M6d Mal Infect. 1995 ; 25, Sp4cial : 177-83
Surveillance 6pid6miologique de la list6riose humaine en France : r61e du Centre National de R6f6rence* J. R O C O U R T * * et Ch. J A C Q U E T * *
RESUME
La s u r v e i l l a n c e de la list6riose e n France est effectu4e p a r le Centre N a t i o n a l d e R6f6rence qui suit l ' 6 v o l u t i o n d e cette infection e n caract6risant les s o u c h e s isol6es chez l ' h o m m e . S 6 r o g r o u p a g e et l y s o t y p i e s o n t utilis6s e n r o u t i n e , les m 6 t h o d e s d e t y p a g e m o l 6 c u l a i r e ( r i b o t y p a g e , a n a l y s e d e s profils de macrorestriction d'ADN) 6tant r6serv6es aux situations 4pid6miologiques particuli6res.
Mots-cl4s : L i s t e r i a - List4riose - Surveillance - E p i d 6 m i o l o g i e .
La s u r v e i l l a n c e 6 p i d 6 m i o l o g i q u e des m a l a d i e s transmissibles est assur6e en France par diverses structures aux m i s s i o n s vari6es et c o m p l 4 m e n taires (2, 3). P o u r la list6riose, u n e surveillance r6guli6re est assur6e par le R6seau National de Sant6 Publique (RNSP) et le Centre National de R6f6rence (CNR) 1.
Suite h la mise en 6vidence de la transmission alimentaire de la list6riose en 1981 lors de l'6pid6mie d u C a n a d a (1) e t ~ la s u r v e n u e de deux nouvelles 4pid6mies en 1983 et 1985 aux USA, u n certain n o m b r e de p a y s industrialis6s (Canada, USA, France, Suisse, Belgique, D a n e m a r k , G r a n d e Bretagne) ont progressivement cr66 des syst6mes de surveillance p o u r la list6riose d o n t les princip a u x buts sont :
ROLE D U C N R D A N S LA SURVEILLANCE DE LA LISTERIOSE
l'estimation de l'incidence, l'identification des populations ~ risques, la d6tection des 4pid4mies d6s leur 6mergence ainsi que leur suivi et la participation aux investigations, la participation aux 6tudes relatives ~ la transmission alimentaire.
* Colloque Bellon, Paris, 17 mars 1995, sur "Listeria monocytogenes et sa pathologie". ** Centre National de R6f6rence des Listeria et Centre Collaborateur de I'OMS pour la list6riose d'origine alimentaire. Institut Pasteur, 28 rue du Docteur Roux - F-75724 Paris Cedex 15.
Quel que soit le syst6me de surveillance consid4r6 (RNSP ou CNR), le biologiste m6dical joue u n r61e central car seul l'isolement de L. m o n o c y t o g e n e s partir d ' u n pr416vement pathologique p e r m e t le diagnostic de list4riose (en effet, d ' u n e part sur le p l a n clinique a u c u n e s y m p t o m a t o l o g i e n ' e s t p a t h o g n o m o n i q u e de cette infection, d'autre part aucune m 6 t h o d e de r6f6rence n'est actuellement d'efficacit6 r e c o n n u e p o u r le s6rodiagnostic). Apr6s d i a g n o s t i c bact4riologique, le biologiste (1) Cette surveillance a 4t4 effectu4e par le CNR de Nantes (s4rotypie) et celui de l'Institut Pasteur (lysotypie) jusqu'en 1993 ; depuis cette date, l'Institut Pasteur assure seul cette fonction.
