Rééducation de l’épaule du sportif : Proposition d’une fiche d’évaluation fonctionnelle

Rééducation de l’épaule du sportif : Proposition d’une fiche d’évaluation fonctionnelle

© 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés J. Traumatol. Sport 2006, 23, 193-202 Note technique Rééducation de l’épaule du sportif : Proposi...

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© 2006. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

J. Traumatol. Sport 2006, 23, 193-202

Note technique

Rééducation de l’épaule du sportif : Proposition d’une fiche d’évaluation fonctionnelle B. FORTHOMME, J.-M. CRIELAARD, J.-L. CROISIER Service de Médecine Physique et Kinésithérapie-Réadaptation, C.H.U. de Liège, Sart-Tilman, 4000 Liège, Belgique.

RÉSUMÉ

SUMMARY

La pratique sportive impliquant le membre supérieur comporte divers gestes puissants et amples (lancer, frappe) généralement à l’origine d’adaptations spécifiques. Certaines modifications liées à un entraînement intensif peuvent causer des dysfonctions contribuant à un risque lésionnel accru. La prise en charge rééducative de l’épaule pathologique nécessite une évaluation spécifique, comparant notamment les particularités biomécaniques de l’épaule dominante par rapport au membre controlatéral. Cet article aborde, sur la base de données récentes de la littérature et de notre expérience clinique, divers facteurs cliniquement accessibles et potentiellement impliqués dans la dysfonction de l’épaule. Une fiche évaluative intégrant ces facteurs sera le support d’une prise en charge raisonnée : elle examine la mobilité, l’extensibilité, la force, elle apprécie également la symétrie scapulaire. Une évaluation longitudinale permettra d’objectiver les progrès éventuels ou la nécessité de modifier les techniques thérapeutiques utilisées.

Rehabilitation of the athletic shoulder: a proposed functional evaluative form

Mots-clès : épaule sportive, évaluation, scapula, flexibilité.

Key words: athletic shoulder, functional evaluation, scapula, flexibility.

Introduction

les objectifs rééducatifs sont ainsi définis après un examen clinique de qualité [1]. Plusieurs fiches d’évaluation ont été validées (score de Rowe, score de Constant, Simple Shoulder Test) [11, 12], mais les adaptations spécifiques liées à la pratique sportive et les théories récentes relatives aux asymétries scapulaires [1-3] imposent un questionnaire et un examen plus spécifiques. Nous avons souhaité concrétiser ces données actuelles sous forme d’une fiche d’évaluation spécifique à l’épaule sportive, basée sur les fondements biomécaniques et l’observation clinique. Cette fiche concerne les rééducateurs au moment d’objectiver un statut initial de mobilité, d’exten-

Les gestes d’armé-lancer requièrent à la fois une mobilité de l’épaule importante en flexion-abduction-rotation externe et une stabilité optimale du complexe articulaire [1]. Cette balance mobilité-stabilité s’avère régulièrement perturbée, expliquant l’évolution vers un éventuel contexte pathologique [1-10]. La prise en charge rééducative d’une épaule douloureuse sportive peut représenter une approche de choix [11-13] lorsque

Correspondance : J.-L. CROISIER, voir adresse ci-dessus. e-mail : [email protected]

Sports activity involving the upper limb implies some powerful movements leading to the development of specific adaptations of the shoulder. These adaptive patterns increase the risk of injury. Shoulder rehabilitation in athletes should be guided by the results of a specific physical examination of the shoulder. In this article we propose an original evaluative form specifically designed for the athletic shoulder which takes into consideration the morphostatic and physical features as well as the possible bilateral asymmetries. The functional evaluation includes measurement of range of motion, flexibility, isometric muscle strength, position and motion patterns of the scapula. Progress achieved during rehabilitation programs can be monitored with successive evaluations which are helpful for determining the most suitable treatment.

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sibilité et de force de l’épaule. Fonctionnelle, elle apparaît complémentaire à l’examen médical diagnostique. Une telle fiche définit rationnellement les objectifs rééducatifs, tout en vérifiant l’efficacité de la prise en charge dans un suivi longitudinal.

Évaluation La mesure de la mobilité articulaire, l’évaluation de la force et de la douleur font partie intégrante d’un examen clinique de qualité. Dans cette fiche évaluative orientée vers la fonction, ces aspects essentiels seront analysés sur la base de caractéristiques spécifiques résultant de l’activité sportive et complétés par : — des mesures complémentaires de la position scapulaire en condition statique ou semi-statique, — l’évaluation de l’extensibilité de certains groupes musculaires souvent raccourcis dans les épaules sportives.

