+ Models
CHIMAI 914 1–8
Disponible en ligne sur
ScienceDirect www.sciencedirect.com Chirurgie de la main xxx (2014) xxx–xxx 1
Mise au point
2
Rééducation après chirurgie secondaire des tendons fléchisseurs des doigts
3
Rehabilitation after secondary surgery of the flexor tendons of fingers and thumb
4
A. Foisneau-Lottin a,*, A. Touillet a, J. Paysant a, G. Dautel b
Q1
a
5 6
b
7 8
Institut régional de réadaptation, 75, boulevard Lobau, BP 4209, 54042 Nancy cedex, France Service de chirurgie plastique et reconstructrice, centre chirurgical Emile-Gallé, 49, rue Hermite, 54000 Nancy, France Reçu le 9 avril 2014 ; reçu sous la forme révisée le 29 septembre 2014 ; accepté le 2 octobre 2014
9
Résumé
10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21
La réparation des tendons fléchisseurs des doigts peut être compliquée par la survenue de ruptures et d’adhérences péritendineuses. Le traitement des ruptures repose souvent sur des greffes et les adhérences péritendineuses peuvent nécessiter de recourir à des ténolyses. Dans les suites de ces deux gestes chirurgicaux, il existe un risque de nouvelles adhérences et de rupture. La rééducation après cette chirurgie secondaire est basée sur un protocole adapté et une surveillance attentive. Les protocoles utilisés par l’équipe de médecine physique et réadaptation de l’Institut régional de réadaptation de Nancy, en collaboration avec l’équipe de chirurgie plastique et reconstructrice, SOS main du Centre chirurgical EmileGallé de Nancy, sont décrits. Cette collaboration étroite entre les chirurgiens et l’équipe de rééducation est primordiale. Après greffe, la prise en charge repose sur des mobilisations précoces protégées permettant de mobiliser d’emblée la greffe tout en la protégeant. Après ténolyse, la rééducation immédiate pluriquotidienne et prolongée est le garant du maintien des mobilités obtenues en cours d’intervention. Elle est réalisée en structure de rééducation spécialisée pendant les trois premières semaines postopératoires. L’objectif est d’éviter la formation de nouvelles adhérences tout en tenant compte de la fragilité tendineuse. # 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
22
Mots clés : Rééducation ; Ténolyse ; Greffe tendineuse ; Tendons fléchisseurs des doigts
23
Abstract
24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34
The repair of the finger flexor tendons can be complicated by the appearance of ruptures and peritendinous adhesions. Ruptures are often treated with tendon grafts. Peritendinous adhesions can require tenolysis. Following these two surgical procedures, there is a risk of new adhesions and rupture. Rehabilitation after this secondary surgery consists of a tailored, closely supervised protocol. Protocols used by the team at the Physical Medicine and Rehabilitation Department of the Regional Rehabilitation Institute and the team at the Plastic and Reconstructive Surgery Department of the Emile-Gallé Surgical Center of Nancy (France) are described. A close collaboration between these teams of surgeons and physical therapists is essential. After tendon grafting, protected early motion helps to move the transplant immediately while still protecting it. After tenolysis, immediate (several times a day) and extended rehabilitation ensures that the mobility obtained intraoperatively is maintained. It is performed in a specialized rehabilitation center during the first three postoperative weeks. The goal is to prevent new adhesions from forming while taking into account tendon’s fragility. # 2014 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
35
Keywords: Rehabilitation; Tenolysis; Tendon grafting; Flexor tendons
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (A. Foisneau-Lottin). http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.10.002 1297-3203/# 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Pour citer cet article : Foisneau-Lottin A, et al. Rééducation après chirurgie secondaire des tendons fléchisseurs des doigts. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.10.002
+ Models
CHIMAI 914 1–8
2
A. Foisneau-Lottin et al. / Chirurgie de la main xxx (2014) xxx–xxx
36
1. Introduction
37
Les réparations des lésions des tendons fléchisseurs des doigts peuvent exposer, comme cela est décrit dans l’article « Rééducation après réparation primaire des tendons fléchisseurs des doigts chez l’adulte », à deux types de complications : les ruptures et les adhérences. Les ruptures qui ne peuvent pas être réparées par suture directe nécessitent la réalisation de greffes, soit en un temps, soit en deux temps. Les adhérences persistant après un minimum de six mois de rééducation et ayant un retentissement fonctionnel nécessitent une chirurgie secondaire de type ténolyse, voire ténoarthrolyse. Nous présentons ici les protocoles de rééducation mis en place, après ces chirurgies secondaires, à l’Institut régional de médecine physique et réadaptation de Nancy, en collaboration avec le service de chirurgie plastique et reconstructive, SOS main du Centre chirurgical Emile-Gallé.
