Pathologie pleurale

Pathologie pleurale

Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2011) 3, 95-112 ISSN 1877-1203 Revue des Maladies Respiratoires Organe Officiel de la Société de Pneumo...

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Revue des Maladies Respiratoires Actualités (2011) 3, 95-112 ISSN 1877-1203

Revue des

Maladies

Respiratoires Organe Officiel de la Société de Pneumologie de Langue Française

Actualités L’année 2010 en pneumologie

68470

Coordinateur du numéro : Hilario Nunes

www.splf.org

Juillet Vol 3 2011

Numéro

Spécial

Pathologie pleurale C. Mélenotte, S. Laroumagne, L. Purek, H. Dutau, P. Astoul* Service d’Oncologie Thoracique, Maladies de la Plèvre, Pneumologie Interventionnelle, Hôpital Nord, Pôle CardioVasculaire et Thoracique, AP-HM, Université de la Méditerranée, Chemin des Bourrely, 13326 Marseille cedex 20, France

Recommandations britanniques pour la prise en charge des infections pleurales chez l’adulte. Vers une homogénéisation des pratiques dans ce domaine ? Davies HE, Davies RJ, Davies CW; BTS Pleural Disease Guideline Group. Management of pleural infection in adults: British Thoracic Society Pleural Disease Guideline 2010. Thorax 2010 ; 65 (Suppl 2) : ii41-53. Review.

Introduction Les infections pleurales de l’adulte sont un problème fréquent dans la pratique clinique et leur prise en charge est variable en fonction du tableau clinique, du terrain, du germe responsable, du plateau technique ou structure à disposition ainsi que de l’évolution de la maladie. Elles présentent cependant une morbidité et une mortalité importante. Si une évaluation clinique rapide et une prise en charge précoce réduisent cette morbi-mortalité ainsi que le coût induit pour la société [1], les pratiques sont disparates et une réÁexion basée sur une revue exhaustive de la littérature s’impose aÀn de rendre homogène ces pratiques. Cet article présente les résultats d’une analyse exhaustive de la littérature confrontée à des opinions d’experts dans ce domaine aÀn de déÀnir un guide des bonnes pratiques. Il n’aborde pas le domaine complexe des pleurésies tuberculeuses compliquées, des infections pleurales de l’enfant non plus que des infections de cavité de pneumonectomie.

*

Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (P. Astoul).

© 2011 SPLF. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Méthodes et résultats Une large revue de la littérature permet de revoir les points essentiels concernant les infections pleurales. Il est rappelé à partir de l’historique de cette maladie partant de l’Égyptien Imhotep en passant bien évidemment par Hippocrate et jusqu’au début du XXe siècle où le drainage thoracique était le seul recours réduisant la mortalité à environ 4 %, que l’avènement des antibiotiques changeait profondément l’incidence de l’empyème ainsi que l’écologie bactérienne. Les facteurs de risque de nos jours sont « en miroir » de ceux des pneumopathies même si aucun facteur de risque « conventionnel » n’est retrouvé. La physiologie pleurale est abordée en mettant l’accent sur les connections pleuro-lymphatiques dans les phénomènes d’échange et de transport des liquides et particules ce qui est illustré par l’histoire naturelle des infections pleurales avec le stade d’exsudat (stérile), le stade Àbrino-purulent et le stade plus tardif d’organisation de l’épanchement Àbrino-purulent avec prolifération Àbroblastique et cicatrice induisant des séquelles pleurales. Pour Ànir une actualisation de l’écologie bactérienne est faite à partir de données récentes concernant les germes responsables d’infections communautaires et de maladies infectieuses pleurales nosocomiales. Il est cependant souligné le mauvais rendement des techniques d’isolement des germes (± 40 %) même si l’usage de la PCR, qui n’est pas un examen de routine dans la plupart des centres, augmente la sensibilité [2]. Les recommandations issues de cette revue de la littérature sont résumées dans le tableau 1. L’argumentation de chaque proposition ainsi qu’un algorithme décisionnel peuvent être consultés dans le document source.

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C. Mélenotte et al.

Tableau 1 Guide des bonnes pratiques pour la prise en charge des infections pleurales chez l’adulte. D’après Davies HE et al. Thorax 2010. Médecin

- Un pneumologue ou un chirurgien thoracique doit être impliqué dans la prise en charge d’un patient nécessitant un drainage thoracique pour une infection pleurale (C).

Nutrition

- Une nutrition adéquate est nécessaire pour tout patient présentant une infection pleurale (C).

Prévention des thromboses

- Tout patient présentant une pleurésie infectieuse a un haut risque de développer une thrombose veineuse et devrait recevoir une prévention par héparine (A). Diagnostic

Clinique

- Des signes de sepsis persistant et une augmentation de la protéine C réactive chez un patient présentant une pneumonie après 3 jours d’évolution peut être en faveur d’une infection pleurale (C).

Imagerie

- Tout patient suspect de pleurésie infectieuse devrait avoir des hémocultures sur milieu aérobie et anaérobie (C). - Aucune recommandation ‘gradée’ dans ce domaine. Il est mis l’accent sur l’intérêt de la radiographie thoracique de proÀl et à l’utilisation en cas de doute de l’échographie pleurale même si tous les centres ne sont pas susceptibles de la réaliser. Le scanner thoracique permet dans le cas surtout de pleurésies cloisonnées de localiser et d’évaluer l’épaississement des plèvres pariétale et viscérale (« split pleura sign »).

Ponction pleurale

- Tout patient présentant une pleurésie associée à un sepsis ou une pneumonie requiert une ponction pleurale (C). - La mesure du pH pleural devrait être réalisée en cas de suspicion de pleurésie infectieuse (B). - Lorsque la mesure du pH pleural n’est pas possible, la glycopleurie devrait être réalisée en cas de suspicion d’infection pleurale (B).

Indication du drainage pleural

- Une ponction pleurale ramenant du pus franc ou un liquide trouble rend nécessaire un drainage pleural ainsi que la mise en évidence d’un germe (B). - Un pH pleural < 7,2 chez un patient suspect d’infection pleurale nécessite un drainage thoracique - Une pleurésie para-pneumonique ne possédant pas les critères ci-dessus peut être traitée par antibiothérapie seule (B). - Dans cette situation une évolution péjorative rend légitime une nouvelle ponction pleurale et au moindre doute la mise en place d’un drain thoracique (B). - Les patients présentant une cavité pleurale cloisonnée doivent bénéÀcier d’un drainage thoracique précoce (C).

Type de drain thoracique

- Un drain de petit calibre (10-14 F) est le plus souvent adapté en cas d’infection pleurale sans qu’il y ait un consensus sur la taille optimale du drain (C). - L’insertion d’un drain thoracique doit se faire dans l’idéal sous repérage par une imagerie.

Antibiotiques

- L’antibiothérapie doit être adaptée à l’écologie « moderne » des infections pleurales en tenant compte de l’épidémiologie locale et des proÀls de résistance (B). - Des antibiotiques dirigés contre les germes anaérobies doivent être systématiquement administrés hormis lorsqu’une infection à pneumocoque a été documentée (B). - Les macrolides ne sont pas recommandés hormis en cas de forte suspicion de pneumonie « atypique » (B). - Les pénicillines associées ou non aux inhibiteurs des ş- lactamases, le métronidazole et les céphalosporines pénètrent bien dans la cavité pleurale. Les aminoglycosides doivent être évités (B). - Lorsque l’enquête bactériologique est négative, l’antibiothérapie doit couvrir les germes communautaires, les germes anaérobies ainsi que les staphylocoques résistants (MRSA) (B). - L’antibiothérapie intrapleurale n’est pas recommandée.

Pathologie pleurale

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Tableau 1 (suite) Guide des bonnes pratiques pour la prise en charge des infections pleurales chez l’adulte. D’après Davies HE et al. Thorax 2010. Fibrinolytiques intrapleuraux

- Il n’y a pas d’indication des Àbrinolytiques intrapleuraux en routine (A).

Sepsis persistant et cloisonnement

- Le choix de l’antibiotique doit être revu et le traitement prolongé (D). - Une discussion avec le chirurgien est nécessaire aÀn d’évaluer toutes les possibilités thérapeutiques (D). - Un traitement chirurgical est nécessaire en cas de sepsis persistant et de cloisonnement pleural malgré un drainage thoracique et une antibiothérapie (C). - Si une anesthésie générale est contrindiquée, une nouvelle imagerie et la mise en place intrapleurale d’un autre dispositif de drainage (cathéter radio-guidée, drain de gros calibre) ou l’utilisation de Àbrinolytiques intrapleuraux doivent être envisagées après discussion avec le chirurgien (D).

Bronchoscopie

- Une bronchoscopie ne doit être réalisée qu’en cas de forte suspicion d’obstruction bronchique (C).

Suivi

- Tout patient pris en charge pour un empyème ou une infection pleurale nécessite un suivi après l’hospitalisation (D).