Observations générales Un questionnaire préliminaire permet d’établir la nature des activités sportives ou professionnelles éventuellement à l’origine de la symptomatologie et précise les antécédents lésionnels ou chirurgicaux du complexe de l’épaule ainsi que le diagnostic médical préalablement établi. Une cotation, en unités arbitraires sur l’échelle visuelle analogue (EVA) comprise entre zéro (aucune douleur) et dix (douleur la plus intense), quantifie la douleur actuelle diurne, nocturne ou survenant lors des activités (sportives ou professionnelles) de l’épaule pathologique. L’inspection révèle une éventuelle cicatrice postchirurgicale, un hématome, une rougeur. Une ancienne luxation acromio-claviculaire et/ou sternoclaviculaire peut expliquer une modification éventuelle du relief osseux. Le galbe musculaire renseigne sur une possible amyotrophie : par exemple, une atrophie des fosses supra- et/ou infra-épineuses lors de l’atteinte du nerf supra-scapulaire ou du deltoïde lors d’une lésion du nerf axillaire [11]. L’analyse de la statique du rachis cervico-dorsal dans les plans frontal et sagittal apporte des renseignements indispensables sur le profil scapulaire du sujet symptomatique [3, 12] : une hyperlordose cervicale peut accompagner une antéprojection excessive de la scapula ou une déviation dorsale dans le plan frontal justifie une éventuelle différence de hauteur entre les angles scapulaires supéro-internes des deux épaules [3].

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Mobilité articulaire L’évaluation de la mobilité scapulo-humérale passive et active représente un temps essentiel de l’examen clinique. La réduction de mobilité passive dans un secteur articulaire suggère, en l’absence de tout contexte algique, un raccourcissement des groupes musculaires antagonistes ou un enraidissement capsulaire. De telles modifications d’amplitudes justifient l’étirement de certains muscles et l’assouplissement capsulaire lors de la prise en charge rééducative [14]. Lors de l’évaluation de l’épaule sportive, la limitation passive de la rotation interne et l’hypermobilité en rotation externe, à 90° d’abduction dans le plan frontal, apparaissent bien documentées dans la littérature [5-7, 15]. L’origine de ce profil particulier semble multifactorielle : plusieurs auteurs suggèrent l’existence de réelles modifications osseuses générant une rétroversion majorée de la tête de l’humérus et de la cavité glénoïdale du côté dominant. La rétroversion humérale correspondrait à une torsion d’origine primaire (génétique) et/ou secondaire, par les actions musculaires imposées lors de l’entraînement de lancer tout au long de la croissance [16, 17]. Ces changements osseux s’accompagnent de diverses adaptations des tissus mous : raideur de la capsule et des muscles postérieurs (infra-épineux, petit rond) et hyperlaxité capsulo-ligamentaire antérieure, liées à l’activité sollicitante du geste sportif (par étirement des structures antéro-internes lors de l’armé et contrôle excentrique important de la sangle postérieure dans le lancer). Brown et al. [18] décrivent, en comparaison bilatérale, une réduction concomitante moyenne de la flexion passive de 5° et de la rotation interne (mesurée à 90° d’abduction) atteignant 18° du côté dominant chez des joueurs de base-ball. Certains évoquent une hyperlaxité congénitale entretenue par le geste sportif, le profil particulier de mobilité apparaissant alors bilatéral [1]. Pour Kibler [3], la limitation en rotation interne crée une translation antéro-supérieure excessive de la tête de l’humérus lors de la flexion du bras et un glissement postéro-supérieur dans la position d’armé, à l’origine de tendinopathies de la coiffe des rotateurs. Une restriction passive en rotation interne et en adduction horizontale (figures 1b, 3, 6) liée à une raideur capsulaire postérieure se retrouve fréquemment chez les athlètes présentant une instabilité gléno-humérale antérieure, susceptible de provoquer un conflit sous-coraco-acromial secondaire [3, 5, 11]. Lors de l’examen de la mobilité passive, un muscle subscapulaire (rotateur interne) raccourci