38 39 40 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50 51 52 53 54 55 56 57
58 59 60 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70 71 72 73
74 75 76 77 78 79 80 81 82 83 84
2. Principes et moyens de rééducation après greffe des tendons fléchisseurs des doigts La réparation secondaire après rupture d’une suture d’un tendon fléchisseur des doigts peut nécessiter la réalisation d’une greffe en un ou deux temps, qui est parfois associée à la réfection de poulies. 2.1. Rééducation après un premier temps de greffe tendineuse selon Hunter Après un premier temps de greffe tendineuse selon Hunter, les objectifs de la rééducation sont de conserver des amplitudes digitales passives complètes et d’obtenir une bonne trophicité cutanée dans l’attente du deuxième temps. Un programme d’auto-mobilisations passives en flexion, passives et actives en extension, analytiques et globales, est enseigné au patient. Parallèlement, l’assouplissement de la cicatrice, le contrôle de l’œdème sont confiés à un masseurkinésithérapeute libéral. L’entretien des mobilités passives est complété par le port d’une orthèse de posture en flexion à type anneau d’enroulement, à porter dix minutes six à huit fois par jour, et par le port en activité d’une syndactylie des phalanges proximale et moyenne du doigt lésé avec celles du doigt adjacent. 2.2. Rééducation après une greffe en un temps ou après un deuxième temps de greffe tendineuse selon Hunter Après une greffe en un temps ou après un deuxième temps de greffe tendineuse selon Hunter, les principes de la rééducation précoce sont les mêmes qu’après une réparation primaire des tendons fléchisseurs (cf. article « Rééducation après réparation primaire des tendons fléchisseurs des doigts chez l’adulte »). Les sutures proximales (réalisées selon Pulvertaft) et les sutures distales (réalisées par réinsertion trans-unguéale, ou selon Pulvertaft en cas de greffe intercalaire) sont considérées comme « solides ». Cependant, la mauvaise vascularisation du greffon
est un facteur de risque d’élongation ou de rupture de celui-ci et sa revascularisation augmente le risque d’adhérences. L’ensemble de ces éléments nous ont fait opter pour un protocole d’auto-mobilisation précoce protégée active pendant les quatre premières semaines postopératoires. Nous y associons systématiquement de l’auto-mobilisation passive protégée. Si le tendon fléchisseur superficiel est conservé, l’auto-mobilisation active analytique de l’articulation interphalangienne proximale (IPP) est également préconisée, pour éviter les adhérences du fléchisseur superficiel avec la greffe. La mobilisation active analytique de l’articulation interphalangienne distale (IPD) est débutée plus précocement qu’en cas de réparation primaire, à savoir dès le 2e ou 4e jour postopératoire (cf. article « Rééducation après réparation primaire des tendons fléchisseurs des doigts chez l’adulte ») compte tenu d’un risque plus important d’adhérences que de rupture. En effet, l’étude rétrospective réalisée dans le service a mis en évidence seulement 3 % de rupture pour 59 greffes en deux temps, contre 21 % de réintervention pour ténolyse ou ténoarthrolyse [1]. Pour les phases suivantes, les principes de l’appareillage et le déroulement de la rééducation sont les mêmes que ceux des réparations primaires dites « solides » (cf. article « Rééducation après réparation primaire des tendons fléchisseurs des doigts chez l’adulte »).
85
2.3. Rééducation en cas de réfections de poulies
110
Lorsque les poulies sont endommagées, une réfection est parfois nécessaire afin d’améliorer l’efficacité de la greffe en évitant la corde d’arc du greffon. Cette réfection est réalisée lors du premier temps pour les greffes en deux temps. Les poulies concernées sont A4 (en regard de la phalange moyenne) et A2 (en regard de la phalange proximale) pour les doigts longs, et la poulie A1 ou de la poulie oblique pour le pouce. En cas de réfection d’une poulie, une protection postopératoire est nécessaire pour éviter la distension de la suture de la poulie. Elle repose sur la mise en place d’un anneau en Velcro1 autour de la phalange moyenne pour la poulie A4, et autour de la phalange proximale pour la poulie A2. Cet anneau est porté en permanence pendant quatre à six semaines. Pendant les séances de rééducation, le masseur-kinésithérapeute applique un contre-appui sur la phalange proximale ou moyenne selon les cas, pour plaquer le tendon contre le squelette lors de la mobilisation active et éviter ainsi la distension de la poulie réparée.
