Stratégies ganglionnaires dans les cancers vulvaires. Recommandations de l’ESGO

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en ligne sur / on line on www.em-consulte.com/revue/bulcan www.sciencedirect.com

Stratégies ganglionnaires dans les cancers vulvaires. Recommandations de l'ESGO Denis Querleu, Agnieszka Rychlik, Frédéric Guyon, Anne Floquet, François Planchamp

Reçu le 7 juin 2019 Accepté le 15 juin 2019 Disponible sur internet le :

Institut Bergonié, 229, cours de l'Argonne, 33000 Bordeaux, France

Correspondance : Denis Querleu, Institut Bergonié, 229, cours de l'Argonne, 33000 Bordeaux, France. [email protected]

Mots clés Cancers vulvaires Ganglion sentinelle Curage ganglionnaire inguinal

Keywords Vulvar cancer Sentinel lymph node Groin node dissection

Résumé Les recommandations de l'European Society of Gynaecologic Oncology (ESGO) couvrent désormais la totalité des situations cliniques courantes en cancérologie gynécologique. Elles sont élaborées selon une méthodologie stricte comportant une revue systématique de littérature, la constitution d'un groupe d'experts sur la base de l'activité scientifique, de la répartition géographique et de la multidisciplinarité, et la revue externe par des utilisateurs et des représentants de patientes. Les recommandations pour la prise en charge du cancer vulvaire ont été élaborées dans l'année 2015 publiées en 2017. Elles sont disponibles en accès libre sur le site internet de l'ESGO. Une application smartphone « ESGO guidelines » permet de les implémenter en pratique quotidienne. Cet article reprend les éléments de stratégie sur le diagnostic et la prise en charge de l'atteinte ganglionnaire dans les cancers vulvaires. Une revue complémentaire de bibliographie depuis 2015 a été réalisée pour la rédaction de cet article afin de compléter la documentation. La stratégie ganglionnaire dans les cancers vulvaires comporte un volet diagnostique, où la clinique et l'imagerie jouent encore un rôle essentiel, mais où la méthode du ganglion sentinelle a permis une avancée majeure dans les cancers précoces. Elle comporte un volet thérapeutique, où le curage ganglionnaire et la radio(chimio)thérapie ont une place codifiée.

Summary Management of the nodal disease in vulvar cancers. The ESGO guidelines The European Society of Gynaecologic Oncology (ESGO) guidelines cover the whole field of common clinical situations in gynecologic oncology. Their elaboration follows a strict process including a systematic review of the literature, the setting up of a group of expert on the basis of scientific production, geographical balance, and multidisciplinarity, and an external review by users and patients. The recommendations for the management of vulvar cancer were elaborated in 2015 and published in 2017. They are available in open access on the ESGO website, and can be incorporated in clinical practice using the free ESGO guidelines smartphone application. This review is a selection of the sections addressing the diagnostic and strategical aspects of the

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tome xx > n8x > xx 2019 https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2019.06.010 © 2019 Société Française du Cancer. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

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Pour citer cet article : Querleu D, et al. Stratégies ganglionnaires dans les cancers vulvaires. Recommandations de l'ESGO. Bull Cancer (2019), https://doi.org/10.1016/j.bulcan.2019.06.010

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management of lymph nodal disease in vulvar cancer. An additional review of the recent literature published since 2015 has been carried out. The management of nodal disease in vulvar cancer encompasses a diagnostic and a therapeutic component. Clinical and imaging assessment still play a major role, whilst the identification of the sentinel node is currently a mainstay of assessment of the nodal status in early vulvar cancer. The therapeutic component is based on the rational use of full lymph node dissection and (chemo)radiation.

L'

atteinte ganglionnaire est un facteur de pronostic majeur dans les cancers vulvaires. Dans l'importante étude collective allemande AGO-CaRE-1 [1], elle concerne environ un tiers (35,8 %) des patientes. Dans cette étude, et malgré l'administration d'une radiothérapie complémentaire à environ la moitié des patientes N+, la survie globale à trois ans passe de 90 % à 56 % en présence d'une atteinte ganglionnaire. Dans la même étude, il apparaît que l'atteinte ganglionnaire impacte également le risque de récidive vulvaire, avec un risque de 20 % chez 447 patientes N+ contre 14 % chez 802 patientes N , témoignant de l'agressivité tumorale. Ce facteur pronostic défavorable est encore plus important en présence d'une rupture capsulaire, avec un hazard ratio de quatre pour la mortalité par comparaison aux cas N+ sans maladie extraganglionnaire [2]. L'atteinte ascendante des aires ganglionnaires pelviennes est considérée comme métastatique, mais reste accessible à un traitement loco-régional [3]. La stratégie de diagnostic et de prise en charge des métastases ganglionnaires a été précisée dans des recommandations de l'ESGO, élaborées à partir de décembre 2015 et définitivement publiées en 2017, qui font l'objet de cet article [4].

