THÉRAPEUTIQUE
Schizophrénie, diabète et antipsychotiques C. GURY (1)
Résumé. Le diabète de type II est plus fréquent chez les patients schizophrènes que dans la population générale. Bien que les troubles du métabolisme du glucose aient déjà été décrits chez les patients schizophrènes avant même l’introduction des antipsychotiques conventionnels, un effet diabétogène de ces derniers a été incriminé dans les années 1950 dès l’apparition des premiers antipsychotiques, puis dans les années 1990 au moment de l’introduction des antipsychotiques de seconde génération (antipsychotiques dits atypiques). Ces traitements ont été associés à une augmentation de la prévalence de l’intolérance au glucose, du diabète de type II et de l’acidocétose diabétique. Toutefois, une revue de la littérature met en évidence le faible nombre d’études prospectives contrôlées face aux cas cliniques et aux études rétrospectives. De plus, cette possible iatrogénicité des antipsychotiques se présente dans le contexte d’une maladie en elle-même diabétogène, chez des patients dont le mode de vie favorise la survenue du diabète de type II et au sein de la population générale pour laquelle l’augmentation de prévalence du diabète est qualifiée d’épidémique. Dans l’attente de nouvelles études prospectives contrôlées, et sans nier l’impact des antipsychotiques sur le métabolisme glucidique et lipidique (sur la prise de poids, par exemple), force est de reconnaître que le rapport bénéfice/risque reste largement en faveur du traitement, en particulier pour les antipsychotiques atypiques, au moins aussi efficaces et mieux tolérés sur le plan neurologique et cognitif que les antipsychotiques conventionnels. Un des bénéfices de la médiatisation de cette question dans la presse professionnelle est la prise de conscience de l’importance des troubles métaboliques chez les schizophrènes, un facteur important de leur surmortalité cardio-vasculaire et ceci quelles qu’en soient les causes. Des mesures de dépistage et de surveillance de la glycémie et du bilan lipidique sont recommandées dans le cadre de la prise en charge des patients schizophrènes. Mots clés : Antipsychotiques ; Diabète ; Schizophrénie ; Troubles du métabolisme.
Schizophrenia, diabète mellitus and antipsychotics Summary. During the last years, a contribution of antipsychotic drugs in the increase of diabetes prevalence in schizophrenic population has been repetitively suggested. The debate focused mainly on the second-generation antipsychotics. The analysis of the scientific literature indicates however that this dicussion is not recent and an increase of diabetes prevalence in schizophrenic populations was already described before the introduction of neuroleptics. Then, after the introduction of the first neuroleptics in the 1950s, an increase of diabetes prevalence was reported among treated patients and the same alarms occurred in the 1990s after the introduction of second-generation antipsychotics. These treatments were related to an increase of glucose tolerance impairment, type II diabetes and diabetic acidoketosis. Recent epidemiological studies have confirmed the increase prevalence of diabetes in schizophrenic patients, particularly in schizophrenic patients before any antipsychotic treatment. Among the suggested mechanisms, there are sedentary life (due to hospitalisation and sedative effects of neuroleptics), food imbalance, shared genetic factors for diabetes and schizophrenia. Moreover, the frequency of the metabolic syndrome is increased in schizophrenic populations. This syndrome associates blood glucose increase, lipid metabolism disorders and android obesity. This could explain – via an increase of the cortisol production – the increase of mortality due to cardiovascular diseases observed in schizoprhenic patients. Thus, it seems well established that schizophrenia is associated with an increased risk for diabetes. It is however more difficult to evalue the role of antipsychotic treatment as a causative factor of diabetes. Indeed, there are many published case reports or diabetes or diabetic acidoketosis after an antipsychotic treatment, but the level of evidence in controlled trials is low. Many studies were performed on large databases, but were retrospective and subjected to many flaws : concomitant diseases not taken into account, diabetes status evaluated by drug consumption, unknown diabetes
(1) Service de Pharmacie Clinique, Centre Hospitalier Sainte-Anne, 1, rue Cabanis, Paris cedex 14. Attaché dans le Service d’EndocrinologieMétabolisme (Professeur Turpin), Hôpital de la Pitié-Salpêtrière, 47, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris. Travail reçu le 7 juillet 2003 et accepté le 19 septembre 2003. Tirés à part : C. Gury, 5, rue Gazan, 75014 Paris. 382
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status before antipsychotic treatment, etc. In the few prospective studies performed, no significant differences between the atypical versus typical antipsychotics were evidenced for new cases of diabetes. Moreover, in general population, the glucose tolerance impairment is underdiagnosed and it is estimated that people with a glucose tolerance impairment have a 5-10 % annual risk of type II diabetes. Thus, this concern has to be replaced among the world epidemic incresase of diabetes and in a population of patients whose the disease itself and life style are risk factors for diabetes. Some studies have explored the pathophysiological mechanisms that could support a diabetogenic effect of antipsychotics. Although it does not seem to be a direct effect of antipsychotics on insulin secretion by pancreatic cells, body weight increase has been evidence for both typical and atypical antipsychotics. However, it remains unclear whether this weight increase is responsible for a visceral adiposity, which is a risk factor better fitted to the cardiovascular mortality tha the body weight itself. Other hypotheses involving an effect on the leptin, which regulates the appetite, have been proposed. In waiting of new prospective controlled studies, and without denying the impact of antipsychotics on the glucose and lipid metabolisms (on the weight increase, for example), it should be recognized that the benefit/risk ratio remains largely in favour of the treatment, particulary for the atypical antipsychotics, more effective and better tolerated at the neurologica level than the conventional antipsychotics. One of the benefits of the mainly articles in professional media about this concern is to draw attention on the metobolism disorders in schizophrenic patients, which are important risk factor of their frequent cardiovascular surmortality whatever the causes. Consequently, it is advised to monitor glucose and lipid metabolisms of schizophrenic patients before and during their treatment (body weight, fast blood glucose, blood cholesterol and triglycerides). In conclusion, schizophrenic patients are a population with an increased metabolic risk, which is a cause of their increased mortality. Although these data are known since a long time ago, this population does not benefit from the same metabolic follow-up than the non-schizophrenic population. The debate on the possible relationship between diabetes and antipsychotics should be also taken as a helpful recall of the necessity to follow simple rules of prevention and monitoring in this at-risk population. This should make it possible to preserve the benefit of the antipsychotics, the contribution of which in the treatment of schizophrenia is not any more to demonstrate. Key words : Antipsychotics ; Diabete ; Metabolic syndrome ; Schizophrenia.
