Recherches genetiques sur le comique

Recherches genetiques sur le comique

LABORATOIRE DE PSYCHO-FEDAGOGIEEXFERIMENTALE, UNIVERSITE DE LIEGE, BELGIQUE. ] ) l r e c t e U l ~ : PROF. N. BRAUNSHAUSF_,N et RECHERCHES GENETIQUE...

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LABORATOIRE DE PSYCHO-FEDAGOGIEEXFERIMENTALE, UNIVERSITE DE LIEGE, BELGIQUE. ] ) l r e c t e U l ~ : PROF. N. BRAUNSHAUSF_,N et

RECHERCHES

GENETIQUES

R. NizAm).

SUR LE COMIQUE

par ROGE,:~ PIRET D~ R~CI-I~RC~IK~ :~U :I~ONDS NATIONAL BELGE DE ~ RECH~RCI'E~SCIEN~W_FIQUE.

~ E

SOMMAIRE

I. II. llI. IV. V.

Introdt~ction. Le l~robl~me du comique. Les premiers stimuli du sourire et du rire et les premieres manifestations du sentiment du comique. Les m6thodes d'investigation. Etude des th6mes comiques fondamentaux. Conclusions. I.

INTRODUCTION.LE PROBLEMEDU COMIQUE.

Le but du present travail est d'6tudier la g~n~se du sens du comique chcz r e n f a n t et d'apporter ainsi une contribution it r~tude de ia signification du comique. Cette question n'a gu6re progressd au cours des si~cles et B~rgson 1) a pu dire avec raison: ,,Que signifie le rire? Qu'y a-t-il au fond du c,,mique? . . . . Les plus grands penseurs, depuis Aristote, se sont attaqu6s ~ ce petit probl6me, qui toujours se d~robt~ sous reffort, glisse, s'6chappe, se rcdresse, impertinent d~fi jet6 la spdculation philosophique. Pour expliquer les causes psychologiques du tire provoqu6 par le comique, certains philosophes ont propos6 des th6ories morales: perception d'une d6gradation (Aristote, Bain), sentiment de sup6riorit~ (Hobbes), glorification 6goiste soudaine (Anthony), r6gression ~ l'infantile (Freud), etc. D'autres se sont ralli6s it des th6ories intellectualistes: r6solution d'une attente e n r i e n (Kant), disconvenavce entre une conception et un objet r6el (Schopenhauer), i n c o n r a i t 6 l~ Pour les indications d'ouvrages, vOir la bibliographic ~ la f~

.~ l'article.

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ROGER PIRET

descendante (Spencer), contradiction logique (Dumont), opposition entre ]e m~anique et le vivant (Bergson), etc. Toutes ces theories, que nous ne pouvons exposer plus longuement ici I), ont ~t~ robjet de critiques vari~es et d'appr~ciations tr~s s~v~res. Beerbohm lea qualifie d'incompr~hensibles, Kiilpe d'unilat~raL~s, St. Hall et Allin de ,,lamentablement m6taphysiques dans leurs tendances, n~buJeuses et dtroites". Pareils jugement3, trop absolus pour ~tre pieinement justifids,sont cependant fond~ ~ certains dgards: l~.plupart des theories du comique sont ~tro!tes, unilat~rales, certaines n~buleuses, et lea plus c~l~bres emp~eintes d'un esprit de syst~'.ne outrancier. D'autre part, les th~oriciens commettent sr,uvent l'erreur de s'attacher d'embl~e aux formes supdrieures du comique (esprit,hu~our, procdd~s des comedies classiques) dont la complexit~ ~gare les interprdtations et engendre des conclusions insuffisantes ou erron~es. Les premiers exp~rimentateurs 2) tomb~rent ~galement dans ce travers. Leur recherches pr~cises et minutieuses aboutirent souvent ~ des conclusions bien maigres, ~t des t~tonnements, des i~icertitudes,~,arce qu'ils ~taient d~bord~s par la masse et la complexit~ de~ifaits. II semble donc plus logique, si ron veut r~soudre un pro~ b]~me aussi difficile que celui du comique, de partir de la base, d'aller du simple au complexe, de renfant ~ radulte, bref de recourir ~ cette m~thode gdn~tique qui a fait ses preuves en tant de domaines. Certes, de nombreuses observations ont ~t~ d~j~ recueillies sur le rire et le sourire enfantins 3). Mais ce qui reste ~ faire, en g;ande partie, c'est d'exp~rimenter syst,~matiquement sur le sens du comique chez renfant, sur la com~r~hensio~ qu'il acquiert peu ~ peu .lea principaux th~mes plaisants. C'est l~ un ph~nom~ne d'ordre intellectuel,lid ~ tout le d~veloppement mental, mais ind~pendant des circonstances dont eat tributaire rintensit~ du rire. Te! a donc ~t~ notre but. Mais le present article ne comprend que la premiere partie du travail d'ensemble que nous I) O n trouvera d'arnples exposds des thtkoriesdana l'ouvrage de Sully et rartlcle ,de DL~erens.

2) Voir la revue des travaux exp@rimentaux fare par m i ~ Perl. :~) Cf. les articles de Brackett, Ding-Jersild, Enders, H e r ~ e l d - P r a g e r . Justin, Valentine.

RECHERCHES GENETIQUES $UR LE COMIQUE

10~

comptons consacrer & la question. Seuls seront envisages ici los th~mes comiques les plus simples, accessibles & de jeunes enfants. On ne trouvera donc pas d'~tude sur les formes sup~rieures du plaisant, le comique verbal, le mot d'esprit et rhumour. II.

LES PRE MIERS

STIMULI DU SOURIRE ET DU RIRE ET LES

PP~EMIERES MANIFESTATIONS

DU SENTIMENT

DU COMIQUE.

Miss Washburn, qui a fait une excellente ~tude exp~rimentale sin' le rire et le sourire chez les b~b4s, donne un tableau des principales observations recueillies par les psychologues et les biographes d'enfants en ee domaine. I1 en ressort que le sourire et le rire, qui apparaissent respectivement d~s le premier et le 19e jour de la vie 1), sont originellement des r~actions de plaisir & des s~imuli divers, visuels ~flumi~re, objets brillants), auditifs (sons, voix humaine), tactiles (chatouillement, tapotement, bain chaud) et kinesth~siques (mouvements). Une sensation g4n~rale de bien-~tre, particuli~rement apr~s la t4t~e, semble 6tre, sinon la cause la plus fr~quente du sourire et du rire, du moins une condition ~minemment favorable & la production de ces ph~nom~ne~. Le sourire peut aussi constituer un indice de r~cognition, une r~.action aux tableaux familiers, au d4j& vu, et il se produit souvent, ainsi que Font fait remarquer Piaget, Valentine et Miss Washburn, lorsqu'il y a r~apparition brusque d'objets ou de visages connus, ou r~p~tition immediate d'un spectacle familier. D'autre part, le sourire en r~ponse au sourire ou & l'expression aimable des adultes, par suggestion ou ,,stimulation sociale", apparait d~s le premier mois et reste frequent durant toute l'enfance. Mais le sourire et le rite sont avant tout, chez l'enfant, les expressions par excellence du plaisir, du bien-~tre, de l'all~gresse physique, de l'exub~rance, de la joie sous routes ses formes. Ils se produisent souvent durant le jeu et accompagnent les activit~s agr~ables. Outre les observations des psychologues d~j~t cit4s, nous poss~dons sur ce sujet un hombre considSrable de donn~es fournies par les travaux de • ) Valentine (p. 645) a pourtant consta~ d~s le foe. Jour, chez Fun enfants, cUrt bruit t..~s semblable /~ un petit rile, ~pr~s un bain chaud~

s~

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ROOER P~R~'r

I~,rackett, Enders, Ding-Jersild, etc. II en r~sulte que, chez le~ f~fants d'~ge pr~scolaire, le sourir~ et le rire accompagnent le plus souvent l'activit~ g~n~rale, et particuli~rerement ]'activit~ motrice (exercices vifs, courses, danses, jeux de main, etc.) ; ces ph6nom~nes se produisent aussi, chez le jeune enfant, ~ la vue d'objets en mouvement et ~ ]'audition de sons aigus. L'~volution du sourire et du rire non provoquds par le comique est facile ~ suivre. Durant toute Yexistence, le sourire restera l'expression la plus caract~ristique de l'euphorie, du plaisir et de la joie, alors que le rite 1) remplira plus rarement cette font~tion, en partie parce que l'adulte a perdu, dans une large mesure, ce gofit physique de la vie et cette fraicheur de sentiments qui caract~risent l'enfance, en partie parce que le rire s'est sp6cialis~ darts le rSle de r6action au comique, et qu'un certain respect humain ferait ccnsid6rer comme de l'enfv~:tillage le rire de la joie ou de l'all~gresse physique 2). Les l n~m~ raisons expliquent la diminution de fr~quence, chez l'adulte, du rite caus6 par ]a ,,stimulation soci~de", ~tant donn~, en outre, que ]a suggestibilit6 d6croit avec l'ige. Auesi, cette ,,stimulation sociale" ne provoque-t-elle plus gu~re que le sourire. Cependant, dans ]e domaine d~J comique, le rire res~era contagieux pendant toute la vie. Enfin, le sourire, consid~r~ comme l'expression typique du plaisir, prend une s~rie de significations sociales parfois tr~s ~loign~es du sens primi~if de ce r6flexe, et le rire subit la m~me 6volution, dans une mesure moindre: de lk les sourires uolis ou d~daigneux, amers, pine,s ou r~sign~s, voire douloureux, et les rires affect~s, sarcastiques ou vengeurs, fr6n~tiques ou d~sesp~r~s 3). On peut se demander maintenant si Yon ne trouve pas d~jb chez le b~b~ les premieres manifestations du sentiment du comique. II semble qu'on puisse r~pondre par ]'affirmative et voici peut-~tre le point de d6part de ce sentiment. D~ns un de leurs articles, Ch. Biihler et H. Hetzer exposent les r6sultats Jr) Nous la~ssons de cOt~ le rlre b cause p u r e m e n t physique (chatoulUement, ftmld, exhilarants). ~) Sully cite des r~cits d'explorateurs, selon l e s q u e ~ certains sauvages m s n l festent f r ~ u e m m e n t leur bonne h u m e u r p a r t m r i t e prolongS, La r u e d~un obJet brillant ou Joll petit provoquer le tire, et no~ p u seulement le sourire, ehez le sauvage c o m m e chez l'enfant, le fait eat bien cormu. 3) Sur tout ceci. cf. l'article de Paulhan.

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RECHERCHES GENETIQUES SUR LE COMIQUE

de la petite experience suivante, faite sur des b~bds. L'exp~rimentatrice s'approche d'abord de l'enfant avec une expression amicale, puis, imm~diatement apr~s, avec une expression s~v~re, comme si elle ~tait f~ch~e, la main levee dans un geste de menace. A par t i r de l'Age de 8 mois, la plupart des enfants (65 %) distinguent avec certitude !es deux expressions, au point m~me que plusieurs sourient ~ la vue du visage f~ch~. Ce fa~t est de toute premiere importance pour l'~tude de la g~n~se du sens du comique. II semblerait donc qu'~ 8 mois d~jA, bon nombre d'enfants seraient capables de distinguer un comportement simul~ d'un comportement r~el. Ils reconnaitraient sans h~sitation une personne bien dispos~e ~ leur ~gard, sous une apparente expression d'hostilit~. Nous avons refait l'exp~rience d~. Ch. Biihler et H. Hetzer avec des enfants de 0 ;6 ~ 2 ;6, puis avec des ~l~ves d'~cole gardienne (2 ;7 A 6 ;6), dang le but de constater le nombre de sourires et de rites ~ chaque niveau d'Age. Voici leg r~sultats. TABLEAU 1. SXMULATION. BEBES. 10 s ~ j e t s p a r Age Age

N. de r t r e s

N. de s o u r i r e s

Total

%

0;6 - - 0 ; 7 0 ;8 - - 0 ; 9 0;1(~-0;11 1;0 - - 1 ; 5 1;6 - - 1 ; 1 1 2;0 - - 2 ; 6

----1 3

1 4 3 5 6 5

1 4 3 5 7 8

10 40 30 50 70 80

4

24

28

Total:

TABLEAU 2.

