L'appareil de Golgi a cent ans

L'appareil de Golgi a cent ans

BIOLOGIE I ................. . . . . . . J appare,l de Golgi a cent ans Voila cent ans, l'italien Camillo Golgi publiait ses observations d'une no...

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BIOLOGIE I

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J

appare,l de Golgi a cent ans Voila cent ans, l'italien Camillo Golgi publiait ses observations d'une nouvelle structure cellulaire. Depuis lors, les biologistes ont d~couvert toute la compIexitd d'organisation de l'<( appareil de Golgi ,,, son importance cruciale pour l'Slaboration des proteines, et certaines consSquences pathologiques de ses anomalies. *ESA CNRS 6037, Universite de Rouen, 76821 Mont-Saint-Aignan cedex. Fax : (33) 02 35 70 55 20. adriouic@cril~an.fr

sommes ,5 Paxie, ell Lombardie, a't l'aube du XX ~' si~cle. Camillo Golgi, 54 arts, professeur/~ I'universit~! et swcialiste de l'dtude des tissus animaux par microscopic, dtudie des cellules de ous

Purklnje de cervelets de chat, de hibou et de chien, grfice a une technique de coloration des neurones de son invention : la reazione ~era (r~action noirel. II observe U[l curieux r~seau de membranes, lille

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structure cellulaire color6e en marron-noir qui n'avait iamais C't6 d&rire auparavant. F.n avril 1898, il publie pour la premiare lois ses observations, qua~ifiant la structure d'apparato

reticMare interno,

ou

appareil r&iculaire interne (1). En 1900, Iors du Congrfs international d'anatomie, organisd il Pavie, (;olgi confirme la presence de cet organite dans plusieurs autres cdlules animales, appartenant aussi bien i~ des vcrtdb:eSs qu'i~ des mvertdbr(,s. [!n 1907, son cor&ipiendaire du pnix Nobel de m~?decine, Ramon Y ( ajal,

{1) C Gotgi (1898) Arch Ital Biol 30. 60-71.

L'appareil de Golgi d'une cellule animale, en microscopie electronique, avec ses tubules et ses vesicules.

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nomme la structure ,, appareil r6ticulaire de Golgi ,, (voir l'encadrd 1). l.a nouvelle description provoque une veritable ~, ru& ,,, aussi bien chez ]es animalistes que chez les v6getalistes. Plusieurs chercheurs tentent de reproduirc la reaction noire, avec plus ou moins de succ~s, pour identifier la structure dans d'autres orga,fismes. Ainsi, en 1928, deux ans aprbs la mort de Go|gi, l'Am~ricain Robert Bowen identifie pour la premibre tois chez les plantes sup&ieures l'eqmvalent de l'appareil de Golgi ddcouvert chez les animaux (2).

{2} RH Bowen (1928) Z ZetI-Forsch Mikrosk Ana 6,689725. (3) R Baker (1963) J RoyMicroscSoc82, 145-157

> Une controverse de cinquante ans

A l'dpoque, plusieurs cytologistes affirment cependant que la structure decritc n'est qu'un artefact apparu 'a la suite de la prfparation des ~chantillons biologiques. Les partisans du ,, Golgi .,, quant fi eux, s'efforcent de convaincrc les sceptiques en reproduisant les experiences, am61iorant les techniques, et multipliant sdminaires el: conferences. Ce debat dure pres de cinquante ans, dormant lieu .~ une s~'rie d'articles connue sous le titre de ,~ Golgi controversy ~, ; le chef de file en est ]'Anglais .John Baker (3). La controverse finit par s'dtemdre en 1954, Iorsque AJ Dalton ct MD Felix, ainsi que Fritiog Stig Sj6strand et V Hanzon, visualisent Fappareil de Golgi en microscopie dectronique, dans les cellules pancreatiques et dans celles de l'6pididyme de' souris (4, 5). Chez ]es plantes, (;ordon Whaley est l'un des premiers (~ obtenir, cmq ans plus tard, de telles images i~ partit des cellules de la coiffe de la racine de plusieurs espi}ces (mais, petit pois, etc) et de glandes secr,Srrices de, plantes carnivores cornme Drosophyllum ou Drosera (6)

