Progrès en urologie (2015) 25, 698—704
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ARTICLE ORIGINAL
Quels sont les facteurs prédictifs de la douleur lors du traitement des calculs rénaux par lithotritie extracorporelle ? What are the predictive factors of the pain during the treatment of kidney stones by extra-corporeal shockwave lithotripsy? K. Ktari a,∗,b, R. Saidi a,b, M. Mahjoub a,b, W. Hamdouni a,b, S. Macherki a,b, B. Ben khalifa a,b, W. Hellara a,b, H. Saad a,b a
Service d’urologie, hôpital Fattouma Bourguiba Monastir, avenue Farhat Hached, 5000 Monastir, Tunisie b Faculté de médecine de Monastir, rue Ibn Sina, 5000 Monastir, Tunisie Rec ¸u le 30 avril 2014 ; accepté le 24 juillet 2015 Disponible sur Internet le 1 septembre 2015
MOTS CLÉS Lithotripsie extracorporelle ; Lithiases rénales ; Douleur ; Facteurs prédictifs
∗
Résumé But. — Identifier les facteurs prédictifs de la douleur au cours de la lithotripsie extracorporelle (LEC), permettant de sélectionner les patients qui nécessitent une analgésie. Méthodes. — Il s’agit d’une étude prospective réalisée sur une période de 13 mois. Ont été inclus dans cette étude cent patients porteurs des lithiases rénales traitées par un lithotripteur électromagnétique (siemens ; lithoskop). Pour l’étude de la douleur subjective provoquée par la LEC aux différents temps de la séance, une Échelle visuelle analogique (EVA) a été utilisée aux différents temps (T) de la séance (T0 avant la séance, T1 à 500 coups et T2 à 1500 coups, T fin de traitement). Une séance a été considérée non douloureuse si EVA ≤ 3. Pour identifier les facteurs prédictifs de la survenue de douleurs pendant la séance de LEC, nous avons proposé d’établir les corrélations entre la douleur et les différentes caractéristiques des patients, des calculs rénaux et de l’onde de choc. Résultats. — L’étude analytique a montré que la douleur a été corrélée au sexe féminin, au score de l’anxiété, à la distance peau calcul, à la distance pariétale et à l’énergie de l’onde de choc. Alors que l’âge, le tour de taille, les Circonstances de découvertes (CDD), la projection du calcul sur la côte et le nombre des coups n’avaient pas d’impacts sur le niveau de douleur.
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (K. Ktari).
http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2015.07.009 1166-7087/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Facteurs prédictifs de la douleur lors du traitement des calculs rénaux
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Conclusion. — Notre étude a montré que même avec un lithotripteur électromagnétique de troisième génération ; la LEC est encore douloureuse amenant à l’arrêt de la séance dans 29 % des cas. Au bout de cette étude, quatre facteurs majeurs prédictifs de douleur et pouvant amener au recours à la sédo-analgésie, dès le début de la séance, ont été identifiés. Niveau de preuve.— 3. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
KEYWORDS Extra-corporeal shockwave lithotripsy; Kidney stones; Pain predictors
Summary Purpose. — Identify predictors for selecting patients who requires analgesia during lithotripsy. Methods. — This is a prospective study over a period of 13 months, 100 patients with kidney stones treated by an electromagnetic lithotripter (siemens; lithoskop) were selected. For the study of subjective pain caused by the ESWL at different times of the session, a visual analog scale (VAS) was used at different times (T) of the session (T0 before shots, T1 at 500 shots, T2 at 1500 shots, T end of treatment). A session was considered painless if VAS ≤ 3. To identify predictors, were investigated association between pain and the different characteristics of patients, kidney stones and the shock wave specifications. Results. — The analytical study showed that pain was correlated with female gender, anxiety score, skin distance stones, parietal distance and the energy of the shock wave. While age, waist circumference, the circumstance found, the projection of stones on the rib and the number of shots had no impact on the level of pain. Conclusion. — Our study showed that even with an electromagnetic lithotripter third generation; ESWL is still painful leading to the interruption of the session in 29% of cases. Four major predictors of pain leading to the use of sedo-analgesia early in the session were identified. Level of evidence.— 3. © 2015 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction
Matériel et méthodes
La lithiase urinaire est une pathologie fréquente qui affecte environ 10 % de la population des pays industrialisés et dont la prévalence a considérablement augmenté dans le monde au cours des cinq dernières décennies [1]. La lithotripsie extracorporelle (LEC) est l’alternative de choix la plus recommandée traitant jusqu’à 90 % des calculs urinaires avec un taux de succès complet variant entre 60 % et 90 % selon différentes séries [2,3]. Les indications actuelles de la LEC pour lithiase rénale selon l’AFU et l’EAU sont les calculs pyéliques, caliciels moyens et supérieurs de moins de 2 cm et les calculs caliciels inférieurs de moins de 1,5 cm [3,4]. Il persiste néanmoins une douleur, variable selon les individus lors de la séance de LEC. En Tunisie, quoiqu’elle soit une circonstance stressante pour le patient et contraignante pour le succès du traitement, elle n’a constitué l’objet d’aucune étude. Dans cette optique, il nous a paru intéressant de réaliser une étude prospective qui a pour but de déterminer les facteurs prédictifs éventuels, permettant de sélectionner les patients qui nécessitent une prémédication avant la séance de LEC.