SIMULATION. PRESCOLAIRES. 20 s u j e t s p a r Age

Age 3 ar~s ( 2 ; 7 - - 3 ; 6 ) 4 . (3;7--4;6) 5 ,, ( 4 ; 7 - - 5 ; 6 ~ 6 ,, ( 5 ; 7 - - 6 ; 6 ) Total:

N. de r i t e s

Total

%

6 5 4 6

N. de s o u H r e s 10 14 16 13

16 19 20 19

80 95 100 95

21

53

74

On voit clue le nombre de rires et de sourires progr Jse r~guli~rement avec l'~ge et qu'/~ partir d'un an la m( * ~ des

71O~

ROGER PIRET

enfants sourient en reconnaissant la simulation du comportement de l'exp~rimentateur. A partir de 4 ans, lea enfants qui ne discernent pas cette simulation et qui n'en rient ou sourient point sont des exceptions. Ajoutons que ces experiences de simulation sont de nature ~ susciter une vive gaiet6 quand lea enfants sont en groupe et que la simulation du geste mena~ant eat tout ~ fait apparente. D'autres experiences ont ~t~ faites pour d~celer la comprehension de la simulation et de la plaisanterie par le jeune enfant. Quelques psychologues ont recouru au ,,jeu de coucou" (Guck-guck Spiel, Peek-a.boo). L'exp~rimentateur met une couverture :,ur le visage de l'enfant et dit: ,,Oh eat b~bd?". Apr~s quelques secondes, il enl~ve la couverture et r~pond: ,,Coucou, il eat 1~!" Ce jeu eat poursuivi durant quelques minutes. C'est b Miles Herzfeld et Prager que l'on dolt lea observations lea plus prdcises sur le comportement des b~b~s soumis ~ cette experience du jeu de coucou. Elles ont not~ trois types de r~action affective: mauvaise humeur, indifference et gaiet~ (rire ou sourire). Elles ont eonstat~ qu'avec r~ge le hombre de r~actions de gaiet~ augmente, tandis qrJe la mauvaise humeur et l'indiff~rence se font plus rares, parce clue l'enfant se rend compte qu'on ne lui veut pas de real en le recouvrant de la couverture, puisqu'on le d~livre presque imm~diatement; bref, il comprend la simulation, le caract~re plaisant de la situation. Une autre experience de Miles Herzfeld et Prager, toujours dana le m~me domaine, consistait t~ taquiner l'enfant en lui o f f r a n t un bonbon, qui ~tait retir~ au moment oh ii~ allait ~tre saisi. Ce man~ge ~tait poursuivi durant deux minutes. Alors qu'entre 1 ;0 et 1 ;5, 80 % des sujets manifestent de la mauvalse humeur, 90 % des enfants de 3 ans comprennent la taquinerie et s'en amusent. II eat vrai que cet amvLsement est temp~r~ par le d ~ i r de poss~der le bonbon conw)it~, qui se d~robe sans cesse. En revanche, lorsque la simulation ne frustre pas l'enfant, elIe est une source de grande gaietY, d~s un age tendre (Valentine, p. 655, cite un cas ~ 0 ;9). A fortiori, lorsque l'enfant lui-m~me s'amuse ~t simuler un co~portement pour faire une farce ~ sea camarades ou aux adultes. De nombreuses anecdotes relatives b c e genre de simulation sont rap~ort~es par le~ auteurs de biographies d'enfa:~ts (notam-

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ment lea Scupin et M e Neugebauer) et par di~'ers psychologues. O n peut consid~rer qu'il y a ici une s~rie de th~mes comiques primitifs, en ce sens que, par la simulation, renfant s'efforce d'amener autrui (le plus souvent radulte) ~ se comImrter d'une mani~re inadequate, risible. Voici donc cette s~rie de thames, avec, entre parentheses, l'~ge de la premiere apparition, d'apr~s la litt~rature i) : 1) L'enfant simule son absence ou celle des objets, il se cache ou cache des objets, d'une mani~re tr~s primitive au d~but, et il s'amuse de voir lea vaines recherches d'autrui

(i ;2). 2) L ' e n f a n t simule une mauvaise action, une maladresse ou un oubli, pour amene~- au'~rui "~ se f~cher (1 ;6). 8) L ' e n f a n t f a i t sembhmt de percevoir quelque chose d ' e f f r a y a n t pour f a i r e peur ~ a u t r u i (2 ;5). 4) L ' e n f a n t simule la v~rit~, il dit des mensonges, afin que les adultes ou d ' a u t r e s e n f a n t s se r~jouissent prdmatur~ment, pour ~tre d~sillusionn~s darts la suite (5 ;O). 5) L ' e n f a n t simule le comportement, le langage ou la tenue d ' a u t r u i (2 ;8). Dans le dernier cas, nous sommes en presence du th~me comique de rimitation, qui jouit d'une grande f a v e u r chez les enfants, ~ p a r t i r de 3 ou 4 ans. Les observations foisonnent ce s u j e t ; citons-en quelques-unes que nous devons ~t l'obligeance de Mlle J. Hauzeur, institutrice gardienne h Renorylez-Lidge: ,,Off le rire devient de rhilarit~, c'est lorsqu'ils (les enfants) imitent des personnages connus ou qu'ils miment de petits r~cits: jouer ~ ~tre les trois ours, les chevaux de Cendrillon, la princesse Ratone. Ceux qui jouent les personnages eomme ceux qui r e g a r d e n t sont ~galement joyeux." ~ ,,Pend a n t plusieurs rdcr~ations, Cadet (4 ;6) a organisd le jeu de Blanche-Neige. Il dtait P r o f et ses compagnons, Alphonse (4;6), Maxime (4;0), Guillaume (2;9} et Jean (5;6) le suivaient en c h a n t a n t et en riant comme de petits fous." ~ ,,Le d~guisement les amuse follement. Nous avons f a i t une matinee de Carnaval en classe. Ce f u t m~morable: ,,Comme on a ri, le j o u r qu'on s'est habill~ pour le bal !", ont-ils r~p~t~ des semaines d u r a n t . " I)

Des exemples sont cttds par Miles Herzfeld et P r ~ g e r (p. 377,

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ROGER PIRET

P a r ailleurs, les premiers exemples de .~a comprehension du comique prorrement dit, chez le petit enfant, semblent pouvoir s'expliquer par la perception d'une simulation. Ainsi, Valentine (p. 655) rapporte qu'A 0 ;6 un de ses fils riait de voir sa m~re coiffee d'un chapeau de gendarme et d'entendre son p~re faire sa voix de fausset. La simulation est ~vidente ici. De re@me dans rimitation des cris de l'enfant par la m~re, qui provoque le rire du m~me b@b@~ l'~ge de 0 ;8. I1 arrive aussi qu'un rire, suscit6 originellement par la perception d'une simulation, se produise A nouveau quand le fait, d'abord simul~, devient rdel. Le fils de Valentine (p. 659), d~j~ eit~, riait, ~ 1 ;4, quand sa m~re faisait semblant de pleurer. Mais un jour qu'clle manifestait une douleur r~elle, sa l@vre ayant heurt~ la t~te de renfant, celui-ci dclata de tire, croyant sans doute encore ~ une simulation. I1 s'amusait aussi de la voir d~gringoler d'un talus, ce qu'elle avait fait A dessein, pour permettre une photographie du rire de l'enfant. I1 est tr~s possible aussi que l'enfant croie ~ une simulation quand on lui dit une chose inexacte, qui lui parait risible. Sully (p. 22) rapporte l'exemple d'un gargonnet de 1 ;6 qui s'@gayait quand sa tante lui demandait ce que racontent les vagu4~s; ~ 1 ;10, le m~me enfant rit aux @clats quand on ]ui annon~a qu'il allait voler comme un oiseau. C'est donc par la simulation que l'enfant, d~s la deuxi~me annde, provoque chez autrui des comportements inad~quats qui ]lui paraissent risibies. C'est d'elle d@rivent plusieurs th~mes comiques importants: les m~saventures d'autrui, les farces, l'imitation, le ddguisement, la parodie. Or, dans la simulation, il y a une attitude de jeu qui constitue une des conditions essentielles de la perception du comique. Doit-on chercher 1~ le point de d~part d'une explication g@n~tique du plaisant? C'est fort possible, et nous nous r~servons de v~rifier cette hypoth~se par des recherches ult~rieures plus approfondies. III.

LES METHODESD'INVESTIGATION.

Apr~s avoir donn~ un aper~u ,des premiers stimuli du rire et du sourire et des premieres manifestations du sentiment du comique, venons-en b l'expoe,~ de nos recherches exp~ri-

~ECHE~CHES GENETIQUES $U~

LE COMIQUE

III

mentales, en commen~ant, comme faire se dolt, par rendre compte des m~thodes employees. Soucieux de partir des faits, sans aucune idle pr~con~u,s, nous avons mis ~ la base de nos recherches les r~sultats d'une enqu~te sur les dessins comiques effectu~s par nos sujets. En effet, avec de jeunes enfants, ]a plupart d'~ige pr~scolaire, le questionnaire ~crit ne peut ~tre employS, et le questionnaire oral ne donne que de maigres r~sultats. On conna~t d'ailleurs la valeur du dessin comme moy~n d'expression chez ]'enfant, et Mlles Herzfe]d et Prager, dans ]eur ~tude, en o~t montr~ ]'int~r~t pour le sujet trait~ ici. Voici quelques d~tails sur cette enqu~te, qui eut lieu dans les ~coles d~pendant du laboratoire de psycho-p~dagogie d'Angleur-lez-Li~gel). On disait aux petits sujets: ,,Vous allez dessiner quelque chose ou que|qu'un de comique, de ,,rigolo", qui fera rire quand on le regardera". Toutes les precautions n~cessaires ~taient prises pour ~viter la suggest.ion et l'imitation. Chaque fois qu'un enfant avait termin~ sa t~che, on lui demandait, en veillant ~ ce que sa r~ponse ne ffit point entendue des autres: ,,Qu'as-tu voulu dessiner de rigolo, qu'y a-t-il de comique dans ton de,sin ?" Les r~ponses ~taient not~es mot ~ ~mot. 220 enfants de 3 ~ 8 ans particip~rent ~. cette enqu~te, mais les instructions donn~es ne limitaient nullement le hombre de motifs: chaque enfant pouvait representer autant d'objets, de personnages ou de sc~nes qu'il le d~sirait, en sorte que certail~es copies renferment deux ou trois motifs diff~rents, parfois davantage. Finalement nous obtinmes 342 motifs. Encore fallait-il s'assurer que tous ces dessins ~taient vraiment comiques, ou du moins voulus tels par les petits. Un contrS]e rigoureux ~tait n~cessaire. Seuls furent d~finitivement retenus : 1) Les dessins dont le caract~re comique ~tait bien ~vident, par exemple ceux qui repr~sentaient des disproportions, bizarreries, absurdit~s, m~saventures d'autrui, farces, etc. 2) Les ~essins d'une interpretation malais~e, mais dont I ) Nous adressons nos plus vifs remerciements ~ la dlrectrice de ce laborr ~re, .Wnle Jadoulle, ainsl q u ' a u x Instituteurs et institutrices qui nous ont seco-, ~vec u n z~le et une eomprdhension remarquables.