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informe par voie t616matique le RNSP d u cas et envoie la souche au CNR pour caract6risation. Grace aux souches qui lui sont adress6es par les biologistes, le CNR peut observer l'6volution hebdomadaire d u nombre de cas et typer les souches afin de suivre plus pr6cis6ment l'6volution g6n6rale de cette infection. La r6gularit6 de cette activit6 permet de d6tecter rapidement toute anomalie dans la distribution des cas, qu'il s'agisse d ' u n e a u g m e n t a t i o n d u n o m b r e de cas ~ distribution g6ographique locale ou nationale, caus6e par une souche u n i q u e ou au contraire par p l u s i e u r s souches diff6rentes. Les modifications ainsi mises en 6vidence font l'objet d'une information imm6diate a la DGS (Direction G6n6rale de la Sant6) et au RNSP. Parall61ement h l'6tude des souches d'origine humaine, le CNR re~oit pour typage, de la part des Laboratoires V6t6rinaires D6partementaux, des Laboratoires de la R6pression des Fraudes ou encore des laboratoires priv6s d'hygi6ne alimentaire, de tr6s nombreuses souches isol6es d'aliments ou de leur environnement, ce qui lui permet d'exercer 6galement une activit6 de surveillance dans ce domaine, activit6 qui devient primordiale en p6riode d'6pid6mie. Face ~ une augmentation du nombre de cas, le r61e du CNR diff6rera selon qu'il s'agira : • D ' u n e augmentation li6e ~ plusieurs souches, situations rares dont seulement deux observations sont actuellement publi6es (4, 5). Si l'origine alimentaire ne fait pas de doute, l'existence de plusieurs souches ne p e r m e t pas d ' i n c r i m i n e r u n aliment unique d'ofl des investigations 6pid6miologiques extrSmement complexes, ne pouvant pas, ou difficilement, aboutir ~ des mesures simples et imm6diates. • Ou d'une augmentation caus6e par une souche unique, qui traduit une source commune de contamination; c'est ainsi q u ' u n e salade de choux ("coleslow"), du lait, des fromages, un pat6, une langue de porc en gel6e et des rillettes furent successivement incrimin6s dans des 6pid6mies de list6riose (1, 6, 7, 8, 9, 10, 11). Face a une telle situation, plusieurs 6tapes vont s'imposer au CNR : - alerte de la DGS, du RNSP, de la Direction G6n6rale de l'Alimentation (DGA1) et de la Direction G6n6rale de la Concurrence, de la Consommation et de la R6pression des Fraudes (DGCCRF), - bilan des connaissances relatives a la souche
impliqu6e : revue de la litt6rature et analyse des donn6es du laboratoire : nombre de cas humains annuels depuis 1987 et liste des aliments a partir desquels cette souche a 6t6 isoMe, suivi de l'6volution de l'6pid6mie, participation h l'identification du v6hicule alimentaire en typant les souches isol6es d'aliments, caract6risation de la souche 6pid6mique et comparaison avec les souches responsables des pr6c6dentes 6pid6mies. Quel que soit le r61e consid6r6, surveillance "en routine" ou au contraire investigations en p6riode 6pid6mique, les activit6s d u CNR s'articulent toujours autour des r6sultats du typage des souches.
METHODES DE TYPAGE DE L. M O N O C Y T O G E N E S Si le premier syst6me de typage date de 1940 avec la s6rotypie, il convient de remarquer que le d6veloppement r6cent des m6thodes de typage mol6culaire depuis cinq ans entraine u n e v6ritable r6volution dans ce domaine, qu'il s'agisse de Listeria ou de tr6s nombreuses autres bact6ries impliqu6es en pathologie humaine. Mais il convient de souligner que si les traditionnelles m6thodes de typage ph6notypique sont rapides, simples et peu cofiteuses, en revanche les m6thodes de typage mol6culaire n6cessitent en g6n6ral u n mat6riel plus sophistiqu6, sont parfois plus longues et sont toujours beaucoup plus on6reuses. La surveillance de la list6riose et des aliments contamin6s par Listeria n6cessite l'6tude de plusieurs milliers de souches chaque ann6e. Face u n tel nombre, le microbiologiste a besoin de m6thodes simples, rapides, peu on6reuses et assez discriminantes, caract6ristiques auxquelles r6pondent la s6rotypie et la lysotypie. En revanche, face une situation 6pid6miologique particuli6re, qu'il s'agisse d ' u n cas sporadique d'origine alimentaire, d'une contamination nosocomiale ou encore d'une 6pid6mie, il est d6sormais n6cessaire d'utiliser au moins u n typage mol6culaire afin de confirmer les r6sultats ph6notypiques et de caract6riser plus compl6tement les souches.
