Traitement de l’hépatite chronique B

Traitement de l’hépatite chronique B

© Masson, Paris, 2004. MISE AU POINT Gastroenterol Clin Biol 2004;28:1215-1227 Traitement de l’hépatite chronique B Tarik ASSELAH, Corinne CASTELN...

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© Masson, Paris, 2004.

MISE AU POINT

Gastroenterol Clin Biol 2004;28:1215-1227

Traitement de l’hépatite chronique B

Tarik ASSELAH, Corinne CASTELNAU, Nathalie BOYER, Marie-Pierre RIPAULT, Patrick MARCELLIN Service d’Hépatologie, INSERM U481, Hôpital Beaujon, 92110 Clichy.

TABLE DES MATIÈRES

CONTENTS

OBJECTIFS DU TRAITEMENT

Treatment of chronic hepatits B Tarik ASSELAH, Corinne CASTELNAU, Nathalie BOYER, Marie-Pierre RIPAULT, Patrick MARCELLIN

• Histoire naturelle • Objectifs du traitement

(Gastroenterol Clin Biol 2004;28:1215-1227)

INDICATIONS DU TRAITEMENT

GOALS OF THERAPY • Natural history • Goals of therapy INDICATIONS FOR THERAPY • Role of liver biopsy • Predictors of response AVAILABLE TREATMENTS FOR CHRONIC HEPATITIS B • Interferon • Pegylated interferon • Lamivudine • Adefovir Dipivoxil COMBINATION THERAPY AGENTS UNDER DEVELOPMENT • Entecavir • Emtricitabine • Clevudine • Tenofovir • Telbivudine IMMUNE-MODULATORS AND THERAPEUTIC VACCINES LONG TERM EFFECT OF INTERFERON AND LAMIVUDINE OTHER THERAPEUTIC MEASURES CONCLUSION: IN CLINICAL PRACTICE

• Intérêt de la biopsie hépatique • Facteurs prédictifs de réponse LES TRAITEMENTS ACTUELLEMENT DISPONIBLES • Les interférons standards • Les interférons pégylés • La lamivudine • L’adéfovir LES ASSOCIATIONS THÉRAPEUTIQUES LES NOUVELLES MOLÉCULES • L’entécavir • L’emtricitabine • La clévudine • Le ténofovir • La telbivudine LES IMMUNO-MODULATEURS ET LES VACCINS THÉRAPEUTIQUES EFFET À LONG TERME DE L’INTERFÉRON ET DE LA LAMIVUDINE LES AUTRES MESURES THÉRAPEUTIQUES CONCLUSION : EN PRATIQUE

Les recommandations de la conférence de consensus européenne sur l’hépatite B qui s’est tenue en septembre 2002 sont disponibles sur les sites de l’EASL (www.easl.ch), de l’AFEF (http://afef.meditis.net) et de la Fédération Nationale des Pôles de Référence et Réseaux Hépatites (www.fnprrh.com). Depuis cette conférence de consensus, d’importants résultats complémentaires sont disponibles concernant les effets à long terme de la lamivudine et de l’adéfovir. Enfin, des résultats sont disponibles sur l’efficacité de l’interféron pégylé, d’associations thérapeutiques et de nouveaux anti-viraux. L’objet de cette mise au point est de résumer les résultats obtenus avec les traitements actuellement disponibles, les interférons pégylés, les combinaisons thérapeutiques, et les nouveaux antiviraux. Ces nouveaux résultats permettent d’affiner et de nuancer les conclusions de la conférence de consensus de l’EASL [1].

« The superior doctor treats when there is not yet disease. » Zhang Zhongjing (150 – 219 AD).

