Résultats cliniques et neuropsychologiques à long terme après hémisphérotomie

Résultats cliniques et neuropsychologiques à long terme après hémisphérotomie

Arch Pédiatr 2002 ; 9 Suppl 2 : 90-1 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0929693X01009125/SCO Table ronde ...

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Arch Pédiatr 2002 ; 9 Suppl 2 : 90-1 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S0929693X01009125/SCO

Table ronde : La neurochirurgie fonctionnelle dans les mouvements anormaux et les épilepsies de l’enfant

Résultats cliniques et neuropsychologiques à long terme après hémisphérotomie C. Bulteau1,2,3*, O. Delalande1, V. Buret1, C. Jalin1, M. Fohlen1, J.M. Pinard1, I. Jambaqué2, O. Dulac2, G. Dellatolas3 1

Unité de neurochirurgie pédiatrique et chirurgie de l’épilepsie de l’enfant, fondation ophtalmologique A. de Rothschild, 29, rue Manin, 75019 Paris, France ; 2service de neuropédiatrie, hôpital Saint-Vincent-de-Paul, avenue DenfertRocherau, 75014 Paris, France ; 3unité d’épidémiologie et de biostatistique, INSERM U472, 94800 Villejuif, France

La chirurgie est un traitement bien connu des épilepsies rebelles de l’enfant. Parmi les techniques utilisées, la déconnexion d’un hémisphère (hémisphérotomie) est réalisée lorsque les crises sont dues à une malformation ou une lésion étendue à tout un hémisphère. Il peut s’agir de malformation congénitale (hémimégalencéphalie, dysplasie étendue, maladie Sturge-Weber) ou de lésions acquises (séquelles d’anoxo-ischémie, d’infections du système nerveux central [SNC], encéphalite de Rasmussen) [1]. Une telle intervention est proposée lorsque les crises sont résistantes aux traitements antiépileptiques et s’accompagnent d’un déficit moteur net (hémiplégie et hémianopsie). La technique de l’hémisphérotomie, mise au point en 1990 [2], a été pratiquée depuis chez plus de 80 enfants. L’efficacité de cette chirurgie sur l’épilepsie a été largement étudiée et dépend d’un certain nombre de facteurs pronostiques. D’une façon générale, elle permet une disparition des crises dans 80 % des cas [2, 3]. Les enfants ayant une lésion acquise, un âge de début tardif et pas de crises sur l’hémisphère controlatéral voient leur crise disparaître de façon quasicertaine après l’intervention [4, 5]. En revanche, les compétences post-opératoires motrices et intellectuelles sont moins bien connues et varient selon l’âge de début des crises et la sévérité antérieure de l’épilepsie, l’âge lors de l’intervention et le côté de l’hémisphérotomie [6, 7]. De façon plus précise, les capacités langagières de ces enfants sont peu analysées. Quelques cas index ou des petits groupes de patients ont été rapportés et sont bien documentés sur le plan neuropsychologique [8-10]. Ces études sont en faveur d’une équipotentialité des hémisphères en ce qui concerne en particulier le déve*Correspondance. Adresse e-mail : [email protected] (C. Bulteau).

loppement du langage puisque les enfants avec hémisphérotomie gauche acquièrent le langage. Ces caractéristiques sont liées aux processus de maturation et de plasticité cérébrale propres au cerveau de l’enfant. Néanmoins, le transfert des fonctions cognitives d’un hémisphère à l’autre reste parfois incomplet puisque les enfants avec hémisphérotomie gauche ont davantage de difficultés de compréhension grammaticale et syntaxique du langage oral et des troubles de la lecture et de l’écriture en particulier pour les non-mots (logatomes). Par ailleurs, il existe de nombreux biais méthodologiques (manque de normes pour le développement du langage chez l’enfant, tests non reproductifs d’un pays à l’autre, manque d’évaluation neuropsychologique sur de larges séries, étude rétrospective) empêchant des comparaisons fiables entre ces études. En ce qui concerne le devenir psychosocial et la qualité de vie, très peu d’études ont été faites. Dans la mesure où cette intervention est proposée dans les premiers mois de vie (pour les enfants avec malformation congénitale), il apparaît essentiel d’étudier leur devenir pour préciser les prises en charge quotidiennes nécessaires. Ceci est d’autant plus important qu’un certain nombre de ces enfants est moins suivi sur le plan neurologique (du fait de l’arrêt des crises). OBJECTIFS Quatre-vingt-deux enfants ont été traités par hémisphérotomie de janvier 1990 à septembre 2000. Nous avons revu tous les enfants vivants en France afin d’évaluer le devenir cognitif, les capacités langagières, de même que la situation d’insertion sociale et scolaire. Les objectifs de cette étude étaient : – analyser le développement du langage et comparer les résultats selon le côté de l’hémisphérotomie ; – préciser les besoins de ces enfants et de leur famille en terme de prise en charge spécifique (rééducation