(voir l'encadrd ci-dessus). Durau: les armies cinquante et soixante, les biologistes se mettent explorer dans le d('tail, microscopes dectroniques fi l'appui, la morphnlogie du , G o l g i - . Progressivement, sos fonctions apparaissent, notamment grfice aux travaux de l'~quipe de (,eorge Palade, fi l'Institut Rockefeller (New York) : cet appar~:il tric ]es milliers de proteines synthdtis~t's dans la cellule, puis les achemme vers d'autres compartiments ccllulaires ou l'ext6rieur de ta cellule. Pour ce faire, le Golgi emballe les proteines dans des v6sicules qui sont ensuite a:gui]lees vers diverses destinations : ses propres membranes, oO agisscnt diffdrcntes pro-

(4) AJ Dalton et MO Felix {1954) AmerJ Anat 94 171-187

Les plantes carnivores font appel au - Golgi ,, pour capturer les insectes. Ainsi, les feuilles rondes de Drosera rotundifolia (ci-dessus) sont hedssees de tentacules coiff6s d'une petite glande en forme de boule de couleur rouge. Cette glande est remplie d'un liquide visqueux et gluant, fabdqu6 par l'appareil de Golgi et s~=cr6t~ via des v6sicules golgiennes & la surface de la feutlle. Cette substance visqueuse a pour principale fonction d'engluer et de pi6ger les insectes qui se posent sur la feuille. Des (~tudes de microscopie 6tectronique effectuees par Eberhard Schnepf 8 I'universit6 de Heidelberg o ~ montrd que les glandes sfjcr~tdces prdsentent de nombreux empilements golglens et des v6sicules golgiennes extr(~mement d6velopp6es, preuve de leur grande activit~ dans la production de ,< la substance gluante de pidgeage ,,. Cette substance est un mucilage compos6 pdncipalement de polysaccharides de type pectique, riches en acide glucuronique, en galactose et en arabinose, et possd~lant des propri~t6s g61ifiantes.

t6ines n6cessaires aux fonctions golgiennes ; la membrane plasmique, au sein de laquelle s'ins~rent de multiples proteines membranaires en contact avec l'ext~rieur ; les compartiments dits ,, lytiques ,, (lysosomes chez les mammif8res, vacuoles chez les plantes), off des enzymes ~, dig~r e n t - des matSriaux endogbnes et exog~nes ; et l'espace extracellulaire, off est exportee par un processus d'exocytose une grande vavi~te de produits de s&r~tion (hormones, protdines plasmatiques, anticorps, protdines de la matrice extracellulaire, polysaccharides, etc). Uautre fonction vitale du (;olgi est la maturation des glycoprotdines, proteines pourvues de chaines glucidiques, et la modification biochimique des protdines qui lui parviennent, par addition de divers groupements (phosphates, sulfates,...), ou par coupures de certains fragments de ces proteines. Aujourdqmi. le terme -appareil de Go]gi., se r~f/:re fi t'ensemble des empilements golgiens de /a celtule, encore appeles dictyosomes chez les plantes. Un empilement golglen est constituc d'un ensemble de petits

sacs aplatis et superposes, appel& saccules ou citernes. Chez les eucaryotes (qui poss~dent des cellules noyau), les empilements golgiens comportent 5 'a 7 citernes, bien que ce hombre puisse varier d'une cellule I'autre et d'un organisme fi I'autre, atteignant patrols plus de 20 fi 30 citernes chez certaines algues. > Les quatre compartiments golgiens

Dans les cellules animales, les empilements golgiens se trouvent g6neralement c6te h c6te, interconnect~s lat6ralement par des tubules, formant ainsi un ruban continu et toulOUtS adjacent au noyau. Chez les plantes, ils sont plut6t dispersSs et libres dans tout le cytosol. Darts les deux cas, leur structure interne est compos~e de trois compartiments distincts comportant chacun une ou plusieurs citernes : le cis-(;olgi, g6n& ralement proche du noyau, le Golgi median et le lrans-Golgi (voir la figure I p 29). L'amiSlioration des techniques de preparation des Jchantillons, grfice fi la cryofixation et sous forme de coupe~; extr~mement fines, BIOFUTUR 176 • Mars 1998 27

(5) FS Si6strand et V Hanzon (1954) Exp Ceil Re~;7. 415-429 (6} WG Whaley et at ( 1959} J Biophvs Biocheol Cyto! 5, 5 i)1-506.

