Rec¸u le : 23 mars 2015 Accepte´ le : 24 aouˆt 2015
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Article original
Pharmacien et e´ducation the´rapeutique du patient : quelles pratiques sur le territoire franc¸ais ? Pharmacist and therapeutic patient education: An overview of practice in France A. Lehmanna,b,c, A. Janoly-Dumenild,e,f, M. Baudrant-Bogab,c, B. Alleneta,b,c,*, pour le groupe « e´ducation the´rapeutique du patient » - Socie´te´ franc¸aise de pharmacie clinique a
Univerte´ Grenoble-Alpes, 38000 Grenoble, France ThEMAS TIMC-IMAG (UMR CNRS 5525), 38000 Grenoble, France c Poˆle pharmacie, UF de pharmacie clinique, CHU de Grenoble, 38000 Grenoble, France d Pharmacie hoˆpital E-Herriot, hospices civils de Lyon, 69003 Lyon, France e Faculte´ de pharmacie de Lyon, 69008 Lyon, France f EA 4129 sante´ individu socie´te´, 69008 Lyon, France b
Summary Introduction. Therapeutic patient education is now recognized as an essential component of care for people with chronic disease. However, its practical implementation faces different problems including inadequate training of healthcare professionals. The aim of this national study was to operate an overview of pharmacists’ practice. Materials and methods. A self-administered questionnaire was posted online between April 4 and June 1, 2013. The unit of observation was the educational intervention. A descriptive analysis was performed. Results and discussion. Two hundred and twenty-eight educational interventions were identified from 177 pharmacists involved. The main areas covered by the action are cardiovascular (21%), endocrinology (20%), infectious disease (10%), psychiatry (9%) and rheumatology (7%). Educational interventions are offered to inpatients (82%), outpatient (53%) and close relatives (58%). One hundred and twenty-five interventions are certified by the regional Health Agency. Sixty-four of the 177 pharmacists involved have the required training (> 40 H), 47 have a level 2 training and 9 level 3. This initial assessment highlights three points on which our group will focus for its future work: educational training; collaborative practices; and practice evaluation.
Re´sume´ Introduction. L’e´ducation the´rapeutique du patient est aujourd’hui reconnue comme un e´le´ment essentiel de la prise en charge des personnes atteintes de maladie chronique. Cependant, sa mise en œuvre pratique se heurte a` diffe´rentes proble´matiques dont l’insuffisance de formation des professionnels de sante´. L’objectif de cette e´tude nationale e´tait d’ope´rer un e´tat des lieux des pratiques des pharmaciens. Mate´riel et me´thode. Un autoquestionnaire a e´te´ mis en ligne entre le 4 avril et le 1er juin 2013. L’unite´ d’observation e´tait le dispositif e´ducatif. Une analyse descriptive des donne´es a e´te´ re´alise´e. Re´sultats et discussion. Deux cents vingt-huit dispositifs e´ducatifs ont e´te´ recense´s pour 177 pharmaciens implique´s. Les principaux domaines sur lesquels porte l’action sont le cardiovasculaire (21 %), l’endocrinologie (20 %), l’infectiologie (10 %), la psychiatrie (9 %) et la rhumatologie (7 %). Les actions e´ducatives sont propose´es aux patients hospitalise´s (82 %), non hospitalise´s (53 %) et a` l’entourage (58 %). Cent vingt-cinq des actions ont une autorisation de l’Agence re´gionale de sante´. Sur les 177 pharmaciens, 64 ont une formation requise en e´ducation the´rapeutique du patient (> 40 H), 47 ont une formation de niveau 2 et 9 une formation de niveau 3. Ce premier e´tat des lieux met en e´vidence 3 points sur lesquels notre groupe portera
* Auteur correspondant. Poˆle pharmacie, CHU de Grenoble, CS 10217, 38000 Grenoble cedex 9, France. e-mail :
[email protected],
[email protected] (B. Allenet). http://dx.doi.org/10.1016/j.phclin.2015.08.004 Le Pharmacien Hospitalier et Clinicien 2016;51:9-16 2211-1042/ß 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.
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Conclusion. The study shows a dynamic process for the development of educational activities by hospital pharmacist and community pharmacist in France. To continue, a closer qualitative analysis of the educational intervention identified will be achieved. ß 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
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son action future : la formation ; les pratiques collaboratives ; l’e´valuation de pratiques. Conclusion. L’enqueˆte montre une dynamique certaine du de´veloppement d’actions e´ducatives par le pharmacien hospitalier et officinal. Pour poursuivre, une analyse qualitative plus fine des offres e´ducatives recense´es va eˆtre re´alise´e. ß 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s.