ROOER PIRET

112

lea auteur~ commentaient clairement le caract~re risible, attestant qu'ils avaient eompris h consigne et qu'ils poss~ daient, it un degr~ quelconque, le sens du comique. C'est ainsi que pros de 25 % des dessins f u r e n t ~cart~s, parce que le caract~re comique en ~tait it tout le moins douteux. Nous sommes donc en mesure d ' a f f i r m e r que les dessins retenus peuvent ~tre consid~rds comme vraiment significatifs et constituent une base solide pour les recherches ult~rieures. En voici le d~nombrement par Age. TABIZAU $. Age 3 ans 4 5 6 7 8

,, ,, ,, ,, ,,

Total:

DZSSINS 8mNIFICATIFS.

N. total de dessins (motifs) 23

N. de dessins sigMflcatifs

%

--

28 55 101 63 72

8 30 96 59 66

342

259

28,6 54,5 95,0 93.6 91,7

II serait hasardeux de tirer de ce tableau des conclusions trop absolues. Le fait qu'aucun enfant de 3 ans ne put r~aliser de dessin significatif n'implique nullement l'absence du sens du comique it cet Age. Il faut tenir covapte des aptitudes graphiques tr~s rudimentaires des jeunes enfants, ainsi que de leur incapacit~ d'expliquer la signification de leurs oeuvres. Peut-~tre certains d'entre eux ont-ils voulu representer quelque chose qu'ils consid~raient, m ~ m e vaguement, c o m m e comique. Mais la m6thode exp~rimentale ne peut se contenter de faits douteux et un contr61e rigoureux devait ~liminer les dessins de ce genre. Nous pouvons done fonder nos recherches sur les th~mes comiques attest6s it p a r t i r de 4 ou 5 ans, quitte it essayer de d~terminer, par l'exp~rimentation si ces th~mes ne sont pas connus d~jit de que]ques sujets d~s l'~ge de 3 ans, et m~me plus tSt. P a r ailleurs, du f ai t que 95 % des dessins effectu~s par les enfants de 6 ans sont significatifs et clue ce pourcentage ne s'~l~ve plus dans la suite (il diminue m~me it 7 et 8 ans, mais la difference n'a aucune valeur statistique), il f a u t se garder de conclure que la comprehension du comique est, d~s lors,

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113

presque parfaite. Cela signifie simplement clue la majorit~ des enfants de cet age a, non seulement le sens du comique assez prononc~ pour satisfaire ~ la consigne donn~e, mais aussi raptitude graphique suffisamment d~velopp~e pour r,~aliser un dessin comprehensible, et le vocabulaire assez ~tendu pour en justifier le caract~re risible. Les dessins significatifs 6tant retenus, il s'agissait de les classer aussi objectivement que possible, selon les th~mes comiques repr~sent~s. Nous avons fait une premiX, re distinction entre les th~mes d~rivant du comique des caract~ristiques et ceux qui rel~vent du comique des situations et comportements. Les premiers proviennent des modifications apport~es ~ certaines caract~dstiques des ~tres. Les seconds tirent leur origine de la perception d'un ~l~ment risib!le dans les situations et comporte,,~ent. Nous avons ensuite dtabli une s~rie de subdivisions dont voici le d~tail : I. COMIQUE DES CARACTERISTIQUES I. Addition de caract~ristiques. 2. Suppression de caract~ristiques. 3. Alteration de caractdristiques: a) alteration ~I.esgrandeurs. b) d~figuration des formes. c. modification des couleurs. 4. Transfert de caract~ristiques: a) humanisation et bestialisation. b) d~guisement. If. COMIQUE DES SITUATIONS ET COMPORTEMENTS 1. Bizarreries et absurdit~s. 2. M~saventures d'autrui et farces. Bien entendu, nous ne pr~tendons nullement que t o u s l e s tlJ~mes comiques connus soient repr~sent~s dans cette classification, puisqu'elle repose sur l'analyse de 259 dessins ef?ectu~s par des enfants de 4 ~ 8 ans. Certains th~mes n'apparaissent dans aucun dessin, le plus souvent pour la simple ~ison qu'ils ne sont pas susceptibles de repr6,sentation ,phique. 3

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C'est le cas pour la plupart des th~mes comiques sup~rieurs (jeu de mot, esprit, comique de caract~re, humour, etc.). Aussi avons-nous r~serv~ o~s th~mes pour une ~tude ult~~ieure, fond~e sur d'autres moyens d'investigation. La ~lassification qui vien~ d'etre expos~e a ~t~ adopt~e, avant tout, pour des raisons d'ordre pratique. Elle fournit un cadre aux recherches exp~rimentales et offre l'avantage d'etre orig~nale, dans une grande mesure, et surtout assez objective pour ne pr~juger de l'adh~sion ~ priori ~ aucune th~orie du risible. Venons-en maintenant ~ l'exp~rimentation. Nous avons soumis b u n ensemble de stimuli se rattachant aux th~mes r~vel~s par les dessins vingt sujets par ~ge, dix de chaque sexe, la plupart appartenant aux classes populaires. A l'~ge de 6 arts, au plus tard, tousles thames pr~cit~s ~taient apparus dans les dessins. Les experiences ~taient donc commencdes aw~c des enfants de 6 ans et poursuivies, d'une part avec des sujets de plus en plus jeunes, jusqu'~ l'~ge auquel aucun sujet ne r~agissait plus, d'autre part avec des sujets de plus en plus ~g~s, jusqu'~ l'~ge auquel la comprehension des th~mes ~tait acquise par tousles enfants, ou du moins par une forte majoritd d'entre eux. Disons-le une fois pour toutes, nous conformant ~ un usage qui tend ~ se g~n~ral~ser en psycho-p~dagogie, parce qu'il est tout ~ fair l~gitime, nous avons consid~rd c o m m e ayant 6 ans, par exemple, tout enfant dont l'~ge dtait compris, au m o m e n t des expdriences, entre 5 ;7 (0) et 6 ;6 (30). Les stimuli employ~s consistaient en images, jouets et situations ou com~ortements. Le choix n'en fur pas toujours ais~. II convenait, en effet, qu'ils fussent simples, ~ la port~e des enfants, en m ~ m e temps que caract~ristiques des th~mes. Certaines images ont ~td emprunt~es soit a des travaux ant~rieurs, soit & certains tests. Nous avons employS, pour chaque tlh~me, un stimulus figur~ (image) et un stimulus non figur~ (objet, situation ou comportement). E n effet, quand il s'agit de jeunes enfants, surtout au-dessous de cinq ans, les images son~ toujours moins efficaces, on le con@oit ais~ment, que les stimuli non figures, dont raction est plus directe, plus immediate. N'employer que des images eSt ~t~ s'exposer & conclure ind6ment & l'apparition relativement tardive de certains

RECHEI~CHES GENETIQUES SUR LE COMIQUE

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th~mes comiques dont racquisition se r4v~le plus pr4coce quand on recourt ~ des stimuli non ~igur~s. Cependant, l'utilisation des images 4tait n4cessaire, car elles permettent de proc4d4r ~ des comparaisons et de se rendre compte des d4buts de la compr4hension des tL6mes comiques pr6sent4s sous cette forme figur4e qui occupe une place importante dans les productions plaisantes de I adr.lte (caricatures, illustrations comiques, etc.). La plupart de nos exp4riences ont eu lieu avec des sujets isol4s. En effet, prendre les enfants en groupe, c'4tait risquer de fausser les r6sultats des exp4riences par rintroduction d'un facteur social bien connu, la contagiosit4 du rir:~.Toutelois ne voulant n4gliger aucun aspect du prc~,eme,~'" nous avons fait quelques exp4riences avec des groupes de sujets, mais sans en faire entrer les r6sultats dans les statistiques, uniquement ~t titre de coup de sonde, en quelque sorte. Ajoutons que toutes les pr4cautions 4taient prises pour obvier aux difficult4s d'expdrimentation: timidit6 des sujets, suggestibilit4, etc. Le mode et l'ordre de pr4sentat~on des stimuli 4talent rigoureusement uniformis4s. Les images 4taient toujours de dimensions dgales, assez grandes pour ~tre bien visibles (21 X 13 cms.). Pour ~viter la fatigue et la distraction ou rindiff4rence qui en auraient 4t6 le.~ cons4quences, nous consacrions ~ chaque sujet trois sdances tr~s courtes (dix minutes environ), s4par6es par des intervalles de plusieurs jours. Une impcrtante question se posait: quel est le crit~re de la comprdhension du comique? De quelle r6action, de quelle r6ponse peut-on conclure avec une quasi-certitude qu'un enfant a parfaitement compris la valeur comique d'un stimulus? Tout d'abord, il semble l~gitime de ne consid4rer une exp4rience c o m m e significative que :~i elle provoque un rire ou un sourire bien apparent, car si l'on rencontre parfois chez l'adulte ce rire int6rieur, ,,psychique", comme dit Paulhan, qui est le point extreme de la spiritualisation du tire, les cas de l'esp~ce sont fort rares chez l'enfant, qui ext4riorise davantage ses sentiments. Mais la r4ac~ n mimique seule peut ~tre trompeuse. I1 arrive q ' - l'enfant exprime par un sourire le simple plaisir qu'il ~prouve en

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ROGER PIRET

apercevant par exemple, dans une image, des objets familiers ou qui lui rappellent des souvenirs agr~ables. D'autre part, tout comme l'adulte, nous l'avons observe, il peut sourire et m~me rire par politesse ou par vanitY, pour faire semblant d'avoir compris le caract~re risible d'un stimulus. II arrive aussi que certains petits sujets ~prouvant le sentiment du comique pour une autre raison que celle qui pr~vaut aux yeux de l'exp~rimentateur, dont le souci d'objectivit~ doit ~tre constant. Ainsi, une gravure repr&entant un canard fumant Iv pipe a fait rite une fillette de 5 ;4 parce que, disait-elle, ,,il ~ un oeil tout rond" ! On ne peut donc se contenter de la rdponse mimique, sauf, bien enterdu, pour les sujets ne sachant pas encore parler. ]~] faut insister, dire: ,Pourquoi ris-tu?" ou bien: ,,Allons, mon petit, dis-moi pourquoi tu ris . . . . Montre-moi ce q u i t e ~fait rire, etc." Si l'enfant prouve, pa~" des explications satis:.~aisantes, ou par une exclamation spontan~e, ou encore par 'an geste non ambigu, qu'il a parfaitement compris le stimulus, l'exp~rimentateur peut se montrer satisfait. Pour ~tre ~out ~ fait clair, donnons quelques exemples de r~ponses ..~ignificatives et non significatives. Il s'agit d'une image repr~sentant un enfant coiff~ d'un chapeau haut de forme et chaussd de larges souliers: Rdponses significa~ives :

Rend B., 7 ;1: L~ger rire. Exclamation spontan~e: ,,Oh, qu'il est comique, son chapeau est trop grand !" Janine S., 4;11: Grand ~clat de rire. L'exp~rimentateur de° mande: ,,Pourquoi ris-tu?" R~ponse: ,,Le petit garqon, il a mis le chapeau de son papa, et les bottes aussi." Joseph G., 3 ;3: Large sourire. Exp~rim. : ,,Pourquei ris-tu ?" Suj.: ,,Un grand chapeau". L'enfant sourit plus largement encore et montre le chapeau en r~p~tant: ,,Grand, grand." R~ponses non significatives :

Robert Q., 2;10: Aucune r~action. L'exp~rimentateur dit: ,,Regarde bien l'image !" Regard indifferent, aueune r~action. Victor L., 3 ;1 : L~ger sourire. Exp~rim. : ,,Pourquoi ris-tu?" Suj. : ,,Un petit gar¢on~ ~a". Aucune mention du chapeau ni des souliers.