Commentaires Il s’agit d’une publication importante compte tenu de la difÀculté du sujet pour une situation fréquente en pratique clinique. Au-delà des résultats et des recommandations proprement dites pour lesquelles la médiocrité des niveaux de preuve dans ce domaine débouchent le plus souvent sur des recommandations de grade C ou D, ce travail collectif permet d’avoir non seulement une revue sur les infections pleurales à partir d’une bibliographie de 212 articles référencés, mais également offre un rappel sur la physiologie et la physiopathologie pleurale. A ce titre, les pneumologues et chirurgiens se doivent d’en prendre connaissance. On relève essentiellement deux recommandations « fortes » (grade A). La première recommandation porte sur la prévention des accidents thromboemboliques. Cela doit sans doute être pondéré par l’absence d’étude dans ce domaine ayant montré dans cette situation une augmentation de l’incidence des accidents thromboemboliques. Cette revue exhaustive peine d’ailleurs à référencer ces données. La prévention des thromboses doit dépendre de l’état général du patient variable d’un patient à l’autre ainsi que son autonomie ce qui n’a rien de spéciÀque aux infections pleurales. La seconde recommandation porte sur l’absence d’indication en routine des Àbrinolytiques intra pleuraux. Cela va à l’encontre des pratiques les plus répandues. Leur utilisation en pratique courante était basée sur les résultats de plusieurs travaux observationnels ou portant sur de petites cohortes de patients pour lesquels une amélioration du drainage pleural (augmentation du volume de liquide) avait été considérée comme le marqueur d’une évolution favorable rapide. Cependant, une étude randomisée récente (étude MIST) montrait que cette amélioration de la durée du drainage après administration de streptokinase ne réduisait pas la mortalité, le recours à la chirurgie non plus que ne modiÀait la durée d’hospitalisation ainsi qu’à long terme la fonction respiratoire et la présence de séquelles pleurales [3]. La recommandation est essentiellement fondée sur cette étude

randomisée. Les conclusions de cette étude multicentrique par Maskell amènent cependant plusieurs commentaires. Les critères d’inclusion induisaient la participation de patients très hétérogènes à tous les stades de l’infection pleurale et il est facile d’imaginer que ceux présentant une pleurésie purulente « organisée » n’allaient pas bénéÀcier de l’administration de Àbrinolytiques. L’absence d’imagerie particulière requise à l’inclusion ne rendait pas possible cette évaluation. Dans le groupe « Àbrinolytique », le nombre important de patients âgés (60 ± 18 ans) et présentant des comorbidités (65 %) a pu inÁuencer les résultats en termes de durée d’hospitalisation et autres objectifs prédéÀnis. Il n’est pas certain que des sous-groupes de patients ne puissent bénéÀcier de l’administration de Àbrinolytiques intra pleuraux notamment ceux au stade de pleurésie Àbrinopurulente. L’autre volet réside dans l’hétérogénéité de la prise en charge thérapeutique comme l’administration des antibiotiques et les techniques de drainage pleural laissées à l’initiative des cliniciens sans standardisation. Dans l’attente de nouvelles drogues Àbrinolytiques, une étude randomisée avec prise en charge standardisée est toujours nécessaire pour préciser la place des Àbrinolytiques malgré ces recommandations. Le dernier point à mettre en exergue dans ces recommandations est représenté par l’utilisation de la mesure du pH pleural à visée pronostique et comme indicateur du drainage thoracique de la cavité pleurale en l’absence de pus franc. Ceci repose essentiellement sur la méta-analyse de Heffner et al. [4]. Celle-ci montre qu’un pH pleural < 7,2 est l’indicateur le plus puissant pour prédire la nécessité d’un drainage thoracique. Cependant la sensibilité de ce test n’est pas de 100 % et n’est pas un marqueur prédictif de mortalité ou pour un recours à la chirurgie [5]. La critique que l’on peut faire à l’utilisation de ce marqueur est l’hétérogénéité des caractéristiques biochimiques du liquide pleural dans le cas de pleurésie cloisonnée en fonction du site pleural du prélèvement et les nombreux facteurs inÁuençant la qualité de la mesure du pH pleural [6, 7].

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C. Mélenotte et al.

Ces recommandations concernant la prise en charge des pleurésies purulentes n’apportent en soi, hormis quelques points particuliers, aucun élément nouveau et mettent en exergue la difÀculté de la prise en charge. La lecture de cet article est à l’inverse indispensable de part la revue de la littérature qu’elle propose et les rappels sur des éléments fondamentaux des pleurésies infectieuses.

Références [1] [2]

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Finley C, Clifton J, Fitzgerald JM, Yee J. Empyema: an increasing concern in Canada. Can Respir J 2008;15:85-9. Maskell NA, Batt S, Hedley EL, Davies CW, Gillespie SH, Davies RJ. The bacteriology of pleural infection by genetic and standards methods and its mortality signiÀcance. Am J Respir Crit Care Med 2006;174;817-23. Maskell NA, Davies CW, Nunn AJ, Hedley EL, Gleeson FV, Miller R, et al.U.K. controlled trial of intrapleural streptokinase for pleural infection. N Engl J Med 2005;352:865-74. Heffner JE, Brown LK, Barbieri C, DeLeo JM. Pleural Áuid chemical analysis in parapneumonic effusions. A meta-analysis. Am J Respir Crit Care Med 1995:151:1700-8. Davies CW, Kearney SE, Gleeson FV, Davies RJ. Predictors of outcome and long-term survival in patients with pleural infection. Am J Respir Crit Care Med 1999;160:1682-7. Maskell NA, Gleeson FV, Darby M, Davies RJ. Diagnostically signiÀcant variations in pleural Áuid pH in loculated parapneumonic effusions. Chest 2004;126:2022-4. Rahman NM, Mishra EK, Davies HE, Davies RJ, Lee YC. Clinically important factors inÁuencing the diagnostic measurement of pleural Áuid pH and glucose. Am J Respir Crit Care Med 2008;178:483-90.

Les cytologistes et anatomo-pathologistes ont besoin d’une grande quantité de liquide pour faire le diagnostic de pleurésie maligne. Simple exigence ou pertinence scientiÀque ? Swiderek J, Morcos S, Donthireddy V, Surapaneni R, JacksonThompson V, Schultz L, Kini S, Kvale P. Prospective study to determine the volume of pleural Áuid required to diagnose malignancy. Chest 2010 ; 137 : 68-73.

Introduction Le rendement diagnostique de la cytologie pleurale recueillie par ponction comparé à celui des biopsies pleurales percutanées ou par thoracoscopie a été largement étudié pour le diagnostic des pleurésies cancéreuses. Peu d’études cependant se sont attachées à évaluer la quantité optimale de liquide pleural nécessaire pour faire le diagnostic de pleurésie maligne. Une étude prospective récente sur un petit nombre de patients a montré que le recueil par ponction de 50 ml était aussi efÀcace qu’un volume plus important [1]. Le travail de Swiderek et al. a pour objectif de préciser sur une cohorte plus importante de patients présentant une pleurésie suspecte d’être cancéreuse ou cancéreuse le volume de liquide pleural à prélever nécessaire pour le diagnostic.

Méthodes et résultats Il s’agit d’une étude monocentrique, prospective ayant pour but de déterminer la quantité de liquide pleural nécessaire au diagnostic d’épanchement pleural malin. Le liquide pleural était recueilli dans trois aliquots (10 ml, 60 ml, •150 ml) pour une analyse cytologique. Le cytologiste ou l’anatomopathologiste n’était pas informé du volume de liquide pleural recueilli et n’avait pas d’information sur le patient. Chaque prélèvement était centrifugé, et si l’échantillon centrifugé était clair une cytocentrifugation était réalisée. Si l’échantillon présentait des caillots ou si le sédiment restant était sufÀsant, des blocs de cellules étaient analysés. L’objectif était de comparer la sensibilité, la spéciÀcité, la valeur prédictive négative (VPN) et la valeur prédictive positive (VPP) des trois différents volumes de liquide pleural recueilli. Le calcul du nombre de prélèvements nécessaires a été basé sur la notion de 10 % de différence en termes de sensibilité entre deux volumes de prélèvements (observée entre le premier et quatrième quartile dans une étude préliminaire rétrospective) [2], une proportion de paires discordantes autour de 12 %, une puissance du test de 80 % et une erreur Ş à 0,05. Une cohorte de 77 patients présentant une pleurésie néoplasique était nécessaire. Cent vingt et un prélèvements par ponction pleurale ont été réalisés entre septembre 2001 et août 2007, sur 102 patients (60 hommes et 42 femmes). La moyenne d’âge des patients était de 67,8 ± 11,6 ans. Tous les patients avaient un épanchement pleural modéré ou abondant (au mois un tiers de l’hémi-thorax). Quatre vingt dix patients (74,3 %) présentaient un épanchement pleural malin diagnostiqué par cytologie, biopsie pleurale percutanée ou thoracoscopie (adénocarcinome bronchique (34,4 %), cancer broncho-pulmonaire indifférencié non à petites cellules (10 %), cancer bronchique à petites cellules 4,4 %, cancer du sein métastatique (26,7 %), mésothéliome (6,7 %), cancer du rein (5,6 %), autres (10 %)). La moyenne d’âge de cette population était de 67,4 ± 12,9 ans. On notait une différence signiÀcative entre la population de fumeurs et de non-fumeurs avec pour ces derniers un rendement diagnostique des prélèvements plus élevé (84,2 % vs 62,5 %, p = 0,02). Les prélèvements de liquide pleural ont été positifs pour 61 patients et 29 patients ont été diagnostiqués par biopsie pleurale (n = 7), nouvelle ponction pleurale (n = 6, hors étude), ou imagerie (n = 16). À l’examen direct et/ou cytocentrifugation, la sensibilité et la VPN augmentaient de manière statistiquement signiÀcative pour un échantillon de 60 ml par rapport à 10 ml et pour un échantillon supérieur à 150 ml par rapport à 10 ml. Aucune différence n’a été mise en évidence pour la sensibilité et la VPN entre 60 ml et 150 ml. Aucune différence signiÀcative n’était détectée pour la spéciÀcité et la VPP quelque soit le volume du liquide pleural. Le tableau 2 résume l’ensemble de ces résultats. À l’examen direct et/ou cytocentrifugation combiné à l’examen du bloc de cellules, la différence entre l’analyse d’un échantillon de 10 ml et 150ml était signiÀcative pour la sensibilité (75,9 % vs 87 %, p = 0,0099) et pour la VPN (55,2 % vs 66,7 %, p = 0,033), mais aucune différence n’était observée entre les échantillons de 10 ml et 60 ml et entre les échantillons de 60 ml et 150 ml. Aucune différence signiÀcative n’était observée entre les différents volumes pour la spéciÀcité et la VPP. Le tableau 3 résume ces résultats.

Pathologie pleurale

Tableau 2

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Examen direct et/ou cytocentrifugation seule (n = 107) D’après Swiderek J et al. Chest 2010.