Keywords: Therapeutic patient education, Pharmacist, Practice analysis, Study, Educational intervention Mots cle´s : E´ducation the´rapeutique du patient, Pharmaciens, Analyse des pratiques, Enqueˆte, Actions e´ducatives
Introduction Selon l’Organisation mondiale de la sante´ (OMS), l’e´ducation the´rapeutique vise a` aider les patients a` acque´rir ou a` maintenir les compe´tences dont ils ont besoin pour ge´rer au mieux leur vie avec une maladie chronique [1]. Elle fait partie inte´grante et de fac¸on permanente de la prise en charge the´rapeutique. Elle comprend des activite´s organise´es, y compris un soutien psychosocial, conc¸ues pour rendre les patients conscients et informe´s de leur maladie, des soins, de l’organisation et des proce´dures hospitalie`res, des comportements lie´s a` la sante´ et a` la maladie. Ceci a pour but de les accompagner (ainsi que leur famille) a` comprendre leur maladie et leur traitement, collaborer ensemble et assumer leurs responsabilite´s, dans leur propre prise en charge, dans le but de les aider a` maintenir et ame´liorer leur qualite´ de vie [2]. L’e´ducation the´rapeutique du patient (ETP) s’est de´veloppe´e en France de manie`re informelle et non coordonne´e depuis plus de 20 ans [3]. Ne´anmoins, a` ce jour, la France est le seul pays a` avoir le´gife´re´ sur l’ETP, son cadre conceptuel et sa pratique. La Haute Autorite´ de sante´ (HAS) pre´cise, en 2007, la structuration d’un programme d’e´ducation the´rapeutique du patient selon quatre e´tapes successives : e´laborer un diagnostic e´ducatif, de´finir un programme personnalise´ d’ETP avec des priorite´s d’apprentissage, planifier et mettre en œuvre des se´ances d’ETP individuelle ou collective ou en alternance et re´aliser une e´valuation des compe´tences acquises par le patient et du de´roulement du programme d’ETP [4]. En juillet 2009, la loi Hoˆpital-Patients-Sante´-Territoire (HPST) est promulgue´e : l’ETP entre dans le droit franc¸ais et devient une priorite´ nationale [5]. Cette loi pre´voit un pilotage des programmes d’ETP par les Agences re´gionales de sante´ (ARS) et permet de poser un cadre dont la mise en application sera re´gie par la parution au journal officiel en aouˆt 2010 des de´crets et arreˆte´s d’application [6–9]. L’ETP se fonde dans la pluriprofessionnalite´. A` ce titre, le pharmacien, quel que soit son mode d’exercice, peut devenir acteur d’ETP, dans le champ de toutes les maladies chroniques relevant d’affection longue dure´e. Par sa position a` la fois
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centrale et originale dans le parcours de soins du patient, le pharmacien se trouve dans une situation strate´gique pour participer aux programmes d’ETP. Dans les suites de la loi HPST, la convention officinale de 2012 [10] confirme le positionnement central du pharmacien pour « participer a` la mission de service public de la permanence des soins, concourir aux actions de veille et de protection sanitaire organise´es par les autorite´s de sante´ et participer a` l’e´ducation the´rapeutique et aux actions d’accompagnement des patients ». Intervenir dans un programme implique en premier lieu pour le pharmacien d’adopter dans sa pratique quotidienne une « posture e´ducative ». Cela passe par l’acquisition de compe´tences spe´cifiques en communication, en psychologie et en pe´dagogie, et par l’utilisation de techniques et d’outils pertinents [11]. L’intervention du pharmacien doit aussi s’inscrire dans une collaboration pluriprofessionnelle. Enfin, elle s’appuie obligatoirement sur une expertise pharmaceutique de qualite´, pour une reconnaissance de notre expertise me´tier par les autres professionnels [3,11,12]. A` ce jour, si la participation des pharmaciens dans des de´marches e´ducatives se de´veloppe en France, la cartographie des de´marches reste inconnue. De ce fait, nous ne connaissons pas les ressources e´ducatives sur le territoire et ne pouvons donc pas encore mutualiser et partager les expe´riences et outils existants. Il est e´galement difficile dans ce contexte d’appre´hender les attentes en termes de formation des pharmaciens hospitaliers et officinaux. A` un moment ou` l’ETP s’inscrit de plus en plus dans le parcours de soins du patient, il apparaıˆt opportun de connaıˆtre les pratiques des pharmaciens hospitaliers et officinaux. Aussi, l’objectif de cette e´tude nationale est d’ope´rer une description des pratiques des pharmaciens.
