres aux prothèses céramiquecéramique : fracture de la céramique et « squeeking ».  Complications propres aux prothèses métal-métal : métallose et pseudotumeurs.  Les meilleurs signes de descellement : liseré évolutif, migration de la prothèse et fracture du ciment.  Les meilleurs signes de descellement septique : ostéolyse, collections des parties molles et épanchement articulaire.  En cas de luxation : rechercher une malposition des implants et un descellement sous-jacent.  En cas de fracture péri-prothétique : rechercher un descellement sous-jacent.

Mise au point

FINANCEMENTS Ce travail n'a bénéficié d'aucun financement. Contribution des auteurs Conception de l'étude: C. Pelissou Coralie et A. Miquel. Acquisition des données: C. Pelissou, A. Miquel, C. Phan, F. Paycha et A. Sautet. Analyse et interprétation des données: C. Pelissou, A. Miquel, C. Phan, F. Paycha et A. Sautet. Rédaction du manuscrit: C. Pelissou et A. Miquel. Critique du manuscrit pour son contenu intellectuel: C. Pelissou, A. Miquel, C. Phan, F. Paycha, A. Sautet et L. Arrive. Approbation de la version du manuscrit à publier: C. Pelissou, A. Miquel, C. Phan, F. Paycha, A. Sautet et L. Arrive. Déclaration de liens d'intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.

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