[ BIOLOGIE]

(7) G Griffith et K Sirnons (1986) Science 234, 438443.

(8) A Schweizer etal (1988) J Cell B/o/ 1{)7, 1643-1653

a encore perfectionn~ cette description. Les trois compartiments, cis, mSdian et trans sont maintenant ddfinis selon des crit&res morphologiques tr~s pr&is : la densit~ des membranes, la largeur de la lumi~re des citernes, l'espace entre les citernes, etc. De plus, en 1986, Kai Simons et ses collaborateurs du Laboratoire europ~en de biologie moldculaire (Heidelberg, Allemagne) ont identifi~ un r6seau de membranes associd fi la face trans de l'empilement golgien (7). Ce compartiment, appel~ rdseau trans-golgien, ou r&iculum du trans-Golgi (pour trans-Golgi network, TGN), a ~t~ ddcrit d'abord chez les animaux, puis chez les plantes. II est aujourd'hui consid6r~ comme le quatri~me compartiment golgien.

work, CGN) (8). Ce r6seau n'est pas systdmatiquement rencontrd dans toutes les cellules ; il n'a encore jamais 6td identifi6 chez les v6g6taux, par exemple. > Les v~sicules de transport entrent en scene

Cette structure de base des empilements golgiens - le CGN mis fi part existe dans toutes les cellules eucaryotes. De petites diff&ences (la taille des citernes et des v6sicules, leur nombre, la densit~ de leurs contenus, etc) peuvent exister d'un organisme ou d'un tissu fi l'autre. Cela traduit g~n& ralement l'&at des activit~s de synth~se et de s&r&ion de l'appareil de Golgi, ainsi que la fonction sp~cifique du type cellulaire auquel il appartient.

zone pdriph6rique donne naissance, par un processus de bourgeonnement, fi des v6sicules (des sphbres entour6es d ' u n e membrane) d'un diam~tre moyen de 50 & 70 nm, qui sont responsables du transport des mol&ules appr&~es et trides par le Golgi. En effet, ces v6sicules peuvent fusionner avec les citernes et ainsi y d&erser leur contenu. Le Golgi produit essentiellement des ,, v~sicules & clathrine ,, et des ~, v~sicules COP ,. (pour coat proteins, prot6ines de manteau). Les premii~'res bourgeonnent fi partir du rSseau trans-golgie_n en direction des compartiments lytiques de la cellule, riches en enzymes. Elles tirent leur nom d'une prot6ine qui est le constituant essentiel d'un manteau de 5 'a 10 nm d'6paisseur tapissant leur

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Enfin, fi la fin des ann6es quatrevingt, le groupe de Hans-Peter Hauri, de l'universit6 de Bfile (Suisse), a mis en ~vidence, dans quelques cellules de mammif~res, un rdseau associ6 ~ la face cis du Golgi, appel6 rdseau cis-golgien ou r&iculum du cls-Golgi (pour cis-Golgi net28 BIOFUTUR176 • Mars 1998

Comment ce r6seau complexe fonctionne-t-il ? L'analyse, par microscopie dlectronique, des m e m b r a n e s purifi~es du Golgi a r6v616 que les citernes poss~dent deux domaines : un domaine central tr~s aplati, et un domaine pdriphdrique (ou marginal) plus ou moins dilat~ et perfor6. Cette

face externe, et qui est associde -a un complexe protdique membranaire appel6 ~, adaptine ou a d a p t a t e u r - . La clathrine et l'adaptateur interviennent en fournissant ['~nergie n6cessaire fi la d6formation m~canique des membranes golgiennes et, par IM /t la formation des v&icules