111
2.4. Surveillance de la rééducation
129
Au cours de la rééducation après greffe des tendons fléchisseurs des doigts, trois types de complications peuvent survenir : une rupture, une inefficacité de la greffe ou une rétraction de la plaque palmaire de l’IPP.
130
2.4.1. Rupture du greffon Les ruptures sont rares [1], plus liées aux conditions de réalisation de la greffe qu’au protocole de rééducation utilisé.
134
Pour citer cet article : Foisneau-Lottin A, et al. Rééducation après chirurgie secondaire des tendons fléchisseurs des doigts. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.10.002
86 87 88 89 90 91 92 93 94 95 96 97 98 99 100 101 102 103 104 105 106 107 108 109
112 113 114 115 116 117 118 119 120 121 122 123 124 125 126 127 128
131 132 133
135 136
+ Models
CHIMAI 914 1–8
A. Foisneau-Lottin et al. / Chirurgie de la main xxx (2014) xxx–xxx 137 138 139 140 141 142 143 144 145 146 147 148 149 150 151 152 153 154 155 156 157 158 159 160 161 162 163 164 165 166 167 168 169 170 171 172 173 174 175 176 177 178 179 180 181 182 183 184 185 186 187 188 189
3
2.4.2. Inefficacité de la greffe L’inefficacité de la greffe se traduit par un déficit d’enroulement actif. Elle est liée soit à des adhérences de la greffe, soit à un excès de longueur de celle-ci. Excepté dans le syndrome de Parkes de rétraction du muscle lombrical responsable d’une extension paradoxale du doigt greffé [2], il est parfois difficile d’identifier la cause de l’inefficacité de la greffe. La possibilité de solliciter la greffe en course externe mais peu ou pas en course interne est en faveur d’un excès de longueur du tendon ; en effet, en course externe, étant dans une condition d’allongement musculaire par positionnement du doigt en extension, le muscle fléchisseur se raccourcit un peu, alors qu’en course interne, étant déjà raccourci par la position fléchie du doigt, le fléchisseur est moins efficace, voire inefficace. En revanche, l’impossibilité de solliciter la greffe en courses interne et externe oriente vers des adhérences. L’inefficacité de la greffe secondaire à un défaut de longueur n’est considérée définitive qu’après un délai de six mois à un an postopératoire. En effet, des possibilités d’adaptation de longueur du muscle fléchisseur commun des doigts sont observées au-delà de six mois. 2.4.3. Rétraction de la plaque palmaire de l’articulation interphalangienne proximale La rétraction de la plaque palmaire de l’IPP est favorisée par une greffe trop courte. Son apparition est à surveiller pendant le déroulement de la rééducation. Sa prévention repose sur une mobilisation analytique passive lente en extension de l’articulation pour étirer la plaque palmaire en position de protection de la greffe. Dès cinq semaines postopératoires révolues, une orthèse de posture dynamique en extension de l’IPP peut être prescrite ; elle est réalisée en position de protection de la greffe (articulation métacarpo-phalangienne MCP fléchie à 608 et poignet stabilisé à 08). En cas d’adhérences de la greffe associées, un étirement de la greffe peut être réalisé en positionnant dans l’orthèse l’articulation MCP en extension à partir de six semaines postopératoires révolues (Fig. 1). Si le flessum de l’IPP est gênant fonctionnellement après six mois postopératoires, un geste d’arthrolyse, voire de ténolyse associée, sera parfois nécessaire. 3. Principes et moyens de rééducation après ténolyse des fléchisseurs des doigts 3.1. Principes et préambule à la rééducation postopératoire Le geste de ténolyse fragilise le tendon par dévascularisation de celui-ci, ce qui entraîne un risque de rupture. L’indication de ténolyse n’est pas portée avant six mois postopératoires après une suture primaire ou une greffe. Le respect de ce délai permet de limiter le risque de nouvelles adhérences par une stabilisation du remaniement cicatriciel. De plus, une progression en termes de gain d’amplitude en flexion active est encore possible jusqu’à ce délai par la levée d’adhérences péritendineuses et par l’adaptation musculaire à la longueur de la greffe.
Fig. 1. Orthèse de posture dynamique d’extension lors d’adhérences péritendineuses.