Volume

Sensibilité

SpéciÀcité

VPP

VPN

10

48,7 % (38/78)

96,6 % (28/29)

97,4 % (38/39)

41,2 % (28/68)

60

62,8 % (49/78)

89,7 % (26/29)

94,2 % (49/52)

47,3 % (26/55)

150

69,2 % (54/78)

86,2 % (25/29)

93,1 % (54/58)

51 % (25/49)

Valeur de p 10 vs 60

0,0058

0,166

0,096

0,045

10 vs 150

< 0,001

0,095

0,126

0,009

60 vs 150

0,090

0,563

0,645

0,304

VPP : valeur prédictive positive ; VPN : valeur prédictive négative

Tableau 3 Examen direct et/ou cytocentrifugation et analyse de bloc de cellules (n = 71) D’après Swiderek J et al. Chest 2010. Volume

Sensibilité

SpéciÀcité

VPP

VPN

10

75,9 % (41/54)

94,1 % (16/17)

97,6 % (41/42)

55,2 % (16/29)

60

79,6 % (43/54)

94,1 % (16/17)

97,7 % (43/44)

59,3 % (16/27)

150

87,0 % (47/54)

82,3 % (14/17)

94 % (47/50)

66,7 % (17/21)

10 vs 60

0,090

NA

0,483

0,478

10 vs 150

0,0099

0,314

0,074

0,033

60 vs 150

0,0181

0,314

0,060

0,117

Valeur de p

VPN : Valeur prédictive négative ; VPP : Valeur prédictive positive

Commentaires Une pleurésie maligne est un indicateur péjoratif de la survie des patients. À ce titre l’exploration d’un épanchement pleural, situation fréquente en médecine, est primordiale et les moyens multiples. De nombreuses études ont évalué la sensibilité de la cytologie pleurale recueillie par ponction à l’aiguille en comparaison aux techniques de biopsies percutanées ou par thoracoscopie. L’intérêt de la multiplication des prélèvements du liquide pleural par ponction à visée d’analyse cytologique couplée ou non aux techniques biopsiques a également été étudié. Dans tous ces travaux, la technique de prélèvement pleural et notamment le volume du liquide recueilli n’est jamais standardisée et cela peut introduire un biais dans ces études comparatives. L’intérêt de l’étude de Swiderek et al. est son caractère pragmatique avec une population représentative des causes des pleurésies métastatiques habituelles représentées par les cancers broncho-pulmonaires suivis par les cancers du sein. Les résultats sont en faveur de l’intérêt du recueil d’un volume supérieur à 150 ml en comparaison aux volumes de 10 ml et 60 ml.

Une des limites de ce travail est représentée par la longue période de recrutement et le fait que pour une étude prospective seulement 27 % des patients ayant bénéÀcié d’une ponction pleurale pour suspicion de néoplasie n’aient été recrutés et ce pour des raisons d’organisation pratique. L’autre élément est l’absence d’évaluation endoscopique de la cavité pleurale pour cette cohorte de patients. On peut faire l’hypothèse (jamais vériÀée) que la présence de cellules malignes dans la cavité pleurale dépend du type histologique du cancer primitif et surtout du degré d’envahissement de la cavité pleurale au niveau des plèvres pariétale et/ou viscérale ou de la répartition inhomogène des cellules dans la cavité pleurale [3]. Le message est cependant simple et clair qui prône des prélèvements de liquide pleural de volume sufÀsant et dans cette étude de minimum 60 ml ou mieux supérieur à 150 ml.

Références [1]

Abouzgheib W, Bartter T, Dagher H, Pratter M, Klump W. A prospective study of the volume of pleural Áuid required for accurate diagnosis of malignant pleural effusion. Chest 2009;135:999-1001.

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C. Mélenotte et al. Sallach SM, Sallach JA, Vasquez E, Schultz L, Kvale P. Volume of pleural Áuid required for diagnosis of pleural malignancy. Chest 2002;135:999-1001. Baumann MH. A pulmonary myth unmasked? Chest 2002;122:1875-7.

ces méthodes ont leurs avantages et inconvénients sachant que pour ces patients à l’espérance de vie limitée, l’approche thérapeutique idéale doit apporter une amélioration des symptômes, éviter l’hospitalisation et offrir un faible rapport risques/bénéÀces. L’utilisation d’un dispositif de drainage ambulatoire se répand actuellement et devient, notamment pour les pneumologues ne pratiquant pas de symphyse pleurale par thoracoscopie, un « standard » thérapeutique dans ce domaine. Peu de travaux ont analysé cependant le proÀl coût-efÀcacité de cette démarche et le travail d’Olden et al. a pour objet cette analyse en comparant dans la prise en charge des pleurésies malignes récidivantes l’utilisation d’un catheter ambulatoire type PleuRx® (Denver Biomedical Inc., Denver, CO) et une pleurodèse obtenue par administration intrapleurale de talc par un drain thoracique (« talc slurry » des Anglo-Saxons) [3].

La prise en charge des pleurésies malignes doit être basée sur la situation clinique spéciÀque du patient, l’espérance de vie et la préférence du patient. A propos d’une étude pragmatique coût-efÀcacité comparant pleurodèse par talc (« talc slurry ») et drainage « ambulatoire »

Méthodes et résultats

Olden AM, Holloway R. Treatment of malignant pleural effusion: PleuRx catheter or talc pleurodesis ? A cost-effectiveness analysis. J Palliat Med 2010 ; 13 : 59-65.

Dans cette étude réalisée aux États-Unis, incluant des patients cancéreux (tout type de cancer) de plus de 50 ans présentant une pleurésie néoplasique, ayant pour but l’amélioration des symptômes et l’efÀcacité de la pleurodèse, seul le coût direct pour les patients et ceux couverts par les assurances ont été pris en compte. Cette analyse couvre uniquement un épisode de pleurésie par patient. Toutes les études revues ont pour but de comparer le talcage pleural à la mise en place d’un cathéter ambulatoire en termes de résolution de l’épanchement après ablation du cathéter. Le détail concernant le choix des variables et le modèle utilisé pour cette analyse coût-efÀcacité est clairement exposé dans l’article. Les tableaux 4 et 5 résument ces résultats. Dans le cadre des conditions initiales, les prises en charge par cathéter ou par talcage ont un coût respectif de 9011,60 USD et 8170,80

Introduction Les pleurésies malignes compliquent fréquemment l’évolution des cancers avancés et leur apparition rend le pronostic très péjoratif avec une médiane de survie d’environ 6 mois [1]. La dyspnée le plus souvent en rapport avec l’épanchement pleural est le symptôme le plus invalidant, grevant la qualité de vie, et le plus fréquent avec une prévalence d’environ 50 % ce qui rend sa prise en charge primordiale [2]. Les options thérapeutiques sont multiples incluant les ponctions pleurales répétées, la réalisation d’une symphyse pleurale par talc ou la mise en place d’un dispositif de drainage ambulatoire (par exemple le cathéter type PleurRx®). Chacune de

Tableau 4 Analyse coût-efÀcacité initiale. D’après Olden AM, Holloway R. J Palliat Med 2010. Stratégie

Coût

Ĺ Coût

Eff (mois)

Eff (année)

Ĺ Eff (mois)

(QALY) Talc

$ 8170,80

PleuRx®

$ 9011,6

$ 840,80

3,3826

0,281

3,3071

0,276

-0,0756

Ĺ Eff (année)

Ĺ C/E (mois)

Ĺ C/E (année)

(QALY)

(QALY)

-0,006

+

Eff : efÀcacité ; C/E : rapport coût-efÀcacité ; QALY : gain en année de survie ajustée pour la qualité de vie

Tableau 5 Analyse coût-efÀcacité additionnelle (utilisation du talc dans le cas d’échec de la mise en place d’un PleuRx®). D’après Olden AM, Holloway R. J Palliat Med 2010. Stratégie

Coût

Ĺ Coût

Eff (mois)

Eff (année)

Ĺ Eff (mois)

(QALY) Talc

$ 8170,80

PleuRx®

$ 9288,00

1117,20

3,3826

0,281

3,3219

0,277

-0,06

Ĺ Eff (année)

Ĺ C/E (année)

(QALY)

(QALY)

-0,005

+

Eff : efÀcacité ; C/E : rapport coût-efÀcacité ; QALY : gain en année de survie ajustée pour la qualité de vie

Pathologie pleurale

USD. Les résultats de l’analyse tenant compte du coût additionnel par année de survie ajustée pour la qualité de vie (coût additionnel ajusté ou « QALY ») sont respectivement de 0,276 et 0,281 pour le cathéter et le talcage. Le talcage pleural entraîne un bénéÀce pour le coût additionnel en analyse QALY de 0,006 en comparaison avec la mise en place d’un cathéter pour un coût inférieur de 840,80 USD. Cette différence faible entre les deux options suggère que le choix du traitement peut être basé sur la préférence du patient et la situation clinique. Dans le cas où l’échec de la mise en place d’un cathéter rend légitime la réalisation d’un talcage, le coût du traitement par cathéter et par talc est respectivement de 9288 USD et 8170,80 USD ; le coût additionnel ajusté dans ce cas de Àgure est de 0,277 pour le cathéter et 0,281 pour le talcage. Le talcage entraîne donc un bénéÀce de 0,004 pour le coût additionnel ajusté pour un coût inférieur de 1117,20 USD par rapport à la mise en place d’un cathéter.

Commentaires

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comparative n’ayant été réalisée entre cathéter et talcage par thoracoscopie) en termes d’efÀcacité mais également en termes de coût et notamment de coût additionnel par année de survie ajustée pour la qualité de vie. Il est bon de rappeler que le talcage par thoracoscopie s’est avéré plus efÀcace que le talcage type « talc slurry » dans une étude multicentrique comparative sur un grand nombre de patients pour les patients présentant un cancer primitif bronchique ou mammaire ce qui représente la majorité de nos patients [4]. Il est par ailleurs bon de constater que le talc n’est plus un sujet tabou, même outre Atlantique, depuis sans doute l’étude européenne ayant montré l’innocuité du talc calibré administré par thoracoscopie [5].