RE rugueux

R~iculum

Cis-

Go/gi

Trans-

Membmne

R~iculum

Fig I - Uappareil de Golgi trie les prot~ines qul lui parviennent du rd~culum endoplasmique (RE) et les achemine vers d'autres, compartiments ,, cellulaires ou vers I'ext~eur de la ceUule (d'apr~s H Lodish et al (1997) Biologie mok~culaire de la cellule, De Boeck UniversitY).

par b o u r g e o n n e m e n t . Chez les mammif~res et les plantes, le voyage des v~sicules fi clathrine jusqu'aux lysosomes, ou fi la vacuole, est dit signal-d~pendant, car les prot~ines destinies fi ces compartiments (des enzymes essentiellement) portent un signal d'~ adressage ~, sp~cifique reconnu au niveau du trans-Golgi, et qui leur permet d'@tre tri4es puis transport~es jusqu'fi leur ,~ adresse ~,, leur lieu de stockage. Ainsi, les prot~ines de lysosomes portent toutes un sucre signal : le mannose6-phosphate. Celui-ci est greff~ fi la prot~ine dans les premieres citernes cis-golgiennes. Les protdines vacuolaires des plantes, quant /t elles, ne poss~dent pas de signal glucidique, mais une petite s~quence-signal peptidique qui peut varier d'une prot~ine ~ l'autre. Les v~sicu)es COP, deuxi~me type de v6sicules golgiennes, acheminent les prot~ines d ' u n c o m p a r t i m e n t l'autre de l'appareil de Golgi, du r~seau cis-golgien (chez les mammif~res) au r~seau trans-golgien (9). Ces v6sicules sont recouvertes ext&ieurement d'un manteau prot~ique appel~ ,, coatom~re ,,, form~ de coat proteins (COP). Celles-ci sont recycl~es en permanence entre le cytosol et les membranes golgiennes (voir l'encadr~ 2). Leur association avec les citernes golgiennes est, elle aussi, indispensable au bourgeonnement et

la formation des v6sicules. Ce type de transport, ainsi que l'acheminement des prot6ines depuis le Golgi

jusqu'/l la membrane plasmique, est non s~lectif (autrement dit, signalind4pendant) : selon le module le plus couramment admis, les passagers prot6iques ne sont pas tri~s mais passivement inclus dans les v6sicules

(bulk flow). > La maturation des glycoproetines, ph~nom~ne capital

Mais, d'ofi proviennent ces passagers avant d'entrer dans le Golgi ? Comme l'a d6couvert, dans les ann6es soixante, le groupe de Georges Palade, 8 New York, les prot~ines qui traversent le Golgi sortent toutes, via des v6sicules de transport, d'un autre r6seau membranaire : le r~ticulum endoplasmique (RE, appel~ aussi r6ticulum endoplasmique rugueux, ou RER). Ce r6seau a 6t4 observ~ pour la premi&e lois, en 1945 fi New York, par le Beige Albert Claude et les Am6ricains Keith Porter et Ernest Fullam. Au d6part, durant leur synth~se sur les ribosomes du cytosol, c'est-~-dire lors de la traduction des ARN messagers, porteurs du code g~n6tique, les prot6ines en cours d'allongement sont transport6es dans la lumi~re du RE. Les prot~ines naissantes suivent 1~ une premiere 6tape de ,, glycosyla-

tion ,,, ph6nom~ne indispensable leur fonction. Chez tous les eucaryotes, ce ph6nom~ne consiste en l'addition, dans le RE, sur certains r6sidus d'asparagine (un acide amin4) sp6cifiques de la prot4ine naissante, d ' u n oligosaccharide (petite mol6cule form6e de plusieurs monosaccharides, ou sucres simples) : le N-glycanne. Cet oligosaccharide comprend 14 mol6cules de sucre : 2 N-ac6tylglucosamines, 9 r~sidus mannose et 3 r6sidus glucose. La glycoprot6ine quitte ensuite le RE, non sans avoir perdu les trois r6sidus glucose et un mannose de son N-glycanne. Puis elle est convoy6e dans les v6sicules du RE jusqu'au compartiment cis du Golgi. Elle passe alors au sein de v~sicules fi coatom~re, ~ travers les diff6rents compartiments golgiens, j u s q u ' a u compartiment trans. Lots de cette travers6e, les Nglycannes sont modifi6s sous l'action de diff~rentes enzymes golgiennes. Cette maturation consiste principalement en l'61imination de r~sidus mannose et, surtout, en l'ajout, dans un ordre precis, de r4sidus N-ac&ylglucosamine, de fucose, galactose, acide sialique, etc, qui donne au glycanne une structure arbustive complexe (10). Les prot6ines sont ensuite tri6es dans les compartiments trans et dans le r~seau trans-golgien, avant d'&re achemin~es vers leur destination finale.