« Le diabète est une maladie souvent découverte dans les familles où règne la folie. » Maudsley, The Pathology of Mind, 1879 (cité in réf. 51)
INTRODUCTION De nombreux articles ont été consacrés ces dernières années à l’éventuelle responsabilité des antipsychotiques
Schizophrénie, diabète et antipsychotiques
dans la survenue du diabète chez les schizophrènes. Ainsi, une recherche bibliographique dans Medline avec les mots clés « antipsychotics » et « diabete » permet de sélectionner plus de 30 articles de revue de la littérature pour les seules années 2000-2003. Bien que l’attention soit focalisée actuellement surtout sur les antipsychotiques de seconde génération (« atypiques »), le débat sur un lien possible entre la schizophrénie et le diabète n’est pas récent. Dès le début du XXe siècle, un lien entre diabète et schizophrénie était suggéré (45). Ce débat se développera avec l’utilisation des premiers antipsychotiques conventionnels (neuroleptiques) dans les années 1950, phénothiazines (chlorpromazine) puis butyrophénones (halopéridol), et il sera repris dans les années 1990 avec l’arrivée des antipsychotiques atypiques (amisulpride, clozapine, olanzapine, quétiapine, rispéridone, ziprasidone). Devant l’abondance des résultats, parfois contradictoires ou discutables, dans un domaine généralement éloigné de la pratique psychiatrique quotidienne, il était important de rappeler les notions de base concernant le diabète et les anomalies du métabolisme du glucose, avant de faire une synthèse des articles se rapportant à ce sujet. La compréhension de la physiopathologie du diabète et des mécanismes mis en jeu par les antipsychotiques devrait permettre une meilleure compréhension des résultats rapportés dans la littérature scientifique et une meilleure prise en charge sur le plan métabolique des patients schizophrènes dont le risque cardio-vasculaire reste plus élevé que celui de la population générale.
DIABÈTE SUCRE Le diabète sucré se définit comme une hyperglycémie chronique. Aujourd’hui, le diagnostic du diabète repose sur la mise en évidence d’une glycémie à jeun supérieure à 1,26 g/L (7 mmo/L) à deux reprises ou d’une glycémie supérieure à 2 g/L (11,1 mmol/L) à n’importe quel moment de la journée (22) (tableau I). Le seuil de 1,26 g/L repose sur des études épidémiologiques qui ont mis en évidence un risque augmenté de rétinopathie diabétique à partir de ce seuil. Lorsque la glycémie à jeun est comprise entre 1,10 et 1,26 g/L, on parle d’intolérance au glucose. Il s’agit d’une glycémie supérieure à la normale mais inférieure au niveau requis pour poser le diagnostic de diabète. Une intolérance au glucose augmente néanmoins le risque de développer un diabète ou d’être atteint d’une affection cardio-vasculaire. Les signes du diabète se manifestent lorsque les cellules β des îlots de Langerhans du pancréas ne produisent plus suffisamment d’insuline ou lorsque les cellules de l’organisme ne parviennent plus à utiliser efficacement l’insuline. À partir de cette définition, on distingue principalement 2 types de diabète : le diabète de type I (nommé autrefois diabète insulino-dépendant, diabète maigre ou diabète juvénile) et le diabète de type II (nommé autrefois diabète non insulino-dépendant, diabète gras ou diabète de la maturité). 383
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TABLEAU I. — Critères biologiques du diabète et des troubles du métabolisme du glucose. Diabète Glycémie à jeun ≥ 1,26 g/L (7 mmol/L) mesurée à deux reprises ou Glycémie à n’importe quel moment de la journée ≥ 2 g/L (11,1 mmol/L) Intolérance au glucose 1,10 g/L (6,1 mmol/L) ≤ glycémie à jeun ≤ 1,26 g/L (7 mmol/L) Sujet normal Glycémie à jeun ≤ 1,10 g/L (6,1 mmol/L) D’après les nouvelles règles de définition du diabète de l’American Diabetes Association (1997) reprises en France par l’ALFEDIAM (22).
