Syndrome d’apnées obstructives du sommeil, hypertension artérielle et artère

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Hypertensions arte´ rielles particulie` res

Dossier thématique

Mise au point

Presse Med. 2009; 38: 627–632 ß 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Syndrome d’apnées obstructives du sommeil, hypertension artérielle et artère Jean-Philippe Baguet1,2, Gilles Barone-Rochette1, Jean-Louis Pépin3,4

1. Clinique de cardiologie, CHU de Grenoble, F-38043 Grenoble Cedex 09, France 2. Laboratoire de radiopharmaceutiques biocliniques, INSERM U877, Université Joseph Fourier, F-38041 Grenoble Cedex 9, France 3. Laboratoire du sommeil, EFCR, CHU de Grenoble, F-38043 Grenoble Cedex 09, France 4. Laboratoire HP2 (Hypoxie : physiopathologie), INSERM ERI 17, Université Joseph Fourier, F-38041 Grenoble Cedex 9, France

Correspondance : Jean-Philippe Baguet, Clinique de cardiologie, CHU de Grenoble, BP 217, F-38043 Grenoble Cedex 09, France. [email protected]

Key points Obstructive sleep apnea syndrome, hypertension and artery Obstructive sleep apnea syndrome (OSAS), due to upper airway collapse, is frequent but still underestimated. The dose-response relation between OSAS and hypertension (HTN) is now well established. Logically, therefore, blood pressure must be tested in every apneic patient, if necessary by ambulatory blood pressure monitoring. Multiple mechanisms explain this relation, most importantly the increase in sympathetic activity during apnea episodes. OSAS-related hypertension has several characteristics: it is highly prevalent, predominantly diastolic and nocturnal, and frequently affects non-dippers; and the HTN tends to be resistant to treatment. OSAS promotes the formation of arterial lesions (parietal thickening of the carotid artery, increased aortic stiffness, and endothelial dysfunction); the more severe the OSAS, the more severe the lesions. The beneficial effects on blood pressure of continuous positive airway pressure (CPAP), the benchmark treatment for OSAS, are still debated but appear to be significant for untreated or

tome 38 > n84 > avril 2009 doi: 10.1016/j.lpm.2008.10.018

Points essentiels Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS), dû à un collapus des voies aériennes supérieures, est une maladie fréquente mais encore sous-estimée. La relation entre SAOS et hypertension artérielle (HTA) est maintenant bien établie. Elle est de type « dose-réponse ». Il en découle qu’une HTA doit être dépistée chez tout patient apnéique, au besoin à l’aide de la mesure ambulatoire de la pression artérielle. Les mécanismes expliquant cette relation sont multiples, le principal étant l’augmentation de l’activité sympathique au cours des apnées. L’HTA associée au SAOS a plusieurs caractéristiques : prévalence élevée, prédominance diastolique et nocturne, statut non dipper fréquent et HTA volontiers résistante au traitement. Le SAOS favorise la constitution de lésions artérielles (épaississement pariétal carotidien, augmentation de la rigidité aortique, dysfonction endothéliale) et ce d’autant plus qu’il est sévère. L’effet bénéfique de la pression positive continue (PPC), traitement de référence du SAOS, sur la pression artérielle est encore discuté mais semble significatif en cas d’HTA non traitée ou réfractaire, en présence d’un SAOS sévère ou si l’observance à la PPC est satisfaisante. Ce traitement semble également prometteur pour diminuer les lésions artérielles liées au SAOS.

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Disponible sur internet le : 12 février 2009

J-P Baguet, G Barone-Rochette, J-L Pépin

refractory hypertension, for severe OSAS, and when CPAP compliance is good. It also seems promising for the reduction of arterial lesions linked to OSAS.

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es relations entre hypertension artérielle (HTA) et maladies cardiovasculaires, aussi bien en termes de morbidité que de mortalité, ne sont plus à démontrer. Elles s’expliquent avant tout par les modifications artérielles liées à l’HTA. La mise en évidence d’une relation entre HTA et syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) est plus récente. On sait désormais que le lien entre ces deux pathologies est de type « doseréponse » : plus le SAOS est sévère, plus la prévalence de l’HTA et le niveau tensionnel sont importants. Bien que le SAOS ne soit pas encore clairement reconnu par les sociétés savantes comme un facteur de risque cardiovasculaire indépendant, de nombreuses études ont montré qu’il favorisait la survenue d’événements cardiaques et cérébraux. Comme pour l’HTA, les conséquences cardiovasculaires du SAOS semblent passer avant tout par la constitution de lésions artérielles.