Il s’agit d’une étude prospective descriptive et analytique réalisée au sein du service d’urologie de l’hôpital Fattouma Bourguiba de Monastir sur une période de 13 mois ayant porté sur 100 patients suivis pour lithiase rénale, n’ayant pas eu de séance de LEC auparavant ni de prémédication et chez qui une LEC a été indiquée (selon les recommandations de l’AFU). Les autres alternatives (urétéroscopie souple et NLPC) n’ont pas été proposées aux patients vus l’absence de plateau technique. La LEC a été réalisée au moyen d’un lithotripteur électromagnétique Lithoskop® de troisième génération de marque Siemens® . Le patient a été installé en décubitus dorsal avec monitorage de ses constantes vitales au scope (fréquence cardiaque, tension artérielle), la région lombaire reposant sur le dôme de convergence des ondes électromagnétiques (OEM). Le patient a été maintenu dans une position ou le calcul est le mieux repéré par rapport à la tête de tirs. Le repérage du calcul, peut se faire de deux fac ¸ons : par fluoroscopie ou par une échographie couplée à la tête de tir, en cas de calcul radio-transparent.
700 Au moment du repérage, les caractéristiques du calcul (la surface, la projection osseuse, les distances L1 : entre capsule rénale-calcul, L2 : peau calcul et L3 : l’épaisseur pariétale) ont été déterminées sur le scanner. Une énergie initiale de 0,1 et progressivement augmentée jusqu’au niveau 4 avec une fréquence de tir fixée à 90 coups par minute. Les paramètres (fréquence et puissance) ont été réglables sur le lithotripteur et consignés dans le rapport de l’étude. Le niveau d’anxiété a été évalué dans le quart d’heure précédant la séance, à l’aide de l’Échelle visuelle analogique (EVA) qui permet au patient de situer son niveau d’anxiété en déplac ¸ant un curseur sur une ligne horizontale entre deux bornes (pas d’anxiété jusqu’a très forte anxiété). La valeur numérique correspondante, lue par l’expérimentateur au verso sur une échelle de 0 mm à 100 mm, permet de déterminer une note d’anxiété comprise entre 0 (pas anxiété) et 10 (anxiété maximale). La douleur a été évaluée sur l’appréciation, par le patient, de sa propre douleur à l’aide de l’EVA selon le même principe qu’on a abordé pour l’évaluation de l’anxiété, seulement les extrêmes étaient définies par 0 (absence de douleur) et 10 (maximum de douleur imaginable). Ces mesures ont été réalisées au début de la séance, à 500 coups, à 1500 coups et à la fin de la séance. Des pauses en cours de séance ont été prévues pour effectuer les mesures ou en cas de douleur importante nécessitant le recours à une énergie plus basse sans modifier la fréquence. Une séance est considérée non douloureuse si EVA ≤ 3. L’étude statistique a consisté en une étude descriptive, une analyse univariée et multivariée. Les résultats de l’étude descriptive sont exprimés en nombre et en pourcentage respectifs pour les variables qualitatives, en moyennes et en déviations standards pou les variables quantitatives. Dans l’étude univariée, pour tester l’influence des différentes variables la comparaison des moyennes a été utilisée pour les variables moyennant le teste de Student et le test du Chi2 pour la comparaison des pourcentages des variables qualitatives à deux classes, quand les conditions d’applicabilité sont réunies (effectif théorique ≥ 5). Pour retenir une variable comme facteur influenc ¸ant, un seuil de sélection à 5 % a été fixé et toute valeur de p ≤ 0,050 est retenue comme significative. Pour l’étude multivariée, nous avons retenu les variables présentant un seuil de sélection inférieur ou égal à 15 % (p ≤ 0,150). Une régression logistique selon la procédure descendante pas à pas (Wald) a été appliquée aux données pour quantifier les liaisons observées. Seuls les facteurs significativement liés à la douleur lors de la séance de LEC retenus à la dernière étape et les résultats sont présentés sous forme d’Odds Ratio, de bornes de l’intervalle de confiance à 95 % ainsi que la valeur de p. Les données ont été saisies et analysées à l’aide du logiciel SPSS version 15.0 pour Windows. Pour toutes les analyses, une valeur de p < 0,05 était considérée comme significative.
