Lettres à la rédaction / Revue du rhumatisme 82 (2015) 133–141
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Premier cas de vertébroplastie pour un hémangioendothéliome épithélioide
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Mots clés : Hémangioendothéliome épithélioide Rachis Vertébroplastie Fracture pathologique
Le traitement de l’hémangioendothéliome épithélioide (HEE), tumeur de l’endothélium capillaire [1], présentant différentes formes (hémangiome à angiosarcome) [2] n’est pas codifié. Nous rapportons ici le premier cas de traitement par vertébroplastie(VTB). Mme Q, 78 ans, présentait une lombocruralgie bilatérale non déficitaire. Le scanner montrait une fracture de L3 stable, avec lyse du mur postérieur et deux lésions spléniques évocatrices d’angiome. L’IRM retrouvait une formation tissulaire du corps de L3 avec rehaussement épidural (Fig. 1) et lésion de l’aileron sacré droit et apophyse transverse de TH7. Le TEP-scanner retrouvait une volumineuse formation splénique et trois foyers hypermétaboliques osseux (Fig. 2). Une biopsie de L3 suivie d’une VTB ont été réalisées dans le même temps sous anesthésie locale et contrôle radiographique. Le geste s’est compliqué d’une fuite épidurale de ciment, sans signe neurologique. L’examen histologique n’a pas été contributif et c’est seulement après une troisième biopsie que le diagnostic d’HEE multimétastatique a été posé. Après RCP, la patiente a bénéficié d’une radiothérapie rachidienne (30 Gy en 10 fractions), permettant la reverticalisation de la patiente. Trois mois après, une splénectomie a été réalisée en urgence pour hémopéritoine avec suites opératoires simples. Désormais, la patiente va bien et aucun traitement complémentaire n’a été proposé. L’ HEE, tumeur rare (0,5 % des tumeurs primitives malignes des os) [3], est souvent plurifocale [4]. Les patients présentent une douleur, une fracture pathologique ou une compression médullaire [5,6]. L’ostéolyse radiologique peut être bien limitée, expansive, soufflante, ou agressives à limite floue et à plage vermoulue [4]. L’IRM non spécifique peut retrouver des structures vasculaires serpigineuses au contact [7]. La fixation du TEP-scanner est liée à la cellularité et non à la taille tumorale. [8] Nous avons réalisé une biopsie vertébrale suivie d’une VTB : technique peu invasive, permettant de soulager la patiente dans le
Fig. 2. Coupe axiale de l’apophyse transverse de TH7 au Pet scan.
même temps. La biopsie est délicate (hémorragie) et il faut parfois envisager une deuxième biopsie, notamment chirurgicale. Il n’existe pas de standard thérapeutique [9]. Lors d’une atteinte viscérale (foie, poumon) localisée, la chirurgie ou la surveillance sont de mise. Dans les formes étendues, l’hépatectomie avec transplantation hépatique ou la chimiothérapie se discutent. La radiothérapie n’a pas fait preuve de son efficacité [10], sauf sur l’atteinte rachidienne associée à la chirurgie [6]. Aucune chimiothérapie n’a fait la preuve de son efficacité. Après RCP, nous n’avions pas retenu l’indication chirurgicale bien que cette tumeur soit à haut risque de récidive locale. Nous décrivons pour la première fois, la réalisation d’une VTB comme traitement complémentaire d’un HEE. La biopsie et VTB ont été réalisées en 1 temps. Notre cas montre qu’en l’absence de diagnostic et si la lésion est unique, l’intervention en 2 temps serait à privilégier. La VTB a pour but de consolider la vertèbre et de détruire les cellules cancéreuses. Ses indications sont l’angiome vertébral, la fracture vertébrale ostéoporotique, traumatique, métastatique ou myélomateuse. Contre-indiquée en cas de coagulopathie ou d’infection ; ses complications, rares, comprennent : fuite ou embolie pulmonaire de ciment ; fracture vertébrale ; infection ; hémorragie. Les alternatives à la VTB sont traitement antalgique, chirurgie ou radiothérapie. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références
Fig. 1. Coupe sagittale du rachis lombaire en IRM T2 fat sat.