L‘

infection par le virus de l’hépatite B (VHB) est un problème majeur de santé publique avec environ 350 millions de porteurs chroniques de ce virus dans le monde [1-3]. L’hépatite B est la principale cause de cirrhose et de carcinome hépatocellulaire dans le monde. Trois médicaments ont actuellement l’AMM (autorisation de mise sur le marché) pour le traitement de l’hépatite chronique B : l’interféron, la lamivudine et l’adéfovir. Ces trois médicaments ont des avantages et des inconvénients. L’interféron est efficace chez une minorité de malades, et est associé à de nombreux effets secondaires qui limitent sa tolérance. La lamivudine et l’adéfovir ont une bonne tolérance mais nécessitent une administration prolongée. Cependant, l’efficacité de la lamivudine est limitée par la fréquence de l’apparition de VHB mutants résistants alors que l’adéfovir, qui a eu l’AMM plus récemment, est associé a une incidence de résistance beaucoup plus faible.

Objectifs du traitement Histoire naturelle

Tirés à part : P. MARCELLIN, Service d’Hépatologie, INSERM U481, Centre de Recherches Claude Bernard sur les Hépatites Virales, Hôpital Beaujon, 92110 Clichy. E-mail : [email protected]

L’hépatite chronique B évolue schématiquement en trois phases [3] (figure 1a). La première phase dite « tolérance

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a b c Fig. 1 – a) Histoire naturelle de l’infection chronique virale B (virus sauvage). Au cours de l’infection chronique virale B, classiquement trois phases se succèdent : — Une première phase de « tolérance immunitaire » avec des aminotransférases normales et une forte réplication virale B, — Une deuxième phase de séroconversion où la réponse immunitaire s’active avec des aminotransférases élevées et une diminution de la réplication virale B, — Une troisième phase où les aminotransférases sont normales et la charge virale basse. Au cours de cette phase des épisodes de réactivation peuvent survenir ; b) Traitement de durée limitée pour obtenir une réponse prolongée. La première stratégie thérapeutique est d’obtenir avec un traitement de durée limitée une réponse prolongée après la fin du traitement : c’est la stratégie proposée avec l’interféron qui a deux mécanismes d’action : un effet anti-viral et un effet immuno-modulateur. Le meilleur moment pour débuter un traitement par l’interféron est la deuxième phase ; c) Traitement de longue durée pour obtenir une réponse maintenue. La seconde stratégie thérapeutique est d’administrer un traitement de longue durée afin d’obtenir une réponse maintenue. C’est la stratégie utilisée avec les analogues nucléosidiques ou nucléotidiques qui ont un seul mécanisme d’action : un effet anti-viral sans effet immunomodulateur. a) Natural history of chronic hepatitis B infection (wild-type virus). During chronic hepatitis B infection there are usually three phases: — A first phase of “immune tolerance” with normal aminotransferases and high viral B replication; — A second phase of seroconversion where the immune response sets in with increased aminotransferases and a reduction of viral replication. b) Short term treatment to obtain a sustained response. The first therapeutic strategy is to obtain a sustained response after withdrawal of treatment with short term treatment: this is the strategy proposed with interferon which has two mechanisms of action: an antiviral effect and an immune modulatory effect. The best period to start treatment with interferon is during the second phase. c) Long term treatment to obtain a maintained response. The second strategy is to administer long term treatment to obtain a maintained response. This is the strategy that is used with nucleoside or nucleotide analogues that have only one mechanism of action: an antiviral effect, with no immune modulatatory effect

immunitaire » est caractérisée par une forte réplication virale (taux élevé d’ADN VHB sérique), des transaminases normales ou peu élevées et des lésions d’activité histologique minimes. À ce stade la fibrose évolue peu ou pas. Cette première phase est plus fréquente chez les malades contaminés à la naissance ou dans l’enfance ; elle est de durée variable de quelques années à plusieurs dizaines d’années. La deuxième phase dite « d’activité immunitaire » est caractérisée par une faible réplication virale (faible taux d’ADN VHB sérique), des transaminases élevées et des lésions d’activité histologique modérées à sévères. À ce stade