Classiquement, le diabète de type I associe, chez un sujet jeune, une polyuropolydipsie, une polyphagie, un amaigrissement et une asthénie. Il existe une glycosurie qui peut être associée à une cétonurie. Le traitement de la maladie repose sur l’insulinothérapie. C’est une forme de diabète qui survient surtout chez l’enfant et l’adolescent et qui représente environ 10-15 % de l’ensemble des diabètes. Il est actuellement admis que l’insuffisance de production d’insuline au cours du diabète de type I est due à une destruction auto-immune des cellules β des îlots de Langerhans. Le diabète de type II est dû à la résistance de l’organisme à l’action de l’insuline (insulinorésistance) en relation avec une diminution à la fois du nombre des récepteurs à l’insuline et de leur sensibilité à cette dernière. Le glucose circulant ne peut donc pas entrer dans la cellule. Face à cette insulinorésistance, le pancréas sécrète plus d’insuline dans un premier temps, permettant ainsi de maintenir la glycémie dans les limites de la normale. Puis, la glycémie augmente indiquant que ce mécanisme compensateur ne suffit plus. Après 10-15 ans, une insulinopénie se développe progressivement, le recours à l’insulinothérapie est alors nécessaire. Le diabète de type II résulte de la conjonction de plusieurs gènes de susceptibilité dont l’expression dépend de facteurs d’environnement (en particulier, sédentarité et surcharge pondérale). Il apparaît généralement entre 40 et 50 ans et il est fréquemment découvert fortuitement, par exemple lors d’un bilan systématique chez un sujet de plus de 40 ans ayant une surcharge pondérale. Une hérédité familiale est fréquente et ce type de diabète est souvent associé à une hypertension artérielle ou à une hypertriglycéridémie. En France, on estime à environ 3 millions le nombre de diabétiques de type II. L’hyperglycémie chronique expose le sujet diabétique à des altérations vasculaires précoces. Selon la taille des vaisseaux atteints, on distingue 2 types de complications : la microangiopathie qui concerne le rein, la rétine et certains nerfs, et la macroangiopathie qui touche principalement les artères coronaires, les artères cérébrales et les artères des membres inférieurs. L’importance des com384
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plications micro et macroangiopathiques est fonction de la durée du diabète et surtout de l’équilibre glycémique tout au long de ces années. L’atteinte des artères des membres inférieurs conduit à une artérite des membres inférieurs et celle des artères coronaires peut se manifester par un angor ou un infarctus du myocarde. L’hypertension artérielle, très fréquente chez les sujets obèses, aggrave les complications liées au diabète. Les décès par maladie cardio-vasculaire sont la première cause de décès chez les diabétiques. L’atteinte des microvaisseaux de l’œil est responsable de la rétinopathie diabétique qui touche plus de 500 000 personnes en France, constituant ainsi une des premières causes de cécité. Selon l’OMS (65), 2 % des diabétiques perdent la vue et 10 % ont une atteinte visuelle importante. Même en l’absence de troubles visuels, un examen ophtalmologique annuel est nécessaire chez les sujets diabétiques. La neuropathie diabétique est responsable de douleurs, de crampes, d’une hyposensibilité des membres inférieurs ainsi que de plaies et de maux perforants plantaires. Enfin, la microangiopathie peut toucher le rein avec pour conséquence une microalbuminurie puis une protéinurie qui à terme évolue vers l’insuffisance rénale chronique. Ainsi, parmi les patients dont la fonction rénale nécessite une hémodialyse chronique, 25 % sont des patients diabétiques (65). L’acidocétose diabétique, heureusement peu fréquente (environ 4 pour mille diabétiques par an), est une complication aiguë du diabète. Elle est due habituellement à un déficit insulinique important chez le diabétique de type I qui résulte en une augmentation très sévère de la glycémie et des corps cétoniques dans le plasma. Ce déficit insulinique peut être aggravé par un facteur extérieur tel qu’une infection. L’accumulation des corps cétoniques est liée à l’augmentation de la lipolyse avec pour conséquence une augmentation des acides gras libres et une augmentation de la cétogenèse hépatique. Les pertes hydriques et ioniques importantes du fait de l’hyperosmolarité sont responsables d’une déshydratation qui engage le pronostic vital en l’absence de traitement. Le plus souvent précédée de signes annonciateurs (polyuropolydipsie, polypnée, signes de déshydratation intra et extracellulaire, vomissements, diarrhée), l’acidocétose diabétique doit être traitée avant la phase d’acidose sévère qui peut entraîner coma et décompensation cardio-vasculaire.
SYNDROME MÉTABOLIQUE L’insulinorésistance qui précède l’installation de l’intolérance au glucose puis celle du diabète de type II n’est pas sans conséquence sur le métabolisme et sur l’incidence des complications cardio-vasculaires. En effet, l’insulinorésistance est dans un premier temps responsable d’un hyperinsulinisme qui provoque des troubles du métabolisme lipidique. L’ensemble des signes cliniques et biologiques et des facteurs de risque qui sont reliés par la physiopathologie de l’insulinorésistance ont été regroupés en 1988 par Reaven sous la dénomination « syn-
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drome X », nommé actuellement « syndrome métabolique » ou parfois « syndrome polymétabolique » (6, 52). Ce syndrome est actuellement défini par la présence d’une intolérance au glucose (glycémie à jeun supérieure ou égale à 1,1 g/L) ou d’un diabète déclaré, associé à au moins 2 des facteurs suivants : – hypertriglycéridémie supérieure à 1,50 g/L ; – HDL cholestérol diminué (moins de 0,40 g/L chez l’homme et moins de 0,50 g/L chez la femme) ; – obésité de type androïde, c’est-à-dire avec une répartition abdominale de la graisse (tour de taille supérieur à 102 cm chez l’homme et supérieur à 88 cm chez la femme) ; – une pression artérielle normale haute (d’après la définition donnée par l’OMS) : PAS ≥ 130 mmHg et PAD ≥ 85 mmHg) (1, 5) (tableau II). TABLEAU II. — Définition du syndrome métabolique. Intolérance au glucose (glycémie à jeun ≥ 1,1 g/L à jeun) ou diabète Associé à au moins deux des facteurs suivants Hypertriglycéridémie (≥ 1,50 g/L) HDL cholestérol diminué (< 0,40 g/L chez l’homme et < 0,50 g/L chez la femme) Obésité abdominale (tour de taille > 102 cm chez l’homme et > 88 cm chez la femme) Pression artérielle systolique ≥ 130 mmHg ou pression artérielle diastolique ≥ 85 mmHg) Anomalies associées fréquemment rencontrées Anomalies des facteurs de l’hémostase Insulinorésistance Hyperuricémie Stéatose hépatique Élévation des protéines de l’inflammation (protéine C réactive) Selon la définition de l’AFSSAPS (1).