Références [1]

[2] [3]

Cette étude, complexe, coût-efÀcacité comparant deux types de prise en charge courante pour une pathologie fréquente est intéressante à plus d’un titre même si elle doit être « testée » dans le cadre d’un système de santé différent. Il n’en reste pas moins qu’elle permet d’optimiser la prise en charge par les cliniciens de ces patients en tenant compte de leur qualité de vie pour une pathologie dont le pronostic est réservé. Elle peut avoir également un intérêt pour les institutions en évitant des prises en charge moins efÀcaces et plus coûteuses même si certains coûts comme les médicaments antalgiques ou certains soins de support médicamenteux ou inÀrmiers n’ont pas été pris en compte. On peut grossièrement dire à la lecture de cet article que les deux traitements sont comparables en terme d’efÀcacité avec une légère différence en termes de coût. Cette différence en termes de coût est inférieure à 1000 USD en situation de prise en charge initiale. Les deux traitements sont à peu près d’efÀcacité équivalente (en terme d’analyse « QALY ») avec une différence de seulement 0,07 mois (2 jours « ajustés ») en situation initiale. Cela autorise une individualisation du traitement après information au patient. L’analyse de sensibilité réalisée dans cette étude (voir détail dans le texte original) permet de dire que la prise en charge par un PleuRx® est préférable pour des patients dont l’espérance de vie serait estimée à moins de 6 semaines et pour ceux ne souhaitant pas être hospitalisés. Un des biais de ce travail est sans doute l’absence de prise en compte des surcoûts générés par les traitements médicamenteux ou l’oxygène et notamment en cas d’échec de l’option thérapeutique choisie. L’hétérogénéité des données bibliographiques est également un écueil même si les données retenues sont conformes aux pratiques habituelles et passées au crible de l’analyse de sensibilité (cf. supra). Une étude prospective, multicentrique, randomisée s’impose cependant qui pourrait comparer les trois options thérapeutiques les plus courantes que sont la mise en place d’un cathéter type PleuRx®, la réalisation d’une symphyse pleurale par « talc slurry » et un talcage réalisé par thoracoscopie. Cette étude aurait pour intérêt de comparer ces techniques (aucune étude

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Le talcage pleural par thoracoscopie entraîne des lésions pulmonaires graves. Combat d’arrière-garde, mais que ce « serpent de mer » a la vie dure ! Gonzalez AV, Bezwada V, Beamis JF Jr, Villanueva AG. Lung injury following thoracoscopic talc insufÁation : experience of a single North American center. Chest 2010 ; 137 : 1375-81.

Introduction Le talc est considéré comme l’agent le plus efÀcace pour obtenir une symphyse pleurale dans la prise en charge des pleurésies néoplasiques ou des pneumothorax récidivants [1]. Il peut être utilisé en instillation à travers un drain thoracique ou pulvérisé pendant une thoracoscopie. Cependant des cas de pneumopathies voire de détresse respiratoire aiguë (SDRA) ont été rapportés après son utilisation. Plus récemment une large étude européenne a montré l’innocuité du talc pulvérisé chez des patients présentant une pleurésie néoplasique récidivante [2]. Gonzalez et al. font une revue de leur pratique en analysant les dossiers des patients ayant bénéÀcié d’une symphyse pleurale par thoracoscopie pour pneumothorax ou pleurésie maligne récidivante.

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Méthodes et résultats Les thoracoscopies avaient été réalisées par des pneumologues selon les techniques habituelles largement diffusées [3]. Les caractéristiques des patients, les comorbidités ainsi que l’étiologie des pleurésies étaient colligées. Les détails concernant la thoracoscopie en termes de côté de l’examen, la dose délivrée de talc et la durée du drainage étaient relevés. Les complications respiratoires étaient déÀnies par une aggravation de la dyspnée, une détresse respiratoire associée à une désaturation du sang en oxygène et/ou nécessitant un apport d’oxygène. L’évaluation clinique était réalisée dans les 24 h, entre 24 h et 72 h, et après 72 h. Les causes de la détérioration respiratoire étaient établies sur les données du dossier clinique du patient et l’imagerie par radiographie ou tomodensitométrie thoracique. Les lésions pulmonaires étaient déÀnies par la présence d’inÀltrats d’apparition récente sur la radiographie thoracique dans un contexte de nécessité d’une augmentation de l’oxygénothérapie. Le talc utilisé pour l’instillation par thoracoscopie (ITT) était le pulvérisateur de talc commercialisé par Bryan Corporation (Sclérosol®, Woburn, MA) seul talc autorisé aux États-Unis par l’agence régulatrice (FDA). Les dossiers de 132 patients (142 ITT) ayant bénéÀcié de cette prise en charge entre janvier 1994 et juillet 2007 ont été revus. L’indication était un pneumothorax récidivant pour 3 patients. Dans 75,5 %, il s’agissait de pleurésies néoplasiques. La survie médiane et moyenne pour ces patients était respectivement de 5,5 mois et 9,5 mois. La dose médiane de talc insufÁée était de 6 g et la durée moyenne de drainage de 4,3 jours. Douze patients ont présenté une dyspnée avec augmentation nécessaire de l’oxygénothérapie dans les 72 premières heures. Une réaction radiologique au talc comme déÀnie précédemment est apparue dans 4 cas sur 142 ITT (2,8 %). Pour 4 patients supplémentaires, un évènement respiratoire en rapport avec le talc a été suspecté. Parmi eux un œdème pulmonaire pour 2 patients n’a pu être écarté. Il est à noter qu’aucune corrélation n’a été retrouvée entre la dose utilisée de talc et l’évènement respiratoire secondaire à l’ITT.

Commentaires L’innocuité du talc pour la réalisation d’une pleurodèse est un sujet récurrent et toujours l’objet d’une littérature fournie. Il est rapporté l’apparition d’un SDRA dans 1 à 9 % des cas des patients traités [4]. L’apparition de cet accident respiratoire dans certaines séries n’était pas dépendante de la maladie sous-jacente, ni de la quantité de talc utilisé non plus que de la technique d’administration du talc. Plusieurs travaux suggèrent que ces phénomènes respiratoires sont en rapport avec la taille des particules contenues dans les préparations de talc (très variables) et que les particules de petites tailles génèrent une réaction inÁammatoire importante locale mais également systémique à l’origine des épisodes de SDRA [5, 6]. Une étude européenne multicentrique prospective conduite par Janssen et al. a récemment montré sur une importante cohorte de patients (558 patients) que l’utilisation de 4 g de talc calibré (peu de particules < 10 õm) pour la réalisation d’une pleurodèse chez des patients présentant une pleurésie cancéreuse n’entraînait pas de SDRA [2]. La même équipe a conduit un travail similaire sur plus de 400 patients présentant

C. Mélenotte et al.

un pneumothorax récidivant traité par 2 g de talc calibré avec les même résultats en termes d’innocuité (Bridevaux et al, 2011, European Respiratory Journal, sous presse). Le travail de Gonzalez et al. s’étale sur 13 ans (certains patients inclus il y a plus de 15 ans) et on est frappé par le petit nombre de patients inclus (environ 10 patients par an). Dans ces situations, les analyses rétrospectives des dossiers « source » sont souvent difÀciles à réaliser pour des patients qui ont bénéÀcié d’une prise en charge en routine. L’interprétation des conduites cliniques au moment de l’hospitalisation des patients ainsi que l’interprétation de l’imagerie hors du contexte rend le recueil des données complexes. On peut cependant noter dans ce travail, l’absence de SDRA proprement dit. Un point discutable dans ce travail, compte tenu des données actuelles émanant des travaux les plus récents dans le domaine, est l’absence de détails concernant la qualité du talc utilisé en termes de calibre des particules contenues. Des travaux antérieurs font état en effet de la variabilité des préparations de talc utilisées et Ferrer et al. ont montré que les préparations utilisées aux États-Unis contenaient les particules de talc les plus Ànes [7]. L’administration de talc sous pression par un dispositif tel que celui utilisé par les auteurs de cet article est également discutable, malgré son autorisation. Aucun travail expérimental ne s’est assuré qu’un tel dispositif n’entrainait pas de micro ou de macro lésions à la surface du poumon sachant en outre qu’à la sortie du cathéter le Áux est à une température très basse pouvant générer en soi des réactions de l’organisme. Ces hypothèses rendent nécessaires des études pour vériÀer l’innocuité de tels dispositifs et qui entretiennent les réticences de la communauté médicale à son égard. Il est clair, en 2011, que l’administration d’une petite dose (< 5 g) de talc calibré, sans Àbre d’amiante, à l’aide d’un dispositif à ballonnet sous contrôle manuel est un traitement efÀcace et dénué d’effets secondaires respiratoires pour la prise en charge des pleurésies néoplasiques. Il est donc clair que de nos jours on puisse se poser cette question avec Noppen : « Qui a encore peur du talc ? » [8].

Références [1] [2]

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Pathologie pleurale

Décès précoces après talcage pleural chez des patients présentant une pleurésie maligne récidivante. Vers une piste « cascade inÁammatoire cytokinique » et évènements thrombo-emboliques ? Montes-Worboys A, Rodriguez-Portal JA, Arellano-Orden E, Digón-Pereiras J, Rodriguez-Panadero F. Interleukin-8 activates coagulation and correlates with survival after talc pleurodesis. Eur Respir J 2010 ; 35 : 160-6.

Introduction Les pleurésies sont une complication fréquente de nombreuses maladies néoplasiques. Le traitement symptomatique le plus efÀcace est le talcage pleural. Cependant des cas de SDRA ont été rapportés, au cours de ces 25 dernières années, à la suite de pleurodèse par talc, et par ailleurs le talc pourrait être à l’origine de la survenue précoce de décès [1]. Le talc administré par voie pleurale entraîne une libération de médiateurs pro-inÁammatoires dans la circulation sanguine dépendant du calibre des particules qui le composent [2-4]. Ceux-ci sont clairement identiÀés comme associés au développement de certaines pathologies thrombovasculaires comme les maladies thromboemboliques veineuses avec pour ces patients des taux plasmatiques d’interleukine 8 (IL-8) très élevés [5]. L’IL-8 participe à la réponse inÁammatoire et sa production est directement corrélée avec le complexe thrombine-antithrombine (TAT) qui est un indicateur important de l’état d’activation de la cascade de coagulation. Le TNF-Ş est un autre médiateur inÁammatoire qui exerce son action sur une grande diversité de types cellulaires. Cette cytokine est impliquée dans la genèse du sepsis et a des effets pro-coagulants par activation de certains facteurs tissulaires et par inhibition de la Àbrinolyse. Dans leur étude, Montes-Worboys et al. font l’hypothèse que le talcage pleural entraîne une diffusion systémique de facteurs pro-inÁammatoires qui altèrent la balance coagulation/Àbrinolyse. Pour cela, ils ont évalué l’activation de la coagulation systémique par IL-8 et TNF-Ş après pleurodèse au talc et déterminé si les taux plasmatiques de ces médiateurs pro-inÁammatoires mesurés chez les patients talqués étaient reliés à une mortalité précoce après pleurodèse.