Le bon déroulement de la rééducation postopératoire nécessite d’avoir établi avant la ténolyse un contrat de soin avec le patient. Ce dernier est informé des contraintes du traitement avant l’intervention, à savoir des soins de rééducation quotidiens les dix premiers jours (week-end compris) répartis sur la journée. Les objectifs de la rééducation sont d’éviter la formation de nouvelles adhérences par des mobilisations actives pluriquotidiennes, le travail musculaire actif étant le seul à permettre l’excursion des tendons entre eux et par rapport au squelette [3], d’entretenir la mobilité articulaire (en particulier en cas d’arthrolyse associée) et de contrôler les phénomènes douloureux qui inhibent la capacité de fléchir activement. Les séances sont courtes, afin d’éviter les réactions inflammatoires, qui sont sources de douleurs et de fibrose, pourvoyeuse de nouvelles adhérences. L’œdème doit être régulé afin de ne pas freiner le libre glissement tendineux [4]. Il est important pour fixer ces objectifs, de disposer du compte rendu opératoire ou d’une transmission écrite de la part du chirurgien mentionnant la zone concernée par les adhérences, les mobilités actives et passives (s’il existe un déficit articulaire associé) préopératoires, les mobilités obtenues en cours de la ténolyse lors de la traction du tendon libéré, et la qualité du tendon. En effet, le but de la prise en charge est avant tout de récupérer des amplitudes en flexion active proches de celles obtenues par traction du tendon en fin d’intervention et, face à une éventuelle fragilité du tendon, le protocole de rééducation doit être adapté. Dans la période postopératoire immédiate, afin de prévenir l’installation de nouvelles adhérences, les chirurgiens du Centre
Pour citer cet article : Foisneau-Lottin A, et al. Rééducation après chirurgie secondaire des tendons fléchisseurs des doigts. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.10.002
190 191 192 193 194 195 196 197 198 199 200 201 202 203 204 205 206 207 208 209 210 211 212 213 214 215 216 217 218 219
+ Models
CHIMAI 914 1–8
4 220 221 222 223 224 225 226 227 228 229 230 231 232 233 234 235 236 237 238 239 240 241
242 243 244 245 246 247
248 249 250 251 252 253 254 255 256 257 258 259 260 261 262 263 264 265 266 267 268 269 270 271 272
A. Foisneau-Lottin et al. / Chirurgie de la main xxx (2014) xxx–xxx
chirurgical Emile-Gallé de Nancy utilisent le plus souvent la technique de « Foucher » adaptée [5]. Elle permet de libérer les adhérences qui se reforment rapidement en flexion. Si cette méthode est choisie par le chirurgien, il réalise en fin d’intervention une traction tendineuse sur le ou les fléchisseurs ténolysés puis immobilise les doigts en flexion. Les adhérences postopératoires immédiates se forment ainsi en flexion. Un pansement en boule est confectionné en surveillant l’absence de flexion articulaire excessive, pour éviter l’ischémie cutanée. Le pansement est retiré le lendemain par le chirurgien qui demande au patient d’effectuer une extension active des doigts en flexion maximale de poignet. Si l’extension est difficile ou incomplète (douleur, moteur musculaire affaibli ou atrophié), une extension passive digitale douce est réalisée en complément par le chirurgien. Elle est suivie d’une flexion active totale des doigts en s’aidant de l’extension du poignet (effet ténodèse). L’existence d’un flessum et la fragilité tendineuse peropératoire sont des contre-indications à cette technique. Les adhérences des tendons fléchisseurs sont les plus fréquemment rencontrées en zone 2 qui correspond au canal digital [6]. Le déroulement de la rééducation est identique pour les zones 1 à 3. 3.2. Protocole classique pour les ténolyses dans les zones 1 à3 La rééducation après ténolyse dans les zones 1 à 3 se divise en trois périodes [7] : les dix premiers jours, les dix suivants et après le 21e jour, définies selon le degré de risque de rupture et d’adhérences. 3.2.1. Phase I : J1 à J10 après ténolyse : fragilité et risque d’adhérences accrus Pendant cette période, les séances de rééducation durent dix minutes et sont réparties quatre fois par jour. Elles sont débutées dès la phase postopératoire précoce dans le service de médecine physique et de réadaptation (MPR). Le contrôle de la douleur repose sur la prescription d’antalgiques de niveau I ou II, éventuellement associés à des anti-inflammatoires non stéroïdiens en l’absence de contreindication. Le traitement de l’œdème est basé sur des anti-inflammatoires non stéroïdiens, le port d’une écharpe, des mobilisations en position déclive, de la cryothérapie et des manœuvres de drainage. L’entretien des amplitudes articulaires requiert initialement une mobilisation passive analytique réalisée en dessous du seuil douloureux. Le balayage articulaire (passage d’une flexion maximale à une extension maximale lors d’une même mobilisation) est évité pour ne pas entretenir les phénomènes inflammatoires. La récupération de l’extension passive de l’IPP est obtenue en insistant sur la mobilisation passive en extension de cette articulation. Cela est d’autant plus important, si un flessum est décrit avant la ténolyse (geste d’arthrolyse associé ou non). Durant cette période de fragilité, la mobilisation passive en extension est réalisée initialement en position de