la fibrose évolue rapidement avec un risque élevé de constitution d’une cirrhose. Cette deuxième phase est plus fréquente chez les malades contaminés à l’age adulte ; l’évolution peut se faire d’un seul tenant ou avec des épisodes d’exacerbation qui peuvent ressembler à une hépatite aiguë B. Enfin, la troisième phase est caractérisée par une faible réplication virale et la rémission de la maladie. Cependant une réactivation peut survenir. L’objectif du traitement est de diminuer la réplication du VHB afin de diminuer l’activité de l’hépatite chronique B et ainsi de prévenir la progression de la fibrose [1-3]. L’arrêt de la progression de la fibrose permet de prévenir l’évolution vers la cirrhose et ses complications, en particulier le carcinome hépatocellulaire, ce qui devrait logiquement aboutir à une amélioration de la survie. La réponse au traitement peut être schématiquement classée en trois phases. La première phase est caractérisée par une diminution de la réplication virale, reflétée par la diminution de la charge virale (ADN VHB) ; l’activité de l’hépatite chronique dimi-

ABRÉVIATIONS : VHB : virus de l’hépatite B IFN : interféron PEG : pégylé PCR : polymerase chain reaction Ag : antigène Ac : anticorps

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médicaments actuellement disponibles. Il y a peu d’études sur les facteurs prédictifs de réponse concernant l’adéfovir. Concernant l’interféron, les chances de réponse sont meilleures durant la phase de réaction immunitaire au cours de laquelle la diminution de la réplication virale peut favoriser la clairance des hépatocytes infectés grâce à une réponse immunitaire efficace. Ainsi, la probabilité de réponse est plus élevée en cas de maladie active (transaminases élevées supérieures à 3 fois la normale, score d’activité histologique élevé supérieur ou égal à 2) avec une charge virale relativement faible (inférieure à 107 copies/mL). En revanche, la probabilité de réponse est plus faible en cas de maladie peu active (transaminases inférieures à 3 fois la normale, score d’activité histologique faible inférieur à 2) avec une charge virale relativement forte (supérieure à 107 copies/mL). En général, en dehors d’une maladie sévère, il est utile d’observer une période de surveillance de 6 à 12 mois pour apprécier l’évolution de la maladie afin de choisir le moment favorable (maladie active) pour débuter le traitement, ou pour surseoir à celui-ci si l’évolution apparaît spontanément favorable.

nue, la fibrose se stabilise et peut même régresser, mais le risque de réactivation persiste. Si l’effet anti-viral est suffisant (diminution de la charge virale en dessous de 100 000 copies d’ADN VHB par mL) et s’il est prolongé et accompagné d’une réponse immunitaire efficace avec clairance des hépatocytes infectés, une séroconversion HBe peut survenir (négativation de l’AgHBe et apparition des anticorps anti-HBe). Le risque de réactivation est alors faible. Si la réplication virale est complètement interrompue (ADN VHB non détectable dans le sérum avec une technique sensible) et si la séroconversion HBe est stable, on peut observer la négativation de l’AgHBs (avec ou sans apparition des anticorps anti-HBs). L’activité de l’hépatite chronique disparaît ainsi que le risque de réactivation. On peut distinguer deux stratégies thérapeutiques différentes : La première est d’obtenir avec un traitement de durée limitée une réponse prolongée après la fin du traitement : c’est la stratégie proposée avec l’interféron qui a deux mécanismes d’action : un effet anti-viral et un effet immuno-modulateur (figure 1b). La seconde est d’administrer un traitement de longue durée afin d’obtenir une réponse maintenue. C’est la stratégie utilisée avec les analogues nucléosidiques ou nucléotidiques qui ont un seul mécanisme d’action : un effet anti-viral sans effet immunomodulateur (figure 1c).

Le génotype pourrait être un facteur prédictif de réponse au traitement par l’IFN standard. Le génotype B semble être associé à un taux de réponse supérieur au génotype C [7]. Pour le traitement par l’interféron pégylé (IFN-PEG), le génotype A semble être associé à un taux de réponse supérieur au génotype D [8]. Le génotype ne semble pas influencer la réponse à l’adéfovir [9]. Des études sont nécessaires afin de déterminer la valeur prédictive propre du génotype concernant les différents traitements en tenant compte des facteurs confondants (origine géographique, forme d’hépatite chronique B AgHBe négatif ou AgHBe positif, source d’infection, âge au moment de l’infection, durée de l’infection, etc…).