Mate´riel et me´thode Un autoquestionnaire a e´te´ e´labore´ par un groupe de pharmaciens experts issus du groupe national ETP de la Socie´te´ franc¸aise de pharmacie clinique. Il comportait 23 questions autour des pratiques d’ETP visant tout pharmacien exerc¸ant
Pharmacien et e´ducation the´rapeutique du patient en France
une action dans un programme d’ETP, avec 3 the´matiques : description (5 questions), me´thodologie (10 questions) et moyens de l’action d’ETP (8 questions). Les coordonne´es et lieu d’exercice principal des pharmaciens participants ont e´galement e´te´ recueillis (questionnaire disponible aupre`s des auteurs). Apre`s validation par le groupe ETP de la SFPC, l’autoquestionnaire a e´te´ configure´ avec le logiciel interview et mis en ligne entre le 4 avril et le 1er juin 2013. Les pharmaciens ont e´te´ informe´s de la mise en ligne du questionnaire par mail par le biais de la Socie´te´ franc¸aise de pharmacie clinique (SFPC), de l’Association pour le de´veloppement de l’Internet en pharmacie (AdiPH), du syndicat des pharmaciens hospitaliers SYNPREFH, de la Fe´de´ration des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), de l’Union re´gionale des professionnels de sante´ (URPS) et du journal pharmaceutique «Quotidien du pharmacien ». L’unite´ d’observation a e´te´ le dispositif e´ducatif (ou action e´ducative), un pharmacien pouvant participer a` un ou plusieurs dispositifs. Une analyse descriptive des donne´es a e´te´ re´alise´e.
Re´sultats Au total, 396 dispositifs e´ducatifs ont e´te´ recense´s dont 168 retire´s car incomplets (42 %) (absence d’action e´ducative et/ou re´ponse aux 5 questions sur la description de l’action e´ducative sans re´pondre aux 18 questions abordant la me´thodologie et les moyens de l’actions). Sur les 228 actions e´ducatives restantes, 177 pharmaciens sont implique´s (tableau I) ; 31 pharmaciens participent a` plusieurs actions, 46 exercent en pharmacie d’officine (26 % des re´pondants).
Tableau I Lieux d’exercice principal des pharmaciens re´pondants. Number of pharmacist respondents by workplace. Re´pondants inclus CHU CH Officine CHS E´tablissement prive´ ESPIC Re´seaux Association Clinique prive´e Autre (professeur a` la faculte´, CRLCC) Non pre´cise´ Total
Re´pondants exclus
56 41 46 17 7
12 41 82 6 0
2 2 4 2
0 2 14 5
0 177
6 168
CHU : centre hospitalier universitaire ; CH : centre hospitalier ; CHS : centre hospitalier spe´cialise´ ; e´tablissements prive´s PSHP : e´tablissements prive´s participant au service public hospitalier ; CRLCC : centre re´gional de lutte contre le cancer.
On observe une disparite´ importante du nombre d’actions selon la re´gion concerne´e (fig. 1). Selon l’index te´le´phonique des re´pondants, les re´sultats rapportent une fre´quence plus importante d’actions e´ducatives dans les de´partements de l’Ise`re (28 actions), de Paris (22 actions) et du Rhoˆne (13 actions). Les 5 principaux domaines sur lesquels porte l’action sont le cardiovasculaire (21 %), l’endocrinologie (20 %), l’infectiologie (10 %), la psychiatrie (9 %) et la rhumatologie (7 %). Les actions e´ducatives sont propose´es aux patients hospitalise´s (81,6 %), non hospitalise´s (53,10 %) et a` l’entourage (57,50 %).
[(Figure_1)TD$IG]
Figure 1. Cartographie des re´pondants selon l’index te´le´phonique. Numbers of respondents mapping.