M~thodes de typage ph6notypique P e n d a n t quatre ~ cinq d6cennies, la caract6risation des souches de L. monocytogenes a 6t6 limit6e la s6rotypie (12). En raison de la difficult6 de la 178
m6thode, bas6e sur l'6tude de la structure antig6nique qui comprend pour cette bact6rie 15 antig6nes somatiques et 5 antig6nes flagellaires dont les associations d6finissent 13 s6rovars, celle-ci n'est g6n6ralement assur6e que par un laboratoire par pays. Cette caract6risation est internationalem e n t utilis6e et reconnue. Particuli6rement utile p o u r u n e premi6re approche, elle est toutefois limit6e par u n faible pouvoir discriminant dans la mesure oh seulement trois s6rovars sont essentiellement rencontr6s chez l ' h o m m e : 1/2a, 1/2b et 4b. Chez l'homme, l'analyse des s6rovars montre que le s6rovar 4b est tr6s s o u v e n t p r 6 d o m i n a n t en France, repr6sentant annuellement entre 50 et 65 % des cas. Une r6partition similaire est 6galement observ6e dans de nombreux pays d'Europe, mais une 16g6re pr6dominance du s6rogroupe 1/2 est en revanche not6e sur le continent Nord-Am6ricain (13, 14). I1 convient d'ajouter que, exception faite de l'6pid6mie de Halle en 1966-67, toutes les autres 6pid6mies majeures de list6riose ont 6t6 caus6es par des souches s6rovar 4b (1, 6, 8, 9, 10, 15). La distribution des s6rovars est en revanche tr6s diff6rente pour les souches isol6es d'aliments oh les souches du s6rogroupe 1 / 2 (1 / 2a, 1 / 2b et m 6 m e 1/2c) repr6sentent la majeure partie des souches isol6es (16, 17, 18, 19, 20) et cette observation est valable pour de tr6s nombreux pays. En d6pit d ' u n e telle r6partition, aucune relation entre la virulence et le s6rovar n'a p u 6tre mise en 6vidence (21). Un syst6me de lysotypie, bas6 sur l'utilisation de 26 phages de lysog6nie, a progressivement 6t6 mis au point depuis une quinzaine d'ann6es dans le but de subdiviser les souches d ' u n m6me s6rovar (22, 23). Afin d'assurer la stabilit6 d u syst6me, cette m6thode n'est pratiqu6e que dans 6 laboratoires dans le monde. La lysotypie a 6t6 particuli6rement utile dans l'investigation des 6pid6mies, en m o n t r a n t que la plupart des souches isol6es chez l ' h o m m e en p6riode 6pid6mique appartenait au m ~ m e lysovar, ce qui sugg6rait u n e source c o m m u n e de contamination. Et ceci fut observ6 et d6montr6 lors des 6pid6mies du Canada en 1981 (1), de Boston en 1983 (8), de Californie en 1985 (10), de Suisse en 1983-87 (6), de Grande Bretagne en 1988-1989 (11) et plus r6cemment en France en 1992 et 1993 (7, 9).