Ces différents signes cliniques et biologiques ne sont donc pas toujours présents et leur intensité peut varier en fonction de l’environnement et de la susceptibilité génétique. Bien que les signes qui composent le syndrome métabolique soient souvent peu inquiétants : glucose à la limite de la normale, léger embonpoint, hypertension légère, etc., les sujets porteurs de ce syndrome ont un risque de mortalité cardio-vasculaire augmenté (30). Ainsi, Lakka et al. (36) ont montré dans une étude prospective de 11 ans sur 1 209 hommes âgés de 42 à 60 ans que la mortalité était plus élevée chez les porteurs d’un syndrome métabolique, avec un risque relatif de 4,26 pour la mortalité coronarienne, de 2,27 pour la mortalité cardio-vasculaire et de 1,67 pour la mortalité toutes causes confondues. L’OMS évalue à 25-45 % la prévalence de ce syndrome dans les pays développés chez les hommes de plus de 40 ans (11). L’intérêt du syndrome métabolique en tant qu’entité nosographique est de permettre la prévention de ses complications. Ce sont, en dehors des com-
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plications propres au diabète, essentiellement les complications cardio-vasculaires qui dominent. Ces dernières sont favorisées par les dyslipidémies, l’hypertension artérielle, l’hypofibrinolyse, le diabète et l’obésité. Le traitement du syndrome métabolique a donc pour but essentiel de prévenir les complications cardio-vasculaires ainsi que le développement du diabète de type II.
SCHIZOPHRÉNIE ET DIABÈTE Des anomalies du métabolisme du glucose chez les patients psychiatriques sont rapportées dès le début du XXe siècle (49). Ces troubles métaboliques sont en particulier l’insulinorésistance, l’intolérance au glucose et le diabète. Récemment, Eaton et al. (19) ont estimé à 2,23 le risque relatif de présenter un diabète 13 ans après un diagnostic de dépression majeure. Selon Lilliker (38), la fréquence du diabète est multipliée par 3 chez les sujets maniaco-dépressifs comparés à la population américaine générale et aux autres patients psychiatriques. Dans une large étude rétrospective, Regenold et al. (49) ont évalué les taux de prévalence de diabète de type II selon le diagnostic psychiatrique : psychose dysthymique (50 %), troubles bipolaires de type I (26 %), dépression majeure (18 %) et schizophrénie (13 %). Concernant plus particulièrement la schizophrénie, sa relation avec le diabète est reconnue depuis longtemps. Avant même l’utilisation des antipsychotiques, un risque élevé de diabète de type II était déjà rapporté chez les schizophrènes (45). Toutefois, l’évolution des définitions et des connaissances concernant autant le diabète que la schizophrénie rendent difficiles les comparaisons et l’appréciation des taux de prévalence rapportés. Par ailleurs, le fait que le traitement antipsychotique lui-même soit rendu responsable de diabète ne facilite pas l’analyse des données. Récemment, Dixon et al. (18), aux ÉtatsUnis, rapportent sur une large population de schizophrènes une prévalence de 14,9 % du diabète de type II sur l’ensemble de la vie du patient. Des études internationales conduisent à des résultats similaires. Ainsi, Tabata et al. (55) dénombrent 8,8 % de diabète chez les schizophrènes japonais contre 5 % chez une population appariée non schizophrène. De même, en Italie, chez les patients schizophrènes de 50-59 ans et 60-69 ans, les prévalences du diabète de type II sont de 12,9 et 18,9 %, contre respectivement seulement 3 et 5,5 % dans la population du même âge (45). Différentes hypothèses ont été proposées afin d’expliquer la prévalence élevée du diabète de type II chez les patients schizophrènes. Ainsi, Ryan et al. (51) constatent, chez des schizophrènes avant traitement appariés à des sujets contrôles, une augmentation de l’insulinémie, de la glycémie et de la cortisolémie. L’existence de taux élevés de cortisol (taux basal ou après stimulation) ainsi que des troubles de la régulation de l’axe hypothalamo-hypophysosurrénalien avaient déjà été constatés à de nombreuses reprises (8, 16, 20, 25, 60). En particulier, un déficit du rétrocontrôle exercé par les cortiscostéroïdes sur l’activation de 385
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l’étage hypothalamo-hypophysaire a été mis en évidence chez les schizophrènes (4, 17, 29). Ces constatations ont conduit à suspecter un rôle de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien dans les troubles du métabolisme chez les schizophrènes. Le cortisol, du fait qu’il augmente la glycémie (en stimulant la néoglucogenèse et en diminuant la pénétration cellulaire du glucose dans les tissus périphériques), et augmente la triglycéridémie (en stimulant la lipolyse) peut être un élément important dans la survenue du syndrome métabolique. De plus, une augmentation du cortisol plasmatique favorise l’accumulation de la graisse viscérale comme cela peut se voir dans le syndrome de Cushing. En effet, l’expression du gène de la lipoprotéine lipase est régulée par un complexe constitué par le cortisol et le récepteur aux glucocorticoïdes. Ce récepteur est préférentiellement exprimé dans les adipocytes abdominaux et une augmentation du cortisol favorise donc l’accumulation des graisses viscérales (7). De plus, l’hypercorticisme entraîne une rétention hydrosodée responsable d’une élévation de la pression artérielle. En conséquence, un taux élevé de cortisol chez les patients schizophrènes pourrait être responsable des éléments les plus importants du syndrome métabolique, à savoir la résistance à l’insuline, l’obésité abdominale