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L’action e´ducative a lieu, dans la majorite´ des cas, au sein des e´tablissements de sante´ public (148/228, soit 65 %), en officine (39/228, soit 17 %) ou dans les re´seaux (37/228, soit 16 %). Dixsept actions e´ducatives (7,5 %) sont re´alise´es directement au domicile du patient. Cent quatre-vingt quinze des actions e´ducatives (sur 228, soit 85,5 %) suivent les 4 e´tapes de la HAS dont 49 impliquant des pharmaciens exerc¸ant en ville (tableau II). Le pharmacien de´clare eˆtre a` l’initiative du projet dans 38 % des actions e´ducatives (87/228). Au total, 169 des 228 actions ont fait l’objet d’une demande d’autorisation a` l’ARS. La participation des pharmaciens dans ces diffe´rentes actions est situe´e a` diffe´rents niveaux : lors du diagnostic e´ducatif (124/228, soit 54 %), de la synthe`se des objectifs e´ducatifs (121/ 228, soit 53 %), de l’e´valuation des compe´tences acquises (129/ 228, soit 57 %) et lors de la mise en œuvre des se´ances e´ducatives (196/228, soit 86 %). La mise en œuvre de ces se´ances est re´alise´e selon 3 modalite´s de fac¸on e´quivalente : sous forme d’entretiens individuels (71/ 228, soit 31 %), d’ateliers de groupes (80/228, soit 35 %) ou de la combinaison de ces 2 modalite´s (77/228, soit 32 %). On retrouve une grande diversite´ de techniques pe´dagogiques utilise´es, allant des expose´s en individuel ou en groupe
jusqu’au te´le´-enseignement assiste´ par ordinateur ainsi que divers outils pe´dagogiques (livrets, objets factices, jeux, diaporamas, coffrets pe´dagogiques. . .), avec l’utilisation de 1 a` 4 outils pour la majorite´ des actions e´ducatives et jusqu’a` 9 outils diffe´rents utilise´s en combinaison pour une action e´ducative (tableau III). Une e´valuation de l’action est re´alise´e pour 168 actions, soit 74 % des cas. Elle porte sur le processus (48/168, soit 28,5 %), les re´sultats (16/168, soit 9,5 %), ou les deux (105/168, soit 62 %) (NB, 17 non-re´ponses). La majorite´ des actions (64 %) combinent plusieurs lieux de recrutement. Le recrutement des patients est re´alise´ lors d’une hospitalisation comple`te (134/228, soit 58,8 %), d’une consultation me´dicale hospitalie`re (117/228, soit 51,3 %), d’un passage chez le me´decin traitant (107/228, soit 46,9 %), d’une hospitalisation de jour (92/228, soit 40,4 %), d’un passage a` la pharmacie (68/228, soit 29,8 %), mais aussi suite a` une orientation du patient par les parame´dicaux (23/228, soit 10,1 %), ou le milieu associatif (29/228, soit 12,7 %). Dans 55 % des cas (125/228), diffe´rents moyens sont utilise´s pour promouvoir l’action e´ducative aupre`s des patients. Meˆme si elle est pre´sente´e dans 75 % des cas par un des soignants de l’e´quipe e´ducative (172/228), les patients peuvent aussi eˆtre sensibilise´s
Tableau II Format ge´ne´ral de l’action e´ducative. Characteristics of educational action. Suivi des 4 e´tapes HAS Demande d’autorisation ARS Autorisation ARS suite a` la demande Pharmacien initiateur du projet Activite´ officialise´e
Oui
Non
En cours
Donne´es manquantes
Total
195 130 125 87 86
33 44 1 141 128
– 39 – – –
– 15 4 – 14
228 228 130 228 228
HAS : Haute Autorite´ de sante´ ; ARS : Agence re´gionale de sante´.