(9) 8 Goud et A Tixier-Vidar(1994) La Recherche26, 254-260. (10) J Montreuil et F Gros (1996) La vie des SciencesTome 1, N°3, 175-191

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Pour en savoir plus Ouvrages et articles • C De Duve (1988) b'ne v/site

guid#e de/a celMe vivante. De Boeck Uniw.=rsite * A Tixier-Vidal (1997) Biologie

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Plant Sc,ences 1. 365-401 Sites Web

Sur /a vi~~.de Cami/h~ Go/gi http :/,,www intercam ib' valcam/assoc/ golgil (en italien

Sur tappareil dd' Golg~ h[tp:// cellbio utmb.edu/ cellbio, golgi.htm

appareil de Golgi est devenu, ces darn/eras annees, I'ortrent une continuite membranaire entre les cliff,cants saccules anite o~J se cristallise la compdtition intemationale entre golgiens, et peu ou pus de v6sicules, ne collent pus tout a fait specialistes du transport intracellulaire des prot(~ines. Le but avec la thdorie vesiculaire (6). Les partisans d'une ,, maturaest d'expliquer, & I'echelon moldculaire, les mecanismes pertion ,, des citemes golgiennes, avanc6e dans les annees mettant & la fois le transport s6quentiel (l'ajout de sucres sesoixante, sont de plus en plus nombreux (7). D'apr6s ce moduion un ordre pre~cis) et vector/el (de la face cis & la face trans le, le transport vesiculaire n'a lieu qua duns le sans rdtrograde. du Golgi) des prote~ines, le retour de nombreuses protdines Le transport ant6rograde sa ferait par le jeu de la formation vers le r6ticulum andoplaarnique rugueux (RE ou RER) - ce trapermanente d'une nouvelle creme cis ~ partir de vesicules fic ,, rdtrograde ,, est emprunte par exemple par les toxines venant du RE. A mesure que d'autres citernes cis se forment des bact~ries Shigella (t) -, et le maintien de I'intd~3rite des derri6re elle, cette c/tame in/t/ale progresse & travers I'empilemembranes golgiennes. ment pour devenir c/tame m6diane, puis trans. Au cours de sa Le modi~le g~ndralement admis aujourd'hui pour le transport progression, sa structure ~volue et son contanu enzymatique intragolgien des prot6ines est celui du <
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clans le transport des prot6ines (9) (volt photographie), Les deux modbles (maturation et transport vesiculaire) coexistent-ils chez un m~me organ/sine ou dans une m(~me cellule ? Cent ans apr~s sa ddcouverte, I'appareil de Golgi est loin d'avoir livre tous ses secrets ! • Bruno Goud

Laboratoire Mecanismes moldculaires du transport intracellulaire, UMR CNRS 144, Institut Curie, 26 rue d'UIm, 75248 Paris cedex 05. E-mail : bgoud@curie, fr (1) L Johanneset B Goud(1998) TrendsCellBio/sous presse. (2) JE Rothmanet LOrci (1992) Nature355,405-415. (3) JE Rothmanet G Warren (1994) CurrBiol4, 220-233. (4} P Cossonet F Letourneur(1994) Science263, 1629-t631. (b-} LOrci etal(1997) Cell90, 335-349. (6) A Rambourget Y Clermont(1990) Eur J CellBio151,189-200. (7) E Schnepf(1993) Protoplasma172, 3-11. (8) B Beckeretal(1995) TrendsCellBiolS, 305-306. (9) A Echardetal(1998) Science279,580-585.