Indications du traitement Intérêt de la biopsie hépatique Le principal facteur à prendre en compte dans l’indication du traitement est la sévérité de la maladie hépatique [1, 2]. Celle-ci est appréciée au mieux, à l’heure actuelle, par la ponction biopsie hépatique [1-5]. Celle-ci fait partie intégrante de la prise en charge du malade. En évaluant le degré d’activité (lésions de nécrose et d’inflammation) et de fibrose, elle permet d’apprécier le pronostic. Dans l’hépatite chronique B (encore plus que dans l’hépatite chronique C), il existe une mauvaise corrélation entre l’activité sérique des transaminases et le degré des lésions hépatiques, surtout chez les malades ayant une hépatite chronique AgHBe négatif. Les limites de la biopsie hépatique sont d’une part la possibilité de sous estimer les lésions du fait du biais d’échantillonnage, et d’autre part sa morbidité avec la douleur, et le risque exceptionnel de complications sévères (3 pour 1 000 avec un risque de décès estimé entre 0 et 3 pour 10 000) [4, 5]. Une étude récente a été réalisée concernant la place des marqueurs sériques de fibrose (fibrotest) dans l’hépatite chronique B [6]. Cette étude montre que ce test permet de bien distinguer les malades ayant une fibrose minime à modérée (F0-F2) de ceux avec fibrose avancée (F3-F4) (score METAVIR). Par contre ce test ne permet pas de bien discriminer d’une part le stade F1 du stade F2, et d’autre part le stade F3 du stade F4. D’autres travaux sont nécessaires pour évaluer différents marqueurs sériques de fibrose dans différentes populations de malades atteints d’hépatite chronique B.

La réponse virologique précoce évaluée au cours des premières semaines ou mois de traitement pourrait, comme dans l’hépatite C, se révéler être un bon facteur prédictif de réponse. Cependant, ce critère virologique (importance de la diminution de la charge virale et moment optimal de sa détermination) devra être précisé par les études en cours.

Les traitements actuellement disponibles Les interférons standards Les IFNs sont des cytokines endogènes sécrétées par l’organisme en réponse à de nombreux stimuli — en particulier les infections virales — et dont l’activité antivirale est à l’origine de leur découverte. Il en existe environ 13 sous-types doués de nombreuses activités biologiques dont l’inhibition de la réplication virale, l’inhibition de la multiplication cellulaire, l’induction de l’apoptose ainsi que la modulation de la différentiation et de la réponse immunitaire [10, 11]. Dans l’hépatite chronique AgHBe positif, l’IFN entraîne un taux de réponse prolongée (défini par la séroconversion HBe, 24 semaines après l’arrêt du traitement) de l’ordre de 20 à 40 % en fonction des caractéristiques du malade [12] (figure 2). Le taux de 40 % rapporté dans des études anciennes, est rarement obtenu et est de moins de 20 % dans les groupes contrôles des études récentes. Les malades ayant une activité importante et une réplication virale faible ont une probabilité de réponse prolongée aux environs de 40 %, alors que pour les autres elle est inférieure ou égale à 20 % [13].

Un traitement anti-viral est indiqué chez les malades ayant une fibrose modérée ou sévère et/ou une activité modérée ou sévère. Ainsi, si l’on utilise le score METAVIR, le traitement est recommandé chez les malades ayant un score d’activité d’au moins A2 et/ou un score de fibrose d’au moins F2. Il est évident, que l’âge du malade, l’état général, l’existence de comorbidités, et la probabilité de réponse au traitement, sont à prendre en compte.