Méthodologie

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L'élaboration des critères ESGO suit un processus dont l'objectif est de remplir l'ensemble des critères de haute qualité pour les recommandations de pratique clinique : revue systématique de littérature, constitution d'un groupe d'experts sur la base de l'activité scientifique, de la répartition géographique et de la multidisciplinarité (18 experts issus de 12 nationalités), et revue externe par des utilisateurs et des représentants de patientes. La revue systématique de littérature indexée dans la base Medline en langue anglaise entre janvier 1980 et septembre 2015 a été effectuée dans le cadre de l'élaboration des recommandations ESGO. Les équations de recherche incluaient les termes suivants concernant spécifiquement ou non l'atteinte ganglionnaire : diagnosis, en bloc dissection, follow-up, frozen sections, groin lymph node involvement, groin node metastasis, histology, histological examination, imaging, inguinofemoral lymph node dissection, lymph node dissection, lymphadenectomy, (inguinofemoral or deep, inguinal or superficial, ipsilateral, pelvic), lympho-vascular invasion, node dissection, pelvic-lymph node dissection, physical examination,

postoperative complications, preoperative workup, radiation (primary, neoadjuvant, adjuvant), sentinel lymph node assessment, sentinel lymph node biopsy, sentinel lymph node dissection, staging, surgical management, surgical procedures, surgical resection, survival rate, survival analysis. La bibliographie a été complétée par l'examen des références présentes dans les articles sélectionnés, par la recherche de référentiels, et par des références additionnelles fournies par le groupe d'experts. Deux cent soixante-dix références ont été sélectionnées. Dans le cadre de cet article, une recherche bibliographique complémentaire entre 2015 et avril 2019 a été menée. Les recommandations ont été basées sur l'évidence scientifique et, en l'absence majoritaire d'études de haut niveau de preuve, sur le consensus à l'intérieur du groupe d'experts, avec la contribution des remarques des relecteurs. Le groupe de 181 relecteurs a été constitué sur la base de la liste des membres de l'ESGO, sélectionnés en fonction d'une répartition géographique équilibrée. La relecture a été structurée par un questionnaire sur la pertinence et l'applicabilité des recommandations, complétée par un texte libre. Trois réunions plénières du groupe de travail ont eu lieu, une initiale, une réunion de consensus pour l'élaboration d'une première version des recommandations et une pour examen et prise en compte des remarques des relecteurs.

Diagnostic clinique et imagerie L'examen clinique des aires ganglionnaires inguinales est un impératif (tableau I). La valeur diagnostique de l'examen clinique dans l'évaluation du statut ganglionnaire est cependant imparfaite. Dans une série de 258 patientes [5], seulement 64 sur 100 atteintes ganglionnaires ont été identifiées cliniquement, et 15 % de faux positifs sont relevés. Dans une série de 224 cas, la stadification clinique était en défaut dans 25 % des cas [6]. La valeur de l'imagerie par résonance magnétique (IRM) a été évaluée dans une étude prospective et une étude rétrospective, dont la combinaison indique une sensibilité de 86 % (intervalle de confiance à 95 % 0,57–0,98) et une spécificité de 87 % (intervalle de confiance à 95 % 0,74–0,95) [7]. Dans une autre étude rétrospective portant sur 60 patientes, les images ont été interprétées à l'aveugle et indépendamment par deux radiologues, avec une sensibilité concordante de 52 % et une spécificité similaire de 85 % et 89 % [8]. Un rapport axe court/axe

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TABLEAU I

TABLEAU II

Recommandations ESGO concernant le diagnostic

Recommandations ESGO concernant le ganglion sentinelle

Avant la biopsie du ganglion sentinelle, un examen clinique et des examens d'imagerie inguinale (par échographie, TEP-TDM [tomographie par émission de positons-tomodensitométrie]) ou IRM sont recommandés pour identifier d'éventuelles métastases ganglionnaires

La procédure du ganglion sentinelle est recommandée chez les patientes présentant des lésions unifocales < 4 cm sans ganglions inguinaux suspects