détente du tendon (MCP fléchie) jusqu’à obtenir un étirement global des tendons (MCP en extension). Le maintien du gain d’amplitudes est complété par le port d’une orthèse de posture dynamique d’extension agissant sur l’IPP, la MCP étant fléchie à 458 et le poignet libre (Fig. 2). Le principe de son action est une traction douce prolongée assurée en général par une lame de Levame1. Lorsque l’objectif de récupération d’un flessum de l’IPP prédomine sur l’obtention de l’enroulement actif digital, cette orthèse est portée la nuit. Dans le cas contraire, notamment lorsqu’une méthode de « Foucher » est préconisée (orthèse d’enroulement la nuit), elle est portée par périodes d’une durée d’au moins une heure pendant la journée. La récupération des mobilités actives en flexion est recherchée par la mobilisation active analytique (Film 1) sans résistance de chaque fléchisseur (glissement des tendons l’un par rapport à l’autre et par rapport à l’environnement tissulaire) et par mobilisation active globale (Film 2). En actif global, le fléchisseur superficiel et le fléchisseur profond sont recrutés simultanément par un travail en « griffe » en fléchissant l’IPP et l’IPD de façon synergique avec les autres doigts (en « quadrige ») (Fig. 3). Le principe est de privilégier le travail en course externe plutôt qu’en course interne pour recruter préférentiellement les muscles extrinsèques par rapport aux muscles intrinsèques. Le maintien du poignet et des MCP en extension permet de mettre passivement sous tension le système fléchisseur extrinsèque, ce qui facilite son recrutement [3].
Fig. 2. Orthèse de posture dynamique d’extension pour agir sur l’IPP.
Pour citer cet article : Foisneau-Lottin A, et al. Rééducation après chirurgie secondaire des tendons fléchisseurs des doigts. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.10.002
273 274 275 276 277 278 279 280 281 282 283 284 285 286 287 288 289 290 291 292 293 294 295 296 297 298 299 300
+ Models
CHIMAI 914 1–8
A. Foisneau-Lottin et al. / Chirurgie de la main xxx (2014) xxx–xxx
5
Fig. 3. Travail des fléchisseurs en « griffe ».
301 302 303 304 305 306 307 308 309 310 311 312 313 314 315 316 317 318 319 320 321 322 323 324 325 326 327 328 329 330 331 332
Pour prévenir la formation de nouvelles adhérences, la méthode de Foucher est choisie par le chirurgien la plupart du temps. Suite au premier pansement postopératoire, une orthèse de posture dynamique en enroulement lâche est portée toutes les nuits six à huit heures d’affilées (Fig. 4). Cette orthèse maintient le doigt opéré dans la position de flexion obtenue après une contraction active des fléchisseurs, afin que les adhérences se forment en raccourcissement du système musculo-tendineux fléchisseur. Le matin, au retrait de l’orthèse, l’extension active des doigts contribue à faire lâcher les adhérences. Elle est portée la nuit uniquement pendant cette phase (dix jours), car cette période est la plus pourvoyeuse d’adhérences ; de plus, après ce délai, il existe un risque d’installation de flessum articulaire de l’IPP. Les séances d’ergothérapie peuvent être débutées dès ce stade, à condition que les tendons fléchisseurs ne soient pas fragiles ou le siège d’une inflammation. Elles sont courtes, limitées à dix minutes, pour diminuer le risque de réactions inflammatoires. Les objectifs sont de réintégrer le doigt opéré et d’entretenir les amplitudes actives, obtenues en massokinésithérapie, au travers d’activités ne nécessitant pas de résistance. Ceci s’accompagne de consignes de reprise des activités de la vie quotidienne explicitant les situations à éviter ou contreindiquées. Au cours de cette période de rééducation, la surveillance est axée sur la survenue de signes inflammatoires : crépitements, crissements tendineux [3]. En effet, la présence de phénomènes inflammatoires s’accompagne d’une plus grande fragilité tendineuse, qui peut entraîner une rupture. Cela impose donc de diminuer la fréquence des séances, voire d’arrêter les séances d’ergothérapie. Dans ce cas, les contractions isométriques des tendons fléchisseurs sont privilégiées ; elles peuvent
Fig. 4. Orthèse de posture dynamique d’enroulement utilisée dans la « méthode de Foucher ».