stnte complbte des ~v6nements intervenant dans ]a maturation des N-glycannes darts le Golgi a et6 mise en 6vidence gnice fi la contribution de plusieurs &tuipes, dont celles de Stuart Kornfeld (universiK" Washington, St Louis, Missouri), d ' f i a r r v Schachter (universitd de Toronto) et de James R o t h m a n (Memorial bloan Kettering Cancer Center. New York). Ces travaux ont tout d'abord permis d'identifier les diffdrentcs enzymes golgiennes (appelces glyccsidases et glycosyltransfdnlses) ilnpliqudes dans le processus de maturation des N-gtycannes, puis I'ordre dans lequel elles agissent. Dans les ann~es quatrevingt, los rema:quables travaux de biochimie dam; le laboratoire de Rothman ont montr~ que ces enzymes se trouvent associt~es fi des cil:ernes diffcrenl;es du Golgi (11). Des &udes de microscopic ,~lectronique ,Je la m[~n]e dquipe et de celles d'Eric Berger cr de Jurgen Roth {universitds Je Berne et tie Gen~ve) ont aussitdt confirmc ces resultats grfice "a l'application d'anticorps spdcifiques des glycosyitransfe}rases golgiennes. Ces travaux ont conduit ~'~ un mod61e de maturation des N-glycannes dans te Golgi des mammifbres, qui est gdn& ralemenr admis aujourd'hui (voir l.a

ciaes aux cancers du c61on ou de l'estomac (lC). Mais ces structures golgiennes ne se contentent pas d'ajouter ou de moditier des gluddes sur les prot~ines, elles produisent dgalement dlesm~mes des glucides complexes ~ pardr de sucres simples. L'un des exemples les plus parlants est la paroi qui enmure les cellules v~g& tales ; elle est un pur produit de l'appareil de Golgi (voir photo page suivante). Structure dynamique et vitale sans laquelle la cellule ne survivrait pas, la paroi conf/ere i~ la cellule - et

SYNTHESE

charides, macromol&ules form&s de sucres simples reli& entre eux pour former des chaines plus ou moins ramifi6es de cellulose, d'h6micelluloses et de pectines. ()r, dans les ann~es soixante et soixante-dix, les biologistes ont mis en 6vidence la richesse des membranes golgiennes en composants glucidiques similaires ceux de la paroi. Yoila une dizaine d'anndes, les groupes d ' A n d r e w Staehelin ~ l'universit6 du Colorado, et de Peter Mbersheim, aujourd'hui ~t l'universitd d'Athens, en G6orgie, ont r6ussi ~ produire des anticorps sp&i-

(12) M Chrispeels (1991) Annu Rev Plant Physiot 42, 21 53. (13) A Driouich eta/ (1993) Trendsin Biochemical Sciences 18 210214. {14} A Driourch et LA Staehelin (1997) in The Golgi Apparatus. EG Berger et J Rolh (eds), Birkhauser Verlag, B~ile 275 301

DES PROTEINES

(15} P Albersheim et A Darvili (1985) Pour la Science 97. 18-27. (16) PJ Moore er a/ (1986) Plant Phys/ol B2,787-794 (17l GF Zhang and LA Staehehn 1199,i!) Plant Physiot 99, 1070-1083 {18) Y Misumi etal (1986) J Bioi Chem 261, 11398-11403

figure 2). Dc mbmc, chez les plantes, les etapes tie la nlaturati~m des N-glycannes dans le Golgi sont retativement bien dessindes, griice surtout aux travaux du groupe de Marteen Chrispeels, de l'universi~(' d,: CJlifornie (San Diego) 1~21. Toutemis, il n'a pas encore dtd possible de Iocaliser directement, t onnne chez les nammif~res, les difffremes enzymes de maturation dans les compartm~ents g:~lgiens, faute d'enzymes purifides et d'anticorps disponines et utilisables par les techniques d'immunocvtochimie (13, ~41. l a glycosylati(.n des prot~ines ( J o n n a n t des glycoprotdines) amorode par Ic rdticulum endoplasmique e,~ compldtt)e par I'appareil de Golgi n tlne grandc importance fonctiunnelle pour [es &res vivants. Sans ele, les gl~copret~ines ne sont pas attires. Ainsi, des ulcbres gastriques oa duoddnaux sont 1K'es fi une ,, s i a l y l a t i o n , (un aiout d'acide sialique) incomp]{}te, au niveau du (,olgi, des mucin,es assurant la prortction des el3ith~liums, l)e m~me, des modifications profondes de la glycosyfathm sont souvent asso-

(11) JE Rottlrnan (1985) Pour la Science 97. 18-27.