Une stadification supplémentaire par TDM thoraco-abdominopelvienne est recommandée en cas de métastases (ganglionnaires) suspectées ou confirmées et/ou de maladie de stade avancé

long supérieur ou égal à 0,75 semble avoir la meilleure performance diagnostique [9]. La tomographie par émission de positons (TEP) a une sensibilité de 71 % (intervalle de confiance à 95 % 0,50–0,86) et une spécificité de 72 % (intervalle de confiance à 95 % 0,59–0,82) [8]. L'échographie a été explorée dans quatre études prospectives dont l'hétérogénéité ne permet pas de combiner les résultats, mais la sensibilité se situe entre 76 et 85 % et la spécificité entre 83 et 96 %, la meilleure évaluation étant le rapport axe court/ axe long [7]. La combinaison d'une échographie et d'une ponction à l'aiguille fine améliore considérablement la valeur diagnostique, avec une sensibilité de 93 % et une spécificité de 100 % [10]. Il n'y a pas d'étude explorant la valeur diagnostique du scanner. En revanche, celui-ci est recommandé lorsqu'il existe des métastases ganglionnaires inguinales suspectées ou avérées, afin d'explorer les aires ganglionnaires sus-jacentes pelvienne, abdominale et thoracique (tableau I). La TEP et l'IRM peuvent jouer le même rôle. Finalement, compte tenu de la sensibilité non absolue de l'examen clinique et de l'imagerie, et de l'importance diagnostique (et thérapeutique) majeure de la connaissance du statut ganglionnaire, la nécessité d'une exploration histologique est reconnue dans toutes les recommandations, sauf dans les stades IA où le risque d'atteinte ganglionnaire est nul. Une exploration chirurgicale inguinale est donc nécessaire dans tous les cas supérieurs au stade IA qu'il y ait ou non des ganglions suspects identifiés, sauf évidemment si des métastases à distance sont décelées. La technique du ganglion sentinelle intervient ici en tant que moyen d'assurer un diagnostic histopathologique sans nécessiter un curage ganglionnaire à visée thérapeutique.

Diagnostic : ganglion sentinelle La procédure du ganglion sentinelle se situe, lorsqu'elle est applicable, c'est-à-dire, dans les tumeurs de moins de quatre

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L'utilisation d'un traceur radioactif est obligatoire ; l'utilisation d'un colorant bleu est optionnelle Une lymphoscintigraphie est conseillée afin de permettre l'identification, la localisation et le dénombrement des ganglions sentinelles avant l'intervention chirurgicale Un examen du ganglion sentinelle en extemporané et/ou sur coupes congelées peut être effectué pour tenter d'éviter une deuxième intervention chirurgicale. Des précautions s'imposent en raison du risque accru d'omission de micrométastases à l'examen anatomopathologique final du fait de la perte de tissu due au traitement pour l'analyse de coupes congelées En l'absence de détection d'un ganglion sentinelle (échec de la méthode), une lymphadénectomie inguino-fémorale doit être réalisée Si un envahissement métastatique est identifié dans le ganglion sentinelle (quelle que soit la taille), une lymphadénectomie inguinofémorale ipsilatérale doit être effectuée Pour les tumeurs touchant la ligne médiane : la détection des ganglions sentinelles bilatéraux est obligatoire. En cas de détection d'un seul ganglion sentinelle unilatéral, une lymphadénectomie inguino-fémorale contro-latérale doit être réalisée L'examen anatomo-pathologique des ganglions sentinelles doit comprendre des coupes en série au moins tous les 200 mm. Si les coupes colorées à l'HE (hématoxyline /éosine) sont négatives, une analyse par immunohistochimie doit être effectuée

centimètres unifocales sans ganglions inguinaux suspects, au carrefour entre le diagnostic (c'est-à-dire, la stadification) et le traitement chirurgical des aires inguinales (tableau II). Les recommandations concernant le ganglion sentinelle sont résumées dans le tableau II. Les recommandations principales que sont l'indication citée ci-dessus et l'utilisation d'un traceur radioactif sont de grade B, les autres recommandations ont été classées en grade C. L'applicabilité est principalement fondée sur le résultat de l'étude fondatrice GROINSS-V [11] et de sa confirmation indépendante [12]. Le taux de détection devrait être proche de 90 %, mais le pourcentage observé en pratique est inférieur [13]. La considération technique sur le traceur est fondée sur les résultats objectifs de sensibilité : 78–94 % pour l'utilisation du colorant bleu seul, 88–94 % pour le traceur radioactif seul, 91– 98 % pour l'association des deux traceurs. À noter la disponibilité à l'heure actuelle de la fluorescence au vert d'indocyanine. Le traceur doit être injecté à la périphérie saine de la tumeur dans les quatre quadrants.