Dans l’hépatite chronique AgHBe négatif, les taux de réponse prolongée sont équivalents (de l’ordre de 20 à 40 %), mais le seul facteur prédictif de réponse connu est la durée de traitement, avec un taux de réponse de l’ordre de 20 % pour une durée d’une année et de l’ordre de 40 % pour une durée de deux années [14].

Facteurs prédictifs de réponse Les facteurs prédictifs de réponse ont surtout été étudiés pour l’interféron (IFN). Cependant les principaux facteurs associés à une bonne réponse pourraient être les mêmes pour les autres 1217

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Patients (%)

40

Le schéma thérapeutique recommandé par la conférence de consensus européenne (résultant des essais contrôlés) est de 5 millions d’unités une fois par jour ou de 10 millions d’unités 3 fois par semaine, en sous-cutané, pour une durée de 24 semaines (hépatite chronique AgHBe positif) ou 48 semaines (hépatite chronique AgHBe négatif) [1]. Cependant des schémas thérapeutiques différents (5 ou 6 millions d’unités 3 fois par semaine) permettent d’avoir une meilleure tolérance avec une efficacité qui pourrait être voisine. Surtout, la meilleure tolérance peut permettre de poursuivre le traitement pendant une durée plus prolongée, ce qui est particulièrement important dans l’hépatite chronique AgHBe négatif. Chez les malades atteints d’hépatite chronique AgHBe positif, en cas de bonne réponse précoce (diminution de l’ADN VHB en dessous de 107 copies par mL), le traitement doit être poursuivi jusqu’à la séroconversion HBe complète (négativation de l’AgHBe et apparition des anticorps anti-HBe). Il est prudent de poursuivre le traitement 2 à 3 mois après cette séroconversion afin de limiter le risque de réactivation.

***P<0,001 vs placebo ****P<0,0001 vs placebo

50

37****

33****

30 20

17 12

10

8 *** 2

0

ADN VHB indétectable

Perte de l’AgHBe Placebo

Perte de l’AgHBs Interféron

Fig. 2 – Méta-analyses de l’interféron dans l’hépatite chronique B AgHBe+, d’après Wong et al. Ann Intern Med 1993;119:312-23. Dans cette méta-analyse incluant 15 études randomisées contrôlées, comparant l’interféron en monothérapie à un placebo, avec un total de 837 patients atteints d’hépatite chronique B AgHBe+ (publications de 1966 à 1992), le bénéfice de l’interféron était démontré en terme de diminution de l’ADN du VHB sérique en dessous du seuil de détectabilité (37 % versus 17 %), de perte de l’AgHBe (33 % versus 12 %) et de perte de l’AgHBs (8 % versus 2 %). In this meta-analysis of 15 randomized controlled studies comparing interferon alone with a placebo with a total of 837 patients with chronic hepatitis B AgHBe+ (publications from 1966 to 1992), the benefits of interferon were shown by the reduction of serum HBV DNA below the detection limit (37% versus 17%), by the loss of AgHBe (33% versus 12%) and the loss of AgHBs (8% versus 2%).

30

Réponse (%)

27

Les effets secondaires sont fréquents, nombreux, mais généralement peu graves et réversibles à l’arrêt du traitement [11-15]. Le plus fréquent est le syndrome pseudo grippal (fièvre, arthralgies, céphalées, frissons) qui est habituellement modéré et bien contrôlé par le paracétamol. Les autres effets secondaires possibles sont : une asthénie, un amaigrissement, une perte de cheveux, des troubles du sommeil, des troubles de l’humeur avec une irritabilité qui peut avoir des répercussions dans la vie quotidienne, des difficultés de concentration, une sécheresse cutanée. Certains effets secondaires rares, comme les troubles psychiatriques, peuvent être graves et doivent être anticipés. Une dépression peut survenir dans environ 10 % des cas et doit être dépistée et traitée car elle peut avoir des conséquences graves (tentative de suicide). Des décompensations de psychose préexistante peuvent survenir. Il peut survenir une dysthyroïdie (hypo ou hyperthyroïdie) [16]. Le traitement par IFN est contre-indiqué pendant la grossesse.