(19} ,] LippincottSchwartz et a~ (198!)) Ceil56, 8Ol813.

Fig 2 - Modele ,, consensuel ,, de la maturation des N-glycannes des glycoproteines de mammifere, lie a la ,, compartimentation ,, du Golgi.

& la plante entiere - sa forme et sa rigidit& Elle participe dgalement, grfice a ses composants moldcu]aires - principalement ceux qui sont affinds darts l'appareil de (;olgi, comme certaines pseudo-horn]ones vC-g~.tales, les oligosaccharines (151-, a la rdgulation de la croissance et du dt'veloppement~ ,~ la morphogen&e, e t a la ddtense contre les agents pathogbnes et les stress environnementaux. La paroi est constitu& ~ principalement (a plus de 90 %) de polysac-

fiques de deux types de polysaccharides complexes de la paroi : une h6micellulose, le xyloglucanne (XG), et un complexe pectique (PGA/RGI) associant l'acide polygalacturonique et le rhamnogalacturonane 1. Grfice ces anticorps, les chercheurs ont localis~ ces polysaccharides, par microscopie 6lectronique, dans les citernes golgiennes de plusicurs esp6ces veg&ales, lls apporta~ent ainsi la preuve dOfinitive de la pr& sence et de la synth&e de poly~accharides dans I'appareil de Golgi (16) BIOFUTUR 176 • Mars !998 31

!-BIOLOGIE] ne A (BFA), s6crdt6e par le charnpignon pathog~ne Alternaria carthami, est responsable d'une maladie rnortelle du carthame (Cartbamus tinctorius), une plante de culture (Asterac:6es) produisant une huile de tr~s haute qualitd. Le groupe d'Ulrich Matern, de l'universit6 de Freiburg, en Allemagne, a montrd que, lors de l'infection, de grandes quantit6s de BFA et de Fun de ses ddrivds, la 7-d6hydroBFA, s'accumulent dans les feuilles de carthame, provoquant la n6crose des feuilles puis la mort de la plante. Or en 1986, l'dquipe de Yoshio Misumi, ;i l'universitd de Fukuoka, au Japon, a montrd que la BFA inhibe la s6cr6tion des protdines passant par le Golgi (18). Puis en 1989, le groupe de Richard Klausner, des Instimts am6ricains de la Santd (NIH), ~ Bethesda (Maryland), a montr~ que la BFA induit Vue en microscopie electronique de deux empilements golgiens d'une celune d~sint~gration lule veg~itale. C : face Cis du Golgi ; T : face Trans du Golgi ; TGN : r~seau totale des structures trans golgien ; P : paroi ; V : vacuole. (d'apres r~f 13) golgiennes des cellules animales 0 9). Dans ce contexte, j'ai voulu savoir, ge de ces polysaccharides est minuavec mes collaborateurs de l'univertieusement compartimentd au sein du (20) A Driouieh et al sit~ de Rouen, si la 7-d6hydro-BFA a Golgi (17). (19971 Plant Phys~ol des effets directs sur [a structure et la 113,487-492 fonction de l'appareil de Golgi des > Des m a l a d i e s li~es plantes. Nous avons tout d'abord aux a n o m a l i e s g o l g i e n n e s (21} JG Donaldson et al (1992) Nature, montr6, en collaboration avec 360, 350-352. Andrew Staehelin, clue la toxine inhiLe Golgi des plantes, micro.-usine be la s~cr6tion des prot~ines et fabriquer des sucres, apparalt finale(22) JB Helms et J entraine une d6sintdgration complete ment constitu6 de differents ,, ateRothman (1992) A'adu Golgi chez l'6rable sycomore (20), liers ,, hautement sp&ialis& produiture 360.352-354. sant chacun un ou plusieurs types de et chez le mais. Nos travaux en cours (23) NK Gonatas montrent que les deux toxines promatdriaux de construction de la (1997} m The Golgi paroi. Toutefois, cette compartimenw N u e n t une ddsint6gration totale Aoparatus EG Berdes saccules golgiens du carthame, tation du Golgi pour la synth~se des ger and J RoIh (eds). Birkha~ser emp&hant ainsi toute fonction d'aspolysaccharides n'est pas gdn6rale, Verlag. B~!e, semblage et de transport des prod'une esp/ece '3. I'autre et d'un tissu 275-30; tdines, y compris les prot6ines de l'autre. Chez les plantes, le Golgi est d6fense contre les pathog~nes, telles connu pour adapter sa structure, s e s (24) H Yamada les glucanases et les chitinases. syntheses et ses s&rdtions au type (1996) in Pectins and Pe~tinasgs. cellulaire auquel il appartienr (14). En 1992, le groupe de Klausner a J Vissel and AGJ Dans ]e monde v~g6tal, ]e dysfoncmontr6 que la BFA provoque (en 30 Voragen (eds) tionnennent de l'appareil de Golgi a 'a 60 secondes) la dissociation d'une pp 173-190. ~galement des incidences patholoprot6ine des saccules golgiens, appegiques. Ainsi, une toxine, la br~feldi16e la tg-COE La I~-COP est la prot~i- sauf la cellulose, qui est synth6tis4e au niveau de la membrane plasmique, lls ont 6galement montr6, gr~ce ~ ces anticorps, que l'assemb]a-