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Les ganglions suspects (à la palpation et/ou à l'imagerie) doivent être analysés par cytoponction ou microbiopsie lorsque cela modifierait le traitement initial

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Les conditions d'expérience pour la réalisation de la procédure du ganglion sentinelle ne sont pas précisées dans les recommandations, mais dans le texte complet, ainsi que dans des publications postérieures [13]. Il est généralement suggéré une courbe d'apprentissage initiale de dix cas sans faux négatif, et un maintien de l'expérience par 5 cas par an, ce qui implique à l'évidence une centralisation de la prise en charge des cancers vulvaires.

remplies (tumeur de plus de 4 centimètres ou multifocales) ou lorsqu'une métastase est identifiée dans un ganglion sentinelle. Une exception à cette règle concerne les cas avec adénopathie, pour lesquels l'exérèse des sites macroscopiquement atteints, complétée de radiothérapie, est une option qui semble générer les mêmes résultats, avec un taux de complications inférieur [16]. De plus, en contradiction avec une recommandation précédente, l'indication de curage complet en cas de micrométastase (dimension inférieure à deux millimètres) unique est discutée [17] dans la mesure où le rôle pronostique de l'atteinte micrométastatique est nettement moins péjoratif que l'atteinte macrométastatique, où le risque d'atteinte d'un ganglion non sentinelle est faible [18], et où la radiothérapie exclusive pourrait trouver son indication dans cette situation clinique. Enfin, le curage contro-latéral en cas d'atteinte ganglionnaire sentinelle unilatérale, sans atteinte sentinelle contro-latérale, semble inutile [19]. Lorsqu'une lymphadénectomie est indiquée, elle doit être complète et ne pas se limiter aux ganglions inguinaux superficiels. Les ganglions inguinaux profonds médiaux à la veine fémorale doivent être inclus dans la dissection. De fait, le taux de récidive est de l'ordre de 1,4 % en cas de dissection complète, contre 6,6 % en cas de lymphadénectomie superficielle seule [13]. En cas de lymphadénectomie complète, la ou les incisions doivent être séparées de la vulvectomie afin de réduire le taux de complications. Une revue générale des méthodes utilisées pour réduire la morbidité des curages inguinaux et leurs limites est disponible [20]. C'est d'ailleurs l'importance des complications postopératoires à court terme (désunion, infection, lymphocèles) et à long terme (lymphœdème) qui a justifié les investigations sur l'exérèse du ganglion sentinelle seul. Les études prospectives ont clairement montré une réduction drastique du risque de lymphœdème après ganglion sentinelle seul (2 %) par comparaison à la lymphadénectomie complète (25 %) [11,12].

Traitement chirurgical

Radiothérapie

Le contrôle de qualité anatomique de la lymphadénectomie est essentiel (tableau III). Elle peut se limiter aux seuls ganglions sentinelles lorsque les conditions en sont réunies (lésion unifocale de moins de quatre centimètres). Le risque de récidive ganglionnaire est alors de l'ordre de 3,4 % [13]. Dans une analyse ancillaire de l'étude AGO-CaRE-1, il n'a pas été noté de différence de survie entre des patientes classées comme N sur la base d'un ganglion sentinelle seul ou d'un curage ganglionnaire [14]. Les résultats à long terme de l'étude GROINSS-V sont disponibles, et confirment la sécurité de la politique d'abandon du curage complet dans ce contexte avec un risque de récidive inguinale de 2,5 % après un recul médian de 105 mois [15]. Il est recommandé de réaliser un curage complet lorsque les conditions de la procédure du ganglion sentinelle ne sont pas

La radiothérapie seule ne peut être considérée comme adéquate dans le traitement initial des aires ganglionnaires inguinales, sur la base d'un essai du Gynecologic Oncology Group qui reste la référence sur le sujet bien que la technique de radiothérapie utilisée soit critiquable, car ancienne et ne tenant pas compte de l'imagerie et des progrès de la radiothérapie [21] (tableau IV). La place de la radiothérapie est exclusivement adjuvante. Egalement sur la base d'un essai ancien [22], la radiothérapie est considérée comme standard après confirmation histologique d'une atteinte ganglionnaire macrométastatique portant sur au moins deux ganglions [23]. Cette politique a été confirmée par l'étude AGO-CaRE-1 en présence de deux ou trois ganglions positifs [1]. La difficulté persistante est l'indication de radiothérapie en cas d'atteinte micrométastatique ou limitée à un seul ganglion. La sensibilisation par chimiothérapie