être réalisées dans le cadre de la mobilisation active de type « placé tenu » qui permet une excursion tendineuse importante pour une contrainte faible (cf. article « Rééducation après réparation primaire des tendons fléchisseurs des doigts chez l’adulte »). Il convient également de pratiquer un glaçage fréquent. Le traitement médicamenteux est adapté en ajoutant des anti-inflammatoires per os en complément du traitement antalgique.
333
3.2.2. Phase II : J11 à J21 post-ténolyse : risque moindre d’adhérences Les séances de rééducation deviennent biquotidiennes. L’assouplissement cicatriciel par physiothérapie et massages à visée trophique et sclérotique est débuté après l’ablation des fils (J15–J21). La récupération en flexion active est poursuivie. Pour cela, le travail actif analytique est réalisé en dissociant les fléchisseurs profond et superficiel, si la solidité tendineuse le permet. La stabilisation des IPD des doigts voisins en extension permet d’annuler l’action du fléchisseur profond (Fig. 5). Le travail en griffe est poursuivi. L’enroulement actif global des doigts est suivi d’une tenue statique en fin de course. Si la méthode de Foucher a été suivie, le port nocturne de l’orthèse de posture en enroulement global digital est arrêté. Une orthèse de posture dynamique en extension peut alors être prescrite, à porter six à huit heures d’affilées la nuit en cas de flessum de l’IPP apparu au cours de la rééducation (Fig. 2). En cas de flessum présent avant la ténolyse, le port de l’orthèse de posture en extension est poursuivi (Fig. 2) et portée la nuit.
341
Pour citer cet article : Foisneau-Lottin A, et al. Rééducation après chirurgie secondaire des tendons fléchisseurs des doigts. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.10.002
334 335 336 337 338 339 340
342 343 344 345 346 347 348 349 350 351 352 353 354 355 356 357 358 359 360
+ Models
CHIMAI 914 1–8
6
A. Foisneau-Lottin et al. / Chirurgie de la main xxx (2014) xxx–xxx
Fig. 5. Travail de dissociation du fléchisseur superficiel.
361 362 363 364 365 366 367
368 369 370 371 372 373 374 375 376 377
Les séances d’ergothérapie sont débutées ou poursuivies comme au cours de la phase I. Un travail actif sans résistance en ouverture et fermeture des doigts sur toute la course tendineuse est proposé ; il repose par exemple sur le déplacement de cylindres de différents diamètres adaptés à l’espace pulpopalmaire digital récupéré (Fig. 6). Les consignes données par rapport aux activités autorisées restent les mêmes.
3.2.3. Phase III : J21 post-ténolyse : solidité retrouvée et risque variable d’adhérences Cette période est encore considérée comme à risque en raison du rebond cicatriciel, source potentielle de nouvelles adhérences. Les massages cicatriciels et les mobilisations analytiques et globales sont donc poursuivis et intensifiés pendant cette phase. En revanche, le tendon est considéré comme ayant retrouvé une solidité satisfaisante. Le travail musculaire actif contre résistance manuelle progressive est débuté.
Fig. 6. Préhensions globales sans résistance en ergothérapie.