M4thodes de typage mol4culaire Si les m6thodes p h 6 n o t y p i q u e s sont tout a fait appropri6es au screening de tr6s grands nombres de souches, il convient en revanche de caract6riser plus finement les souches isol6es lors de situations 6pid6miologiques particuli6res. Au fur et ~ mesure de leur description, les m6thodes de typage mol6culaire ont 6t6 i m m 6 d i a t e m e n t appliqu6es L. monocytogenes en raison des probl6mes 6pid6miologiques pos6s par la list6riose. Les principales m6thodes utilis6es sont bas6es : • Sur la caract&isation des protdines : il s'agit essentiellement de l'analyse des profils d'isoenzymes mise au point d6s 1989 (24, 25). Sur la base des travaux publi6s, cette m6thode met en 6vidence deux groupes, l'un constitu6 par les souches s6rovar 4b et 1/2b, l'autre par les souches 1/2a et 1/2c. Une s u b d i v i s i o n tr6s fine ~ l'int6rieur de ces deux g r a n d s g r o u p e s p e r m e t de d6finir au moins 45 61ectrophor6types pour L. monocytogenes (25). • Sur la caractdrisation de I ' A D N :
- Ribotypage : deux sondes ont 6t6 utilis6es pour L. monocytogenes [pBA2 constitu6e des g6nes codant pour I'ARNr 16S de Bacillus subtilis (26), et pKK3535 constitu6e des g6nes codant pour I'ARNr 16S et 23S de Escherichia coli (27, 28)]. Avec pBA2, deux groupes 6mergent au sein de L. monocytogenes, l'un regroupe 89 % de souches du s6rovar 4b et 64 % de souches d'origine humaine, tandis que l'autre rassemble 48 % de souches du s6rogroupe 1/2 et 42 % de souches isol6es d'aliments ou de leur environnement (26). L~ encore, aucune relation entre la virulence et le ribovar n'a pu ~tre mise en 6vidence (21). Profils de restriction d ' A D N avec des enzymes g6n6rant de nombreux fragments de restriction et s6paration de ces fragments par 61ectrophor6se conventionnelle : cette m6thode, appliqu6e notamment aux souches de l'6pid6mie de Suisse et du Canada, a confirm~ dans u n cas c o m m e dans l'autre l'identit6 des souches isol6es durant une m~me 6pid6mie (29). - Profils de restriction d ' A D N avec des enzymes ,g6n6rant peu de fragments de restriction et s6paration de ces fragments de haut poids mol6culaire par 61ectrophor6se en c h a m p puls6 : dans l'6tat actuel des r6sultats publi6s, cette m6thode apparait comme la plus discriminante. Uutilisation de
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trois e n z y m e s , ApaI, Sinai et NotI, p e r m e t de d6finir plus de 70 combinaisons au sein de L. monocytogenes (30, 31, 32).
ainsi que le r e n f o r c e m e n t des contr61es dans l ' e n s e m b l e des industries agro-alimentaires (DGA1) a 6t6 i m m d d i a t e m e n t mis en place (35, 36, 37).
RAPD ("Random Amplification of Polymorphic D N A ' ) : n o u v e l l e m e n t ddcrite, cette m d t h o d e apparait p r o m e t t e u s e p o u r le gain notable de t e m p s que l'utilisation de la PCR (Polymerase Chain Reaction) apporte et pourrait vraisemblablement remplacer la lysotypie lorsque les probl6mes de reproductibilit6 seront p l e i n e m e n t maitrisds et que le prix de la Taq polymdrase sera moins prohibitif (33). Comparaison des mdthodes
Les m6thodes de typage de L. monocytogenes 6tant utilis6es dans de nombreux pays, et leur nombre augmentant r6guli6rement depuis l'introduction des mdthodes mol6culaires, une 6tude multicentrique internationale a 6t6 entreprise sur l'initiative de I'OMS (Unit6 de Sdcurit6 Alimentaire) afin d'dvaluer ces mdthodes, de proposer une standardisation de leur protocole et de d6finir une nomenclature des vari6t6s observ6es p o u r c h a c u n e d ' e n t r e elles. Cette 6tape de s t a n d a r d i s a t i o n s'impose en effet face a la diversit6 mdthodologique qui s'est progressivement install6e depuis environ 5 ans. U6tape ult6rieure sera l'instauration d ' u n contr61e de qualit6 entre laboratoires n a t i o n a u x charg6s de la surveillance de la list6riose.