et la dyslipidémie (50). Le mode de vie des schizophrènes en lui-même est un élément favorisant la survenue d’un syndrome métabolique : alimentation déséquilibrée, absence d’exercice et sédentarité liées à l’hospitalisation et aux effets sédatifs des antipsychotiques conventionnels (9). La maladie, du fait des symptômes déficitaires et du retrait social, accentue le manque d’exercice physique. De façon surprenante toutefois, le taux d’obésité chez les schizophrènes n’est pas particulièrement élevé (9, 10, 31). Ainsi, les index de masse corporelle de patients schizophrènes et de sujets non schizophrènes ont été comparés après ajustement sur l’âge sans qu’il soit possible de mettre en évidence une différence entre les patients masculins des deux populations ; les femmes schizophrènes en revanche avaient des index de masse corporelle significativement plus élevés que les femmes non schizophrènes (2). Toutefois, dans le cadre du syndrome métabolique, le paramètre pertinent à considérer n’est peut-être pas l’index de masse corporelle mais plutôt le rapport taille/hanche ou le périmètre abdominal qui sont de meilleurs reflets de l’accumulation de graisse abdominale. Ainsi, l’étude de Thakore et al. (57) a montré récemment par tomodensitométrie que la masse de graisse viscérale était plus élevée chez les patients schizophrènes non encore traités par des antipsychotiques ou traités antérieurement, comparés à des patients non schizophrènes appariés pour l’âge, le sexe, l’activité physique, le régime alimentaire, la consommation de tabac et d’alcool. Le rapport taille/hanche des patients schizophrènes était augmenté significativement et la masse grasse viscérale était trois fois plus importante. Il n’y avait pas de différence entre les patients qui n’avaient jamais reçu d’antipsychotiques et ceux qui avaient été exposés antérieurement aux antipsychotiques. Les éléments constitutifs du syndrome métabolique (troubles du métabolisme du glucose et du métabolisme 386
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lipidique, hypertension artérielle et obésité abdominale) sont donc plus fréquemment rencontrés chez les patients schizophrènes. Ceci pourrait donc expliquer la plus grande fréquence des maladies cardio-vasculaires chez ce type de patients (24). Il est possible également qu’une prédisposition génétique commune à la schizophrénie et au syndrome métabolique existe. Ainsi, certains des gènes de susceptibilité mis en évidence chez les schizophrènes sont également impliqués dans la signalisation cellulaire de l’insuline, suggérant que le diabète de type II et la schizophrénie auraient des bases génétiques communes (43).
ANTIPSYCHOTIQUES ET DIABÈTE La question de la responsabilité des antipsychotiques dans la survenue d’un diabète de type II chez les patients schizophrènes est complexe. Les principales difficultés résident dans les différentes définitions du diabète ou de l’intolérance au glucose au cours du temps, dans la quasiabsence d’études prospectives, dans les faibles effectifs analysés, dans l’absence fréquente de groupes appariés et dans la difficulté de faire la part de ce qui revient à la maladie et au traitement. Sans prétendre à l’exhaustivité, on peut néanmoins retenir quelques travaux marquants, parfois contradictoires, décrivant la relation entre traitements antipsychotiques et diabète. Les articles récents insistent sur la responsabilité des antipsychotiques atypiques. Mais, dès 1956, c’est-à-dire peu de temps après l’introduction des antipsychotiques conventionnels, une augmentation de la prévalence du diabète chez les schizophrènes était notée. Ainsi, Thonnard-Neumann rapporte des taux de prévalence de 4,2 % en 1956 puis de 17,2 % en 1968 (58, 59). Dans les années 1960, les taux de prévalence de diabète chez les patients schizophrènes traités par antipsychotiques varient de 11 à 18 % (58, 61). Confirmant ces données épidémiologiques, l’effet hyperglycémiant de la chlorpromazine fut directement mis en évidence en pharmacologie humaine et animale (12, 21, 46, 62). Mettant à profit cette propriété, la chlorpromazine fut même utilisée pour prévenir l’hypoglycémie liée à l’insulinome (23, 37). Toutefois, du fait des bénéfices apportés par les premiers antipsychotiques conventionnels sur la symptomatologie psychotique, et face aux autres effets indésirables tels que les syndromes extrapyramidaux, les éventuelles conséquences métaboliques passèrent au second plan. L’introduction des antipsychotiques atypiques dans les années 1990 et leur meilleure sécurité d’emploi firent resurgir la question de possibles troubles métaboliques liés au traitement. De nombreux cas cliniques concernant l’apparition de diabète et d’acidocétose chez des patients traités par antipsychotiques atypiques ont été alors rapportés (26, 28, 33, 34, 40, 47, 48, 63) (tableau III). Cependant, Mukherjee et al. (45), à contre-courant de l’opinion générale, montrèrent dans une étude rétrospective sur 95 patients schizophrènes que le diabète est plus fréquent chez les patients naïfs de traitement que chez les sujets
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Schizophrénie, diabète et antipsychotiques
TABLEAU III. — Antipsychotiques atypiques et diabète : synopsis des études. Type d’études
Auteurs
Un cas avec clozapine (hyperglycémie sévère) (28) ; un cas avec clozapine (acidocétose) (34) ; un cas avec clozapine (acidocétose) (33) ; un cas avec clozapine et lithium (acidocétose) (47) ; un cas avec clozapine (diabète) (48) ; 2 cas avec clozapine et 4 avec olanzapine (63) ; un cas avec olanzapine (acidocétose) (26) Études Mukherjee et al., 1996 (45) 95 patients extraits d’une cohorte rétrospectives (Italie) Études de cas*