RECHERCHES GENETIQUES SUR LE COMIQUE

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Jeanne S., 4;2: Sourire fig~. L'exp~rimentateur demande: ,,Pourquoi ris-tu?" R~ponse: ,,C'est un monsieur". Toujours le m~me sourire fig~. Comme on le voit, nous n'avons consider4 comme sigl~ificatives que les r~ponses oh l'enfant atteste indubitablement qu'il a compris le stimulus. Certes, la m6thode est rigoureuse. 11 se peut que quelques r4ponses jug~es non significatives raient dt4 en r~alit~, surtout quand il s'agissait de jeunes enfants, s'exprimant difficilement. Mais le souci de la rigueur exp~rimentale exigeait des preuves, et il vaut mieux encourir le reproche d'avoir n4glig~ des reponses peut-~tre vaIables que celui d'avoir tenu compte de r~ponses laissant sflrement place au doute. Tout en donnant la priorit~ h rexperimentation, nous n'avons pas n~glig~ l'observation des sujets, soit durant les experiences, soit en classe (surtout dans les ~coles gardiennes), soit en r~crdation. Notre documentation a ~t6 consid4rablement enrichie grace ~ l',;oligeance d'une dizaine d'instituteurs et institutrices que ont bien voulu nous communiquer oralement ou par ~crit, en r~p,onse ~ un questionnaire pr4cis, tousles c ts de rire ou de sourire enfantins qu'ils avaient pu observer. Cet aper~u des m~thodes emp!oydes pour l'61aboration du present travail nous para]t suffisamment complet pour que nous puissions entamer maintenant l'expos~ des r6sultats de nos recherches.

IV.

1.

F,TUDE DES THEMES COMIQUES FONDAMENTAUX.

Addition de caractgristiques.

Dessins: Ce th~me n'est repr~sent~ que par cinq dessins, figurant: un h o m m e ~ deux t~tes, une f e m m e ~ quatre bras, un h o m m e ~t trois jambes, des h o m m e s ~ quatre jambes, un enfant ~ deux nez. Stimuli: a) une poupde sur !e front de laquelle un troisi~me oeJl a ~t~ peint. b) une image repr~sentant un h o m m e ~ ..~xt~tes.

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ROGER PIRET

TABLF,AU 4.

POVI~

AUX Tlt01S YEUX.

20 s u j e t s p a r Age Age

N. de rires

N. de sourires

Total

%

2 ans 3 ,, 4 ,,

I 2 4

2 5 5

3 7 9

15 35 45

5

,,

2

10

12

60

6

,,

12

16 18 17

80

8

6 4: 5

10

7

,, ,,

24

58

82

Total:

14

TABLEAU 5.

90 85

HOMME A DEUX TETES.

20 s u j e t s par ~ g e N . de sourires

Total

%

3 ans 4 ,, 5 ,, 6 ,, 7 ,, 8 ,,

Age

1 1 2 3 1 1

2 3 9 13 17 16

3 4 11 16 18 17

15 20 55 80 90 85

Total:

9

60

69

N. de r i r e s

Le tableau 4 montre que, d~s 4 ans, pros de la moiti~ des enfants comprennent ce th~me tr~s simple, puisque 3 sujets de 2 ans ont d~j~ r~agi au stimulus. Pr~sent~ sous la forme figur~e (tabl. 5), le th~me cst acqui~ par la moiti~ des enfants l'~ge de 5 aI~s; un gros progr6s se marque ~ 6 ans et le point culminant est ~ 7 arts. Si l'on compare les +~ableaux 4 et 5, on constate que l'image suscite exactement le m~me hombre de rires et de sourires ~ 3 ans que le stimulus non figur~ ~ 2 ans, et que les pourcentages de r~ponses significatives sont ~gaux, pour les deux stimuli, ~ 6, 7, et 8 ans. Ces coincidences sont bien caract~ristiques d'un ph~nom~ne que nous observerons maintes fois: chez les jeunes enfants, l'effet des images est toujours plus tardif (en moyenne d'un an ou deux) que celui des stimuli non figures, tandis que, d~s 6 ans, parfois m~me d~s 5 ans, l'~galit~ est sensiblement r~tablie. Cela s'explique par la difficult~ qu'~prouvent les jeunes enfants ~ saisir le ~ms d'une image, qui, 'pour eux, constitue un stimulus moins efficace qu'un objet ou qu'un comportement.

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RECHERCHES GENETIQUES SUR L E COMIQUE

2.

Suppression de caraetdristiques.

Dessins: 18 dessins comiques peuvent ~tre group,s ~sous ¢ette rubrique. Ils repr~sentent le plus souvent des personnages d~pourvus de jambes, de bras, de corps, d'yeux, etc. Stimuli: a) une poup~e dont on a coup~ les bras. b) une image repr~sentant une femme priv~e d'un oeil. TABLEAU 6.

POUPI~E SANS BILa.S.

20 s u j e t s p a r a g e Age

N. de r i r e s

3 arts

--

N. de s o u r i r e s

Total

%

1

1

5

4

,,

1

2

3

15

5

,,

---

11

11

55

6

,,

1

15

16

80

7 8

,, ,,

--

13

1

13 15

65 80

3

57

60

Total:

~

TABLEAU 7.

16

FEMME PRIVEE D'UN OEIL.

2 0 ~ u j e t s p a r ~-ge Age 4 ans

N. de rires

N. de 3ourires

Total

%

1

1

2

10

5 6

,, ,.

-1

5 14

5 15

25 75

7

,,

--.

14

14

70

8

,,

--

16

16

80

50

52

Total:

2

A la lecture des tableaux 6 et 7 une constatation s'impose. D~s r~ge de 6 ans, le th~me de la suppression des caract~ristiques parait d~finitivement acquis et le nombre de r~ponses significatives n'augmente plus gu~re. Mais, chez la plupart des enfants de 3 et 4 ans, la vue de la poup~e sans bras et de la femme priv~e d'un oeil a provoqu~ plus d'~tonnement que de gaietY. Au reste, ~ tous les ~ges, ces stimuli furent peu efficaces. Le nombre de rires est infime; presque t ~tes les r~ponses positives sont des sourires. Certains er5 ~s de 6 8 arts rest~rent passifs, alors m~me qu'ils perce, .rant parfai-

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ROGER PIRET

tement les lacunes. Nous avons d'ailleurs remarqu~ maintes lois que l'4preuve de lacunes de figures, darts l'~chelle de Binet-Terman, amusait rarement les sujets. Il est vrai que l'atmosph~re d'une application de tests ne predispose gu~re les enfants ~ l'hilarit~. Faut-il chercher l'explication du fait que les stimuli ressortissant au th~me de la suppression des caract~ristiques ne suscitent gu~re le rite, dans la consid,~.ration que l'exp~rience a blas~ certains enfants, habitues ~ voir, par exemple, des manchots et des borgnes. Nous ne le pensons pas, car ces infirmit~s ne sont pas si fr~quentes. I1 semble plutSt qu'un effet comique n~gatif, en quelque sorte, comme ceux qui d~rivent de ce ~h~me, produise une impression beaucoup moins vive qu'un effet comique positif, dans le genre de ceux que nous allons dtudier ~ propos des th~mes ult~rieurs. D'autre part, pareils stimuli n'amusent pas l'adulte, ce qui prouve bien que n'importe quelle bizarrerie n'est pas risible et qu'il faut tenir compbe, pour expliquer le plaisant, d'une sp~cialisation des effets ~omiques que les recherches g~n~tiques permettent de constater, comme on le voit ici.

3.

Altdration des grandeurs.

Dessi~s: Ce th~me a inspir~ 16 de nos petits artistes, qui ont dessin~ par exemple ,,une grande madame", , u n e femme avec un gros ventre", divers personnages dot~s de grands bras ou de longues jambes, ou bien, au contraire, ,,des tout petits bonshommes", ,,un monsieur avec de petits pieds", etc. Dant tous ces dessins, f l y a exag~ration ou diminution excessive des grandeurs, ou bien disproportion marquee. Stimuli: a) l'exp~rimentateur se coiffe d'un tout petit chapeau de carnaval. b) une image repr~sentant un petit garcon coiff~ d'un chapeau haut de forme et chauss~ de larges souliers. Si l'on compare les tableaux 8 et 9, on s'aper~oit que la situation s'av~re plus efficace que l'image: elle suscite plus souvent le rire et est comprise par un plus grand hombre de sujets jv~lU'~ 5 ans. Cela tient au fait, d~jb signal~, clue les enfant~ tr~s jeunes saisissent plus ais~ment le sens d'une

121

RECHERCHES GENETIQUES SUR LE COMIQUE T A B I ~ U 8.

P ~ n T CHAPEAU.

20 s u j e t s p a r ~ g e Total

%

2 arts 3 ,, 4 ,, 5 ,, 6 ,, 7 ,, 8 ,,

Age

N. d e r i r e s 1 4 6 13 10 12 II

N. de s o u r i r e s 2 4 9 6 9 8 9

3 8 15 19 19 20 20

15 40 75 95 95 100 I00

Total:

57

47

104

TABLEAU 9.

GARCON A GRAND CHAPEAU.

20 sujets par age Age

N. de r i r e s

N. de s o u r i r e s

2 ans 3 ,, 4 ,, 5 ,,

-2 6 11

6

,,

9

7

.

11

8

,,

8

1 3 5 7 11 9 12

47

48

Total:

Total 1 5 11

18 20 20 20

% 5 25 55 90 100 100 100

95

situation que celui d'une image. En tout cas, le th~me, d~j~ compris de quelqu~s sujets de 2 ans, peut ~tre consid~r~ comme acquis d~s 4 ou 5 ans. I1 est remarquable (le fait est rare, nous le verrons) que les effets comiques d~vir~s de ce th~me n'aient laiss~ indifferent aucun sujet de 6 ~ 8 ans. II semble donc que les enfants consid~rcnt comme particuli~rement comique tout ce qui s'~carte de,~ dimension normales, le tr~s grand, le tr~s petit et surtout le disproportionn~. Rapprochons de cette constatation les conclusions d'un travail de Busemann sur le predilection des enfants pour les objet~ particuli~rement grands ou petits, ainsi que les remarques de Ch. Biihler sur le rSle des variations de grandeur dans les contes. Ajoutons enfin que du th~mc envisag~ ici d d r i w n t de nombreux effets comiques auxquels ]'adulte est part. d~rement sensible et dont '~1sera touch~ un mot plus 1o:

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ROOER PIRET

4.

Ddfiguration des formes.

Dessins: Le th~me de la d4figuration des formes est voisin de celui de l'alt4ration des grandeurs. C'est le th~me dont s'inspirent un grand nombre de dessins comiques (36), provenant surtout des plus jeunes sujets (4 ~ 6 ans). Ces dessins fibmrent des personnages ou des objets d~form& en tout ou en pattie. Bien entendu, seules ont ~t.~ consid~r4es comme significatives les d~formations voulues et express~ment signal~es pas les sujets; sinon, l'inaptitude graphique des enrants, surtout des plus jeunes, permettrait de voir des d4for.-nations, tout comme des disproportions, dans de nombreuses copies. Les proc£~l~s de d~formations sont simples; le plus souvent, ce qui est naturellement rond ou ovale est dessin~ carrY: visage, yeux, bouche, oreilles, ventre de divers personnages, et aussi queue d'animal, baUon de foot-ball, etc. Signalons ~galement des bonshommes dot~s de ,,bras comme des aiguilles" ou de ,,jambes pointues", ,,un chat avec une queue qui fair des zigzags", etc. Stimuli: a) l'exp~rience consistait h faire des grimaces devant les sujets; la grimace est, en effet, une d~formation ~ies traits du visage, et elle peut l~gitimement representer le th~mc .onsid4r~ ici. b. une image repr~sentant une femme laide, aux traits tourment~s, d~form~s.