Résultats Cent patients consécutifs ont été colligés dans cette étude. L’âge moyen de nos patients était de 50,6 ans avec un sex-ratio (H/F) de 1,5.
K. Ktari et al. La survenue de la douleur, lors de la séance de LEC, en fonction des caractéristiques générales de la population est résumée dans le Tableau 1. Dans notre série, parmi les antécédents pathologiques étudiés, les patients diabétiques ont éprouvé moins de douleur que les autres patients. Parmi les paramètres étudiés nous avons eu recours au tour de taille, qui reflète la masse adipeuse péri-rénale, aucune corrélation statistiquement significative avec la douleur n’a été retrouvée. La survenue de la douleur pendant la séance de LEC en fonction des caractéristiques des lithiases est résumée dans le Tableau 2. Les calculs caliciels inférieurs semblent être les moins douloureux alors que les calculs pyéliques paraissent êtres les plus douloureux, mais ces associations n’étaient pas statistiquement significatives. On a constaté que les patients ayant des calculs avec projection costale étaient plus douloureux, mais cette corrélation n’était pas significative. Dans cette étude, on a noté une corrélation négative entre le score de la douleur et la distance entre la peau et le calcul (L2), surtout si celle-ci était inférieure à 110 mm. Mais une plus étroite corrélation était trouvée entre la distance pariétale (L3) et la douleur. Toutefois, l’épaisseur du parenchyme rénal n’avait pas d’influence sur la douleur. Par ailleurs les circonstances de découverte de calcul, la présence ou non de gaz digestif, la radio-opacité de calcul, le côté du calcul et la taille de calcul n’ont pas montré d’influence sur le score de la douleur au cours de la LEC. L’étude de la douleur en fonction des caractéristiques des patients durant la LEC illustrée dans le Tableau 3. Le niveau d’anxiété était associé à la survenue de la douleur au cours de la LEC. Parmi les patients ayant eu une séance de LEC douloureuse, 71,2 % avaient un niveau d’anxiété supérieur à 4, contre 50 % dont le traitement n’a pas été douloureux (p = 0,036). Au cours d’une séance de LEC douloureuse, on a noté que la fréquence cardiaque était supérieure par rapport à celle notée au cours d’une séance non douloureuse (84 bpm vs 78 bpm) mais cette différence n’était pas significative (p = 0,129). De même la tension artérielle n’était pas corrélée à la douleur. L’étude de la douleur en fonction des caractéristiques de la lithotripsie illustrée dans le Tableau 4. Dans notre série, l’étude de l’évolution de la douleur aux différents temps de la séance en fonction du niveau d’énergie délivrée ou de l’intensité des tirs n’était pas linéaire. Une seule corrélation négative a été retrouvée au temps T1500. Les patients, chez qui la LEC était non douloureuse, avaient eu un niveau d’énergie supérieur à celui qui a été noté au cours d’une séance de LEC douloureuse. Les facteurs prédictifs majeurs de la douleur retenus en étude multivariée sont mentionnés dans le Tableau 5. Chez nos patients, l’analyse univariée n’a pas montré de corrélations entre le sexe et la douleur, par contre l’étude multivariée a démontré que le sexe féminin est un facteur prédictif indépendant de douleur.