Méthodes et résultats Les taux d’IL-8 et de TNF-Ş ont été mesurés dans le Áuide pleural et le plasma de 231 patients présentant un épanchement malin de liquide pleural, avant pleurodèse puis 3, 24, 48 et 72 heures après talcage. Par ailleurs, des échantillons sanguins prélevés chez des volontaires sains ont été incubés in vitro avec les deux médiateurs inÁammatoires (IL-8, TNF-Ş) et un inducteur de la coagulation (thromboplastine) pendant 3 heures, ou avec différentes concentrations de talc calibré, avant de mesurer le taux du complexe thrombineantithrombine (TAT). Neuf, douze et dix-sept patients sont décédés respectivement 7, 10 et 15 j après pleurodèse, par embolie pulmonaire massive. Parmi eux, six présentaient une

103

thrombose associée à une augmentation du taux plasmatique d’IL-8, cependant aucun SDRA n’a été rapporté après talcage. D’une façon générale, des taux plasmatiques plus élevés d’IL-8 (mais pas de TNF-Ş) ont été retrouvés chez 102 patients (44 %) talqués depuis 24-48 h, préférentiellement, bien que de manière non signiÀcative, chez des sujets porteurs de métastases pulmonaires, de tumeurs d’origine rénale ou atteints de cancer du sein (84 vs 52, 312 vs 108, et 109 vs 54 pg/ml, respectivement par rapport au taux basal). Une corrélation inverse entre les taux d’IL-8 et la survie a été observée 24-48 h après talcage. De la même façon, il a été observé une différence signiÀcative des taux d’IL-8 chez des patients décédés dans les 15 jours suivant le talcage et ceux mesurés chez les sujets ayant survécu plus longtemps. Ainsi, 24 h après pleurodèse, les taux d’IL-8 étaient respectivement entre ces deux groupes de 516 ± 219 et 50 ± 7 pg/ml (p < 0,001). De la même façon, le taux de complexe TAT était plus élevé chez les patients décédés rapidement ou ayant présenté des troubles de la coagulation, corrélé positivement avec les taux d’IL-8 mesurés à différents temps après talcage (p < 0,02), et enÀn inversement corrélé avec la survie 24-72 h après talcage. Ces observations ont été conÀrmées in vitro. Ainsi, il existe une réponse dose-dépendante IL-8-TAT (p < 0,001) mais pas TNF-Ş-TAT après stimulation d’échantillons sanguins de donneurs volontaires co-incubés avec 31,2, 62,5, 125, 250, 500 ou 1000 pg/ml d’IL-8 ou de TNF-Ş comparés à des échantillons non traités. EnÀn, ni la thromboplastine (inducteur de la coagulation) ni différentes concentrations de talc n’induisent de façon signiÀcative une production des médiateurs inÁammatoires IL-8 et TNF-Ş, ou du complexe TAT.

Commentaires Plusieurs études ont montré que des cytokines pro-inÁammatoires comme l’IL-6, IL-8, MCP-1 et le TNF-Ş libérées en réponse à divers stimuli, semblent jouer un rôle important dans l’activation des processus de coagulation à l’origine de maladies thromboemboliques, au même titre que certains médiateurs de la cascade de coagulation tels que les facteurs VII et X et la thrombine peuvent participer au processus inÁammatoire [5,6]. Cependant, la place du processus inÁammatoire comme cause ou conséquence de la thrombose reste difÀcile à identiÀer, et le rôle direct des cytokines dans le risque thromboembolique n’est pas consensuel étant donnée l’hétérogénéité des méthodes d’évaluation menées d’une étude à l’autre. À partir de mesures in vivo et in vitro, avant ou après stimuli, l’étude de Montes-Worboys et al. montre que seule l’IL-8 est directement impliquée de manière dose-dépendante dans l’activation du processus de coagulation qui peut être observé après pleurodèse par talcage, alors que le rôle du TNF-Ş reste à préciser. Une complication majeure du talcage observée ici a été une mortalité des patients dans les 15 jours due à une embolie pulmonaire. Le mécanisme physiopathologique sous-jacent suggéré montre un « relargage » d’IL-8 du liquide pleural vers la circulation systémique à la suite de l’administration de talc, à l’origine ensuite d’une activation majeure de la cascade de coagulation.

104

C. Mélenotte et al.

D’autres travaux sont nécessaires pour préciser ces mécanismes physiopathologiques, notamment le passage d’IL-8 du Áuide pleural vers la circulation sanguine et une possible production de novo d’IL-8 au niveau systémique, ainsi que l’effet pro-inÁammatoire (et pro-coagulant) d’autres sclérosants tels que la doxycycline ou la tétracycline, cette dernière pouvant également entraîner une augmentation du taux plasmatique d’IL-8 après pleurodèse [7]. Il est intéressant de noter qu’aucun cas de SDRA n’est rapporté dans cette cohorte de 231 patients ayant bénéÀcié d’un talcage avec du talc calibré (Stéritalc ®, Novatech, France) ce qui conÀrme les résultats de l’étude européenne multicentrique réalisée dans le même contexte [8]. Une recommandation forte de ce travail est, sans prôner le dosage systématique d’IL-8 chez ces patients, est d’être vigilant sur la prévention de ces accidents thrombotiques en situation postopératoire. A ce jour cependant la durée de cette prévention n’est pas déÀnie.

Références [1] [2]

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L’efÀcacité des muscles respiratoires et la fonction respiratoire sont altérées dans les jours qui suivent une thoracoscopie médicale. Les patients présentant une incapacité respiratoire préexistante doivent être particulièrement surveillés Froudarakis ME, Pataka A, Makris D, Kouliatsis G, Anevlavis S, Sotiriou I, Steiropoulos P, Eleftheriadis S, Bouros D. Respiratory muscle strength and lung function in patients undergoing medical thoracoscopy. Respiration 2010 ; 80 : 220-7.

Introduction La thoracoscopie médicale est particulièrement indiquée dans le diagnostic et le traitement des maladies pleurales et est associée à peu de complications. Cependant, elle reste une technique « mini » invasive même si elle est moins traumatique que les techniques chirugicales à l’origine de défaillances mécaniques locales de la fonction respiratoire [1]. La thoracoscopie médicale peut être associée à une morbidité signiÀcative pour certains groupes de patients (patients présentant une bronchopneumopathie chronique obstructive ou avec une fonction cardiaque instable) [2], mais son impact sur la force musculaire respiratoire reste peu étudié. L’étude de Froudarakis et al. a pour but de montrer l’impact de la thoracoscopie médicale sur la force musculaire respiratoire et la fonction pulmonaire chez des patients ayant subi ou non une pleurodèse par talcage pour pleurésie récidivante.

Méthodes et résultats Vingt-neuf patients pris en charge pour épanchement pleural par thoracoscopie médicale sous anesthésie locale selon la technique décrite dans la littérature ont été inclus prospectivement [3]. Les variables mesurées avant la thoracoscopie puis 1, 2, 7 et 14 jours après concernaient la pression inspiratoire maximale (Pimax), la pression expiratoire maximale (Pemax), le volume expiratoire maximum seconde (VEMS) et la capacité vitale forcée (CVF). L’effet du talcage sur ces différentes variables a également été évalué chez les 14 patients ayant bénéÀcié d’un talcage pleural par insufÁation (Stéritalc ®, Novatech, France). Les valeurs moyennes de la Pimax (35 % de la valeur prédictive) et Pemax (35,8 % de la valeur prédictive) sont signiÀcativement diminuées 24 h après la thoracoscopie par rapport à leur valeur basale (45 % et 47,3 % de la valeur prédictive respectivement), pour revenir à leur niveau de base à J+14. Les valeurs moyennes de la fonction pulmonaire (VEMS et CVF) sont également signiÀcativement diminuées à J+1 et reviennent à leur état de base à J+2. La PaO2 moyenne est signiÀcativement plus faible à J+1 et J+2, la SaO 2 moyenne suivant cette même tendance alors que la PaCO2 moyenne n’est signiÀcativement plus faible qu’à J+1. EnÀn, les patients talqués ont tendance à avoir une force musculaire respiratoire, une fonction pulmonaire et des paramètres gazométriques altérés, et ce signiÀcativement dans les 48 heures post-thoracoscopie. Le tableau 6 résume les valeurs mesurées entre les patients ayant bénéÀcié d’une simple thoracoscopie diagnostique et ceux pour lesquels un talcage a été réalisé.

