Annales de cardiologie et d’angéiologie 51 (2002) 223–224 www.elsevier.com/locate/ancaan
Compte rendu de congrès
Microbulles cibles et thérapeutiques Target microbubbles J.L. Vanoverschelde * Université de Louvain, clinique Saint-Luc, 10, avenue Hippocrate, 1200 Bruxelles, Belgique
Résumé Du fait de leurs propriétés physiques lorsqu’elles sont soumises à des excitations ultrasonores, les microbulles de contraste agissent comme des noyaux de cavitation et peuvent donc servir de vecteurs facilitant la délivrance locale de médicaments ou de matériel génétique. En travaillant les propriétés physicochimiques de la coque des microbulles, il est en effet possible de fixer ou d’incorporer en leur sein les substances que l’on désire délivrer localement. Lorsque les microbulles ainsi modifiées pénètrent dans la zone d’insonification, leur cavitation permet la libération locale des produits qu’elles transportent. © 2002 E´ditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Because ultrasound microbubbles lower the threshold for cavitation by ultrasound energy, they may be used as cavitation nuclei for drug and gene delivery. By tailoring the physical properties of microbubbles and coating materials, drugs and genetic drugs can be incorporated into ultrasound contrast agents. As the microbubbles enter the region of insonation, the microbubbles cavitate, locally releasing the therapeutic agents. © 2002 E´ditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. Mots clés: Échographie de contraste; Délivrance locale Keywords: Contrast echography; Locally releasing
1. L’ECC comme outil thérapeutique La meilleure connaissance des interactions entre les produits de contraste ultrasonore (PCUs), les ultrasons et la microcirculation est à l’origine de travaux expérimentaux qui suggèrent l’utilisation de l’ECC à des fins thérapeutiques. L’ECC permet en effet d’envisager de délivrer localement et de manière ciblée, des médicaments ou des séquences de gènes au myocarde. Le principe général est le suivant. Lorsque des microbulles de gaz en suspension dans un liquide sont soumises à des excitations ultrasonores, leur volume oscille suivant les variations de pression provenant de l’onde ultrasonore. Lorsque le champ ultrasonore auquel sont soumises ces microbulles est de faible intensité
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (J.L. Vanoverschelde). © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. PII: S 0 0 0 3 - 3 9 2 8 ( 0 2 ) 0 0 1 1 4 - 2
(< 100 kPa), les variations de volume se font de façon rythmique autour d’un volume d’équilibre. Ce phénomène est parfois qualifié d’oscillation respiratoire, de cavitation stable ou de cavitation non inertielle. Lorsque l’intensité du champ ultrasonore dépasse 1 mPa, les phases d’expansion et de contraction des microbulles deviennent plus violentes, et conduisent in fine à leur implosion. Cette seconde forme d’activité est qualifiée de cavitation transitoire ou inertielle. Le collapsus d’une microbulle induit généralement une importante augmentation de chaleur et de pression locale qui, lorsqu’elle survient dans la lumière des vaisseaux, peut provoquer des lésions catastrophiques sur les cellules environnantes. Comme cette activité est fortement localisée, l’importance des dommages engendrés par un tel collapsus dépend du site où il se produit. Par exemple, la rupture de la graisse sous-cutanée risque d’avoir peu de répercussions cliniques, alors que des dommages similaires sur un embryon peut avoir de graves conséquences sur son développement.