Tableau III Ressources didactiques. Educational resources. Techniques pe´dagogiques principales
Nombre (%) de citations (sur les 228 dispositifs)
Outils principaux
Nombre (%) de citations (sur les 228 dispositifs)
Enseignement pratique Expose´ Table ronde Me´taplan Brainstorming Expose´s individuels De´monstrations Photoexpression Te´le´-enseignement Autres
117 80 78 61 61 61 57 48 6 17
Livret/brochure Objet figuratif ou factice Jeu Affiche Coffret pe´dagogique Diaporama Mate´riel me´dical Guide d’utilisation Logiciels/CD/DVD Internet Outils « maison » Autre
139 92 79 65 58 58 57 51 24 13 7 21
12
(51,3) (35,1) (34,2) (26,8) (26,8) (26,8) (25) (21) (2,6) (7,5)
(61) (40,4) (34,6) (28,5) (25,4) (25,4) (25) (22,4) (10,6) (5,7) (3,1) (9,2)
Pharmacien et e´ducation the´rapeutique du patient en France
a` l’existence de l’action par le biais d’affiches ou de flyers (101/ 228, soit 44 %), par le bouche a` oreille (61/228, soit 27 %), par un soignant n’appartenant pas a` l’e´quipe e´ducative (50/228, soit 22 %) ou encore lors des journe´es de sensibilisation sur la pathologie cible´e par l’action e´ducative (24/228, soit 11 %). Les donne´es recueillies dans le cadre de l’action ETP sont enregistre´es dans un dossier de soins dans seulement 76 actions (sur 216 actions avec donne´es disponibles – soit 35,1 %) dont 75 utilisent un dossier spe´cifique. Les donne´es sont accessibles aux autres professionnels pour 101 actions sur 216 (soit 46,7 %) et aux autres professionnels de l’e´quipe ETP dans seulement 31 actions sur 216 (14,3 %). Les actions e´ducatives sont re´alise´es par une e´quipe pluriprofessionnelle dans 89 % des cas. En plus du pharmacien, les autres professionnels investis dans l’action sont : infirmiers diploˆme´s d’e´tat (170/228, soit 75 %), me´decins spe´cialistes (153/228, soit 67 %), die´te´ticiens (124/228, soit 54 %), psychologues (91/228, soit 40 %), cadres de sante´ (76/228, soit 33 %), kine´sithe´rapeutes (56/228, soit 25 %) et me´decins ge´ne´ralistes (52/228, soit 23 %). Il est a` noter que les associations de patients sont implique´es dans 22 % des cas (soit 50 actions e´ducatives/228) et que 33 actions font intervenir des patients experts (14,5 %). Dix-huit des actions e´ducatives de´crites sont re´alise´es en ville dans le cadre de l’activite´ officinale et semblent n’eˆtre soutenues que par l’e´quipe pharmaceutique. L’activite´ e´ducative effectue´e est officialise´e dans le temps de travail des pharmaciens re´pondant a` l’enqueˆte dans 38 % des cas (86 des 228 actions e´ducatives) dont 77 % pour les pharmaciens exerc¸ant en milieu hospitalier et 23 % pour les pharmaciens exerc¸ants en ville. Il est a` noter que 95 actions e´ducatives (sur 200 actions avec donne´es disponibles – soit 47,5 %) sont re´alise´es sans aucun moyen financier supple´mentaire (79 actions concernant des pharmaciens hospitaliers et 16 des pharmaciens de ville). Pour les autres actions,
plusieurs financements sont en jeu, notamment les subventions publiques (33/200, soit 16,5 %), le budget hospitalier MIG (32/200 donne´es disponibles, soit 16 %), les subventions prive´es (29/200, soit 14,5 %), le budget hospitalier T2A (8/ 200, soit 4 %), le budget hospitalier de recherche clinique (3/ 200, soit 1,5 %). Le nombre d’heures moyen de´die´ a` l’activite´ e´ducative par le pharmacien pour une action e´ducative est de 7 heures par mois avec une me´diane a` 4 heures. Sur les 228 actions e´ducatives, 162 soit 71 % sont re´alise´es avec des pharmaciens ayant suivi la formation requise en ETP (> 40 H, DU ou de niveau DIFEP, Master ou the`se de science) : 37 par des pharmaciens exerc¸ant en ville et 125 par des pharmaciens hospitaliers (fig. 2).
Discussion Les pharmaciens implique´s dans l’ETP recense´s dans cette enqueˆte (n = 177) repre´sentent un pourcentage minime des pharmaciens exerc¸ant en e´tablissement de sante´ ou en officine. Si les pharmaciens commencent a` s’impliquer dans l’ETP, l’enqueˆte (avec ses limites me´thodologiques que nous reverrons plus loin) tend a` montrer qu’ils sont encore rares.