Commentaires L’étude de Froudarakis et al. met l’accent sur les répercussions temporaires de la thoracoscopie médicale sur la force musculaire respiratoire et la dysfonction pulmonaire qui en découle. Il a été montré dans la littérature que

Pathologie pleurale

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Tableau 6 Valeurs moyennes des paramètres étudiés en fonction du type d’intervention (talcage ou non). D’après Froudarakis ME et al, Respiration 2010. (En caractères gras apparaissent les différences statistiquement signiÀcatives ou proches). Paramètres ou proches

Thoracoscopie avec talcage (n = 15)

Thoracoscopie sans talcage (n = 14)

p

Pimax J1

31,6 ± 13,2

38,7 ± 18

0,24

Pimax J2

38,3 ± 14,1

44,7 ± 19,7

0,33

Pimax J7

39,8 ± 16,6

50,2 ± 17

0,12

Pimax J14

45,5 ± 16,3

61,5 ± 19,4

0,09

Pemax J1

31,8 ± 13,9

40 ± 11,9

0,09

Pemax J2

34,6 ± 13,2

47,1 ± 12,5

0,01

Pemax J7

39,1 ± 14,1

52,7 ± 15,5

0,02

Pemax J14

46,4 ± 18,7

57,7 ± 19,2

0,25

VEMS J 1

39,8 ± 14,8

58,1 ± 21,5

0,01

VEMS J 2

46,2 ± 15,6

66,1 ± 25,5

0,02

VEMS J7

58,7 ± 23,9

68,3 ± 19,6

0,28

VEMS J14

61,6 ± 16

77,2 ± 15,3

0,07

CVF J1

39,4 ± 12,9

55,9 ± 20

0,01

CVF J2

46 ± 15,4

62,6 ± 19,9

0,02

CVF J7

57,9 ± 25,2

69,6 ± 19,9

0,20

CVF J14

62,1 ± 16,9

76,4 ± 15,6

0,10

PaO2 J1

59,9 ± 9

69 ± 12,3

0,029

PaO2 J2

62 ± 8,2

71 ± 12,5

0,032

PaCO2 J1

35,7 ± 2

37,7 ± 3,5

0,070

PaCO2 J2

36,8 ± 1,7

38,7 ± 3

0,045

SaO2 J1

90,7 ± 3,7

93 ± 3,6

0,028

SaO2 J2

91,6 ± 3,1

93,3 ± 3,5

0,033

Pimax : pression inspiratoire maximale ; Pemax : pression expiratoire maximale ; VEMS : volume expiratoire maximal seconde ; CVF : capacité vitale forcée ; PaO2 : pression artérielle en O2 (mmHg) ; PaCO2 : pression artérielle en CO2 (mmHg) ; SaO2 : saturation du sang en oxygène.

des procédures plus invasives telles que la thoracoscopie chirurgicale vidéo-assistée ou la thoracotomie pouvaient aussi entrainer une dysfonction musculaire respiratoire qui ne s’améliore qu’à la 72e heure ou 96e heure respectivement [1]. Il est difÀcile cependant de comparer la thoracoscopie médicale avec ces techniques chirurgicales du fait des différences en termes d’anesthésie générale dans le contexte chirurgical et l’absence d’utilisation de morphine le plus souvent en contexte médical même si une étude a montré que ce type de drogue est probablement sous utilisée dans le cadre de thoracoscopie médicale [4]. Une récupération plus rapide des fonctions pulmonaires

et musculaires pourrait être expliquée par le fait que la thoracoscopie médicale est réalisée sous anesthésie locale et par une seule porte d’entrée [5]. Une diminution de la force musculaire peut être due localement à la contusion des muscles respiratoires et/ou de leur innervation, ou résulter de l’atélectasie sous jacente qui peut durer plusieurs semaines avant de se résorber [6]. La douleur et la présence du drain thoracique peuvent limiter la force musculaire respiratoire. De plus, l’administration d’anesthésiques diminue le tonus des muscles intercostaux et du diaphragme. Toutefois, les patients inclus dans cette étude ont reçu de faibles doses de morphine qui n’entrainent,

106

C. Mélenotte et al.

à cette dose, pas d’effet sur la fonction pulmonaire et la force respiratoire. Un résultat intéressant de cette étude est la conséquence du talcage qui diminue la force musculaire. Ceci peut être dû à un changement local de pression pleurale causée par la symphyse, entraînant une contrainte sur l’expansion pulmonaire affectant transitoirement la force des muscles respiratoires. De la même façon, la fonction pulmonaire des patients talqués est altérée à J+1 mais celle-ci s’améliore très rapidement et de façon simultanée à la compliance pulmonaire. Parallèlement à ces événements, les paramètres gazométriques sont signiÀcativement diminués dans le 24-48 h post-traitement. Notamment, une diminution de la PaO 2 moyenne pourrait être reliée aux effets pro-inÁammatoires systémiques du talc précédemment décrits [7]. La thoracoscopie médicale reste un examen peu invasif et peut être réalisée chez des patients présentant des comorbidités comme la BPCO. Il est cependant important de connaître l’état respiratoire initial aÀn d’adapter la technique de l’examen, les éléments de surveillance pendant et après l’examen ainsi que les drogues antalgiques. Une surveillance du patient les 48 premières heures est nécessaire et l’ablation précoce du drain, notamment en cas de thoracoscopie diagnostique est recommandée [8].

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Incidence du pneumothorax spontané. Quel temps fait-il ? Chen CH, Kou YR, Chen CS, Lin HC. Seasonal variation in the incidence of spontaneous pneumothorax and its

association with climate: a nationwide population-based study. Respirology 2010 ; 15 : 296-302.

Introduction Le pneumothorax spontané (PS) survient chez des individus généralement de sexe masculin sans dysfonction pulmonaire clinique ou au contraire avec des antécédents de pathologies pulmonaires. La distribution du PS selon l’âge montre typiquement deux pics, à 15-34 ans chez des hommes grands et minces sans pathologie pulmonaire sous jacente, et après 55 ans concernant des sujets surtout atteints de broncho-pneumopathie chronique obstructive (BPCO) ou de tuberculose. L’incidence croissante du PS est la même dans les deux situations. Le sexe et le tabagisme sont des facteurs de risque de PS, toutefois, ceux responsables de la rupture des bulles sont peu identiÀés si tenté que celle-ci soit responsable de l’irruption d’air dans la cavité pleurale ce qui est actuellement remis en question [1]. Certaines études ont suggéré l’inÁuence des variations saisonnières climatiques dans l’incidence du PS, mais leur rôle n’a pas vraiment été évalué à l’échelle de vastes territoires voire d’une nation entière [2]. Dans ce but, Chen et al. rapportent les résultats d’une étude nationale réalisée à Taïwan ayant pour objectif d’évaluer l’inÁuence des variations saisonnières climatiques dans l’incidence du PS.

Méthodes et résultats Cette étude a porté sur 19088 patients âgés de 15-44 ans hospitalisés pour PS entre 2001 et 2005 inclus rétrospectivement et recrutés à partir du fichier de l’Institut National de Recherche sur la Santé de Taïwan (97 % des 21 millions d’habitants du pays). Parallèlement, les données météorologiques enregistrées sur la même période ont été collectées à partir de 26 bureaux météorologiques couvrant de façon représentative l’ensemble du territoire du pays et de son occupation par la population. Le taux d’incidence du PS entre 2001 et 2005 à Taïwan a augmenté annuellement, progressant de 13,94 en 2001 à 17,67 cas pour 100 000 habitants en 2005, avec en moyenne 1,16 cas de PS sévère pour 100000 habitants. L’incidence mensuelle a été six fois plus importante chez les hommes que chez les femmes. Par ailleurs chez les patients présentant des comorbidités, 3,6 % souffraient notamment d’emphysème, 2,1 % de pleurésie et 0,8 % de séquelles de tuberculose. L’analyse des données météorologiques de cette zone subtropicale (période de pluie, température ambiante, humidité relative, pression atmosphérique, période d’ensoleillement) n’a pas permis de montrer une inÁuence saisonnière sur l’incidence du PS quelque soit le sexe (Fig. 1). En revanche, après ajustement, l’incidence mensuelle du PS sévère chez les hommes est corrélée avec l’humidité relative de l’air ambiant. Une augmentation de l’humidité relative de 1 % entraine une augmentation de l’incidence de 0,059 pour 100 000 hommes. Chez les femmes, l’incidence de PS sévère est signiÀcativement

Pathologie pleurale

107

Hommes

Femmes

Incidence PS (/100 000) 3

2

1

0 2001-01

2001-07

2002-01 2002-07 2003-01 2003-07 2004-01 2004-07 2005-01 2005-07 Mois

Figure 1. Taux d’admission pour pneumothorax spontané (PS) pour 100 000 habitants à Taïwan entre 2001 et 2005 par sexe. D’après Chen CH et al., Respirology 2010.

associée à la température ambiante et la pluviométrie. Les autres variables météorologiques analysées, notamment la pression atmosphérique, ne semblent avoir aucune inÁuence signiÀcative sur la survenue du PS.

Commentaires Cette étude est une des rares à avoir analysé l’inÁuence des conditions climatiques sur l’incidence du PS à l’échelle d’une nation. L’incidence du PS sur la période 2001-2005 à Taïwan n’est pas associée aux variations saisonnières climatiques. Le même constat a été effectué dans plusieurs autres pays, d’Europe notamment [3, 4]. Toutefois, l’étude de Chen et al. conÀrme que l’incidence du PS est plus élevée chez les hommes en raison de leur grande taille en moyenne, et d’un tabagisme plus important que chez les femmes, et qu’elle a augmenté entre 2001 et 2005 alors que l’incidence des comorbidités est restée stable sur la même période. Les raisons pour expliquer cette augmentation restent à préciser et ne font pas intervenir, dans cette étude, les conditions climatiques. En effet, des changements climatiques brutaux entrainant une Áuctuation de la pression atmosphérique d’au moins 10 hPa (1 hPa = 1 hectopascal) sur 24 heures semblent nécessaires pour déclencher une rupture de bulle (cf. remarque ci-dessus concernant le rapport entre bulles et pneumothorax) et un PS, ce qui n’a pas été constaté pendant la période analysée par Chen et al. [5]. Il est intéressant de noter que l’incidence du PS chez les femmes est associée à la température ambiante. L’augmentation de celle-ci de 0,5° C pourrait être à

l’origine d’une certaine forme de pneumothorax uniquement observé chez la femme, le pneumothorax cataménial, qui survient fréquemment chez des patientes lors du cycle menstruel [1,6]. L’importance de ce paramètre reste toutefois à préciser. D’autres mécanismes, telle que la bronchoconstriction induite par l’inhalation d’air humide lors d’événements météorologiques particuliers (orages, fortes précipitations) pourraient expliquer l’incidence élevée du PS dans la population taïwanaise [7]. Cela justiÀe des investigations supplémentaires concernant d’autres paramètres météorologiques aÀn de préciser les mécanismes de survenue de PS entre des hommes et des femmes vivant dans des régions aux climats contrastés.

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L’échographie thoracique permet de déterminer le meilleur accès pour la porte d’entrée avant thoracoscopie en cas d’épanchement pleural. Échographie thoracique pour tous les malades ? Medford AR, Agrawal S, Bennett JA, Free CM, Entwisle JJ. Thoracic ultrasound prior to medical thoracoscopy improves pleural access and predicts Àbrous septation. Respirology 2010 ; 15 : 804-8.