TABLEAU III Recommandations ESGO concernant le traitement chirurgical des aires ganglionnaires Le traitement de l'aire ganglionnaire inguinale doit être réalisé pour toutes les tumeurs de stade > pT1a Pour les tumeurs unifocales < 4 cm sans ganglions inguinaux suspects à l'examen clinique et à l'imagerie (quelle que soit la modalité), la procédure du ganglion sentinelle est recommandée Pour les tumeurs  4 cm et/ou en cas de cancer invasif multifocal, une lymphadénectomie inguino-fémorale par incisions séparées est recommandée. Dans les tumeurs latérales (bordure médiane à plus de 1 cm de la ligne médiane), une lymphadénectomie inguinofémorale ipsilatérale est recommandée. Une lymphadénectomie inguino-fémorale contro-latérale peut être réalisée lorsque les ganglions ipsilatéraux montrent un envahissement métastatique Lorsque la lymphadénectomie est indiquée, les ganglions fémoraux superficiels et profonds doivent être retirés La préservation de la veine saphène est recommandée En cas d'adénopathie inguinale documentée, l'attitude optimale (lymphadénectomie inguino-fémorale ou exérèse des seules adénopathies) n'est pas établie

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Si une adénopathie pelvienne (>2 cm) est identifiée, une adénectomie doit être envisagée

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Récidive

TABLEAU IV Recommandations ESGO concernant la radiothérapie des aires inguinales Une radiothérapie postopératoire est recommandée en cas de plus d'un ganglion métastatique et/ou de présence d'une extension extracapsulaire La radiothérapie adjuvante pour atteinte ganglionnaire doit inclure l'aire inguinale homolatérale, et en l'absence de ganglions iliaques suspects, la partie distale des ganglions iliaques avec une limite supérieure au niveau de la bifurcation de l'artère iliaque commune (accord d'experts) La radiothérapie adjuvante doit débuter le plus tôt possible, de préférence dans les 6 semaines suivant le traitement chirurgical (accord d'experts concernant la radiothérapie des cancers de la vulve en général) Sur la base de l'évidence existante dans les cancers du col utérin, ORL, et anal, l'addition d'une chimiosensibilisation concomitante à la radiothérapie adjuvante doit être envisagée (accord d'experts)

concomitante est généralement utilisée, sur la base d'analogies avec d'autres localisations tumorales épidermoïdes, ainsi que sur une étude rétrospective de population montrant une augmentation de la médiane de survie (44 mois versus 30) associée à la chimiosensibilisation [24]. Cependant, dans une étude utilisant la base de données nationale américaine, l'adjonction de chimiothérapie ne semble utile qu'à partir de deux ganglions envahis [25]. La chimiothérapie utilisée en routine est le cisplatine à la dose de 40 mg/m2 hebdomadaire.

Le traitement de l'aire inguinale doit être réalisé en cas de récidive locale lorsqu'il ne l'a pas été au primo-traitement. La technique du ganglion sentinelle n'est pas validée, mais semble réalisable bien que plus complexe [26]. La récidive inguinale est considérée de très mauvais pronostic, mais doit encore être prise en charge avec une intention curative [27]. Elle doit faire l'objet d'un bilan d'extension à la recherche de métastases ganglionnaires sus-jacentes ou de métastases à distance. L'excision radicale est nécessaire, et la radio(chimio) thérapie adjuvante indiquée en l'absence d'antécédent de radiothérapie. La détection précoce de la récidive ganglionnaire est possible par échographie [28].

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Conclusion Si une grande proportion de situations cliniques sont bien codifiées, avec une réduction de l'agressivité des traitements chaque fois que possible, il persiste des sujets d'investigation. L'étude GROINSS-V II, ouverte en décembre 2005 et fermée en octobre 2016 après l'inclusion de 150 patientes, a étudié la possibilité de remplacer la lymphadénectomie complète par une radiothérapie en cas de ganglion sentinelle positif micrométastatique (métastase de moins de deux millimètres de diamètre). L'étude GROINSSV III, étude observationnelle avec critères d'arrêt, concernera les cas avec macrométastase, de diamètre supérieur à deux millimètres, une situation dans laquelle la radiothérapie seule a montré son insuffisance. C'est ici la radiochimiothérapie exclusive qui sera évaluée, avec des conclusions attendues en 2026. Déclaration de liens d'intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d'intérêts.

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