Kamran et al., 1994 (28) Koval et al., 1994 (34) Kostakoglu et al., 1996 (33) Peterson et Byrd, 1996 (47) Popli et al., 1997 (48) Wirshing et al., 1998 (63) Goldstein et al., 1999 (26)
Cavazzoni et al., 2001 (15) 46 111 patients sélectionnés dans une base de données (AdvancePCS Database) (États-Unis)
Études prospectives
Conclusion des auteurs
Caractéristiques de l’étude
Koro et al., 2002 (32)
20 000 patients environ sélectionnés dans une base de données (General Practice Research Database) (Royaume-Uni)
Sernyak et al., 2002 (53)
38 632 patients sélectionnés dans une base de données (Veteran Affairs Database) (États-Unis)
Hägg et al., 1998 (27)
Comparaison clozapine (63 patients) vs antipsychotiques conventionnels (67 patients) sur une période de 5 ans dans un service psychiatrique (Suède)
Lindenmayer et al., 2001 (39) Intolérance au glucose ou diabète après 5 mois de traitement par olanzapine chez 55 patients (États-Unis)
Lien entre la prise de l’antipsychotique et le trouble du métabolisme glucidique. Parmi les 6 cas de Wirshing et al. (63), 5 avaient des facteurs de risque pour le diabète Diabète plus fréquent chez les patients naïfs comparés à ceux traités par antipsychotiques Pas de différence dans la survenue de diabète entre antipsychotiques atypiques (1,6 %) vs conventionnels (1,6 %) Nouveaux cas de diabète chez 0,9 % des patients sous olanzapine, 1,4 % sous rispéridone et 2,1 % sous antipsychotiques conventionnels Environ 9 % de diabètes en plus pour les patients traités par antipsychotiques atypiques vs conventionnels Plus grande fréquence de troubles du métabolisme du glucose avec clozapine, mais non statistiquement significative Taux identiques à ceux de la population générale
Commentaires Les études de cas ne permettent pas d’estimer la prévalence du diabète
Résultat inattendu ; petite série ; pas de précisions sur les antipsychotiques reçus
Incidence faible des cas de diabète sous antipsychotiques atypiques
Existence d’un diabète avant le traitement inconnue. Pathologies associées non prises en compte. Petite série monocentrique ; pas de randomisation
Petite série non comparative ; courte durée de traitement
* Liste non exhaustive, cf. McIntyre et al. (40) pour une revue de la littérature des études de cas.
traités par antipsychotiques (tableau III). L’étude rétrospective de Koro et al. (32), réalisée à partir d’une large base de données d’environ 20 000 patients schizophrènes, permettait de conclure à l’apparition de diabète chez 0,9 % (9/970) des patients sous olanzapine et chez 1,4 % (23/1683) des patients sous rispéridone. Les antipsychotiques conventionnels quant à eux étaient accompagnés de 2,1 % (382/18 443) de cas de diabète. Bien que l’apparition de ces nouveaux cas de diabète soit statistiquement significative, il est important de noter que cette fréquence repose sur un nombre limité de cas et qu’elle est faible par rapport à une population pour laquelle l’incidence du
diabète est déjà relativement importante. L’étude transversale de Sernyak et al. (53) mettant à profit une base de données comportant 38 632 schizophrènes, montre une augmentation de 9 % environ des cas de diabète chez les patients recevant un antipsychotique atypique par rapport aux antipsychotiques conventionnels. Cependant, l’existence d’un diabète avant le traitement n’était pas connue puisque le critère de définition du diabète ne reposait que sur la coprescription à l’antipsychotique d’un médicament hypoglycémiant, sans recueil des antécédents médicaux. De plus, les raisons pour lesquelles un antipsychotique conventionnel ou atypique a été prescrit (par 387
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exemple du fait d’une pathologie associée) ne sont pas prises en compte, introduisant éventuellement un biais dans l’étude. L’étude de Cavazzoni et al. (15), faite également sur une large base de données de patients traités par des antipsychotiques, constate une augmentation du risque de développer un diabète du fait du traitement mais ne met pas en évidence de différence entre les antipsychotiques atypiques (641/38 969, soit 1,6 %) et conventionnels (307/19 782, soit 1,6 %). Peu d’études prospectives ont été publiées. Parmi ces dernières, l’étude de Hägg et al. (27) avait pour but de comparer la survenue de diabète ou d’intolérance au glucose chez des patients traités par la clozapine (63 patients) ou par des antipsychotiques conventionnels (67 patients) de 1990 à 1995. Les résultats indiquent une tendance à une plus grande fréquence du diabète ou d’intolérance au glucose pour les patients traités par clozapine, sans atteindre toutefois la significativité statistique. Une autre étude prospective chez 55 patients schizophrènes (39) rapporte que le pourcentage de patients avec une hyperglycémie persistante à jeun (7,2 %, soit 4 patients, selon les critères de l’American Diabetes Association) après un traitement de 5 mois par olanzapine n’était en fait pas différent de la prévalence de diabète ou d’intolérance au glucose de la population générale des États-Unis (6-8 %). De plus, 3 des 4 patients diabétiques avaient une histoire personnelle ou familiale de diabète. Différents mécanismes d’action des antipsychotiques sur les troubles du métabolisme du glucose ont été proposés, que l’on peut regrouper en 2 grandes familles : 1) une diminution de la sensibilité à l’insuline par le biais d’une prise de poids ; 2) un effet direct de l’antipsychotique sur la sensibilité