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se traduit par une limitation de la rotation externe passive, le sujet installé en décubitus dorsal, coude au corps (figure 2). Par contre, une rétraction du ligament gléno-huméral inférieur et moyen et de la capsule antérieure limite la rotation externe passive pour un positionnement de l’épaule à 45° et à 90° d’abduction [11] (figure 1a). Un manque d’extensibilité du grand dorsal et du grand rond ou de la capsule inférieure peut entraîner une réduction de mobilité en flexion antérieure ou en abduction frontale, occasionnant une sonnette latérale et une participation excessive du tronc (extension ou inclinaison latérale) dans les derniers degrés du mouvement [11]. L’évaluation de l’extensibilité du grand dorsal et du grand rond s’effectue sujet en décubitus dorsal, genoux et hanches fléchis. Un bras demeurant plus éloigné de la table (distance évaluée en cm), lorsque les deux membres supérieurs sont placés passivement en flexion maximale, signerait un enraidissement des extenseurs de ce côté (figure 4) [11].

Un petit pectoral raccourci entraîne une antéprojection cliniquement objectivable sur le sujet installé en décubitus dorsal : elle correspond à une majoration de la distance entre le bord postéroinférieur de l’acromion et la table par rapport au côté opposé (figure 5) [19]. Nijs et al. [19] ont par ailleurs démontré la bonne reproductibilité inter observateur de ce test, avec un coefficient de corrélation intraclasse supérieur à 0,80. La perte de mobilité active peut s’expliquer par une limitation passive dans le même secteur, une douleur, ou encore un déficit de force interdisant l’achèvement du mouvement. Le diagnostic médical et les mesures de force compléteront ainsi le bilan des amplitudes articulaires, afin de déterminer l’origine de cette limitation active.

Asymétries scapulaires L’étude biomécanique du complexe articulaire de l’épaule et des facteurs étiopathogéniques

1b 1a 3 6 FIG. 1. — Mesure goniométrique de la rotation externe passive (a) et de la rotation interne passive (b), épaule à 90° d’abduction frontale. FIG. 3. — Mesure goniométrique de l’adduction horizontale passive. FIG. 6. — Mesure centimétrique de l’extensibilité de la coiffe postérieure.

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2 4 5 FIG. 2. — Mesure goniométrique de la rotation externe passive, coude au corps. FIG. 4. — Mesure centimétrique de l’extensibilité du grand dorsal. FIG. 5. — Mesure centimétrique de l’extensiblité du petit pectoral.

confirme le rôle essentiel de la scapula. Kibler [3] attribue cinq fonctions à la scapula au sein de la ceinture scapulaire lors du geste d’armé-lancer : — cet élément représente le pivot de l’articulation gléno-humérale. En coordonnant ses déplacements aux mouvements de l’humérus, elle autorise le positionnement adéquat du centre de rotation articulaire pendant tout le mouvement et favorise une fonction « concavité-compression » optimale. Celle-ci résulte ainsi de la pression négative intraarticulaire, de la position respective de la cavité glénoïdale et de l’humérus et, de l’action synergique coaptatrice des muscles de la ceinture scapulaire (principalement les muscles de la coiffe des rotateurs) ; — la position adéquate de la scapula optimalise le cycle étirement-détente lors des différentes phases d’armé et de lancer. Durant l’armé, son glissement postérieur sur le gril costal étire davantage la sangle antérieure précédant la phase con-

centrique d’accélération, il facilite également le travail concentrique vers la rotation externe de la coiffe postérieure. Sa projection en avant lors du lancer maintient l’alignement cavité glénoïdaletête de l’humérus et participe à la dissipation énergétique du travail frénateur excentrique de la sangle postérieure ; — les sonnettes médiale et latérale, intervenant dans les différents mouvements, maintiennent un espace acromio-huméral satisfaisant, prévenant ainsi un conflit supérieur ostéo-tendineux, essentiellement à la fin de l’armer, avant la phase rapide d’accélération ; — la scapula représente également le site d’insertion des muscles : (a) stabilisateurs (rhomboïde, élévateur, dentelé antérieur, trapèze) déterminant son positionnement propre ; (b) extrinsèques (deltoïde, biceps, triceps), moteurs principaux de l’articulation gléno-humérale ; (c) intrinsèques (muscles de la coiffe des rotateurs), responsables des

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7a 7b 7c 8a 8b 8c

FIG. 7. — Mesures du positionnement scapulaire : bras le long du corps (a), mains à la taille (b), bras en hyperpronation à 90° d’abduction (c). FIG. 8. — Position scapulaire en comparaison bilatérale : niveau respectif des angles supéro-internes (a), distance entre l’épine scapulaire et l’apophyse épineuse correspondante (b), distance entre l’angle scapulaire inférieur et l’apophyse épineuse correspondante (c).