Facteurs prédictifs de la douleur lors du traitement des calculs rénaux Tableau 1
Évolution de la douleur pendant la séance de LEC en fonction des caractéristiques générales de la population.
Sexe M Sexe F Âge (ans) HTA Diabète Lombotomie Obésité abdominale a b
701
LEC non douloureuse (n = 34)
LEC douloureuse (n = 66)
p
24 (40 %) 10 (25 %) 54 ± 16 11 (32,4 %) 11 (32,4 %) 54 (17,6 %) 17 (50 %)
36 (60 %) 30 (75 %) 49 ± 15 11 (16,7 %) 10 (15,2 %) 12 (18,2 %) 35 (53 %)
0,121a 0,147b 0,073a 0,045a 0,947a 0,774a
Test de Chi2 . Test de Student.
Tableau 2
La survenue de la douleur pendant la séance de LEC en fonction des caractéristiques des lithiases.
CDD Fortuite Colique néphrétique Lombalgies Siège Pyélique Caliciel supérieur Caliciel moyen Caliciel inférieur Lithiase gauche Taille (mm) Radio-transparent Projection sur l’os Gaz digestifs Dilatation L2 (mm) L1 (mm) L3 (mm)
LEC non douloureuse (n = 34)
LEC douloureuse (n = 66)
p
9 (26,5 %) 8 (23,5 %) 17 (50 %)
12 (18,2 %) 19 (28,8 %) 35 (53 %)
0,335a 0,575a 0,774a
19 (55,9 %) 1 (2,9 %) 3 (8,8 %) 11 (32,4 %) 16 (47,1 %) 190 ± 164 3 (8,8 %) 9 (26,5 %) 17 (50 %) 18 (62,1 %) 111 ± 21 38,2 ± 12,7 72,8 ± 21,5
40 (60,6 %) 5 (7,6 %) 6 (9,1 %) 15 (22,7 %) 43 (65,2 %) 202 ± 141 10 (15,2 %) 24 (36,4 %) 33 (50 %) 37 (63,8 %) 102 ± 21 39 ± 13,1 62,7 ± 20,9
0,649a 0,331a 0,965a 0,299a 0,081a 0,698b 0,534a 0,319a 1,000a 0,875a 0,033b 0,758b 0,026b
CDD : circonstance de découverte ; L1 : distance parenchyme calcul ; L2 : distance peau calcul ; L3 : distance pariétale. a Test de Chi2 . b Test de Student.
Discussion Le mécanisme de la douleur au cours de la LEC, reste encore mal élucidé. La LEC est considérée comme un bon modèle d’étude de stimulation nociceptive viscérale chez l’homme conscient [5] puisque à l’entrée des ondes de choc à travers
Tableau 3
La douleur au cours de la LEC en fonction de l’anxiété.
Anxiété Anxiété > 4 a b
la peau et les tissus avoisinant le calcul, ces ondes stimulent les nocicepteurs cutanés superficiels ou viscéraux [6]. En effet, la douleur provoquée par la LEC paraît clairement viscérale comme le suggère la description des malades : douleur lombaire, souvent comparables à celles des coliques néphrétiques précédemment ressentie mais
Test de Student. Test de Chi2 .
LEC non douloureuse (n = 34)
LEC douloureuse (n = 66)
p
3,2 ± 2,2 17 (50 %)
4,6 ± 2,6 47 (71,2 %)
0,009a 0,036b
702 Tableau 4
K. Ktari et al. La douleur en fonction des caractéristiques de la lithotripsie. LEC non douloureuse (n = 34)
T500 Energie Intensité T1500 Energie Intensité Tfin Traitement Energie Intensité Nombre de coups
LEC douloureuse (n = 66)
p
3,04 ± 0,55 7,2 ± 2,17
2,85 ± 0,71 6,42 ± 1,9
0,185 0,071
3,7 ± 0,59 31,14 ± 8,2
3,41 ± 0,67 27,62 ± 7,02
0,046 0,039
3,46 ± 0,63 50,4 ± 0,72 2192 ± 720
3,24 ± 0,72 51,45 ± 17,03 2180 ± 697
0,197 0,837 0,934
Test de Student.