Syndrome d’apnées obstructives du sommeil : de l’épidémiologie au traitement Le SAOS est une maladie fréquente touchant environ 5 % de la population générale, surtout les hommes [1]. L’aspect clinique habituel associe 4 symptômes principaux :  hypersomnolence diurne ;  re ´ veils nocturnes fre´quents avec nycthurie ;  asthe ´ nie matinale ;  ronflement important. Les facteurs favorisant le SAOS sont non seulement l’âge, l’obésité, le tabagisme et la consommation d’alcool mais aussi,

Glossaire EIM HTA IAH MAPA PA PAD PPC ROS RR SaO2 SAOS

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VEGF VOP

épaisseur intima-média hypertension artérielle index apnées-hypopnées mesure ambulatoire de la pression artérielle pression artérielle pression artérielle diastolique pression positive continue radicaux oxygénés risque relatif saturation en oxygène syndrome d’apnées obstructives du sommeil vascular endothelial growth factor vitesse de l’onde de pouls

et surtout, les anomalies anatomiques et/ou fonctionnelles des voies aériennes supérieures. Le SAOS est aujourd’hui un véritable problème de Santé publique non seulement du fait de sa prévalence élevée mais également de la somnolence, de la morbidité cognitive et de la morbimortalité cardiovasculaire qui lui sont attribuées [2]. Lorsqu’un SAOS est supecté, un questionnaire validé (Epworth ou Berlin) doit être utilisé. La polysomnographie nocturne est l’examen de référence pour le diagnostic de SAOS mais une polygraphie de ventilation peut également être utilisée. Le nombre d’apnées (arrêt complet du flux aérien) et d’hypopnées (réduction de plus de 50 % du flux inspiratoire ou baisse d’au moins 30 % de ce flux avec une désaturation de plus de 3 % et/ ou des micro-éveils obstructifs) durant plus de 10 secondes par heure d’enregistrement peut être calculé [index d’apnéeshypopnées (IAH)]. Les apnées sont obstructives si l’effort respiratoire persiste. En utilisant les méthodes diagnostiques sensibles actuelles, le seuil de 15 événements par heure d’enregistrement est fixé pour poser le diagnostic de SAOS. Le traitement de référence du SAOS est la pression positive continue (PPC) par voie nasale. Elle diminue de façon significative non seulement le nombre et la sévérité des événements respiratoires mais aussi les complications cardiovasculaires, en particulier coronaires [2].

Syndrome d’apnées obstructives du sommeil à l’origine de l’hypertension artérielle La relation causale du SAOS vis-à-vis de l’HTA est maintenant bien établie malgré l’existence de facteurs confondants, parmi lesquels l’obésité et notamment l’obésité viscérale.

Aspects physiopathologiques (figure 1) Les variations de la pression artérielle (PA) au cours de la nuit et les modifications aiguës survenant au cours des apnées sont bien décrites chez les patients apnéiques. La PA atteint son niveau le plus bas au début de l’apnée puis augmente progressivement pour atteindre son niveau maximum quelques secondes après la reprise ventilatoire, au moment de l’éveil qui correspond également à la pression oesophagienne la moins négative et à la saturation en oxygène (SaO2) minimale. Le principal mécanisme à l’origine de l’HTA chez les patients apnéiques est l’augmentation des résistances vasculaires périphériques essentiellement médiée par une vasoconstriction d’origine sympathique. Cet état d’hyperadrénergie est secondaire non seulement aux épisodes hypoxémiques mais tome 38 > n84 > avril 2009

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Aspects cliniques

Figure 1 Mécanismes impliqués dans la genèse de l’hypertension artérielle au cours du syndrome d’apnées obstructives du sommeil

également à l’hypercapnie fréquement présente. La démonstration de cette hyperactivité sympathique a été faite par microneurographie au niveau des nerfs sympathiques à destinée musculaire et par le dosage des catécholamines plasmatiques ou urinaires. Il est probable que la répétition des éveils et des efforts respiratoires anormaux contibuent également à cette élévation chronique du tonus adrénergique. Une élévation des concentrations plasmatiques d’aldostérone a également été trouvée chez les patients ayant un SAOS [3]. Cet hyperaldostéronisme est la conséquence de l’activation du système rénine-angiotensine-aldostérone du fait de l’hyperactivité sympathique et de l’obésité abdominale souvent présente.