à l’insuline ou sur la sécrétion de cette dernière par les cellules β des îlots de Langerhans (42, 44). Les antipsychotiques atypiques sont des antagonistes de récepteurs appartenant à diverses familles : récepteurs dopaminergiques, sérotoninergiques, muscariniques et histaminergiques (14). La fixation des antipsychotiques atypiques aux récepteurs sérotoninergiques et histaminergiques pourrait être un facteur explicatif de la prise de poids observée lors d’un traitement par l’un de ces produits. Une méta-analyse de la littérature reposant sur 81 articles a montré qu’une prise de poids était rapportée aussi bien avec les antipsychotiques atypiques que conventionnels (3). De même, la revue de la littérature de Taylor et al. (56) suggère que tous les antipsychotiques, à l’exception de la ziprasidone, ont fait l’objet d’observations et d’études indiquant qu’ils étaient associés à une prise de poids. Toutefois, peu d’études ont étudié si ce gain de poids se traduisait par une augmentation de l’adiposité viscérale, seul véritable facteur de risque métabolique et cardio-vasculaire. Ainsi, dans l’étude de Thakore et al. (57), la mesure de l’obésité abdominale chez des schizophrènes traités ou n’ayant jamais reçu d’antipsychotique et appariés pour l’âge, le sexe et le mode de vie (tabac, alcool, exercice physique, régime alimentaire) met en évidence une augmentation de la graisse viscérale pour ces 2 populations sans que l’on observe de différence entre le groupe traité par les antipsychotiques et le groupe naïf. 388
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Kraus et al. (35) ont proposé que certains antipsychotiques pouvaient avoir une action en diminuant la sensibilité à la leptine, une hormone de la satiété. L’effet en serait un appétit augmenté et par conséquent une prise de poids. Melkerson et al. (41) ont mesuré chez des patients schizophrènes traités par olanzapine une augmentation de la leptine, accompagnée d’une résistance à l’insuline et d’une augmentation de l’insulinémie, des triglycérides et du poids. Afin d’explorer un effet direct des antipsychotiques sur la sécrétion d’insuline par les cellules pancréatiques, Sowell et al. (54) ont étudié récemment chez des volontaires sains l’effet d’un traitement de 15-17 jours par des antipsychotiques atypiques (olanzapine ou rispéridone) sur la sécrétion d’insuline provoquée par une perfusion maintenant un taux constant et élevé de glucose (méthode du clamp hyperglycémique). Chez ces sujets, une augmentation significative de la production d’insuline après clamp hyperglycémique et une prise de poids étaient mises en évidence en comparaison à des sujets recevant un placebo. La prise en compte de la prise de poids dans l’analyse ne permettait plus de mettre en évidence l’augmentation de la production d’insuline par rapport aux sujets sous placebo. Les auteurs concluent que l’insulinémie est le témoin d’une insulinorésistance transitoire, elle-même directement liée à la prise de poids. Les antipsychotiques atypiques ne modifieraient donc pas directement la fonction des cellules β du pancréas.
DISCUSSION L’analyse de la littérature concernant l’évaluation du risque de diabète sous traitement antipsychotique met en évidence un risque plus élevé de diabète dans la population des patients schizophrènes. Toutefois, l’augmentation du risque de diabète chez les patients schizophrènes était déjà décrite avant même l’introduction des antipsychotiques. Des études ont confirmé la prévalence plus importante de diabète chez les patients schizophrènes par rapport à la population générale, en particulier chez des schizophrènes non encore traités par des antipsychotiques. Parmi les mécanismes physiopathologiques invoqués pour expliquer cette augmentation de la prévalence du diabète figurent la sédentarité liée à l’hospitalisation et aux effets sédatifs des antipsychotiques conventionnels, une alimentation déséquilibrée et des facteurs génétiques communs au diabète et à la schizophrénie. Les désordres du métabolisme du glucose peuvent faire partie du tableau clinique du syndrome métabolique dont la fréquence est augmentée dans cette population. Ce syndrome associe à l’augmentation de la glycémie, des troubles du métabolisme lipidique, une pression artérielle limite haute et une obésité de type androïde. Il pourrait expliquer la surmortalité liée aux pathologies cardio-vasculaires chez les schizophrènes par le biais d’une augmentation du cortisol. S’il est bien établi que la schizophrénie augmente le risque de diabète, il est plus difficile d’évaluer le rôle des antipsychotiques dans le développement du diabète car, face
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aux nombreux cas cliniques individuels de diabète rapportés sous traitement antipsychotique, le niveau de preuve apporté par des études cliniques rétrospectives est faible. En effet, si l’on se réfère aux études réalisées sur des échantillons importants extraits de larges bases de données, des résultats discordants en termes d’incidence de diabète sont rapportés : une absence de différence entre antipsychotiques conventionnels et atypiques (15), une incidence de diabète significativement plus faible sous olanzapine et rispéridone par rapport aux antipsychotiques conventionnels (32), un risque de diabète plus important sous antipsychotiques atypiques par rapport aux conventionnels (53). Ces études sont critiquables par de nombreux aspects méthodologiques : pathologies associées non prises en compte, statut diabétique évalué par la consommation de médicaments hypoglycémiants, existence