Tableau 5
Facteurs prédictifs d’une LEC douloureuse retenus en étude multivariée. Wald
Sexe féminin Niveau d’énergie Calcul gauche L2 < 110 mm
4,638 3,645 3,618 4,571
OR
p
3,139 3,042 2,433 2,766
IC à 95 %
0,031 0,056 0,057 0,033
Min
Max
1,108 0,971 0,973 1,088
8,890 9,534 6,081 7,027
L2 : distance peau calcul ; Wald : régression logistique selon la procédure descendante pas à pas ; OR : Odds Ratio avec intervalle de confiance à 95 %.
Tableau 6
Publications récentes évaluant la douleur au cours de la LEC.
Études
Type de machine
Francheschi 1990 [12]
EDAP LT 01 PE Dornier HM4 EH Nova UltimaDirex EH Siemens Lithoskop® EM
Torrecilla 2000 [14] Oh 2005 [15]
Notre série 2010
Nombre de patients
Âge moyen
Niveau moyen de douleur
Taux de traitement inachevé
78
42,8
—
28 %
20
39,5
4,1
—
180
50
6,6 ± 2,3
—
100
50,6
7,39
29 %
PE : piézoélectrique ; EH : electro-hydraulique ; EM : electromagnétique.
qui disparaît à l’arrêt du traitement. Elle est vraisemblablement due à l’effet de cavitation qui stimule les fibres nerveuses. D’autres facteurs seraient aussi impliqués dans la genèse de la douleur au cours de la LEC ; il y a ceux qui sont liés au patient et d’autres en rapport avec le type de lithotripteur, le site et le diamètre du calcul, la pression des ondes de choc, le diamètre de la zone focale [5]. L’analyse de la douleur lors de la LEC a fait l’objet de peu d’études publiées jusqu’à présent dont la majorité s’est
intéressée essentiellement à la comparaison de l’efficacité de deux antalgiques ou plus [7,8] car ils ont considéré que la douleur provoquée par ce type de traitement reste non négligeable et qu’une prémédication antalgique s’avère nécessaire [5,7]. Le Tableau 6 résume les publications les plus récentes, ayant le même principe que notre étude : ils n’ont pas utilisé de prémédication antalgique ou anxiolytique, mais avec des lithotripteurs différents rendant la comparaison assez délicate.
Facteurs prédictifs de la douleur lors du traitement des calculs rénaux Ces résultats étaient comparables à ceux rapportées dans la littérature et viennent renforcer l’idée que la LEC reste malgré les progrès, un traitement assez douloureux justifiant la recherche continue dans plusieurs centres dans le monde de la méthode analgésique la plus appropriée [9—11] pour minimiser la douleur provoquée par LEC.
Les paramètres prédictifs de la douleur Douleur et caractéristiques générales de la population de l’étude Dans notre série, le sexe féminin, ainsi que l’état d’anxiété étaient trouvés comme des facteurs prédictifs de la douleur. Cependant, l’antécédent de diabète était inversement corrélé à la douleur, vue l’augmentation du seuil de la douleur au cours de cette pathologie. Dans notre étude, on a évalué l’anxiété par l’EVA et on a trouvé qu’elle est un facteur prédictif important de la douleur mais c’est un paramètre subjectif vu qu’on n’a pas adopté un score spécifique de l’anxiété. La plupart des auteurs ont montré que l’âge jeune (inférieur à 40 ans) était un facteur prédictif de douleur, facteur non révélé par notre étude. Cela peut être expliqué par le fait que 78 % de nos patients avaient un âge supérieur à 40 ans.