Durant les séances d’ergothérapie, les consignes sur les activités de la vie quotidienne sont actualisées grâce à la possibilité de réintégrer progressivement des activités contre résistance. Elles contribuent à récupérer la force de préhension et l’endurance gestuelle au travers d’activités sur ordinateur comme le système MULE (Motor Upper Limb Exerciser) (Fig. 7) et manuelles diverses [8]. Elles sont dictées par les exigences professionnelles et de loisirs des patients. Après le début de cette phase, si l’évolution est favorable, un relais en massokinésithérapie libérale est envisagé. Une ordonnance mentionnant le type de chirurgie, les amplitudes obtenues en cours de ténolyse, ainsi qu’un protocole détaillé sont transmis. Les objectifs sont la prise en charge des troubles trophiques, l’entretien des amplitudes articulaires et la poursuite du travail de la flexion active contre résistance manuelle progressive. Le port nocturne de l’orthèse de posture dynamique d’extension agissant sur le flessum articulaire de l’IPP doit être poursuivi pendant plusieurs mois (jusqu’à six mois, voire un an) avec un arrêt progressif (une nuit sur deux, puis une nuit sur trois) en raison d’un risque de réapparition de ce dernier. Pour les patients ayant des exigences fonctionnelles importantes en termes de force et d’endurance, une nouvelle prise en charge en centre de MPR peut être indiquée à partir de six semaines postopératoires, afin qu’ils puissent bénéficier de séances d’ergothérapie.
378
3.3. Protocoles spécifiques
404
3.3.1. Rééducation en cas de fragilité tendineuse Si, au cours de l’intervention, le chirurgien constate une fragilité tendineuse, il est préconisé de mettre en place une orthèse de protection antébrachio-digitale dorsale. Le poignet est positionné à 08 d’extension, les MCP fléchies à 608 et les interphalangiennes à 08 d’extension (Fig. 8). Cette orthèse est portée en permanence. Une auto-mobilisation passive et active globale protégée dans l’orthèse et de la mobilisation active de type « placé tenu » sous contrôle d’un masseur-kinésithérapeute sont réalisées pendant les trois premières semaines postopératoires. Les objectifs sont d’entretenir la mobilité passive,
405 406
Fig. 7. Exercice musculaire statique intermittent sur Motor Upper Limb Exerciser (MULE).
Pour citer cet article : Foisneau-Lottin A, et al. Rééducation après chirurgie secondaire des tendons fléchisseurs des doigts. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.10.002
379 380 381 382 383 384 385 386 387 388 389 390 391 392 393 394 395 396 397 398 399 400 401 402 403
407 408 409 410 411 412 413 414 415
+ Models
CHIMAI 914 1–8
A. Foisneau-Lottin et al. / Chirurgie de la main xxx (2014) xxx–xxx
7
Fig. 8. Orthèse de protection d’un tendon fléchisseur fragile. Fig. 9. Orthèse de posture dynamique d’extension du poignet et des doigts dans les ténolyses en zones 4 et 5. 416 417 418 419 420 421 422 423 424 425 426 427 428 429 430 431 432 433 434 435 436 437 438 439 440 441 442 443 444
de limiter le risque de formation d’adhérence, tout en prévenant le risque de rupture. Le protocole classique de rééducation après ténolyse est ensuite repris depuis la phase I. 3.3.2. Rééducation après ténolyses dans les autres zones Pour les zones 4 et 5, les adhérences se forment au poignet. Il y a moins de risque de ruptures tendineuses et le coulissement tendineux est plus facile que dans le canal digital. Les ténolyses dans ces zones sont donc moins fréquentes qu’en zones 2 [6] : les adhérences après réparation des tendons fléchisseurs des doigts et du poignet en zone 5 sont surtout sous-cutanées et sont par conséquent plus facilement levées par l’appareillage associé au dépressomassage. Après une ténolyse en zone 4 ou 5, les tendons fléchisseurs des doigts sont initialement sollicités activement en extension du poignet en utilisant l’effet ténodèse. Un raccourcissement tendineux maximum est ensuite recherché [3]. Le gain obtenu par les séances de mobilisation est maintenu par le port d’une orthèse de posture dynamique en extension des doigts et du poignet, MCP stabilisées à 08, poignet stabilisé en extension progressive (jusque 308) (Fig. 9). Cette orthèse permet d’étirer les adhérences des tendons fléchisseurs des doigts et du poignet. Elle est portée la nuit six à huit heures d’affilées. 3.3.3. Rééducation après ténolyse du long fléchisseur du pouce La survenue d’adhérences sur le long fléchisseur du pouce a moins de conséquences fonctionnelles que sur les doigts longs, en particulier si elles surviennent en flexion de l’articulation interphalangienne (IP). En effet, fonctionnellement, une pince
pouce-index stable est suffisante en dehors de gestes spécifiques dictés par certaines activités professionnelles ou de loisirs. Après une ténolyse du long fléchisseur du pouce, un recrutement analytique des long et court fléchisseurs du pouce est réalisé en alternant flexion active de l’IP et de la MCP. Pour faciliter son recrutement, le long fléchisseur du pouce est sollicité en stabilisant la MCP et le 1er métacarpien en extension-rétropulsion. La mobilisation en flexion active est réalisée successivement de la phalange distale sur la phalange proximale, de la phalange proximale sur le 1er métacarpien. Elle est poursuivie par une antépulsion-opposition du 1er métacarpien pour aboutir à la base du 5e métacarpien [3].