Les structures hospitalie`res encore omnipre´sentes mais une pousse´e vers l’ambulatoire On note que 18 % des pharmaciens sont « tre`s investis » en ETP, car participants a` plusieurs actions. On identifie une repre´sentation non ne´gligeable de l’officine avec 22 % des actions de´crites, soit pre`s d’un quart des actions de´crites. Dans bon nombre de cas, les pharmaciens sont a` l’initiative (dans 38 % des actions). Les pharmaciens de ville semblent plus a` l’initiative des actions que leurs homologues hospitaliers :
[(Figure_2)TD$IG]
Figure 2. Niveaux des formations suivies. Re´partition par niveau de formation : [TD$INLE] par action e´ducative ; [TD$INLE] par pharmacien implique´. 0 : niveau 0 : absence de formation ; S : sensibilisation : moins de 40 heures de formation ; 1 : niveau 1 (40 heures de formation) ; 2 : niveau 2 (diploˆme universitaire) ; 3 : niveau 3 (master 2, The`se de science). Training achieved by level.
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30 des 61 actions a` l’officine contre 56 des 167 actions hospitalie`res. Dans 81 % des cas, les actions e´ducatives sont propose´es aux patients hospitalise´s. La part relative aux dispositifs ambulatoires devrait eˆtre amene´e a` grandir, conforme´ment aux vœux des autorite´s de tutelle. Par pratiques ambulatoires, on doit entendre pratiques externalise´es par l’hoˆpital (en consultation notamment ou en hoˆpital de jour) et pratiques de ville : a` l’officine (17 % des actions de´crites), dans les re´seaux (16 %), au domicile du patient (7,5 %). La question qui se pose est celle de l’ade´quation du lieu avec les contraintes inhe´rentes a` l’ETP telles que la pratique pluriprofessionnelle, l’espace confidentiel et le temps de qualite´ ne´cessaires a` l’accompagnement e´ducatif du patient.
Un investissement dans des disciplines me´dicales emble´matiques Si les principales disciplines me´dicales sur lesquelles porte l’action sont emble´matiques (le cardiovasculaire, l’endocrinologie, l’infectiologie), a` l’instar de ce que de´crit la Direction ge´ne´rale de la sante´, dans son bilan re´cent des demandes d’autorisation de programmes d’ETP [13], on ne connaıˆt pas le niveau d’expertise technique des re´pondants dans ces domaines. Or il est bon de rappeler que l’inte´gration a` une action e´ducative ne´cessite des pre´requis en termes de connaissances physiologiques et pharmacothe´rapeutiques [11]. De fait, le pharmacien investi dans une action pluriprofessionnelle l’est a` deux niveaux conse´cutifs : 1 : un niveau ge´ne´rique (e´tablir un bilan e´ducatif partage´ ou BEP, identifier et ne´gocier les objectifs e´ducatifs avec le patient, re´fe´rer a` la personne ad hoc, pour la suite du suivi e´ducatif) ; 2 : un niveau expert (eˆtre la personne ressource pour l’e´quipe pluriprofessionnelle pour ce qui est des proble´matiques me´dicamenteuses). De fait, le niveau de connaissances doit eˆtre optimal pour se lancer dans l’aventure e´ducative.
Une de´marche me´thodologique en ETP assez bien respecte´e Cent quatre-vingt quinze des actions e´ducatives de´crites (86 %) suivent les 4 e´tapes de la HAS [4], contre 27 % dans l’enqueˆte EDUPEF de 2005 [14], ce qui souligne l’e´volution globale des pratiques ainsi que l’engagement me´thodologique des colle`gues pharmaciens, mais aussi la marge de progression restante, afin de rentrer dans le cadre re´glementaire. Pour rappel, ces 4 e´tapes correspondent a` : la constitution d’un BEP visant a` identifier les besoins e´ducatifs du patient ; la ne´gociation d’objectifs e´ducatifs avec le patient ; la mise en œuvre d’une inge´nierie de formation adapte´e aux objectifs ne´gocie´s ; l’e´valuation re´currente de l’atteinte des objectifs ne´gocie´s avec le patient.
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Les pharmaciens re´pondants sont pre´sents a` toutes les e´tapes du diagnostic e´ducatif a` l’e´valuation. Dans 86 % des actions e´ducatives, ils interviennent lors de la mise en œuvre des se´ances e´ducatives qui sont re´alise´es sous forme de se´ances individuelles (32 %), de se´ances collectives (35 %) ou par la combinaison de ces 2 modalite´s (33 %). Nous n’avons pas recueilli de donne´es sur les de´tails de la pratique de groupe : est-elle e´taye´e par un bilan e´ducatif individuel pre´alable afin d’eˆtre adapte´e aux objectifs personnalise´s des patients ?