ROLE DE LA MICROBIOLOGIE D A N S LA SURVEILLANCE DE LA LISTERIOSE : EXEMPLES DES EPIDEMIES DE FRANCE EN 1992 ET 1993 Epiddmie de 1992
La surveillance des souches isol6es de patients par sdrotypie et lysotypie a permis en mai 1992 de d6tecter u n e a u g m e n t a t i o n du n o m b r e de cas causds par u n e souche sdrovar 4b et lysovar 2389 / 2425 / 3274 / 2671 / 47 / 108 / 340 et d' alerter la DGS et le RNSP (34, 35). Un dispositif d'investigations tr6s complet bas6 sur une enqu~te cas-tdmoin (DGS et RNSP), la recherche de Listeria dans les aliments pr61evds dans le rdfrig6rateur des patients (DGA1) et dans les m a g a s i n s off les patients avaient l'habitude de s'approvisionner (DGCCRF)
Cette 6piddmie a comport6 279 cas (1/3 des cas 6taier~t des formes maternelles, foetales ou ndonatales et 2/3 des formes de l'adulte), dispersals dans 81 ddpartements (les incidences les plus fortes 6tant observdes dans le Limousin et en Alsace). Le v6hicule alimentaire majeur fut u n e l a n g u e de porc en gelde, qui est intervenue soit directement, soit indirectement par l'intermddiaire de contaminations croisdes dans les stands de vente a la coupe. Les investigations relatives ~ cette 6piddmie furent particuli6rement difficiles en raison de la complexit6 lide aux contaminations croisdes des produits de charcuterie au stade de la vente au d6tail : la souche 6pid6mique a 6t6 progressivem e n t ddtectde sur des p r o d u i t s de charcuterie vari6s et c'est sur la base de ces rdsultats que la d e u x i 6 m e @ape de l'enqu~te cas-tdmoins a p u identifier pr6cisdment le vdhicule de cette 6piddmie. Le CNR de l'Institut Pasteur a regu en consdq u e n c e plus de 15.000 souches en 7 mois. Le screening en vue de rechercher la souche 6piddm i q u e a 6t6 r6alis6 avec le s6rogroupage et la lysotypie, cette derni6re m 6 t h o d e p e r m e t t a n t d'assurer h moindre frais et dans u n d61ai de 48 h cette d6tection pour u n nombre aussi important de souches. Toutefois, si la lysotypie s'av6re satisfaisante p o u r u n screening, l'6tude des souches 6piddmiques a 6t6 parall61ement poursuivie par la ddtermination des pulsovars (30, 38). La caract6risation de 278 souches d ' o r i g i n e h u m a i n e a montr6 que 89 % des souches appartenaient a la m ~ m e c o m b i n a i s o n de profils confirmant l'6mergence brutale d ' u n clone responsable de l'6piddmie. La m6me 6tude faite sur les souches d'origine alimentaire a permis d'identifier avec prdcision les aliments contamin6s par ce clone. Le ribotypage (rdsultats non publids) effectual sur 108 souches 6piddmiques a confirm6 6gal e m e n t l'identit6 de ces souches. De tous ces rdsultats de typage (s6rotypie, lysotypie, pulsovars et ribovars), il apparait que cette souches parrage u n e tr6s g r a n d e parent6 avec les souches responsables des 6pid6mies de Californie et de Suisse (32).
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Epid~mie de 1993 Trente-huit cas dus h u n e m ~ m e souche (s6rogroupe 4, lysovar 2671/108/312) ont 6t6 mis en 6vidence entre juin et octobre 1993, principalement localis6s dans la moiti6 ouest de la France et constitu6s pour 80 % de formes foeto-maternelles (7). Uenqu~te cas-t6moins a permis l'identification tr6s rapide du v6hicule alimentaire de cette bouff6e : il s'agissait de rillettes. La souche 6pid6mique a 6t6 u l t 6 r i e u r e m e n t isol6e a partir de pots de rillettes pr61ev6s chez des patients 6pid6miques, rapport6s par des consommateurs ainsi que des pots retir6s de la vente, confirmant le bien-fond6 des mesures prises sur la base de l'analyse statistique de l'enqu~te cas-t6moins.
les stands t~ la coupe ont 6t6 mis en 6vidence par l'enqu~te cas-t6moin ~ la fin de l'6pid6mie. - Enfin, si la souche responsable de l'6pid6mie de 1992 6tait bien connue pour avoir provoqu6e des 6pid6mies ant6rieures, en revanche celle de 1993 6tait d6nu6e de toute histoire. Pour ces deux 6pid6mies, comme pour les autres 6pid6mies, le v6hicule 6tait u n aliment ~ risque en mati6re de Listeria, c'est-~-dire : des aliments consomm6s en l'6tat, dont la composition permet la croissance de la bact6rie, conserv6s u n certain temps h temp6rature r6frig6r6e, fortement contamin6s (>10 2 Listeria/gramme), et qui plus est par une souche du s6rogroupe 4.