Introduction La thoracoscopie médicale à visée diagnostique ou pour réaliser une pleurodèse est la pierre angulaire pour la prise en charge des épanchements pleuraux [1]. La principale difÀculté responsable du plus grand nombre d’échec est l’impossibilité de réaliser un pneumothorax aÀn d’accéder à la cavité pleurale du fait de la présence de brides. L’échographie thoracique permet le plus souvent de déterminer le meilleur site pour l’insertion d’une aiguille pour ponction ou d’un thoracoscope en détectant les brides pleurales Àbreuses les plus épaisses. Elle améliore le succès de la ponction pleurale de 26 %, et permet de diminuer les complications [2]. L’échographie thoracique est en outre supérieure pour la détection des petites collections liquidiennes pleurales par rapport à une radiographie thoracique conventionnelle et dans une étude non contrôlée portant sur 687 patients a permis avant la réalisation d’une thoracoscopie, un gain de 20 à 30 mn par examen en repérant les cloisons pleurales [3,4]. L’hypothèse de l’étude prospective réalisée par Medford et al. est que l’échographie thoracique précédant une

thoracoscopie peut diminuer le taux d’échec en termes d’accès dans la cavité pleurale en détectant les cloisons Àbreuses.

Méthodes et résultats Il s’agit d’une étude prospective sur 12 mois avec deux groupes de patients présentant un épanchement pleural d’origine indéterminée. Tous les patients ont bénéÀcié d’un examen clinique complet, d’une radiographie thoracique de face et de proÀl et d’une ponction pleurale avant la réalisation d’un scanner thoracique. L’indication de la thoracoscopie reposait sur la présence d’un épanchement pleural unilatéral d’au moins 3 cm intéressant un tiers de l’hémithorax concerné avec une suspicion de néoplasie sur le scanner thoracique. Une thoracoscopie médicale a été effectuée sans échographie thoracique préalable sur les trente premiers patients. Sur les trente autres patients, l’échographie thoracique a été réalisée huit heures avant la thoracoscopie médicale. L’échographie thoracique a été réalisée pour déÀnir la porte d’entrée de la thoracoscopie et pour conÀrmer ou exclure les cloisons Àbreuses au sein de la cavité pleurale. Les groupes ne se différenciaient pas en termes d’âge et de sexe. L’accès à la cavité pleurale a été possible pour tous les patients ayant bénéÀcié d’un repérage par échographie thoracique. Dans l’autre groupe, pour 5 patients sur 30 (16,7 %) l’introduction de l’optique de thoracoscopie n’a pas été possible en raison de l’impossibilité d’accéder à la cavité pleurale. La prévalence des brides pleurales Àbreuses n’était pas différente entre les deux groupes et toutes les cloisons pleurales épaisses ont été détectées par l’échographie thoracique par rapport au groupe qui avait bénéÀcié d’un scanner pleural sans échographie (Tableau 7).

Commentaires L’intérêt de l’échographie thoracique ne cesse de croître comme en atteste une étude prospective récente par l’équipe d’Oxford [5]. Dans ce travail par Rahman et al., 955 échographies thoraciques ont été réalisées par des pneumologues avec un diagnostic correct de pleurésie dans

Tableau 7 Impact de l’échographie thoracique (E.T.) « pré » thoracoscopie sur l’accès pleural. D’après Medford AR et coll. Respirology 2010. Paramètres

Pas d’ET

ET

OR (IC 95 %)

p

Âge, moyenne, SE

72 (1,9)

74 (1,9)

NA

0,42

Sexe (M:F (%))

21:9 (70:30)

23 :7 (77:23)

0,71 (0,22-2,25)

0,77

Échec

5 (16,7 %)

0 (0 %)

13,2 (0,69-250)

0,0522

Adhérences Àbreuses/TM

8 (26,7 %)

8 (26,7 %)

1,00 (0,32-3,14)

1,00

Cloisons Àbreuses/imagerie

1/8 (12,5 %)1

8/8 (100 %)2

85,0 (2,99-2420)

0,001

1mises

en évidence par scanner thoracique. identiÀées par ET (pas relevées sur le scanner). TM : thoracoscopie médicale ; ET : échographie thoracique. 2toutes

Pathologie pleurale

951 cas (99,6 %, IC 98,9 % à 99,9 %). Le recours à un radiologue (proportion moyenne 4 %) a été stable tout au long des 3 années de l’étude. Le taux de complications majeures lorsqu’une intervention pleurale (558 cas) était faite dans cette cohorte a été de 0,5 % (IC 95 % = 0,1 % à 1,6 %). L’échographie thoracique permet également de suspecter le caractère malin d’un épanchement pleural et un épaississement pleural supérieur à 1 cm, un aspect nodulaire de la plèvre et un épaississement pleural diaphragmatique supérieur à 7 mm sont des critères échographiques de malignité [6]. L’étude par Medford et al. est intéressante car elle a pour objectif de mettre en exergue l’intérêt de l’échographie thoracique avant la réalisation d’une thoracoscopie aÀn de déterminer la porte d’entrée (accès pleural). Dans ce travail non comparatif, on ne note aucun échec pour l’accès pleural après « repérage » par échographie thoracique. L’accent est mis, comme on pouvait s’y attendre, sur l’intérêt de cet examen dans le cadre de pleurésies cloisonnées et en particulier lorsque des cloisons épaisses sont présentes, toutes détectées par l’échographie. Le pourcentage d’échec passe de 16,7 % à zéro, ce qui toutefois dans cette faible cohorte n’est pas statistiquement signiÀcatif (p = 0,0522). Les cinq patients pour lesquels la thoracoscopie n’a pu être réalisée ont bénéÀcié d’une ponction-biopsie écho guidée et une chirurgie thoracique vidéo-assistée a été nécessaire pour deux patients. Ces résultats sont à rapprocher des études concernant les ponctions pleurales et les drainages thoraciques conduites par l’agence nationale de sécurité en Grande-Bretagne (National patient Safety Agency) concernant la place de l’échographie thoracique [7]. Ce travail de l’équipe de Leicester a cependant des limites représentées essentiellement par son caractère mono centrique, non prospectif et non comparatif ce qui en limite la portée. Il est clair qu’une étude dans ce domaine devrait porter sur une population spéciÀque de patients présentant ou étant suspect de présenter une pleurésie cloisonnée et de comparer alors la faisabilité d’une thoracoscopie médicale avec ou sans repérage. La réalisation d’une simple radiographie thoracique en décubitus latéral homolatéral à l’épanchement permet le plus souvent de prédire le caractère cloisonné de la pleurésie et de prendre les mesures de repérage pour l’accès pleural [8]. La place de l’échographie thoracique dans ce cas est primordiale et rend la diffusion de cette technique auprès des pneumologues « interventionnels » indispensable.

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Les traitements intrapleuraux ont toujours le « vent en poupe » ! Traitement des tumeurs intrapleurales par cryothérapie. Un traitement d’avenir ? Downie G, Krimsky W. Response to spray cryotherapy in a patient with adenocarcinoma in the parietal pleura. Respiration 2010 ; 80 : 73-7.

Introduction Les atteintes néoplasiques de la plèvre pariétale, primitives ou secondaires, représentent un challenge thérapeutique. Les traitements actuels sont essentiellement à visée symptomatique et ne prennent pas en compte la réduction de la masse tumorale. D’autres alternatives thérapeutiques sont à explorer notamment l’administration intrapleurale des drogues cytostatiques mais également les moyens physiques de destruction des masses tumorales. Ce cas clinique relate la toute première tentative de réduction de la masse tumorale par l’application d’un spray de cryothérapie sur les lésions pleurales et décrit leur évolution symptomatique ainsi que macroscopique.

Méthodes et résultats Un patient de 49 ans, porteur d’une atteinte de la plèvre pariétale par un adénocarcinome bronchique primitif classé stade IIIB (en l’absence toutefois de toute atteinte macroscopique pulmonaire), diagnostiquée par thoracoscopie, est initialement traité par une chimiothérapie associant deux drogues sous forme d’un doublet à base comprenant un sel de platine. L’évaluation par thoracoscopie après 4 cures de ce protocole révèle un effet très modéré de la chimiothérapie sur les lésions avec des biopsies pleurales toujours positives pour la même histologie. L’état général ne permettant pas la réalisation d’une chimiothérapie de deuxième ligne (il n’est pas fait mention d’une proposition de traitement par thérapie ciblée) le consentement du patient est obtenu pour la réalisation de l’application d’un

110

C. Mélenotte et al.

spray de cryothérapie (CryoSpray Ablation TM CSA System, modèle ML2-NAM, CSA Medical). Ce système permet au médecin de contrôler le départ et l’arrêt du Áux cryogénique et sa durée au niveau de la région sélectionnée. Le traitement était réalisé sous sédation légère, anesthésie locale sous-cutanée et supplémentation nasale en oxygène (3 l/mn). Trois cycles de 10 secondes ont été appliqués induisant l’apparition d’un « blanchiment » (« cryofrost ») de la muqueuse au niveau du site choisi. Une nouvelle thoracoscopie réalisée trois jours plus tard, montrait une réduction tumorale de plus de 50 % et une quatrième thoracoscopie, trois mois après le traitement par cryothérapie, une persistance de surélévations pleurales dont les biopsies ne retrouvaient pas de lésions néoplasiques mais seulement un tissu inÁammatoire. Parallèlement, était notée une amélioration symptomatique (questionnaire de Saint Georges) et, l’absence de tout effet indésirable ou de toute complication en relation avec le traitement par cryothérapie.