Douleur et caractéristiques des lithiases L’analyse de la douleur en fonction de la localisation du calcul dans l’arbre urinaire montre que les lithiases urétérales sont significativement les moins douloureuses par rapport aux calculs rénaux [8,12] qui pourraient être expliqué par la richesse de la capsule rénale en fibres sensitives amyéliniques et par le parenchyme rénal [8]. Pour les calculs intra-rénaux, l’étude de Franceschi et al. [12] a montré que les calculs caliciels supérieurs, moyens et pyéliques étaient significativement plus douloureux que ceux caliciels inférieurs. Dans notre étude, cette association n’était pas statistiquement significative. Dans notre série, comme dans la majorité des études nous n’avons pas trouvé de corrélation entre la douleur et la taille de calcul. Vergnolles et al. [8] ont montré que la projection de calcul sur la côte était un facteur prédictif majeur de la douleur recommandant une analgésie adjuvante par tramadol associé au traitement antalgique standard. Cette corrélation serait liée à l’effet direct des ondes de choc sur l’os surtout avec le périoste qui est richement innervé ainsi que l’irritation des nerfs intercostaux. Cette corrélation n’a pas été significative dans notre étude. Les distances tissulaires traversées par les ondes de choc depuis le dôme de convergence de lithotripteur, qui est directement appliqué à la peau de la région lombaire, jusqu’au calcul qui est intra-rénal. L’étude de ces distances a montré des corrélations significatives entre la douleur et les distances L1 (parenchyme calcul) et L2 (peau calcul). Franceschi et al. [12] ont montré que le score de douleur est corrélé de fac ¸on positive avec L1 et de fac ¸on négative avec L2. La corrélation la plus forte était retrouvée avec la différence L2-L1 qui correspond à l’épaisseur pariétale traversée avant d’atteindre le rein ; plus cette distance est grande, moins la douleur est importante. Cela a été expliqué par le fait qu’il y’a perte d’énergie au niveau
703
pariétal. Il est d’ailleurs décrit que les résultats de la LEC chez les obèses sont moins fructueux [13]. Dans notre série, nous avons trouvé des résultats similaires à ceux publiés dans la littérature. Toutefois, l’épaisseur du parenchyme rénal n’avait pas d’influence sur la douleur. Ce qui suggère que la douleur provient essentiellement de la stimulation de la capsule rénale qui est riche en fibres nerveuses amyéliniques et non du parenchyme rénal [12].
Douleur et caractéristiques de lithotripteur L’intensité ainsi que le niveau d’énergie de l’onde de choc sont des facteurs qui interviennent majoritairement dans le mécanisme de la douleur [7]. L’analyse des résultats à travers la littérature ne permet pas de conclure, dans l’absolu, à un risque douloureux accru selon l’énergie ou l’intensité des tirs utilisés comme ce qui pourrait être attendu. Franceschi et al. [12] ont montré que les scores de la douleur augmentent avec l’intensité des impulsions avec une différence hautement significative. En revanche, l’évolution dans le temps des réponses, à chaque niveau d’intensité, n’était pas linéaire, suggérant une habituation qui se développerait au cours de la séance. Andréou et al. [7] ont montré une corrélation significative entre l’énergie délivrée et la douleur lors de la LEC mais qui était variable selon les patients justifiant la progression par paliers de ces paramètres afin de les adapter à la tolérance individuelle de chaque patient. Dans notre série, l’étude de l’évolution de la douleur aux différents temps de la séance en fonction du niveau d’énergie délivrée ou de l’intensité des tirs n’était pas linéaire. Une seule corrélation négative a été trouvée au temps T1500. Les patients, chez qui la LEC était non douloureuse, ont eu un niveau d’énergie supérieur à celui qui noté au cours d’une séance de LEC douloureuse. Ceci paraît un peu contradictoire mais éventuellement dû au fait que le niveau d’énergie délivrée était progressif et toute demande d’interruption était respectée par l’opérateur, l’obligeant à repartir du niveau 0.
Conclusion Notre étude analytique a montré que la douleur était corrélée essentiellement au sexe féminin, au score de l’anxiété, aux calculs gauches, au niveau d’énergie délivrée, à la distance pariétale et la distance peau calcul. Par conséquent, le recours à la sédo-analgésie pourrait être prévisible dès le début de la séance de LEC, chez les patients de sexe féminin ayant un score d’anxiété supérieur ou égal à 4, une distance peau calcul inférieur ou égal à 110 mm.
Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
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