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ne majeure d'un complexe de sept prot~ines qui forme le coatom~re, le manteau des v6sicules rcsponsables du transport des protdines entre les diff6rents compartiments golgiens. Ce manteau contient une autre protdine, appelde ARF (pour ADPRibosylation Factor). Elle n'apparfient pas au complexe coatomi~re mais elle est n&essaire fi sa fixation et fi son assemblage sur la face externe des membranes golgiennes, depuis le cytosol. Les 4quipes de Richard Klausner et de James Rothman ont montr~ simultandment que I'ARF est la vraie cible de la BFA (21,22). Celle-ci agit en fait en amont, non pas pour provoquer la dissociation des coatom~res d6j'a fixds aux membranes, mais pour emp~cher la fixation des coatom~res sur ies saccules golgiens en interft~tant avec l'activation et la fixation de la protdine ARF, ce qui induit la perte de l'unit6 structurale et fonctionnelle de l'appareil de Golgi. > Possibililes therapeutiques

?

Les multiples activit6s de l'appareil de Golgi dans l'assemblage et l'acheminement des prot6ines et des polysacchatides, font de lui un centre essentiel contr6lant de grandes fonctions qui assurent la survie de la cellule et de l'organisme. Des ddfauts des activites de s&rdtion et de tri du Golgi chez les mammif&res (telles la s&r&ion d'hormones par des cellules glandulaires, ou encore l'assemblage d'oligosaccharides sur quelques glycoprotdines) sont /~ l'origine de pathologies importantes {10). De m~me, la perte de l'int~grit~ structurale du Golgi (atrophic puis fragmentation) est 6troitement ]i6e ~t des pathologies graves, comme la maladie d'Mzeihmer /23). I1 est, par cons6quent, essentiel de poursuivre les recherches sur l'appareil de Golgi, pour mieux connaitre ses fonctions de transport et les m&anismes maintenant son intdgrit6 structurale. Par ailleurs, certains produits polysaccharidiques golgiens des plantes (des pectines essentiellement) peuvent avoir des propri6t~s th6rapeutiques (24). Cette d6couverte ouvre la porte aux recherches biotechnologiques visant utiliser comme m~dicaments les pectines de la paroi v6getale, ddifi valoris~es en tant qu'agents g61ifiants dans plusieurs produits alimentaires. ®

Remerciements ~ Andrew Staehelin et Marc le Mosquet