Un niveau global de formation a` ame´liorer Selon les de´crets [6,7] et arreˆte´s [8,9] de la loi HPST concernant l’ETP, au moins un des acteurs de l’action doit pouvoir justifier d’un niveau 1 de formation (soit un e´quivalent de 40 h). Dans la pratique et, notamment, a` des fins de dynamique et d’homoge´ne´isation des pratiques, une formation ou au minimum une sensibilisation est attendue pour le plus grand nombre des acteurs participant a` l’action. Sur les 177 pharmaciens ayant re´pondu a` l’enqueˆte, 73 % disposent d’un niveau de formation adapte´ (au moins niveau 1), contre 49 % dans l’enqueˆte EDUPEF [14] ; 40 pharmaciens n’ont pas suivi de formation en ETP et 9 ont eu une sensibilisation (< 40 H). Ces re´sultats soulignent les besoins de formation en ETP. On note cependant que la plupart des UFR de pharmacie ont inte´gre´ a` ce jour, les 40 h requises pour le niveau 1 dans la formation initiale des e´tudiants. Par ailleurs, l’offre de formation se de´veloppe rapidement en formation continue [13,15].
La pluriprofessionalite´ : le gage majeur de bonne pratique Les actions entreprises par le pharmacien doivent inte´grer une logique multiprofessionnelle avec une e´quipe de soins et/ou dans le cadre d’une structure ambulatoire au sein de son territoire (type re´seau, association, maison de sante´, plateforme. . .), au minimum en lien avec le me´decin traitant et/ou les acteurs de proximite´. La cohe´rence et la pertinence de processus d’ETP rendent ce pre´requis indispensable [16]. A` ce titre, les re´sultats de cette e´tude sont rassurants : les actions sont porte´es par une e´quipe pluriprofessionnelle dans 89 % des cas. A contrario, cette enqueˆte re´ve`le 18 actions e´ducatives re´alise´es dans le cadre de l’activite´ officinale et porte´es uniquement par l’e´quipe pharmaceutique. Ce re´sultat peut questionner la pertinence technique et l’efficacite´ de ces actions isole´es, pour re´pondre a` des situations complexes, multifactorielles ve´cues par les patients chroniques.
Une communication a` de´velopper entre les professionnels Concernant la communication entre les acteurs, on note que les donne´es issues de l’action d’ETP sont peu transmises aux professionnels de sante´ (les donne´es sont accessibles aux autres professionnels pour 101 actions (soit 46,8 %) et, de manie`re plus alarmante, encore moins entre les acteurs de l’ETP eux-meˆmes
Pharmacien et e´ducation the´rapeutique du patient en France
(les donne´es sont accessibles autres professionnels de l’e´quipe e´ducative dans seulement 31 actions [14,4 %]). Ceci re´ve`le une lacune majeure dans la mise en place des actions e´ducatives, celle de la mise en re´seau des professionnels du soin et des acteurs de l’accompagnement e´ducatif. Mettre en lien les acteurs de l’ETP reste un enjeu majeur, pour assurer une cohe´rence de l’action globale. De plus, mettre en lien les acteurs de l’ETP et les autres professionnels de sante´ est incontournable pour que l’ETP soit inte´gre´e dans le soin et, a` ce titre, participe au choix et a` l’e´volution de la prise en charge globale dont l’e´quipe me´dicale est re´fe´rente et le me´decin responsable. Il est a` noter que la mise en re´seau avec d’autres ne se de´veloppe pas forcement autour d’un lieu physique mais qu’elle peut de´ja` se concevoir au plan virtuel (avec le partage de donne´es en ligne, par exemple).