TABLEAU 10.

GRIMACES.

20 s u J e t s p a r Age N. de s o u r i r e s

Total

2 ans 3 ,, 4 ,, 5 ,,

Age

1 4 4 3

4': 7 12 ~6

5 11 16 19

25 55 80 95

6

,,

4

16

20

100

? 8

,, ,,

2 2

15 16

17 18

85 90

20

86

106

Total

N. d e r i r e s

%

123

RECHERCHES GENET~UES SUR LE COMIQUE TABLEAU I I .

FEMME LAIDE.

9-0 s u j ~ t s l~ar &ge Age 4 arm 5 ,, 6 ,, 7 ,, 8, ,, Total:

N. de r i r e s

N. de s o u r i r e s

Total

1 1 3 1 3

2 3 12 13 16

3 4 15 14 19

9

46

55

% 15 20 75 70 95

II r~sulte de ces tableaux qu'it t o u s l e s ~ges, sauf ~ 8 ans (diff~!rence insignifiante), les grimaces produisent un e f f e t comique bien sup~rieur h celui de l'image. Cela est attribuable non seulement it la sup~riorit~ des stimuli non figures sur les stimuli figures, mais aussi, sans doute, au fait que, dans les grimaces, i n t e r v i e n t un mouvement des muscles du visage, et l'on a vu plus h a u t le rSle joud p a r le mouvement dans la production d'effets risibles chez l'enfant. Notons encore que Miss Shinn a f f i r m e avoir vu r i r e sa niece, it l'~ge de q u a t r e mois, tandis ~ue la m~re faisait des grimaces. Mais il s'agit probablement, a notre sens, d'un simple rire de plaisir it la r u e de la m~re. E n tout cas, aucun de nos sujets de moins de deux ans n'a souri it la vue des g r i m a c e s ; certains semblaient m~me effray~s.

5.

Modification des couleurs.

Dessb~s: Ce th~me est reprg:sentd par 12 dessins comiques fiffurant, le plus souvent, des personnages ou des a n i m a u x coiorids d'une mani~re plus ou moins incongrue, en tout ou en p a r t i e : des hommes it t~te verte, ~ genoux bleus, h mains rouges et oranges, v~tus parfois de costumes bigarr~s, etc. ; un chien vert et un canard mauve, un ~ne blanc, etc.; un e n f a n t a reprdsent~ le soleil rouge et bleu, un a u t r e le ciel v£rt. Parfois, les coloris sont accumul~s, p a r exemple dans un dessin d'une fillette de 7;9 oh l'on voit ,,une petite fille avec des cheveux de couleur, elle a deux bras bleus; Ze la fum~e rouge sort de la chemin~e, un clown est de % ~es les couleurs." Bien entendu, sont seuls consid~r~s c o : . . , e signi-

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ROGER

PIRET

ficatifs de ce th~me les dessins dont le coloriage incongru a 6t~ signal6 explicitement par l'enfant. N'entrent doric pas en ligne de compte les dessins dont les couleurs fantaisistes n'~taient pas clairement justifides et pouvaient ~tre attributes it un souci purement d4coratif, frequent dans les dessins enfantins. A une exception pros, c'est it 7 ans seulement qu'apparaissent les dessins comportant des modifications de couleurs. Le fair ne surprend gu~re. Helga Eng avait d~jit constat6 (cf. Braunshausen, p. 97) qu'avant l'Age scolaire sa niece dessinait ordinairement au crayon noir, bien qu~elle eftt des crayons de cou!eur it la p o t t l e de ]a main, comme c'6tait le cas pour nos sujets. Cetto observation pout ~tre g6n6ralis~e, dans une certaine mesure, puisque c'est surtout it l'~cole (donc d~s 6 ou 7 ans) que l'enfant s'habitue it l'emploi du crayon de couleur. D'autre part, pour employer des couleur,~ incongrues it dessin, en rue de produire un effet comique, il faut savoir distinguer nettement le coloris r6aliste du coloris d6coratif, et cela suppose un certain degr6 de d6veloppement mental, d'exp6rience et d'aptitude graphique, qu'il est difficile d'atteindre avant l'~ge scolaire. Rien d'~tonnant donc qu'un seul enfant de moins de 7 ans s'en soit montr6 capable. Ajoutons d'ailleurs qu'il s'agit d'un gargon de 5 ;5, tr~s bien dou6 (Q. I. 120). Stimuli: a) une vieille chaise peinte de couleurs baroques et criardes; die ~tait recouverte d'une housse, enlev6e au moment des experiences. b) une image repr6sentar.t un cheval bleu.

TABLEAU 12.

C H A I S E I~ARIOL~.

20 sujets

par Age

Age

N. de rires

3 ans

--

1

1

5

4 5 6 7

,,

--

3 7 Ii 14

3 13 16

15 .t0 65 80

8

,,

10

10

50

46

51

.

1

,, ,,

2 2

Total:

--

5

N. de sourires

Total

8

%

RECHERCHES GENETiQUES SUR LE COMIQUE TABLEAU 13.

1~5

CHEVAL BLEU.

20 s u j e t s p a r &ge N. de s o u ~ r e s

Total

%

4 arts 5 ,, 6 ,, 7 ,, 8 ,,

Age

N. d e r i r e s 1 2 1 2 3

2 4 12 13 14

3 6 13 15 17

15 30 65 75 85

Total:

9

45

54

Comme on peut le c o n s t a t e r ~ la lecture des tableaux 12 et 13, les stimuli relatifs/~ ce th~me s'av~rent relativement peu efficaces, s u r t o u t chez les plus jeunes sujets. Le f a i t est sans doute attribuable, t o u t comme le petit nombre de dessins p r 6 s e n t a n t des modifications de couleurs,/~ l'habitude d'employer le coloris d6coratif, que les petits distinguent difficilement du coloris r~aliste. Toutefois, m~me les e n f a n t s de 7 ou 8 ans, s'ils s'aperqoivent de la b i z a r r e r i e d'une chaise bariol~e et d'un cheval bleu, n'en sourient pas tous et n'en rient gu~re. Il semble que, pour eux, la d~figuration des f o r m e s ou l'alt6ration d , s g r a n d e u r s ait plus de vis comica que la modification de.~ couleurs. 6.

H u m a n i s a t i o n el; bestialisation.

Dessins: Abordons m a i n t e n a n t un th~me comique dont l'~tude pr~sente un g r a n d int6r~t. C'est celui du t r a n s f e r t des caract~ristiques d'une cat6gorie d'~tres/~ une autre. Le proc~d~ le plus simple pour obtenir un e f f e t plaisant en s'inspir a n t de ce th~me consiste/~ h u m a n i s e r l'animal ou/~ bestialiser l'homme. Il est employ~ p a r les enfants, dans ies dessins, d/~s l'~ge de 5 ans et s u r t o u t / ~ sept et huit ans. Voici quelques-uns des motifs repr~sent~s: une f e m m e et un e n f a n t avec des oreilles d'~ne (on connait le symbolisme scolaire des oreilles d'~ne), une petite fille avec une t~te de lapin, toute une s~rie de souris humanis~es (Mickey), un canard coiff~ d'un chapeau, un chat avec un chapeau de nain et un n~,in avec une queue, etc. Trois dessins pr~sentent une particularit~ b i z a r r e : ils a t t r i b u e n t ~ de.,5 ~tres humains des caract~ristique- non d ' a n i m a u x mais de v~g4taux. Un gar¢;on de 8 ;0 de, " ,e ,,un

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ROOER PIRET

monsieur avec des mains c o m m e des prunes", une fillettede 7;8 nous prd,~nte un h o m m e qui a des mains c o m m e des pomrnes; un aatre sujet de 6;7 dessine ,,une m a d a m e avec d. 2euilles".

Stimuli: a) L'exp~rimentateur se coiffe d'une t~te de chien en carton, comme on en trouve dans les magasins d'articles de carnaval. b) une image qui reprdsente un canard fumant la pipe et chaussd de gros souliers. TABLEAU 14.

HOMME A 1%~rE DE CHIEN.

20 s u j e t s p a r Age Age

N. d e r i r e s

Total

%

4 6 9 13 11 7

2 6 9 9 6 6 9

2 10 15 18 19 17 16

10 50 75 90 95 85 80

50

47

97

2 ~ns

--

3 4 5 6

7 8

,, ,, ,, ,, . ,,

Total:

N. d e s o u r i r e s

T A B L E A U 15.

C A N A R D A PIPE.

~-0 s u j e t s p a r Age -~ge

N. d e r i r e s

N. de s o u r i r e s

Total

%

3 arts 4 ,, 5 ,,

-1 6

2 1 12

2 2 18

6

,,

4

12

16

7 8

,,

8 9

12 10

20

10 ?0 90 80 100

19

95

28

49

77

,,

Total:

7.

D~Tuisement.

Dessin~: Le d4guisement consiste, ~ proprement parler, en un changement de v~tements. Or, ehez lea hommes, lea v~tements so~t souvent caract~ristiques d'une race, d'une classe sociale, cu d'une profession, d'une ~poque ou d'une circonstance. I~ d~guisement peut donc ~tre consid~r~ c o m m e un transfert de caract~ristique, susceptible, dans certains cas, de

RECHERCHES

GENETIQUES

127

S U R LE C O M I Q U E

faire rire. I1 est devenu un th~me comique fondamental qui a donn~ naissance/t un grand nombre d'effets plaisants, notamment par le passage tout naturel de l'id~e de d~guisement physique ~ celle de ddguisement moral. Ce qui nous int~resse ici, e'est de voir si r e n f a n t a d~j~t conscience de cette vertu risible du d~guisement. 21 dessins comiques" semblent l'attester. Ils reprdsentent des personnages ddguis~s soit entiArement (clowns, pierrots, figures de carnaval) soit partiellement (masques, faux nez, chapeaux, fantaisistes, etc.). A vrai dire, certains de ces de ssins peuvent 6tre diffdremment interpr6t~s. Ainsi, quand un enfant nous pr6sente ,,un monsieur qui a mis ur~ chapeau pointu", on peut se demander s'il faut parler ce prol~)S de ddguisement ou de d~figuration des formes. De m~me pour les dessins repr6sentant des clowns ou des pierrots. Si r e n f a n t consid~re ces personnages comme comiques, c'est a cause de leur d~guisement, certes, mais aussi des facdti~'.s de tout genre auxquelles ils se livrent, et dont lea petits gardent un souvenir sinus4. II est remarquable, d'autre part, que bon hombre de sujets, ayant dessin~ des personnages ddguis4s, spdcifient qu'il s'agit de parents ou d'amis, p. ex. : ,,C'est mon fr~re habilld comme au Carnaval" ou ,,C'est Jean qusnd il va au hal d'enfants", etc. On voit qu'il n'est pas toujours facile de distinguer deux th~mes, et cela n'a pas peu contribud A embrouiller la question du comique. Stim:~tli: a) un masque en papier, sans expression sp~ciale. b) une image repr~sentant un clown dr61ement accoutr~. T A B L E A U 16.

MASQUE.

20 sujets par ~tge Age

N. de rires

N. de sourires

Total

%

1 an 2 ans 3 ,,

-3 11

5 8 4

5 11 15

25 55 75

4

,,

15

2

17

85

5 6 7 8

,, ,, ,, ,,

8 11 7 5

9 7 8 9

17 18 15 14

85 90 75 70

Total:

eo

52

112

128

R~R

PIRET

TAB~gAU 17.

CLOWN.