mouvements rotatoires du bras et de la coaptation articulaire par le phénomène de « concavité-compression » ; — enfin, la scapula constitue, dans la séquentielle proximo-distale, le lien indispensable entre les membres inférieurs, le tronc et les articulations distales coude et main. Les segments proximaux jouent un rôle générateur de la force, alors que l’épaule en est le régulateur, autorisant la transmission et la distribution de l’énergie au projectile lancé ou frappé via la main [13]. Burkhart et al. [4] décrivent chez l’athlète pathologique, une asymétrie scapulaire positionnelle référenciée sous le vocable anglo-saxon de « Scapula Infra Coracoïd Dyskinesis » (SICK). Elle se traduit par une scapula abaissée, en abduction et antéprojetée. Le syndrome peut résulter d’une fatigue et d’une faiblesse des stabilisateurs de la scapula liées à leur hypersollicitation. Il favorise la survenue d’un conflit sous-coraco-acromial secondaire, souvent accompagné d’une souffrance acromio-claviculaire [4]. De même, selon Kibler [3], les dysfonctions scapulaires résultent d’une fatigue par hypersollicitation des muscles stabilisateurs ou d’un déséquilibre entre les muscles d’action antagoniste. Une épaule douloureuse peut également se caractériser par une inhibition des muscles stabilisateurs, entraînant une instabilité scapulaire doublée d’une instabilité

gléno-humérale [3]. Les muscles trapèze inférieur et dentelé antérieur apparaissent les plus touchés, engendrant au repos un décollement de l’angle inférieur de la scapula (scapula allata) [14]. Une perte de mobilité du bras perturbe également l’harmonie scapulo-humérale [3]. De telles « dysfonctions scapulaires », reprises sous le terme de « scapula instable », se traduisent par une altération du fonctionnement gléno-huméral, potentialisée par l’hyperutilisation sportive [3, 11, 12, 19, 20]. L’analyse en trois dimensions apporte des renseignements très intéressants sur le comportement scapulaire, notamment lors du mouvement du bras [19]. Néanmoins, elle requiert un matériel de pointe (caméra infrarouge, sonde à US, marqueurs électromagnétiques, imagerie médicale…) limitant l’accessibilité en clinique courante. Plusieurs manœuvres, statiques ou semi-statiques, apprécient la symétrie scapulaire en pratique clinique. Le « Lateral Scapular Slide Test » (LSST) élaboré par Kibler [3] cible la fonction des stabilisateurs de la scapula (trapèze, dentelé antérieur, rhomboïde et élévateur). La mesure (en cm) de la distance comprise entre l’angle inférieur de la scapula et l’apophyse épineuse la plus proche (le plus souvent T7) s’effectue au niveau des deux épaules et ce, pour trois positions différentes (bras le long du corps, mains aux hanches et bras à 90° d’abduction en hyperpronation). Une différence

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entre les deux épaules supérieures à 1,5 cm, dans au moins une des trois positions, serait associée à des lésions microtraumatiques (figure 7). Cette asymétrie scapulaire, sans réel pouvoir diagnostique, oriente la rééducation vers un travail spécifique des stabilisateurs de la scapula [3, 11]. L’auteur démontre la bonne reproductibilité inter et intra-observateur ainsi que la validité de ce test [3]. Nijs et al. [19] retrouvent également lors d’un test-retest une reproductibilité interobservateur satisfaisante. En complément des évaluations de Kibler [3], nous proposons deux mesures déterminant la position scapulaire au repos, comparativement au côté controlatéral : — l’élévation ou l’abaissement scapulaire se définit par rapport à l’horizontale et en référence à l’épine supéro-interne controlatérale (figure 8a), (tableau I). Une élévation ou un abaissement du côté dominant par rapport à l’épaule non dominante comptabilise respectivement + 1 ou – 1 (annexe (2), item VI), une symétrie de niveau équivaut à 0 ; — la comparaison bilatérale de la mesure (cm) entre le bord médial (figure 8b) (au niveau de l’épine) ou entre l’angle inféro-interne (figure 8c) et l’apophyse épineuse correspondante caractérise une abduction, une adduction ou une sonnette de la scapula du côté dominant (tableau I). TABLEAU I. – Évaluation de la position scapulaire sur le thorax (élévation-abaissement, abduction-adduction, sonnettes interne-externe), sujet au repos et comparativement au côté controlatéral. Asymétrie scapulaire objectivée