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J.L. Vanoverschelde / Annales de cardiologie et d’angéiologie 51 (2002) 223–224
Au cours de travaux précédents [1], nous avons étudié les conséquences morphologiques et fonctionnelles, pour le cœur, des phénomènes de cavitation inertielle induits au cours d’une échocardiographie de contraste. Ces expériences ont été menées sur cœurs isolés de lapins, perfusés à l’aide de différents produits de contraste (Pesda, Levovist, Optison, Sonozoid). Il ressort de ces expériences que ni l’administration isolée de ces produits (en l’absence d’insonification), ni l’exposition isolée aux ultrasons (en l’absence de produits de contraste) n’ont de conséquences physiologiques ou morphologiques néfastes sur le cœur. Par contre, lorsque ces produits de contraste sont administrés au cours d’une émission pulsée d’ultrasons, on note une diminution réversible, énergie dépendante de la fonction contractile du ventricule gauche ainsi que l’apparition de ruptures capillaires et de zones d’hémorragie intramyocardique. Ces dégâts tissulaires sont confinés aux vaisseaux sanguins et ne concernent qu’un maximum de 3,6 % des capillaires aux énergies ultrasonores les plus élevées. De manière très intéressante et malgré le nombre limité de ruptures vasculaires, la perméabilité capillaire et l’accessibilité de l’espace extracellulaire à des macromolécules circulantes étaient fortement accrues (plus de 50 % du volume myocardique insonifié). Cette observation laisse entrevoir la possibilité d’utiliser cette approche pour faciliter la délivrance locale de substances actives, voire de matériel génétique. Des expériences récentes, menées par Price et al. [2] dans le muscle spinotrapèze du rat, ont montré qu’il était en effet possible de « délivrer » des particules colloïdales relativement larges à des tissus musculaires, et ce par cavitation inertielle de produits de contraste ultrasonores. Nos propres données montrent la faisabilité d’une telle approche dans le cœur, du moins ex vivo. Des expériences préliminaires réalisées dans plusieurs laboratoires américains montrent le bien-fondé de cette approche. Ainsi, Shohet et al. [3] ont montré que l’insonification du cœur au cours de l’administration intraveineuse d’adénovirus fixés sur des PCUs permettait d’obtenir une expression significative du transgène (en l’occurrence le gène rapporteur de la ß-galactosidase) dans les myocytes cardiaques.
Les possibilités thérapeutiques liées aux PCUs ne se limitent cependant pas à la seule délivrance locale. Plusieurs auteurs ont également montré que la lyse des thrombus pouvait être accélérée par l’ECC, en présence ou en l’absence d’agents thrombolytiques. Enfin, le recours à l’ECC au cours des procédures d’alcoolisation septale se répand rapidement. Nagueh et al. [4] furent parmi les premiers à recourir à cette approche pour identifier l’artère où les injections sélectives d’éthanol devaient être réalisées. L’ECC permet aussi d’évaluer l’étendue de la zone de nécrose provoquée après la procédure.
2. L’ECC comme outil diagnostique Outre les possibilités thérapeutiques susmentionnées, l’ECC permet aussi d’envisager de tracer des phénomènes physiologiques jusque là inaccessibles à l’échographie. En fixant sur les PCUs des anticorps ou des séquences peptidiques, il devient possible d’utiliser l’ECC pour détecter l’inflammation, l’expression endothéliale de molécules d’adhésion ou de visualiser des plaques d’athérome.
Références [1]
Ay T, Havaux X, Van Camp G, Campanelli B, Giselu G, Melin JA, Vanoverschelde JL. Destruction of microbubbles by ultrasound: effects on myocardial function, coronary perfusion pressure and microvascular integrity. Circulation 2001;104:461–6.
[2]
Price RJ, Skyba DM, Kaul S, Skalak TC. Delivery of colloidal particles and red blood cells to tissue through microvessel ruptures created by targeted microbubble destruction with ultrasound. Circulation 1998;98:1264–7.
[3]
Shohet RV, Chen S, Zhou YT, Wang Z, Meidell RS, Unger RH, Grayburn PA. Echocardiographic destruction of albumin microbubbles directs gene delivery to the myocardium. Circulation 2000;101:2554–6.
[4]
Nagueh SF, Lakkis NM, Middleton KJ, et al. Role of myocardial contrast echocardiography during non surgical septal reduction therapy for hypertrophic obstructive cardiomyopathy. J Am Coll Cardiol 1998;32:225–9.