20 s u j e t s p a r ~ge N. de s o u ~ . r e s

Total

%

3 ans 4 ,, 5 ,, 6 7 ,, 8 ,,

Age

1 3 6 7 9 6

4 3 9 8 7 11

5 6 15 15 16 17

25 30 75 75 80 85

Total:

32

42

74

,,

N. de t i r e s

On le voit, !e masque s'av~ra tr~s efficace comme stimulus, d~s un Age tendre. A r~oter une nette r~gression ~ partir de 7 arts (tabl. 1 0 , les enfants de cet ~ge commen~ant ~ ~tre blas~s par rhabitude de voir des masques dans les f~tes de carnaval. Signalons aussi que, dans quelques cas, la r~action obtenue ne fut pas le rire, mais la peur, certains enfants particuli~.rement timorSs s'effrayant de voir le visage de l'exp~rimentateur masque; il y eut des larmes non seulement chez les b~b~s, mais chez deux petites filles de 2;10 et 3 ;2. 8.

Bizarreries et absurditds.

Dcssi~: Jusqu'~ prdsent, nous n'avons considerS, dans les dessins d'enfants, que les thames comiques, plu:~ ou moins primitifs, ayant trait ~ des modifications apport~es aux caract~ristiques des ~tres et des objets, isol~s et passifs. Mais l'enfant per~oit aussi le comique des situations et comportements dont l'aspect risible peut consister tout d'abord en une bizarrerie pouss~e parfcis ju:~qu'~ l'absurdit~. 38 dessins peuvent ~tre ranges dans cette cat~gorie. La vari~t~ des sujets repr~sent~s est assez grande. Citons-en quelques-uns: un h o m m e ~t cheval sur un papillon, un h o m m e couch~ dans une boite ~ macaroni (sic), une f e m m e porrant un chapeau de paille en hirer, un chien mordant un petit garcon ~ la joue pour le gu~rir d'un real de dents (sic), un chat fuyant devant une souris, un bossu qui se tient droit eta mis une robe, un h o m m e qui prend le soleil en main, etc. Stimuli: a) l'exp~rimentateur s'assied sur une chaise retourn~e, qui repose sur le dossier, les pieds en rair.

129

RECHERCHES GENETIQUES SUR LE COMIQUE

b) une image repr~sentant une fillette qui conduit une voiture de b~b~ dans laquelle se trouv~ un vieillard barlm et coiff~ d'un chapeau haut de forme. TABLEAU 18.

CHAISE a

~

.

20 s u j e t s p a r Age

Age

N. de r i r e s

2 ans 3 ,. 5

,,

1 6 7 5

6

,,

4

7

,,

8

,,

4

i'

Total:

N. de souri~'es

Total

%

3 8

20 60 55 80 75 75 70

4

4 12 11

11

16

3

Ii 12

15 15

3

II

14

29

58

87

TABLEAU 19.

VI~ILLARD DANS LA VOITUIIE DE BEB~. 20 sujets par Age

Age

N. de sourires

Total

4 .aa'ts 5 ,,

1 5

1 6

6

,,

5

5

7

,,

7

8

,,

9

9 II

2 II I0 16 20

27

32

59

Total:

N. de rlres

% I0 55 50 80 I00

Ne nous ~tonnons point des maigres rdsuitats obtenus avec les plus jeunes sujets (tableau 19)o La comprehension de l'image du vieillard dans une voiture de bdbd n~cessite la perception d'une relation; au reste, la justification~ tout prix intervient ici: d'oh diverses remarques fond~es soit sur des explications ing~nieus-~s et vraisemblables (type 1), soit sur des interpretations f~ntaisistes (type 2), soit enfin sur des d~formations de la rdalit~ (type 3). Voici quelques exemples: Type 1 : ,,lly a des h o m m e s dans les voitures parce qu'ils ont real aux jambes (6 ;9). ,,S~rement on lui a coup~ les jambes." (6 ;10). Type 2: ,,C'est un b~b~ avec un grand chapeau . une barbe." (6 ;~). q

130

roger PIrET

Type. 3: C'est un petit b~b~." (4 ;9). ,,C'est une poup~e dans la voiture." (4 ;8). II est remarquable que tousles sujets de 8 ans aient ri ou souri ~ la wle de cette image. Cela indique une diminution, curieuse ~ vrai dire, et peut-~tre purement fortuite, du besoin de justificatf~on ~ tout prix b cet ~ge. 9.

Mdsaventures d'autrui et farces.

Dessins: I1 s'agit ici de comportements bizarres ou absurdes, mais dcr.t la cause est soit la maladresse, la sottise ou la malchance de l'individu auquei arrive une m~saventure, soit la malice d'autres personnages (farces). A en juger par les r~sultats de l'enqu~te sur lea dessins comiques, ce th~me des m~saventures et farces est l'objet d'une predilection particuli~re de la part des sujets les plus ~g4s, ce qui est normal, l>uisqu'il s'agit de sc~nes plus ou moins complexes, dont la repr4sentation exige des aptitudes graphiques d~j~ ~volu~es et un cert~in degr~ de d~veloppement mental. Voici quelques-uns des sujets repr~sent~s: "~n homme s'assied par inadvertance sur un enfant, un homme tombe dans un seau, un clown ~ v~lo fait une chute, un homme manque le train, un faucheur coupe la barbe d'un compagnon, une fillette s'accroche par sa natte ~ un arbuste, un petit garcon sonne une porte et se sauve, un autre tire la barbe de St Nicolas, un enfant jette ~ terre des fleurs qui se trouvaient sur un meuble, etc.. On le volt, les motifs sont simples: maladresses courantes, chutes, pertes, gamineries de rue, farces anodines joules aux parents, etc. Bien entendu, si les enfants ne commencent /~ dessiner de;s sc~nes de ce genre que vers les six ans, cela ne permet nullement d'affirmer qu'ils n'appr~cient pas beaucoup plus tSt les effets comiques des m~saventures ou des mauvais tours. Nous avons vu plus haut qu'avant m~me l'/tge de trois ans, les petits sont capables de faire des farces et comprennent les plaisanteries ~l~mentaires. Stimuli: a) chute: l'exp~rimentateur fait semblant de glisser et i~mbe lourdement. b) image: un homme marche sous la pluie avec son parapluie retourr4, en sorte qu'il est copieusement mouill~.

131

RECHERCHES OENETIQUES SUR LE COMIQUE T A S L t ~ U 20.

CHUTB.

20 su.jets p a r Age A4l~e 2 ans 3

N. de rirt~.s

N. de sourSres

--

1

Total 1

% 5

3

4

20

.

1

4

,,

b

1

7

35

5

,,

5

,,

5

7

,,

8

17 17 19

85

6

12 12 11

8

,,

9

9

18

90

34

49

83

'l~otal:

85

95

TABLEAU 21. HOMME AU PARAPLUIE RETOUI~'E. 20 s u j e t s p a r &ge Age

N. de r i r e s

N. de souri*res

Total

%

4 arts fi ,

--2

2 5

10 35 55 85 95

6

,,

3

8

7

,,

4

13

2 7 ii 17

8

,,

3

16

19

12

44

56

Total:

II peut paraitre surprenant que la chute (tabl. 20) n'ait pas provoqu~ plus de r~actions chez les sujets de 3 et 4 ans. Aussi bien, la chute est un des stimuli comiques ]es plus efficaces et les p~us universels, c o m m e ~es grimaces par exemple. Les clowns et les acteurs comiques y recourent souvent avec grand succ~s. Elle est un des rdsultats les plus typiques de la maldresse humaine et rares sont les adultes qui n'ont jamais souri, tout au moins, en voyant leur prochain prendre avec le sol un contact direct. On pourrait donc croire, it priori, que renfant est aussi port~ it rire d'une chute que radulte, qu'il s'en amuse autant que de la vue d'une grimace ou d'un masque. Cela n'est pas vrai, du moins pour les enfants tr~s jeunes: avant cinq ans, renfant est peu sensible it reffet plaisant d'une chute; nous avons d'ailleurs constat~ la chose it maintes reprises en simulant une chut~ ~ans des classes gardiennes (enfants de moins de 6 ano~ ~uelle explication donner de ce fait? Voici une hypoth~" 4ui nous paralt vraisemblable. Pour ]'adulte, la chute est surtout risi-

132

ROGER PIRET

ble parce qu'elle est rare et nettement incongrue; il f a u t une maladresse insigne ou une cause assez exceptionelle (verglas, pelure de fruit, etc.) pour la provoquer. Au contraire, le jeune enfant tombe souvent. A 3 ou 4 ans, le maintien de l'~quilibre et l'assurance de la marche sont encore des acquisitions de fraiche date et les petits gardent sans doute le souvenir des chutes nombreuses qui marqu~rent leurs prelniers pas et qui se produisent durant les jeux. Quoi d'dtonnant, dAs ]ors, que le spectacle d'une chute ne commence devenir vraiment risible que vers les cinq ans, ~ l'~ge off l'enfant tombe presque aussi rarement que l'adulte ? La chute repr~sentc alors un stade du d~veloppement moteur largement d~pass~ et devient comique pour la plupart des enfants. Passons aux observations recueillies touchant les rires provoqu~s, chez l'enfant, par le spectacle des m~saventures, maladresses, sottises ou erreurs d'autrui, ainsi que par les farces. Ces observations montrent que la moquerie est universelle. Les rires qu'elle suscite sont nombreux et les occasions en sont vari~es. A l'dcole gardienne. Voici un t~moignage caract~ristique: ,,On ri~ frdquemment d'Andr~ (6 ;0), gros lourdaud maladroit, surtout de ses erreurs et de ses ouvrages d~fectueux, peu de ses punitions. On a ri une fois de Roger (5 ;4) qui s'~tait sali avec de l'encre. Ils rient parfois d'un enfant qui pleure en mangcant sa soupe." A l'~cole primaire. Les enfants rient des maladresses des condisciples, surtout aux leTons de gymnastique (mouvements gauche;~J et de travaux manuels (modelages d~fectueux). Les r~ponses erron~es, les fautes au tableau, les distractions des ~l~ves ou des maitres, la vue d'un camarade real peign~ ou qui ne retrouve pas un objet perdu, sont autant de pr~textes ~ l'hilarit~ g~n~rale. Une petite m~saventure, un simple oubli peuvent amuser certains enfants. Ainsi, une petite fille de 4 ;9 rit aux ~clats parce que rexp~rimentateur lui redemandait son nora lots d'une deuxi~me s~ance: ,,Vous avez dAj~ oubli~ mon nora", disait-elle en riant. g n rue. Un chapeau enlev~ 'par le vent, un parapluie retourn~, une glissade, un d~irapage d'automobile, un chien d~sob~issant, un b~b~ qui v.leure, suffisent ~ provoquer le rire.

RECHERCHES

GENETIQUES

SUR

LE

133

COMIQUE

Inutile d'insister sur la grande popularit~ des farces, qui amusent les enfants ~ tout ~ge. Ddj~ les plus petits en font d'61~mentaires. En voici quelques-unes qui ont cours dans les classes : Ecole £/ardi~nne: ,,Fdlix (5 ;3) et Andr~ (4 ;8) font fr~quemment des farces, comme se placer de la terre ~ modeler sur la figure, coller des ~tiquettes sur le dos de leurs camarades, s'a~puyer contre une porte pour emp~cher quelqu'un de sortir, etc. Eeole primaire. Farces diverses: cacher une casquette, un gant, une dcharpe; transporter la mallette d'un condisciple sans le prdvenir, confondre intentionnelTement les v~tements ~u vestiaire, attacher dans le dos d'un camarade un papier portant rinscription ,,~ vendre" ou ,,~ louer", etc. V.

CONCLUSIONS.