La prévalence du SAOS chez les patients hypertendus est au moins 3 fois plus importante que celle des sujets normotendus. Si l’on stratifie précisément les données en fonction de l’indice de masse corporelle, il existe une relation positive significative de type « dose-réponse » entre l’IAH et le niveau de PA [5]. Cette relation est beaucoup plus nette chez les sujets de moins de 50-60 ans que chez les sujets plus âgés. L’HTA est très largement méconnue au cours du SAOS. Elle doit systématiquement être cherchée par la mesure clinique de la PA qui doit respecter les conditions de mesure recommandées [6]. Plus de la moitié des patients apnéiques sont hypertendus mais la prévalence dépend de plusieurs éléments dont la méthode de mesure de PA utilisée. Ainsi, 42 % des patients apnéiques non connus comme être hypertendus ont une HTA par la mesure clinique contre 76 % avec la mesure ambulatoire de la PA sur 24 heures (MAPA) [7]. Ceci explique l’indication préférentielle de la MAPA comme mode d’évaluation de la PA chez les patients porteurs d’un SAOS [8]. Outre sa prévalence élevée, l’HTA du SAOS a plusieurs caractéristiques (encadré 1). Il n’est pas surprenant qu’elle soit à prédominance nocturne compte tenu du fait que les apnées surviennent essentiellement durant le sommeil de nuit [7]. Une des conséquences de cette HTA nocturne est la présence fréquente d’un profil non dipper (chute de PA la nuit inférieure à 10 %) ou d’une baisse tensionnelle atténuée chez le sujet apnéique [7,9]. De ce fait, l’existence d’un profil non dipper sur la MAPA (figure 2) doit faire évoquer la possibilité d’un SAOS. Une autre caractéristique, moins connue mais bien démontrée, est une élévation préférentielle de la PA diastolique (PAD) au cours du SAOS [7,10]. Ainsi, une HTA à prédominance diastolique voire diastolique isolée est fréquente (environ 75 %), surtout en MAPA, chez les patients apnéiques et ce d’autant plus que le SAOS est sévère [7]. Le mécanisme principal expliquant cette particularité est l’augmentation des résistances vasculaires périphériques du fait de l’hyperactivité sympathique. La prévalence du SAOS est élevée en cas d’HTA réfractaire, de l’ordre de 75 % [11]. L’ensemble des

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Aspects épidémiologiques

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Encadre´ 1 Caracte´ristiques de l’hypertension arte´rielle associe´e au syndrome d’apne´es obstructives du sommeil 

Prévalence élevée



HTA à prédominance nocturne



Profil non dipper fréquent



HTA à prédominance diastolique



HTA plus souvent résistante au traitement

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L’augmentation du risque relatif (RR) d’HTA en présence d’un SAOS a été démontrée en population générale [4]. Dans la Sleep heart health study, et pour un IAH > 30/h, ce RR est situé entre 1,37 et 2,27 selon les variables ajustées utilisées [4]. Dans la Wisconsin cohort study (suivi à 4 et 8 ans), lorsque l’IAH initial est compris entre 0,1 et 5, le RR d’HTA est de 1,42 alors qu’il est de 2,89 lorsque l’IAH est supérieur ou égal à 15 [5]. Ces études et d’autres encore ont amené à la reconnaissance du SAOS comme cause d’HTA à évoquer chez tout patient ayant une PA anormalement élevée [6].

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modifications structurales et fonctionnelles qu’il est possible d’appréhender par des explorations non invasives spécifiques.

Modifications de la paroi carotidienne au cours du syndrome d’apnées obstructives du sommeil

Figure 2 Mesure ambulatoire de la pression artérielle sur 24 heures montrant une hypertension artérielle systolique, nocturne avec phénomène de non dipping chez un patient apnéique

données de la littérature permet désormais de retenir le SAOS comme une des étiologies à systématiquement évoquer devant une HTA réfractaire [6].