Mesure • Niveauangle supérointerne D> (scapula)

⇒ élévation

ND D<

⇒ abaissement

ND • Distancesepine scapula — angle inféroapophyse épineuse interne — apophyse épineuse D > ND

D > ND

⇒ abduction

D < ND

D < ND

⇒ adduction

D > ND

D < ND

⇒ sonnette médiale

D < ND

D > ND

⇒ sonnette latérale

(D = épaule dominante, ND = épaule non dominante).

De nombreuses asymétries scapulaires, mises en évidence en position bras le long du corps, pourraient refléter un enraidissement ou une hypotonie musculaire des muscles axio-scapulaires du bras dominant [11]. La contraction concentrique du trapèze supérieur est responsable de l’élévation de l’épaule ou de l’extension, de l’inclinaison homolatérale et de la rotation controlatérale de la tête et du cou. Le faisceau moyen autorise l’adduction de la scapula. Seul le faisceau inférieur abaisse la scapula : en association avec le faisceau supérieur et le dentelé antérieur, il permet la sonnette latérale. Un enraidissement du trapèze supérieur provoque, au repos, une élévation de l’épaule et une sonnette latérale excessive. Un trapèze supérieur hypotonique entraîne une épaule basse avec une scapula en abduction-rotation médiale [11]. Le dentelé antérieur provoque la projection antérieure, l’abduction et la sonnette latérale de la scapula. Une hypotonie du dentelé antérieur entraîne le décollement du bord médial de la scapula (scapula allata), majorée dans les mouvements actifs (flexion-abduction), un raccourcissement de ce muscle génèrerait une abduction excessive de la scapula en comparaison à l’autre épaule. L’élévateur de la scapula agit en synergie avec le trapèze supérieur lors de l’élévation de la scapula mais ces deux muscles deviennent antagonistes lors de la rotation scapulaire (sonnette), puisque la contraction du muscle élévateur, assistée du rhomboïde, produit la sonnette médiale. Un enraidissement de l’élévateur et du rhomboïde se traduit par une sonnette médiale et une adduction excessive au repos ; une limitation de la sonnette latérale apparaît précocement lors de la flexion antérieure entraînant une diminution des amplitudes [11].

Performances musculaires Une évaluation musculaire quantitative devrait faire partie intégrante de toute approche complète de l’épaule [12]. L’isocinétisme fournit une mesure précise et reproductible de la force maximale développée mais nécessite l’acquisition d’un matériel relativement coûteux, la mise au point d’un protocole rigoureux et un examinateur expérimenté [13]. Notre objectif consiste à établir une fiche évaluative fonctionnelle dont la simplicité autoriserait son utilisation régulière en pratique. Nous optons donc pour une évaluation musculaire manuelle et isométrique des principaux mouvements de l’épaule. Celle-ci propose, dans le cadre d’une comparaison bilatérale, une cotation de 0 à 3 (3

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correspondant à la force maximale développée par le côté sain). La contraction isométrique, maintenue pendant 4 à 6 secondes, permet effectivement le développement d’une tension optimale. L’établissement d’une faiblesse musculaire débouchera sur un renforcement spécifique. Une telle évaluation subjective impose, cependant, lors d’un suivi longitudinal, qu’elle soit menée par le même expérimentateur afin de garantir la meilleure reproductibilité possible. Une évaluation isocinétique complémentaire, en particulier pour les rotateurs internes et externes, se révélera judicieuse afin de quantifier l’asymétrie bilatérale (en pourcentage) et d’identifier un éventuel déséquilibre agonistes/antagonistes (ratio RE/RI) [12]. L’information chiffrée permet de cibler les muscles déficitaires à renforcer quantitativement. Une évaluation isocinétique longitudinale garantira le contrôle de l’efficacité de ce renforcement.