Nous avons donc passd en revue les principaux th~mes comiques, dont diverses experiences ont mis en lu:mi~re la comprdhension aux diff~rents ~ges. II est temps de tirer quelques cov-lusions de cette ~tude. Pr~sentons tout d'abord au lecteur u, tableau synoptique montrant l'~ge ~tuquel chaque th~me fair son apparition, m ~ m e chez un seul sujet, non pas seulement dans les dessins, mais dans la comprdhension des stimuli figurds et non figurds. TABLEAU 22.

Age d'apparition des diff~rents thdmes. Th~me

Dessins

Add. de caractdr.

4 ans

2 ans

3 a,ns

Suppres,

5

,,

3

4

,,

Altdr. des ,grandeurs

4

,,

2

,,

2

,,

D6figur.

des

formes

4

,,

2

,,

4

,,

Modific.

des

couleurs

5

3

,,

4

de caract~r.

Stimuli non figurds

Stim, figllrds

Humanis.-bestialis.

5

2

,,

3

,.

D6guisement

5

,,

I

,,

3

,,

Btzar.-absurd.

5

,,

2

,,

4

,,

~V[~sav.-farces

6

,,

2

,,

4

,,

A la lecture de ce tableau, on constate qu'en gdr al la compr6hension est ddcel~e plus t6t par les stimuli v ~igur~s clue par les images et les dessins, ce qui n'~tonne liullement,

]34

ROGER PIRET

puisqu'il s ' a g i t de jeunes e n f a n t s . II £aut, en effet, attel~dre l'.~ge de 3 ou 4 a n s p o u r o b t e n i r des r~actions a u x images, et certains th~mes ne sont attest~s d a n s les dessins qu'~t 5 ou 6 ans. Une fois signal~ l'Age d'appa~ition des d i f f ~ r e n t s th~mes, il dtait i n t ~ r e s s a n t de d ~ t e r m i n e r l'Age m o y e n auquel ils p e u v e n t ~tre consid~r~s c o m m e d ~ f i n i t i v e m e n t acquis. Quel crit~re e m p l o y e r p o u r d ~ t e r m i n e r cet Age ? On ne p e u t exiger, p a r exemple, que tou8 les sujets de tel Age a i e n t r~agi l~)sitiv e m e n t ~ t~l s t i m u l u s p o u r que le th~me repr~sent~ p a r ce stimulus soit consid~r~ c o m m e acquis. E n effet, assez ]:ares sont les stimuli qui ont suscit~ 100 % de r~ponses significatives ~ un Age donn~. II y a, le ~lus souvent, ~ chaque niveau d'Age, des sujets dou~s d ' u n sens du comique m~diocre qui ne r~agissent pas a u x stimuli. Nous a v o n s a l o r s song~ b la r~gle g~n~rale employee p o u r a s s i g n e r un t e s t A un niveau d'Age d a n s les ~chelles m ~ t r i q u e s de l'intelligence: il s u f f i t que le t e s t en question soit r~ussi p a r 75 % des e n f a n t s de cet Age. Pourquoi ne serait-il p a s l~gitime de proc&ler de la sorte d a n s le d o m a i n e du p l a i s a n t ? L a perception du comique (nous ne disons p a s l'intensit~ ou la fr~quence du rite) n'est-elle pas, d a n s une large mesure, un acte d'intelligence? Nous a v o n s donc adopt~ ce crit~re, et l'on t r o u v e r a d a n s le tableau ci:dessous l'indication de l'Age auquel 75 % au moins des s u j e t s ont donn~ une rdponse s i g n i f i c a t i v e (rire ou s o u r i r e c o m p r d h e n sif) a u x stimuli r e p r ~ s e n t a n t les diff~ren~s th~mes, ce qui p e r m e t d ' i n f ~ r e r que la c o m p r e h e n s i o n de ces th~mes est d ~ f i n i t i v e m e n t acquise b c e t Age. T~LEAU 23. Age d'acquisit~n d~yinitive de~ ditf~ents t~mes. Th~mes Add. de caract~r. Supprel. de caract~r. Alt~r. ,les grandeurs D6figur. d~m formes Modlfic. des couleurs Httraanis-beatialis. D6guizement Blzar.-~bsurd. M6sav.-farces

Stimuli non figures 6 arm 6 ,, 4 ,, 4 ,, 7 ,, 4 ,, 3 ,, 5 ,, 5 ,,

Stimuli figur4m 6 ans 6 . 5 ,, 6 ,, 7 ,, 5 ,, 5 ,, 7 ,, 7 ,,

RECHERCHES GENETIQUES SUR LF; COMIQUt:~

135

Si r o n rapproche les donn~es figurant clans les tablaux 22 et 23, on est amen~ aux estimations m o y e n n e s suivavtes. La comprehension des th~mes d~bute g~n~ralement vers 2 arts pour les stimuli non figures, vers 3 ou 4 arts pour ies images; elle est d4finitivement acquise (75 % des sujets au minimum), en moyenne vers 4 ou 5 ans pour les stimuli non figures, vers 6 ans pour les images D. Les th~mes apparaissent dans les dessins vers 4 ou 5 ans. On remarquera qu'il y a une diff4fence moyenne de 2 ou 3 ans entre la premiere apparition de la comprehension des th~mes et leur acquisition d~finitive, et que l'efficacit~ des stimuli non figures est plus pr4coce, d'un an ou deux, que celle des images, fair que nou,~ avons d~j~ signal~. II pout ~tre int4ressant de se demander quels f u r e n t les stimuli qui suscit~rent le plus grand nombre de r~actions, pour l'ensemble des sujets. I1 suffit pour cela de comparer les totaux de r~ponses significatives consign4s dans les tableaux dorm,s jusqu'ici. TABLEAU 24.

~'f#cacit~ compar~e de~ stimuli non figures. Rang

S t i m . non f i g u r 6 s

Th~me

Total des r6p. signif.

1. 2. 3. 4. 5. 6. 7. 8. 9.

Masque Grimaces Petit chapeau T~te de chien Chaise retourn~e Chute Poup6e aux 3 yeux Poul~e sans bras C h a i s e bariolSe

D6guis. D~fig. des f o r m e s Alt~r. des g r a n d . H u m a n i s . bestialis. Bizar.-absurd. ~dsav.-farces Add. de caractdr. Supp. de caract~r. NIodif. des coul.

112 l~a 104 97 87 83 82 60 51

On pout remarquer qu'il y a une certaine concordance entre le rang qu'occupent les th~mes dans les tableaux 24 et 25. On est donc en droit de concl.ure qu'il existe, pour chaque th~me, un parall~lisme suffisant entre l'efficaciit~ des stimuli, figur~ et non figure. Passons maintenant ~ une constatation que le le," u r a pu i) Cela ne $1gnlfte pas que nous aurions dO arr~ter nos ITr¢,~ .gations ~ 6 aus. En les poursuivarlt Jusqu'~ 8 ans, nots avons obtenu des pot~rcentages ¢r~s dlevds, qu! montrtmt l'extr~me popularlt~ de certains th~mes.

136

ROGER P I R E T

TXBL~U 2,5. Eflic~'it~ compur~e des stimuli f t g ~ . Rang

Stimuli figures

1. 2. 3. 4. 5. 6. 7.

Enfa~tt & g r a n d chapeau C a n a r d k pipe Clown H o m m e b 2 t~tes Vieillard darts voiture Paraplule retourn~ F e m m e la~de

8.

Chm'al bleu

9.

F e m m e sans oeil

"Ph6me Alt6r. grand. Hmnanis. D6guis. Add. de caract~r. Bizar.-abs. M~av.-farces I~fig. formes Modif. c o u l e u r s Suppo de caractdr.

Total d e s r6p. sig~tf. 95 77 74 69 59 56 55 f14

52

faire en parcourant les tableaux de r~ponses significatives pour chaque stimulus. D'une mani~re g~n~rale, le nombre de ces r~ponses augmente de fa~on continue avec l'~ge. On peut en induire que le sens du comique croit avec l'~ge, et cela parce qu'il est lid au ddveloppement mental dont il n'est, k bien des ~gards, qu'un des aspects particuliers. I1 est vrai que, ce qui se d~veloppe ~galement avec l'~ge, c'est l'exp~rience ~) et notarnment l'acquisition des normes physiques, intellectuelles et sociales. I1 semble bien que la perception du comique soit, avant tout, le produit d'un~.~ comparaison faite par l'enfant entre un stimulus d~termin~ et les normes qui lui sont fournies par l'exp~rience. Les exclamations s p o n t a n ~ s des sujets soumis ~ des stimuli comiques, et les r~ponses ~ la question ,,Pourquoi ris-tu?" corroborent cette mani~re de voir: les enfants justifient souvent le caract~re comique d'un stimulus en faisant appel ~ leur ex p~rience personnelle, ou l'exp~rience g~n~rale, au sens commun. A mesure que son intelligence s'ouvre au monde ext~rieur, l'enfant acquiert peu peu ]a connaissance des normes; |'experience lui fournit les ~talons de comparaison qui lui permettront de percevoir le comique dans les d~viations de ces normes. Une importante question se pose msintenant. Les recherches exposdes dans cet article permettent-elle~ d'apporter une contribution d'ordre exp~riment~.l ~ la r~solution du probl~me du plaisant? Confirment~elles ou infirment-elles les th&)ries ? 1) Pratlquement, lntelltllenee et e ~ c e blen darts main~ test~.

sont ~u~perabl~, comme on le volt

RECHERCHES GENETIQUES SUR LE COMIQUE

137

A notre sens, ce sont les theories intellectualigtes du plaisant qui donnent du risible rexplication, la plus satisfaisante, du moins si on les envisage sous leur forme la plus g4n4rale. Le comique parait bien r4sider dans un contraste, une incongruit4, une d4viation de,~ normes. L'incongru, le bizarre, l'absurde, le grotesque, l'inconvenant, le d4plac4, rinopportun, l'inadapt4, etc., voil~t, semble-t-il, ce que l'on peut trouver la base de tous les stimuli risibles. Certes, il faut faire la part au sentiment de sup4riorit4 ou de malice pour certains th~mes (m4saventures d'autrui, farces); d'autre part, la nouveaut4, l'impr~vu, la surprise sont souvent n4cessaires pour qu'un stimulus comique soit vraiment efficace. II reste que l'in,:ongru est bien l'414ment fondamental du comique. Mais aucune th~orie particuli~re n'est assez vaste pour embrasser tous les fairs. Parler d'une attente qui se r4sout en rien (Kant), d'une disconvenance entre le con~u et le per~u (Schopenhauer), d'une contradiction logique entre deux jugements simultan4s (Dumont), c'est s'exposer ~ n4gliger certains fairs ou ~ les interpr4ter arbitrairement, bref ~ tornber dans l'unilat4ralit~ d4nonc4e par Kiilpe. De m ~ m e pour la c41~bre th4orie de Bergson, inspir4e d'un esprit de syst~me 4vident, et qui constitue le plus parfait exemple de d4formation abusive d'un grand nombre de faits. On chercherait en vain, m ~ m e ~ grand renfort de subtilit4 bergsonienne, ~t ai~pliquer la plupart de nos stimuli et aux dessins enfantins la fameuse formule ,,du mdcanique plaqu4 sur du vivant", et ~ ddceler chez l'enfant les premieres manifestations de cette fonction sociale du rire, charg4 de ch~tier la raideur et l'automatisrae, l'exclusion de tout autre travers antisocial. Revenons/t la th4orie de l'incongru. Si on donne un~.~acception tr~s large ~ ce terme, il semble qu'elle soit g~.n4ralement applicable. Certes, eIIe peut aussi susciter des objections. Mais il importe de tenir compte de deux fairs, que l'on constate surtout chez l'adulte. Tout d'abord, le comiq~ae peut devenir tr~s complexe, surtout dans les th~mes sup4rieurs, oh l'incongruit4 primitive a souvent quasi disparu. L'esprit et l'humour procurent une sorte de jouissance intelleo~uelle dont les rapports avec le plaisir du gros comique son ~ ~arfois tr~s lointains. II est remarquable d'ailleurs qu'il # ait pas n4cessairement corr4lation entre le degr4 de raffinement d'un

138

ROGER PIRET

effet plaisant et l'intensi~;~ du rire qu'il provoque. Bien plus, i~t est d'observation courante que les roots les plus spirituels, 1,~s r~flexions les plus humoristiques font souvent ~ peine sourire l'adulte cultiv~ qui en fait ses d~lices, alors que des effets risibles asses grossiers d~chainent plus vite le rire. D'autre part, le sentiment du comique ne s'accommode gu~re de circonstances d~favorables telles que la mauvaise humeur, l'~tat de sant~ d~fectueux, l'accoutumance, la pr~dominance d'une ~motion forte ou d'un sentiment sup~rieur. II convient done de mettre l'accent sur l'importance des conditions n~cessaires ~ ce sentiment, qui requiert la presence d'un comFlexe psychique total et d'une attitude de jeu. Sully a longuement insist~ sur le parall~le qui s'impose jusqu'b un certain point entre le rire et le jeu, et les recherches g~n~tiques ¢onfirment ses vues. Telles sont done les conclusions que nous croyons pouvoir tirer de cette ~tude, qui constitue le point de d~part d'un travail d'ensemble oh seront envisag~es toutes les formes du p]aisant dans ~eur ~volution g~n~tique, ce qui nous permettra d'approfondir le probl~me et de formuler des conclusions plus ~tendues.