Commentaires Les possibilités de réduction tumorale au niveau pleural sont rares hormis la chirurgie par décortication qui s’associe à une morbi-mortalité importante et qui entraîne une durée d’hospitalisation longue. En outre aucune étude à ce jour n’a montré un impact sur la survie au même titre que les chimiothérapies intrapleurales qui ne font pas mieux qu’un simple geste de pleurodèse [1]. Des nouvelles stratégies de prise en charge des pleurésies malignes ayant pour objectifs de diminuer les symptômes et de réduire la masse tumorale peuvent avoir un intérêt. Les techniques de traitement par cryobiologie sont largement utilisées dans la prise en charge des tumeurs des voies aériennes supérieures [2]. En outre les effets vasculaires de la cryothérapie entraînant thrombose et infarctus tumoraux rendent légitimes l’association de cette technique avec la chimiothérapie [3] et des effets immunorégulateurs de ce traitement local pourraient entraîner une réponse immunologique systémique [4]. Cette nouvelle technique par cryothérapie en spray propose une alternative thérapeutique aux décevantes possibilités actuelles de prise en charge des pleurésies néoplasiques. Si aucune conclusion déÀnitive ne peut être tirée de ce seul cas clinique, on peut noter cependant l’absence d’effets secondaires sur le poumon et la plèvre au moment du traitement et 30 jours après et la facilité de réalisation du traitement. Une réduction de 50 % du volume tumoral a été observée 3 jours après le traitement avec une réponse qui s’est maintenue 3 mois contrôlée par de nouvelle biopsie réalisée par thoracoscopie. Cette technique représente une opportunité réelle pour la réalisation d’études prospectives dans le domaine des pleurésies néoplasiques et des traitements locaux.

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Chimiothérapie intrapleurale. Intérêt pharmacocinétique ou réellement clinique ? Jones DR, Taylor MD, Petroni GR, Shu J, Burks SG, Daniel TM, Gillenwater HH. Phase I trial of intrapleural docetaxel administered through an implantable catheter in subjects with a malignant pleural effusion. J Thorac Oncol 2010 ; 5 : 75-81.

Introduction Les pleurésies malignes sont très fréquentes et les médecins régulièrement sollicités pour leur prise en charge. Les étiologies sont représentées essentiellement par les métastases du cancer du poumon et les cancers mammaires et l’apparition de la pleurésie est un facteur de mauvais pronostic. La chimiothérapie intrapleurale a pour but de délivrer de fortes doses de produit actif, dose non tolérée par voie systémique, avec des taux in situ très élevés [1,2] en faisant l’hypothèse que l’efÀcacité est augmentée. Ce concept n’a cependant jamais été conÀrmé par des études contrôlées. Les taxanes sont des chimiothérapies utilisées dans la prise en charge des cancers bronchiques et mammaires. C’est la raison du choix de Jones et collaborateurs pour réaliser cette étude phase I concernant l’administration intrapleurale d’une dose unique de docétaxel aÀn de déterminer l’innocuité, la faisabilité et le proÀl pharmacocinétique dans la prise en charge des pleurésies néoplasiques.

Méthodes et résultats Il s’agit d’une étude monocentrique. Les critères d’inclusion étaient un âge supérieur à 18 ans, un épanchement pleural malin conÀrmé par histologie ou cytologie pleurale. Les autres critères d’inclusion et d’exclusion étaient classiques selon les bonnes pratiques des essais cliniques en oncologie. Il est à noter qu’étaient exclus les patients avec des antécédents d’allergie au docétaxel ou d’autres produits comportant du polysorbate 80. Un traitement systémique par docétaxel ou autre paclitaxel n’était pas un critère d’exclusion. Une thoracoscopie chirurgicale était réalisée avec si nécessaire une résection d’éventuelles brides intrapleurales. Un drain thoracique de petit calibre était mis en place pour réexpansion pulmonaire et évacuation du liquide pleural ainsi qu’un cathéter « ambulatoire »

Pathologie pleurale

111

type PleuRx® de 15,5 Fr (Denver Biomedical, Golden, CO) pour l’instillation du docétaxel. La pharmacocinétique du docétaxel était réalisée au niveau plasmatique et pleural. Les prélèvements étaient effectués avant l’administration du produit et à 30 mn, 1 heure, 6 heures, 24 heures et 36 heures après l’injection pleurale. La prémédication habituelle pour ce type de produit était donnée. Un schéma avec dose croissante de docétaxel (50 mg/m2, 75 mg/m2, 100 mg/m2, 125 mg/m2) était appliqué pour 3 à 6 patients. Lorsqu’un des 3 premiers patients atteignait la dose maximale tolérée (DMT), 3 patients supplémentaires étaient inclus. La DMT était déÀnie par une toxicité hématologique de grade 4 d’une durée > 7jours, une neutropénie fébrile de grade 4, ou une toxicité non hématologique de grade 3 ou 4. La réponse clinique était déÀnie par : (1) réponse complète : disparition complète de l’épanchement ou épanchement résiduel non accessible à une ponction ; (2) réponse partielle : diminution de 75 % ou plus en comparaison au volume initial ; (3) stabilité : diminution de moins de 75 % ou augmentation de moins de 25 % ; et (4) progression : augmentation de plus de 25 % du volume de l’épanchement [3]. Quinze patients ont été inclus en 3 ans dont 8 patients présentant un cancer bronchique et 4 patients un cancer pleural. Sept patients sur 15 (47 %) avaient reçu une chimiothérapie par voie veineuse comprenant un taxane. Six patients ont reçu une dose de 50 mg/m2 et 3 patients ont reçu les paliers suivants (3 par palier). Les résultats pharmacocinétiques sont colligés dans le tableau 8. La médiane de survie de cette

cohorte a été de 3,6 mois (intervalle, 1,5 à 17,9 mois) avec pour : (1) 50 mg/m 2, 4 mois (intervalle, 1,5 à 17,9 mois) ; (2) 75 mg/m2, 2,7 mois (intervalle, 2,1 à 9,6 mois) ; (3) 100 mg/m2, 8,5 mois (intervalle, 7,9 à 16,5 mois) ; (4) 125 mg/m2, 3,1 mois (intervalle, 1,7 à 7,1 mois).

Commentaires Cette étude doit être rapprochée des travaux réalisés par Perng et al. utilisant le paclitaxel par voie pleurale chez des patients présentant un cancer bronchique avec pleurésie métastatique [4,5]. Dans ces études la DMT avait été de 225 mg/m2 et le facteur limitant marqué par une dyspnée sévère. Dans la phase 2 par ces auteurs il est fait état d’un contrôle de l’épanchement pleural à 4 semaines dans plus de 90 % des cas. Ceci était considéré comme une efÀcacité du traitement. Ceci est tout à fait discutable au même titre que dans le travail de Jones et al. car aucune étude qui aurait comme comparatif une évaluation par thoracoscopie n’a, à ce jour, était réalisée et l’épanchement pleural en rapport avec une pleurésie néoplasique ne peut être considéré comme une cible. L’administration intrapleurale de docétaxel par rapport au paclitaxel permet cependant une exposition à la drogue au sein de la cavité pleurale plus importante comme en atteste la comparaison des chiffres de l’aire sous la courbe. La pharmacocinétique du docétaxel n’est pas linéaire, ce qui est illustré par l’absence de corrélation entre le chiffre de l’aire sous la courbe et les doses administrées et des

Tableau 8 Paramètres pharmacocinétiques chez les patients en fonction de la dose administrée par voie pleurale de Docétaxel. D’après Jones DR et al. J Thorac Oncol 2010 Doses (mg/m2) Paramètres

50 (n = 6)

75 (n = 3)

100 (n = 3)

125 (n = 3)

Plèvre AUC0-36 (õmol/l) h

12617

10052

9100

4356

T1/2 (h)

4,3

5,7

4,1

4,6

Sang Cmax (õmol/l) Médiane

0,17

0,34

0,48

0,25

Intervalle

0,04-0,53

0,14-0,45

0,12-1,40

0,08-0,67

Médiane

1

6

1

0,5

Intervalle

1-6

0,5-6

1-1

0,5-1

1,89

3,74

3,02

2,30

Tmax (h)

AUC0-36 (õmol/l) h

Cmax : concentration maximale. AUC0-36 : aire sous la courbe de 0 à 36 h. T1/2 : temps pour atteindre la moitié de la concentration maximale de docétaxel. Tmax : temps pour atteindre la concentration maximale de docétaxel.

112

études supplémentaires sont nécessaires aÀn de déterminer quel impact sur la capacité cytotoxique du docétaxel résulte de l’augmentation de la clairance. Ce travail illustre les difÀcultés des chimiothérapies intrapleurales en termes d’évaluation de leur efÀcacité qui rend légitime un contrôle par thoracoscopie. Il est clair que cette voie d’administration des médicaments permet une augmentation des doses en limitant les effets secondaires. Pour quel bénéÀce ? Cela reste à préciser.

C. Mélenotte et al.

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[2]

[3]

ConÁit d’intérêt H. Dutau : interventions ponctuelles : rapports d’expertise (Novatech, EFER, Pentax) ; interventions ponctuelles : activités de conseil (Novatech, EFER, Pentax). C. Mélenotte, S. Laroumagne, L. Purek, P. Astoul : les auteurs déclarent n’avoir aucun conÁit d’intérêt potentiel en rapport avec le thème de cet article.

[4]

[5]

Greillier L, Monjanel-Mouterde S, Fraticelli A, Devictor-Pierre B, Bouvenot J, Coltel N,et al. Intrapleural administration of pemetrexed: a pharmacokinetic study in an animal model. J Thorac Oncol 2009;4:404-8. Monjanel-Mouterde S, Frenay C, Catalin J, Boutin C, Durand A, Astoul P. Pharmacokinetics of intrapleural cisplatin for the treatment of malignant pleural effusions. Oncol Rep 2000;7:171-5. Rusch VW, Figlin R, Godwin D, Piantadosi S. Intrapleural cisplatin and cytarabine in the management of malignant pleural effusion: a Lung Cancer Study Group trial. J Clin Oncol 1991;9:313-9. Perng RP, Wu MF, Lin SY, Chen YM, Lin JY, Whang-Peng J. A phase I feasibility and pharmacokinetic study of intrapleurale paclitaxel in patients with malignant pleural effusions. Anticancer Drugs 1997;8:565-73. Perng RP, Chen YM, Wu MF, Chou KC, Lin WC, Liu JM, WhangPeng J. Phase II trial of intrapleural paclitaxel injection for non-small-cell lung cancer patients with malignant pleural effusions. Respir Med 1998;92:473-9.