445
4. Conclusion
457
Les principes de la rééducation précoce après greffe d’un tendon fléchisseur des doigts sont similaires à ceux après suture primaire. Le résultat définitif d’une greffe n’est obtenu qu’après six mois à un an postopératoire grâce à la poursuite de la rééducation, en particulier l’auto-rééducation et le port de l’appareillage. Le bénéfice de la ténolyse est jouer pendant les trois premières semaines postopératoires, mais les résultats définitifs ne sont pas obtenus avant trois mois. La planification de la ténolyse et de la rééducation postopératoire immédiate est donc primordiale pour optimiser ces résultats. Pendant les trois premières semaines postopératoires, la prise en charge en service de MPR spécialisé est nécessaire pour un traitement
458
Pour citer cet article : Foisneau-Lottin A, et al. Rééducation après chirurgie secondaire des tendons fléchisseurs des doigts. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.10.002
446 447 448 449 450 451 452 453 454 455 456
459 460 461 462 463 464 465 466 467 468 469 470
+ Models
CHIMAI 914 1–8
A. Foisneau-Lottin et al. / Chirurgie de la main xxx (2014) xxx–xxx
8
474
multidisciplinaire et pluriquotidien. Une évaluation et une adaptation régulières de l’appareillage sont nécessaires en fonction des troubles trophiques, de l’évolution des adhérences péritendineuses et des raideurs articulaires.
475
Déclaration d’intérêts
476 477
Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article.
478
Annexe A. Matériels complémentaires
479
482
Les matériels complémentaires (Films 1 et 2) accompagnant la version en ligne de cet article sont disponibles sur http:// www.sciencedirect.com et http://dx.doi.org/10.1016/j.main. 2014.10.002.
483
Références
484 485
[1] Pedeutour B, Medrykowski F, Foisneau A, Petry D, Dap F, Dautel G. Résultats des reconstructions tendineuses en deux temps de Hunter des
471 472 473
[2]
[3]
480 481
[4]
[5]
[6] [7]
[8]
lésions du tendon fléchisseur profond en zone 2 : à propos de 59 cas. Chir Main 2012;31:377. Tubiana R. Chirurgie des tendons, des nerfs et des vaisseaux. Greffes des tendons fléchisseurs. In: Tubiana R, editor. Traité de chirurgie de la main. Paris: Masson; 1996. p. 242. Isel M, Merle M. Rééducation après ténolyse des fléchisseurs. In: Isel M, Merle M, editors. Orthèses de la main et du poignet : protocoles de rééducation. Paris: Masson; 2012. p. 240–4. Thomas D, Comtet JJ. Rééducation de la main et du poignet : rééducation des ténolyses des fléchisseurs. In: Boutan M, Casoli V, Moutet F, Thomas D, editors. Rééducation de la main et du poignet. Atlas pratique d’anatomie et de rééducation. Paris: Masson; 2013. p. 323–32. Foucher G, Marin-Braun F. Technique originale de mobilisation après ténolyse des tendons fléchisseurs en zone 2. Ann Chir Main 1989;8: 252–3. Egloff DV, Verdan C. Valeur des ténolyses des tendons fléchisseurs. Ann Chir 1979;33:663–7. Gavillot C, Isel M. Chirurgie secondaire des tendons fléchisseurs. In: Merle M, editor. La main traumatique : chirurgie secondaire - le poignet traumatique. Paris: Masson; 1995. p. 90–2. Gable C. Rééducation de la main et du poignet : ergothérapie chez les patients traumatisés de la main. In: Boutan M, Casoli V, Moutet F, Thomas D, editors. Rééducation de la main et du poignet. Atlas pratique d’anatomie et de rééducation. Paris: Masson; 2013. p. 165–73.
Pour citer cet article : Foisneau-Lottin A, et al. Rééducation après chirurgie secondaire des tendons fléchisseurs des doigts. Chir Main (2014), http://dx.doi.org/10.1016/j.main.2014.10.002
486 487 488 489 490 491 492 493 494 495 496 497 498 499 500 501 502 503 504 505 506 507 508 509