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Pauline Lasselin-Boyard a,∗ Pierre Olivier Boulet b Franck Grados a Henri Sevestre c Vincent Goëb a a EA4666, service de rhumatologie, université de Picardie-Jules-Verne, centre hospitalier universitaire d’Amiens, 1, place Victor-Pauchet, 80054 Amiens, France b Service de radiologie, université de Picardie-Jules-Verne, centre hospitalier universitaire d’Amiens, 1, place Victor-Pauchet, 80054 Amiens, France c Service d’anatomie pathologie, université de Picardie-Jules-Verne, centre hospitalier universitaire d’Amiens, 1, place Victor-Pauchet, 80054 Amiens, France ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (P. Lasselin-Boyard)
ˆ 2014 Accepté le 22 aout Disponible sur Internet le 28 janvier 2015 http://dx.doi.org/10.1016/j.rhum.2014.08.006
Tolérance des associations d’antibiotiques dans les infections ostéoarticulaires à Staphylocoque夽
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Mots clés : Infection osseuse et articulaire Association d’antibiotiques Tolérance Staphylococcus spp
1. Introduction Actuellement, il existe une augmentation de l’incidence des infections ostéoarticulaires (IOA). [1]. Le staphylocoque est l’agent étiologique principal [2]. L’objectif de notre étude était d’étudier le taux d’effets indésirables (EI) des antibiotiques selon les différentes associations d’antibiotiques (A-ATB) dans l’IOA à Staphylocoque. 2. Méthodes Les patients ont été sélectionnés à partir du registre de notre service (Nice, France), en se basant sur un logiciel spécifique (Statview® version 4.5) [3]. Les comorbidités, la durée d’hospitalisation, le diagnostic précis, les résultats
DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.jbspin.2014.03.021. 夽 Ne pas utiliser, pour citation, la référence franc¸aise de cet article, mais la référence anglaise de Joint Bone Spine avec le DOI ci-dessus.
Tableau 1 Paramètres et comorbidités des 238 patients présentant une infection ostéoarticulaire à staphylocoque. Paramètres Âge (moyenne ± DS) (ans) Sex-ratio (homme/femme) Affection cardiovasculaire Diabète Affection hépatique Affection du système nerveux Affection rénale Néoplasie Infection à VIH Infections ostéoarticulaires Prosthèse ou matériel d’ostéosynthèse Spondylodiscite Autre IOA
62 ± 17 2,01 (159/79) 100 (42 %) 44 (18 %) 32 (13 %) 30 (13 %) 28 (12 %) 14 (6 %) 4 (1,7 %) 108 (45 %) 47 (20 %) 83 (35 %)
microbiologiques, les antibiotiques prescrits et les EI ont été enregistrés prospectivement durant l’hospitalisation. Toutes les IOA monobactériennes à Staphylocoque, diagnostiquées entre juillet 2005 et décembre 2012, ont été incluses. Les monoarthrites isolées ont été exclues (car requérant une prise en charge antibiotique différente). Durant la prise en charge, la survenue d’EI, la modification de la prescription des A-ATB, l’évolution et la durée de suivi ont été rétrospectivement enregistrées. Dans notre service, la posologie de la rifampicine était de 10 mg/kg, deux fois par jour. Les cultures aérobie et anaérobie ont été réalisées, avec hémoculture, et dans certains cas, un séquenc¸age 16s ARNr a été réalisé. Seuls les EI nécessitant l’interruption de l’ATB ont été considérés. L’évolution était classée comme guérison en l’absence de rechute clinique et/ou microbiologique durant la période de suivi. La relation statistique entre les variables a été évaluée en utilisant des tests du 2 pour les variables catégorielles et un test t de Student pour les variables continues à distribution normale, ainsi qu’un test U de Mann–Whitney pour les comparaisons non paramétriques. Une corrélation univariée à été réalisée, et les variables significatives (p < 0,1) étaient par la suite incluses dans des analyses de régression logistique à plusieurs étapes.
3. Résultats Au total, 238 patients atteints d’IOA à Staphylococcus ont été traités, avec 186 (78 %) Staphylococcus aureus (17 % résistants à la méthicilline) et 52 (22 %) Staphylococcus coagulase négatifs (40 % résistants à la méthicilline). Les principales caractéristiques cliniques et la répartition des IOA sont montrées dans le Tableau 1. Les 3 principales A-ATB étaient les fluoroquinolones et la rifampicine (FQ + RF), la rifampicine et la clindamycine (RF + CD) et la clindamycine et les fluoroquinolones (CD + FQ). Toutes les autres A-ATB étaient classées comme « autres associations ». La durée moyenne totale du traitement antibiotique était de 6 semaines. Parmi les 61 EI amenant à l’arrêt des ATB, 41 (67 %) sont survenus durant la période d’hospitalisation et 20 (33 %) durant le suivi en ambulatoire. La classification des EI est montrée dans le Tableau 2. L’association RF + FQ était la plus pourvoyeuse d’EI, suivie de l’association RF + CD et FQ + CD. Les troubles digestifs étaient les plus fréquents des EI, 13/33 (39 %). Il n’y avait pas de diarrhée liée au Clostridium difficile. La durée de suivi moyenne (± DS) était de 11 ± 12 mois. À la fin de l’étude, 160 patients étaient guéris, alors que 40 avaient rechuté (17 %), 31 (13 %) étaient perdus de vue et 7 patients sont décédés. Dans les analyses univariée et multivariée, les EI en rapport liés à l’A-ATB étaient associés au sexe féminin (OR [IC 95 %]) 1,99 [1,07–3,69], p = 0,028, mais pas aux comorbidités, ni