Retentissement artériel du syndrome d’apnées obstructives du sommeil

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Les variations hémodynamiques observées au cours du SAOS sont le résultat de l’action de 4 stimuli :  l’hypoxe ´ mie ;  l’hypercapnie ;  les modifications de volume pulmonaire ou de pression intrathoracique ;  les micro-e ´ veils. Il en découle une augmentation du stress oxydatif avec production de radicaux oxygénés (ROS), une augmentation de la production de molécules d’adhésion, une activation des leucocytes, une inflammation systémique, une augmentation des concentrations plasmatiques du vascular endothelial growth factor (VEGF) et de facteurs de la coagulation. Récemment, Faure et al. ont montré que l’altération des propriétés antioxydantes de l’albumine au cours du SAOS était plus sévère s’il existait un nombre important d’événements respiratoires [12]. L’ensemble de ces mécanismes conduit à la constitution d’une dysfonction endothéliale et de lésions athéroscléreuses. L’athérosclérose est une maladie généralisée qui est à l’origine de la majorité des événements cardiovasculaires. Le problème majeur lorsque l’on veut étudier le retentissement vasculaire du SAOS est la présence quasi permanente de facteurs confondants pour l’athérosclérose dont les principaux sont l’HTA, l’obésité abdominale et les anomalies glucidiques et lipidiques. Il est malgré tout possible, grâce à des schémas d’étude et à des tests statistiques adaptés, d’analyser le rôle du SAOS dans la constitution d’anomalies pariétales artérielles. Le remodelage artériel lié à l’athérosclérose se manifeste par des

Les modifications de la paroi des artères carotides sont bien analysables par échographie de haute résolution. Il s’agit avant tout de la présence de plaques, plus ou moins calcifiées, et/ou d’un épaississement pariétal, appelé augmentation de l’épaisseur intima-média (EIM). Pour certains, cette dernière anomalie fait le lit de l’athérosclérose alors que pour d’autres elle représente déjà une forme d’athérosclérose. La présence d’une EIM augmentée ou de plaques au niveau carotidien représente un marqueur préclinique d’athérosclérose, bien étudié tant sur le plan épidémiologique que clinique. Ainsi, il est démontré qu’une augmentation de l’EIM carotide est associée à un risque accru de coronaropathie et d’accidents cérébrovasculaires [13]. L’EIM carotide a été étudiée par plusieurs auteurs chez des patients ayant un SAOS. La première étude réalisée dans ce domaine a analysé ce paramètre chez des apnéiques sévères et des sujets témoins [14]. Elle a permis de mettre en évidence des valeurs plus élevées d’EIM en présence d’un SAOS. Par la suite, plusieurs études ont trouvé un résultat similaire. La plupart d’entre elles ont de plus montré que les valeurs d’EIM étaient d’autant plus élevées que le SAOS était sévère [15]. De manière intéressante, Minoguchi et al. ont trouvé au cours du SAOS une corrélation positive entre l’EIM carotide et les paramètres inflammatoires [16]. Dans cette dernière étude, l’EIM était plus élevée chez les patients apnéiques que chez les patients obèses non apnéiques. Chez des patients apnéiques sans maladie cardiovasculaire ou HTA connue, une relation entre la valeur de l’EIM de la carotide primitive et le degré de désaturation nocturne en oxygène a été trouvée [17]. Une étude récente de grande envergure (985 sujets issus de la Sleep heart health study) n’a cependant pas confirmé cette relation, après ajustement sur les facteurs de risque cardiovasculaire conventionnels [18]. Toutefois, la majorité des sujets de cette dernière étude n’avait pas de SAOS et, lorsque le SAOS était présent, il était peu sévère chez la plupart des patients. La présence de plaques carotides est un prédicteur encore plus fort de coronaropathie qu’un simple épaissisement pariétal [13]. Comme l’augmentation de l’EIM, ce paramètre a été étudié au cours du SAOS. La présence de plaques est plus fréquente au cours du SAOS, surtout quand celui-ci est sévère, avec une relation indépendante entre plaques et paramètres respiratoires [17,19]. Le caractère indépendant de cette relation n’a cependant pas été retrouvé par certains auteurs [15,18]. Il reste donc à attendre les résultats d’une probable future méta-analyse ou, mieux, d’une étude de plus grande envergure menée chez des patients apnéiques bien caractérisés sur le plan de leurs facteurs de risque cardiovasculaire et comparés à un groupe témoin apparié. tome 38 > n84 > avril 2009

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L’examen de référence pour étudier la rigidité artérielle est la mesure de la vitesse de l’onde de pouls (VOP), le plus souvent carotidofémoral. Il a été démontré que ce paramètre est un prédicteur indépendant de coronaropathie et d’événements cardiovasculaires [20,21]. Peu d’études se sont intéressées à l’analyse de la rigidité artérielle, en particulier aortique, au cours du SAOS. Drager et al. ont montré que la VOP était plus élevée chez les patients apnéiques [22]. Dans cette étude, la VOP était d’autant plus grande que le SAOS était sévère, avec une corrélation indépendante entre la VOP et l’IAH. Protogerou et al. ont également récemment montré que le niveau de rigidité aortique dépendait de la sévérité du SAOS et ce de manière indépendante des facteurs de risque cardiovasculaires classiques [15]. Tsioufis et al. ont trouvé cette même relation indépendante entre VOP carotidofémorale et degré de sévérité du SAOS dans une population spécifique puisque constituée uniquement de patients hypertendus grade 1-2 [23].