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i~ECHERCHES GENETIQUES SUi~ LE COMIQUE

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m~suMe

I.

~;u~t.

L e problbme du cornique n ' a guSre p r o g r ~ s ~ depuis l'a~tiquit~, en d~pit des nordbreuses *,.h~orles propos~es p a r les phUosophes p o u r expllquer les causes psychologlques du rtre. 11 s e t t l e que r o n puisse ~ p p o r t e r une c o n t r i b u t i o n ~ttle & r ~ t u d e de ce probl~me e n d ~ t e r m i n a n t r~volution g~n~Uque de la comprehension d u ccmtque. Le p r ~ e n t a . ~ o l e ne cc~mprend que la p r e m i e r e parUe d'un t r a v a i l d'ensemble qui est e n pr~paration. On n ' e n v i s a g e donc pas les formes sup~rleures du p l a i s a n t (comtque verbal, esprit, h u m o u r ) , m a t s seulem e n t les ~ m e ~ oomiques f o n d a m e n t a u x , a~.'ess~l~les a u x Jeune~ enfa.~s. U n ~perqu e s t dorm~ des p r e m i e r s stimuli du sourire et du rire chez le b~b~.

II.

M#thodes.

,L'.a~Jyse de dessins cornlques e£fectu6s p a r 220 e n f a n t s de 3 & 8 a n s a se~'f de base ~ des rccherches exp~rimentales qu! ont 6t~ poursuivies avec 20 s u j e t s p a r ~ge. Des sthnttli t r t s simples o n t ~t6 employ~s pour m e t t r e en lumibre l a cor~pr6hension de ~ e u f th~mes fondsauentaux, a p p a r a i s s a n t dane le~ d e s s ~ s e t r e l e v a n t du comique des caract6Hsttques, des situattx>ne et des c o m p o r t e m e n t s . Les experiences o n t 6t~ corn~pl6t~s p a r l'obserration. Totttes les ~ ) r ~ u t i o n s n~cessa~res Grit ~t~ prises pour obvier a ~ x d l f f l o u l ~ s d ' e x p ~ n e n t a t i o n e t p o u r a s s u r e r l'ol~Jectivit~ de l'l~terpr~t~t~n.

HI.

Oonclusions.

thbrnes cowAques f o r ~ d a m e ~ t a ~ sont cornpris p a r quelques e r d ~ t s e n t r e 2 et 3 ans, p a r 75 % a u m o i n s des suJets e n t r e 4 e t 6 arm. L'~n~olu~ion de l a c~zr~pr6he~on du comlque a p p a r a l t li6e ~u d(~velopper n e n t m e n t ~ l e t & r e n r l ~ h i s s e m e n t de r e x p 6 r l e n c e qu~ en e s t i~s6par~ble. A ~ m e ~dl~a-ie pa~.ioull~re du p l ~ i e s o t n'es~ e ~ i 6 r e m e n t c o n ~ r m 6 e p a r les recherches g~n~Uques. D'une mani~re ~ ; ~ r a l e , le s e n t i m e n t du eomique sernble provenir de la perception d'un contraste, d'tme incon-

RECHERCHES GENETIQUE$. $UR LE COM1QUE

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gruit~, d'tme d~ri~tion des nonmes physiques, intel'lectuelles ou socialse; il a pour conditions n~cessaires u n complexe p s y c h i q u e total zt une e~tUtude de jeu. Des r e c h e r ~ e s u lt~r~eures s u r t o u t e s les f o r m e s du p l a t s a u t perme~t r o n t de f o r m u l e r des conclusions plus ~tend~es.

SUMMARY

I,

~ubject.

"l~e problem of t h e comic ha~ not m a d e m u c h p r o g r e s s since antiquity. In s p i t e of t h e m a n y theories proposed by t h e pl~ilosophers to explain t h e psyahclog~ca~ c a u s e s of l a u g h t e r , I t s e e m s t h a t a u s ~ u l eontr'~btttion could ,be brotrght t o t h e s t u d y of t~he p r o b l e m ~by det,÷rmini~g the g e n e t i c ef~olutk)n of t~e u n d e r s ~ n d i n g of l~e comic. T h e preserLt article includes only t h e f i r s t p a r t of a g e n e r a l w o r k whioh is in p r e p a r a t i o n . T h e r e f o r e the s u p e r i o r l~orms of the ludicrous (Jokes, wit, h u m o u r ) axe not i n v e s t i g a t e d here, .but only t h e f t m d a ment~fl comical t h e m e s , which c a n be u n d e r s t o o d by y o u n g cldldre~. A n outline is given of the firs ~. stimuli of s~dle a n d l a u g h t e r a m o n g i~ants. II.

Methods.

T h e e x p e r i m e n t a l r e s e a r c h w a s .based on the a n a l y s i s of comical d r a w i n g s maG2 b y 220 children, ~ to 8 y e a r s old. V e r y sir~Lple s t i m u l i w e r e u s e d w i t h 20 children per a g e level, to t e s t the u n d e r s t a n d i n g of nine f u n d a m e n t a l t h e m e s a p p e a r i n g in the d r a w i n g s a n d belonging to comic c h a r a c t e r i s t i c s , s i t u a t i o n s a n d .beha,viours. T h e e x p e r i m e n t s were completed b y observation. All n e c e s s a r y p r e c a u t i o n s were talken to p r e v e n t diffiettlties of e x p e r i m e n t a t i o n in this m a t t e r a n d to secure objectivity of interpretation. HI.

~onclusioas.

T h e f u n d a m e n t a l comical t h e m e s are ur, derstood ~y s o m e children b e t w e e n 2 a n d 3 years, by 75 % a t l e a s t of the s u b j e c t s b e t w e e n 4 a n d 6 y e a r s . T h e evolution of the understan¢~lng of the ~comic a p p e a r s to r u n para~lea w i t h t h e lnteUectu~d, d e v e l o p m e n t a n d t h e g r o w t h of ez~erience, ~vhich a r e inseparable. N o p a v t t e u l a r t h e o r y of t h e ludicrous is entirely c o r r o b o r a t e d by the •g e n e t i c lnvesti~aUorm. Generally, t h e fee~,ng ~)f t h e c m n i c seenm to arise f r o m t h e perception of a c o n t r a s t , a n i n c o n g r u i t y , a deviation f r m n the physioal, ~v:tellectual or ~ocial s t a n d a r d s ; t h e n e c e s s a r y oo2~dRlons axe a total p s y c h i c a l c o m p l e x a n d a p l a y a t ~ t u d e . F u r t h e r r e s e a r c h e s on all t h e f o r m s of the ludicrous ,,-' ~llow us to m a k e wider conclusions.

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ZUSAMMENFASSUNG

I.

Gege~t~nd.

Das Prol~lem der Komtk h a t seit dem Altertm-n kat~m et~en F o r t schritt zu verzelchnen, t r o t z tier zahlretchen Theorien, (lie die psychologisohen U r s a c h e n des L a c h e n s zu erkl~ren versuchten. U m eine empirische Grundlage f~dr eine befried/gende L~sung des P r o b l e m s zu gew/nnen, sch/en es uns ntttzlich, das Verst/indnis ftir Komlk yore genetlschen S t a n d p u n k t e aus zu untersuchen. Die vorlle~ende Stu~l/e tm~_fasst nur den e r s t e n Tefl einer Arbei,t, die in V o l ~ r e i t t m g ist. Sie ]~/~St dm-~m die h~heren b ' ~ e n des Komlsohen (W~ortkorrdk, W~tz, ,Humor) a u s s e r a ~ r t und belumde~t n u r jene G r ~ d ~ o r m e n der Kamik, die ~ttch den Ktudern zugttngliah sind.

II.

Methoden.

,Die Analyse yon komischen Zelchnungen, a u s g e f t ~ r t yen 220 K/ndern Im A l t e r ~on 3 zu 8 J a ~ e n , bildete die G r u r f d l ~ e der exper/menteHen U n t e r s u c ~ n g , die ~ t 20 Klndern pro A l t e r s s t u f e a ~ g e s t e ~ t wtr~de. E s wurden s e h r einfache Relze angewa~dt, um das Verst~udnis fllr neun grundlegende T h e m e n zu kli~ren, die in den Zeichnungen e n t h a l t e n w a r e n und d/e s/ch auf das Kom/sche d e r MerkJuale, der Situatlonen und der H a n d l u n g s w e l s e n bez/ehen. Die E x p e r / m e n t e sind dutch die Beobachtung vervoll3ti/nd/gt worden. E s w,lrden a~e n o t w e n d i g e n Vorsicbtswns.ssnah~en g e t r o f f e n um den Schwierigkei~en des Exper~ment~erens g e r e c h t zu werden und um elne objekt~ve Deutur~g zu sioP.~rn. IIL

Sch|us~toZgerungen.

Die g r u n d l ~ e n d e n komischen "f~emen werden yon einigen Ktndern zwlschen 2 und 3 J ~ r e n , eowle van m~ndestens 75 % der Versuchspersonen z~visehen 4 und 6 J a h r e n verstanden. Die Entw/cklur~g des VerSt~ndnisse~ flir Komtk sc~etnt an die Entw~.ckl~mg d e r Inte~igenz g e b t m ~ n zu sei~ und a n die Bereiohemmg der E r f a h n m g , die yon dieser nic~t g e t r e n n t w e r d e n kann. Keine der besonderen Theorien, die zur E r k l ~ r u n g des Komischen dienen sollen, 1st dttrch die genetische Unte~tlcll~mgen restlos ~est{t~vorden. Jan Qltgemeinen scheint das Geflihl des K o m ~ . h e n hervo~en zu ~verden dur0h die Wakrnehmursg etnes Gegens~tzes, eider Unver~r~ba_~eit, einer A~veioh~mg gegent~ber den physischen, l~tte~lekbuellen oder sozl~len N o r m e n ; es h a t ztu" notwendige Bedtngungen einen psychischen Gesamtcomplex und eine spi~lerische Einstewing. Weitere Unb~rsuclnmgen i~ber /tHe F o r m e n der K a m i k werden ausg e d e d m ~ r e S e h i w ~ g e r u n g e n erm~glichen.