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cognitive, pédagogie adaptée, soutien psychothérapeutique) ; – mieux connaître le pronostic d’un tel traitement chirurgical et proposer un suivi prospectif sur le plan neuropsychologique à tous les nouveaux enfants opérés. MÉTHODOLOGIE L’évaluation est basée sur le recueil des données préopératoires cliniques (âge de début des crises, type et fréquence des crises, traitement, étiologie, âge à l’intervention, développement psychomoteur, scolarité et prise en charge avec, selon les cas, évaluation neuropsychologique) et paracliniques (EEG-vidéo de surface critique et intercritique, IRM, test de Wada, IRM fonctionnelle, SPECT, PET). Étude de la situation actuelle Sur le plan épileptique (crises, type, fréquence, traitement, anomalies EEG) et neurologique (étude de la motricité : marche, capacité de préhension). Sur le plan cognitif : évaluation neuropsychologique avec étude de la latéralité, mesure du quotient intellectuel (QI) ou du quotient de développement (QD) pour les plus jeunes (6 mois à 2 ans et 6 mois), étude de la dextérité manuelle (Purdue Pegboard), évaluation du langage oral et écrit (épreuves de dénomination, compréhension verbale, jugement syntaxique et grammatical, fluence, répétition de mots et logatomes, niveau de lecture et d’écriture) et des capacités visuo spatiales. Étude de la qualité de l’insertion sociale et scolaire et des prises en charge actuelles (échelle du comportement adaptatif de Vineland). Ce bilan a été fait en hospitalisation de jour, pendant laquelle l’enfant a eu une consultation médicale avec un neuropédiatre et une évaluation neuropsychologique avec un neuropsychologue. À cette occasion, ont été complétées les données pré-opératoires à partir du dossier de chaque enfant. Une étude de l’audition a été réalisée chez tous les sujets. RÉSULTATS Soixante-deux enfants ont été revus entre novembre 2000 et novembre 2001. Il s’agissait de patients nés entre 1971 et 1999 ; 21 ont eu une hémisphérotomie droite et 41 une hémisphérotomie gauche. Les étiologies étaient celles habituellement retrouvées : encéphalite de Rasmussen (15), syndrome de SturgeWeber (8), malformation cérébrale congénitale (hémimégalencéphalie, dysplasie étendue, pachygyrie, malformation complexe) (24), lésions clastiques périnatales ou postnatales (15).

Tableau I. Répartition des âges à l’intervention. Nombre d’enfants

Âge à l’intervention

19 17 15 11

< 2 ans de 2 ans et 1 mois à 6 ans de 6 ans et 1 mois à 16 ans > 16 ans

La répartition des âges à l’intervention est montrée dans le tableau I. Nous présenterons les résultats préliminaires qui permettent : – d’améliorer la compréhension des phénomènes de transfert des fonctions cognitives mais aussi des déficits impossibles à combler compte-tenu de la surcharge cognitive sur l’hémisphère sain ; – d’évaluer les possibilités de prise en charge ou de rééducation cognitive à mettre en place après cette intervention et les aides à apporter aux familles ; – d’informer les familles sur les possibilités d’évolution de leur enfant. RE´ FE´ RENCES 1 Prayson RA, Bingaman W, Frater JL, Wyllie E. Histopathologic findings in 37 cases of functional hemispherectomy. Ann Diagn Pathol 1999 ; 3 : 205-12. 2 Fohlen M, Jalin C, Pinard JM, Delalande O. De l’hémisphérectomie à l’hémisphérotomie. In : Bureau M, Kahane P, Munari C, Eds. Épilepsies partielles graves pharmaco-résistantes de l’enfant : stratégies diagnostiques et traitements chirugicaux. Paris : John Libbey Eurotext ; 1998. p. 231-5. 3 Davies KG, Maxwell RE, French LA. Hemispherectomy for intractable seizures : long-term results in 17 patients followed for up to 38 years. J Neurosurg 1993 ; 78 : 733-40. 4 Curtiss S, de Bode S. Age and etiology as predictors of language outcome following hemispherectomy. Dev Neurosci 1999 ; 21 : 174-81. 5 Mariotti P, Iuvone L, Torrioli MG, Silveri MC. Linguistic and non-linguistic abilities in a patient with early left hemispherectomy. Neuropsychologia 1998 ; 36 : 1303-12. 6 Doring S, Cross H, Boyd S, Harkness W, Neville B. The significance of bilateral EEG abnormalities before and after hemispherectomy in children with unilateral major hemisphere lesions. Epilepsy Res 1999 ; 34 : 65-73. 7 Pulsifer MB, Zuckerberg A. Why would you remove half a brain ? The outcome of 58 children after hemispherectomy-the Johns Hopkins experience : 1968 to 1996. Pediatrics 1997 ; 100 : 163-71. 8 Duchowny M, Jayakar P, Resnick T, Harvey AS, Alvarez L, Dean P, et al. Functional hemispherectomy on language acquisition. Epilepsia 1998 ; 39 : 787-92. 9 Rosenblatt B, Vernet O, Montes JL, Andermann F, Schwartz S, Taylor LB, et al. Speech-language outcomes of hemispherectomy in children and young adults. Brain Lang 1995 ; 51 : 406-21. 10 Vargha-Khadem F, Carr LJ, Isaacs E, Brett E, Adams C, Mishkin M. Onset of speech after left hemispherectomy in a nineyear-old boy. Brain 1997 ; 120 : 159-82.