Comparaison des deux 6pid~mies
CONCLUSION
U6tude de ces deux 6pid6mies d6montre la n6cessit6 d ' u n syst6me de surveillance impliquant le typage syst6matique des souches responsables des cas h u m a i n s et d ' u n dispositif d'investigation des cas tr6s performant afin de d6tecter rapidement le v6hicule alimentaire lors d ' u n e 6pid6mie. De ces deux 616ments d6pend la rapidit6 des interventions permettant d'arr~ter l'6pid6mie. I1 est int6ressant de constater combien ces deux 6pisodes 6pid6miques diff6rent globalement : - Ualerte fut plus pr6coce en 1993 en raison de la tr6s grande raret6 de la souche. La r6partition g 6 o g r a p h i q u e des cas 6pid6miques 6tait diffuse, mais les cas 6taient plus nombreux dans le Centre et l'Est en 1992 tandis qu'ils 6taient localis6s essentiellement dans l'Ouest en 1993. Les formes foeto-maternelles ne constituaient que 33 % des cas en 1992 contre 80 % en 1993; cette observation peut-elle laisser s u p p o s e r que certaines souches seraient plus sp6cifiques de certaines formes cliniques ? Uenqu~te cas-t6moin a permis l'identification pr6cise tr6s rapide de l'aliment responsable en 1993, d ' o 6 une pr6vention d'embl6e sp6cifique (marque divulgu6e), la caract6risation des souches isol6es de cet aliment intervenant secondairement en confirmation; au contraire, en 1992, les premiers r6sulthts furent microbiologiques, d6montrant une grande vari6t6 de produits de charcuterie contamin6s par la souche 6pid6mique, d ' o 6 une pr6v e n t i o n m o i n s sp6cifique p u i s q u e le v6hicule maieur et le r61e des contaminations crois6es dans
Le syst6me de surveillance bas6 sur l'6tude des souches adress6es au CNR par les biologistes ne permet certes pas u n recensement exhaustif des cas (811 cas recens6s par u n questionnaire adress6 aux biologistes en 1986 contre 335 souches revues au CNR la m~me ann6e) (16, 39). Toutefois, la surveillance de la list6riose bas6e sur le typage des souches d'origine h u m a i n e a permis d'accumuler depuis quelques ann6es u n ensemble d'informations compl6tes et vari6es en ce qui concerne l'6pid6miologie de cette infection chez l'homme, qu'il s'agisse de l'incidence annuelle (16, 17, 18, 19, 20, 40), de l'analyse de bouff6es 6pid6miques (4, 41) ou encore d ' u n e 6pid6mie (7, 9). Par ailleurs, ce syst6me est assez sensible pour d6tecter les ph6nom6nes a n o r m a u x et participer ensuite h leur maitrise comme cela fut r6cemment d6montr6 lors des 6pid6mies de 1992 et 1993 en France. Les activit6s du CNR sont essentiellement bas6es sur la caract6risation des souches qui lui sont adress6es par les biologistes. Les m 6 t h o d e s de typage de L. monocytogenes ont certes beaucoup 6volu6 d u r a n t les cinq derni6res ann6es avec l'introduction d u typage mol6culaire, mais il n'en d e m e u r e pas moins que les m6thodes ph6notypiques conservent aujourd'hui encore une grande actualit6, permettant ~ u n laboratoire de pouvoir faire face sans d61ai au typage d ' u n grand nombre ,de souches lors d'une situation 6pid6mique exceptionnelle. N6anmoins, tout permet de penser que ces m 6 t h o d e s p o u r r a i e n t disparaltre dans u n proche avenir avec le d6veloppement de m6thodes utilisant la PCR.
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SUMMARY
S U R V E I L L A N C E OF H U M A N L I S T E R I O S I S I N F R A N C E : THE ROLE OF THE N A T I O N A L REFERENCE CENTER
Surveillance of listeriosis is mainly based on the characterization of strains isolated from patients. Serotyping and phage-typing are used in routine and molecular typing methods (ribotyping, DNA macrorestriction patterns analysis) are restricted to special epidemiological situations. Key-words : L i s t e r i a
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Listeriosis - Surveillance - Epidemiology.
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