Une activite´ encore tenue par des « be´ne´voles » Concernant les moyens disponibles pour de´velopper l’ETP, 42 % des actions de´crites sont re´alise´es sans aucun moyen financier supple´mentaire (79 actions concernant des pharmaciens hospitaliers et 16 des pharmaciens de ville). De fait, il s’ave`re plus complique´, dans le cadre du fonctionnement de l’officine, d’organiser et de libe´rer du temps pour l’ETP. L’activite´ e´ducative effectue´e est officialise´e dans le temps de travail des pharmaciens dans seulement 38 % des cas, quel que soit le lieu d’exercice du pharmacien. Ainsi, on observe un volume de pratique « occulte » important. La construction d’actions e´ducatives de qualite´ et la publication d’e´valuations inte´grant des pharmaciens est le pre´alable a` l’obtention de moyens financiers. Au final, les pre´requis a` l’implication du pharmacien dans les activite´s e´ducatives pour accompagner au mieux le patient sont : parfaire son expertise me´tier ; se mettre en re´seau pluridisciplinaire formalise´ ; se former au pre´alable en pe´dagogie et a` l’e´ducation the´rapeutique [11]. Il est sans doute ne´cessaire d’inte´grer cette activite´ a` un mode`le d’Accompagnement pharmaceutique global [APG] (le soin pharmaceutique de nos colle`gues Que´be´cois), inte´grant la conciliation, les interventions pharmaceutiques, le suivi pharmacothe´rapeutique ainsi que l’information et l’accompagnement individualise´ du patient [17]. Dans l’e´quipe de soin ou` le pharmacien clinicien est coresponsable de la se´curite´ du patient et, plus spe´cifiquement, de la prise des me´dicaments, la re´flexion autour de l’ETP porte sur les moyens pe´dagogiques disponibles pour minimiser l’e´cart entre le projet du professionnel de sante´ et celui du patient en re´alisant un suivi construit et partage´ entre ces derniers [16].
partenaires (socie´te´ savante, syndicats, presse). Nous sommes dans l’incapacite´ de calculer un taux de re´ponse mais on peut faire l’hypothe`se d’une sous-de´claration en lien avec le mode de diffusion et la dure´e de l’e´tude. Nos re´sultats sont repre´sentatifs des re´pondants effectifs. Concernant la re´partition ge´ographique des actions par exemple, les re´sultats rapportent une fre´quence plus importante d’actions e´ducatives dans les de´partements de l’Ise`re (28 actions), de Paris (22 actions) et du Rhoˆne (13 actions). Il nous faudrait conforter cette re´partition en la croisant avec d’autres donne´es, comme par exemple les programmes re´gionaux d’ETP labellise´s par l’ARS. Cependant, on ne dispose d’aucune lisibilite´ de la participation du pharmacien dans chacun de ces dispositifs, car seul le coordonnateur apparaıˆt sur les donne´es disponibles en ligne. En regard du nombre important de programmes d’ETP labellise´s en France, le nombre de programmes labellise´s retrouve´s dans notre e´tude est faible ; les raisons peuvent eˆtre, d’une part, une sousestimation (pharmaciens participant a` un programme labellise´ mais n’ayant pas re´pondu a` l’enqueˆte) et d’autre part, une inte´gration encore faible des pharmaciens aux e´quipes pluriprofessionnelles des programmes d’ETP franc¸ais. Cent soixante-huit re´ponses ont e´te´ retire´es de l’analyse car incomple`tes. De fait, un certain nombre de connexions sur le site de re´ponse au questionnaire peut eˆtre conside´re´ d’opportuniste (42 % des re´ponses) : on peut faire l’hypothe`se que ces personnes se sont connecte´es, car inte´resse´es par le the`me, mais n’ont pas pu avancer dans le recueil de donne´es car ils n’avaient pas une pratique structure´e de l’ETP permettant de re´pondre au questionnaire. Pour le reste des re´pondants, nous exploitons des donne´es de´claratives. Nous nous basons sur les dires des re´pondants. De fait, certains items permettant le recueil de commentaires des re´pondants peuvent eˆtre un premier pas vers une analyse qualitative des pratiques.
Conclusion Cette premie`re enqueˆte a permis de mettre en e´vidence une dynamique certaine du de´veloppement d’actions e´ducatives par le pharmacien, en ville comme a` l’hoˆpital. Nous souhaitons poursuivre ce travail par une analyse qualitative plus fine des dispositifs e´ducatifs de´clare´s. Celle-ci est en cours aupre`s des pharmaciens ayant re´pondu a` l’enqueˆte. Cela nous permettra de cartographier de manie`re plus pre´cise les ressources e´ducatives franc¸aises.
De´claration de liens d’inte´reˆts
Biais et limites
Les auteurs de´clarent ne pas avoir de liens d’inte´reˆts.
Les re´sultats propose´s ne sont pas a` conside´rer comme un e´tat des lieux sur les pratiques pharmaceutiques en ETP, compte tenu du type de recueil de donne´es utilise´. En effet, nous avons opte´ pour un questionnaire en ligne relaye´ par diffe´rents
Remerciements Nous remercions tous les pharmaciens ayant participe´ a` l’enqueˆte, Corinne Frison pour la saisie du questionnaire en ligne ainsi que Ce´line Genty pour les analyses statistiques.
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A. Lehmann et al.
Re´fe´rences [1]
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