Syndrome d’apnées obstructives du sommeil et dysfonction endothéliale Plusieurs études sont en faveur de l’existence d’une dysfonction endothéliale au cours du SAOS. Dans une très large cohorte de patients apnéiques issue de la Cardiovascular health study, le niveau de vasodilatation humérale flux-médiée est corrélé aux indices respiratoires, essentiellement chez les sujets hypertendus et chez ceux âgés de moins de 80 ans [24]. Cette dysfonction endothéliale observée au cours du SAOS est le reflet non seulement des facteurs de risque cardiovasculaire fréquemment associés au SAOS mais aussi de l’athérosclérose préclinique ou clinique.

Effets de la pression positive continue sur la pression artérielle et les anomalies vasculaires La PPC supprime les événements respiratoires, restaure une qualité de sommeil normale et fait disparaître la somnolence diurne. En normalisant la ventilation au cours du sommeil, elle supprime les salves d’hyperactivité sympathique présentes à la fin de chaque événement respiratoire et réduit les taux de catécholamines durant la veille et le sommeil [25].

Pression positive continue et variations de la pression artérielle Les résultats des études et méta-analyses publiés à ce jour suggèrent mais ne permettent pas d’affirmer un effet bénéfique de la PPC sur la PA des patients ayant un SAOS [26–28].

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En effet, la réponse tensionnelle dépend de la sévérité du SAOS, et en particulier de l’importance des désaturations nocturnes, du niveau initial de PA, de la présence ou non d’une HTA et du traitement pharmacologique de celle-ci. De plus, les résultats des études diffèrent selon les paramètres de PA analysés et leur mode d’acquisition, selon la durée du traitement par PPC et l’observance des patients à leur PPC. Les données actuelles permettent cependant d’avoir une idée sur le profil des patients apnéiques qui semblent pouvoir bénéficier le plus sur le plan tensionnel de leur traitement par PPC. Il s’agit d’hypertendus, surtout si les chiffres de PA sont très élevés et que l’HTA n’est pas traitée ou bien est réfractaire. De plus, la PPC est plus efficace sur la PA si le SAOS est sévère et lorsque la PPC est bien tolérée par le patient avec une observance d’au moins 3 heures par nuit.

Effets de la pression positive continue sur les paramètres vasculaires La PPC semble améliorer les paramètres biologiques incriminés dans la genèse de l’athérosclérose au cours du SAOS. Ceci ne veut pas dire pour autant que ce type de traitement du SAOS peut faire régresser dans tous les cas les anomalies artérielles dépistées par les explorations non invasives. L’effet de la PPC sur les lésions vasculaires n’est étudié que depuis peu de temps. Drager et al. ont retrouvé chez 12 sujets apnéiques sévères (vs 12 témoins) une baisse significative de l’EIM carotidienne et de la VOP carotidofémorale après 4 mois de traitement par PPC [29]. Dans cette étude, les PAD de jour et de nuit diminuaient significativement sous traitement actif mais ces variations n’expliquaient pas à elles seules les modifications pariétales artérielles. Une autre étude a montré une baisse significative de la VOP humérotibiale chez 17 patients apnéiques après 4 mois de traitement par PPC [30]. Plusieurs études, ayant là encore inclus chacune peu de patients, ont montré qu’un traitement par PPC allant de 4 semaines à 6 mois améliorait la fonction endothéliale évaluée par la vasodilatation NO-dépendante ou flux médiée.

Conclusion Le lien de causalité entre SAOS et HTA est bien établi. Une HTA doit être dépistée chez tout patient apnéique, au besoin à l’aide de la MAPA. Le SAOS favorise la constitution de lésions artérielles et ce d’autant plus qu’il est sévère. L’effet bénéfique de la PPC sur les chiffres de PA est encore discuté mais semble significatif en cas d’HTA non traitée ou réfractaire, en présence d’un SAOS sévère ou si l’observance à la PPC est satisfaisante. Ce traitement semble également prometteur pour diminuer les lésions artérielles liées au SAOS. Conflits d’intérêts : aucun

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