inconnue d’un diabète avant le début du traitement antipsychotique, etc. Cette évaluation du statut diabétique avant le début du traitement est très importante car il existe de nombreux cas d’intolérance au glucose non diagnostiqués et l’on estime que 5 à 10 % des patients qui en sont atteints ont un risque de développer un diabète de type II dans l’année (13). Parmi les deux études prospectives – menées sur un petit nombre de sujets – une seule était comparative (clozapine vs antipsychotiques conventionnels) (27). Cette étude a montré une plus grande tendance à développer un diabète sous clozapine, sans différence statistiquement significative entre les deux groupes. En définitive, les études analysées ne permettent pas d’évaluer le risque de diabète par les antipsychotiques pour des raisons essentiellement méthodologiques. En particulier, il est souvent mal aisé d’imputer la responsabilité d’un antipsychotique donné car fréquemment les patients ont été traités antérieurement par un ou plusieurs autres antipsychotiques. Par ailleurs, il est possible que, du fait de la publicité faite autour de cette question, le diabète soit recherché plus systématiquement chez les patients traités par antipsychotiques, en particulier par les antipsychotiques atypiques. La conséquence en est un risque de sous-évaluation de la prévalence du diabète chez les patients schizophrènes non traités ou traités par des antipsychotiques conventionnels, par rapport à ceux recevant des antipsychotiques de seconde génération (13). On ne doit pas oublier également qu’il existe une augmentation de la prévalence du diabète dans la population générale, parfois qualifiée « d’épidémie », aussi bien dans les pays industrialisés que dans les pays en voie de développement, avec un doublement prévu de la prévalence mondiale entre 1995 et 2025 (64). La question des nouveaux cas de diabète chez les patients traités par des antipsychotiques atypiques doit donc être replacée dans ce contexte épidémiologique. Concernant le mécanisme physiopathologique de l’éventuel effet diabétogène des antipsychotiques atypiques, une étude menée chez des volontaires sains a mon-
Schizophrénie, diabète et antipsychotiques
tré que les antipsychotiques atypiques (olanzapine et rispéridone) n’exerçaient pas d’effet direct sur la sécrétion d’insuline par les cellules pancréatiques (54). En revanche, des prises de poids sont rapportées par une métaanalyse (3) et une revue de la littérature (56), qu’il s’agisse d’antipsychotiques atypiques ou conventionnels. Cette augmentation de poids pourrait s’expliquer par la fixation des antipsychotiques atypiques aux récepteurs sérotoninergiques et histaminergiques. Le rôle de la leptine a également été évoqué pour expliquer cette prise de poids par le biais d’une augmentation de l’appétit (35, 41). Dans l’attente d’études prospectives contrôlées évaluant le risque de diabète sous antipsychotique, l’élévation de la prévalence du diabète dans la population générale, associée à un risque accru de diabète chez les patients schizophrènes, conduisent à recommander la surveillance régulière sur le plan métabolique et cardiovasculaire des patients schizophrènes : poids, glycémie à jeun, cholestérolémie et triglycéridémie avant traitement et une fois par an (tableau IV), ainsi que la mesure de la pression artérielle et un ECG. Cette surveillance devra être d’autant plus étroite que le patient présente des facteurs de risque de diabète de type II : prise de poids ou obésité (indice de masse corporelle > 30), antécédents familiaux de diabète, hypertension et hypertriglycéridémie. Si une modification de traitement antipsychotique est envisagée à la suite d’anomalies métaboliques, le rapport bénéfice/risque des traitements antipsychotiques sera soigneusement évalué. En particulier, il conviendra d’être particulièrement prudent avant d’incriminer le traitement chez les patients pour lesquels le diabète est apparu sans prise de poids associée. TABLEAU IV. — Conduite à tenir vis-à-vis du risque de diabète chez les schizophrènes. Recherche et évaluation des facteurs de risque de diabète de type 2 Index de masse corporelle > 30 avant traitement Obésité en particulier abdominale (tour de taille > 102 cm chez l’homme et > 88 cm chez la femme) Antécédents familiaux de diabète Antécédents personnels de troubles de la glycémie Hypertension artérielle Âge > 45 ans Surveillance biologique régulière (avant traitement et une fois par an) Glycémie à jeun Cholestérolémie et triglycéridémie Surveillance du poids En cas de diagnostic de diabète : consultation spécialisée
CONCLUSION Les patients schizophrènes constituent une population à risque métabolique accru et c’est l’une des causes de 389
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leur surmortalité, en particulier du fait de l’incidence plus élevée de maladies cardio-vasculaires. Ces notions sont connues depuis longtemps mais cette population ne bénéficie probablement pas de la même prévention et de la même surveillance que la population non schizophrène. Le débat concernant la relation entre le diabète et les antipsychotiques vient opportunément rappeler la nécessité de respecter quelques règles simples de prévention et de surveillance chez cette population à risque. À cet égard, un bilan minimal biologique et cardio-vasculaire devrait être réalisé de façon annuelle. Ceci devrait permettre de préserver le bénéfice de ces traitements dont l’apport dans le traitement de la schizophrénie n’est plus à démontrer.
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