Conclusion Cet article analyse divers facteurs fonctionnels de l’épaule devant faire l’objet d’une évaluation clinique et d’une prise en charge rééducative. Une fiche de synthèse élaborée sur base de données biomécaniques et de notre expérience clinique s’avère complémentaire au bilan diagnostique. Elle permet d’établir un profil d’amplitude, de flexibilité, de symétrie scapulaire et de force. À la lumière de ce bilan fonctionnel, les objectifs réeducatifs seront définis et une seconde évaluation objectivera les résultats du traitement. Une étape ultérieure devra apprécier le pouvoir discriminant de cette fiche d’évaluation fonctionnelle, en l’appliquant à différents tableaux cliniques. RÉFÉRENCES [1] WILK KE, MEISTER K, ANDREWS JR. Current concepts in the rehabilitation of the overhead throwing athlete. Am J Sports Med 2002; 30: 136-151. [2] MEISTER K. Injuries to the shoulder in the throwing athlete. Part one: Biomechanics/pathophysiology/ classification of injury. Am J Sports Med 2000; 28: 265-275; 587-601. [3] KIBLER WB. The role of the scapula in athletic shoulder function. Am J Sports Med 1998; 26: 325-326. [4] BURKHART SS, MORGAN CD, KIBLER WB. Shoulder injuries in overhead athletes. The “dead arm” revisited. Clin Sports Med 2000; 19: 125-158.

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FICHE ÉVALUATIVE (1) NOM : ____ Épaule

DATE : ___________

dominante

D

G

pathologique

D

G

Activités sportives/professionnelles : Pathologie : Chirurgie ? (type, date) Rééducation ? Nombre séances effectuées : Douleurs :

Diurnes :

activité

repos

nocturnes

(EVA 0 → 10) :

I.

ASPECT CUTANÉ — RELIEFS OSSEUX

II. GALBE MUSCULAIRE (comparaison côté sain) (deltoïde, fosses supra-/infra-épineuse, trapèze, grand pectoral, biceps)

III. STATIQUE CERVICO-DORSALE (assis) — observation statique Plan frontal : ____ Plan sagittal : ____

IV. a) MOBILITÉ PASSIVE

Droite Décubitus dorsal (degrés) : Flexion sagittale Extension sagittale Abduction frontale 90° abduction frontale 0° abduction

{

Rotation externe

(figure 1a)

Rotation interne

(figure 1b)

Rotation externe

(figure 2)

Adduction horizontale

(figure 3)

Gauche

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FICHE ÉVALUATIVE (2) b) Mobilité active Droite

Gauche

Debout (degrés) : Flexion sagittale Extension sagittale Abduction frontale Rotation externe, 0° abduction Main dos (cm) (charnière lombo-sacrée, apophyse styloïde ulna)

V.

EXTENSIBILITÉ

Décubitus dorsal

Décubitus latéral

{

Grand dorsal

{

Coiffe postérieure

Droite

Gauche

Droite

Gauche

(flexion 2 bras, distance (cm) apophyse styloïde radiale — table) (figure 4) Petit pectoral (distance (cm) bord postérieur acromion — table)

(figure 5)

(rotation interne, distance (cm) apophyse styloïde ulna — table) : (figure 6)

VI. SYMÉTRIE SCAPULAIRE

Debout – Distance (cm) bord inféro-interne scapula/apophyse épineuse correspondante

(figure 7)

– bras long corps

a

_____

_____

– main taille

b

_____

_____

– abduction 90° — hyperpronation

c

_____

_____

_____

_____

apophyse épineuse

_____

_____

correspondante

_____

_____

– Distance (cm)base épine scapula (figure 8b) angle inféro-interne (figure 8c) * défini par le côté non dominant

{

<–1

(figure 8a)

=0

{

– Niveau angle supéro-interne*

>+1

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FICHE ÉVALUATIVE (3) VII.

FORCE ISOMÉTRIQUE (0, zéro ; 1, faible ; 2, moyen ; 3, normal) Droite

Assis coude corps, fléchis à 90° : Flexion antérieure

(deltoïde antérieur, coraco-brachial)

Extension

(deltoïde postérieur, grand dorsal, grand rond)

Abduction

(deltoïde moyen, supra-épineux)

Adduction

(grand dorsal, grand pectoral, grand rond)

Rotation externe

(infra-épineux, petit rond)

Rotation interne

(subscapulaire, grands dorsal — pectoral — rond)

90° abduction, plan frontal, coude fléchi à 90° : Rotation externe

(infra-épineux, petit rond)

Rotation interne

(subscapulaire, grand rond)

90° abduction, 30° flexion, main en hyperpronation : Élévation plan scapulaire

(supra-épineux)

→ SYNTHÈSE ET OBJECTIFS RÉÉDUCATIFS : – – –

Gauche