28 24

25



Les interférons pégylés

19

20 15

L’interféron pégylé (IFN-PEG) est constitué d’IFN standard conjugué à du polyéthylène glycol (PEG), diminuant ainsi la clairance rénale de l’IFN, aboutissant à une augmentation importante de sa demi-vie. Cela permet d’obtenir une concentration plasmatique d’IFN plus stable et prolongée permettant une injection par semaine [17].

12 10 5 n = 51

n = 49

n = 46

n = 48

4.5 MU

90 g

180 g

270 g

n = 143

0

IFN α-2a

toutes doses

IFN-PEG α-2a

Dans l’hépatite chronique AgHBe positif, une première étude sur des malades asiatiques, a suggéré une supériorité de l’IFN-PEG D-2a par rapport à l’IFN standard (37 % de séroconversion HBe contre 25 %) (figure 3) [18]. Dans cette étude randomisée contrôlée il y avait 4 bras, le groupe contrôle recevait de l’IFN D-2a à 4,5 MU trois fois par semaine (posologie recommandée en Asie), et les trois autres groupes recevaient de l’IFN-PEG D-2a à différentes posologies (90, 180, et 270 Pg par semaine). Il n’existait pas de différence significative entre les malades recevant de l’IFN-PEG D-2a quelle que soit la dose utilisée et ceux recevant de l’IFN standard, mais les résultats cumulés montraient une supériorité de l’IFN pégylé par rapport à l’IFN standard. On retrouve dans cette étude les mêmes facteurs prédictifs de bonne réponse au traitement que pour l’IFN standard, à savoir une activité importante et une réplication virale faible. Le bénéfice de l’IFN-PEG D-2a était aussi observé chez les malades ayant des facteurs prédictifs de mauvaise réponse. Dans cette étude, les résultats étaient équivalents pour les posologies de 90 et 180 Pg par semaine, et la dose la plus élevée (270 Pg par semaine) n’améliorait pas la réponse. La posologie de 180 Pg par semaine a été décidée pour les études ultérieures.

Réponse : perte de l’AgHBe, ADN du VHB < 500 000 copies/mL, Normalisation des ALT † p = 0.036

Fig. 3 – Interféron pégylé alpha 2a dans l’hépatite chronique B AgHBe+, d’après Cooksley et al. J Viral Hepatitis 2003;10:298-305. Dans cette étude randomisée contrôlée avec 4 bras, un groupe de malades recevait de l’interféron classique et les trois autres de l’interféron pégylé à différentes posologies. En terme de réponse (normalisation des ALT, ADN du VHB < 500 000 copies/mL, perte de l’AgHBe), aucun bras ne montrait de supériorité avec une différence statistiquement significative. Mais les résultats cumulés montrent une supériorité de l’interféron pégylé par rapport à l’interféron classique. Dans cette étude, les résultats étaient équivalents pour les posologies de 90 et 180 Pg par semaine, et la dose la plus élevée (270 Pg par semaine) n’améliorait pas la réponse. In this 4 arm randomized controlled study, one group of patients received classic interferon and the three others received pegylated interferon at different doses. None of the arms was better with a statistically significant difference in terms of response (normalization of ALT, HBV DNA < 500 000 copies/mL, loss of AgHBe). Nevertheless the cumulative results showed that pegylated interferon was better than classic interferon. In this study the results were equivalent for doses of 90 and 180 g per week and the higher dose (270 g per week) did not improve the response rate.

1218

Traitement de l’hépatite chronique B

IFN-PEG α-2a 180 µg (n = 177)

IFN-PEG α-2b (n = 177)

IFN-PEG α-2a + Lamivudine (n = 179)

IFN-PEG α-2b + Lamivudine (n = 181) 100

Lamivudine (n = 181)

Patients (%)

60

p = 0.,007

p = 0.,003

80

59

p = 0.,003

60 44

40

Patients (%)

p = 0.,004

100

43

44 29

20

80 60 40

35

32

20

7

9

0

0

ALT normales

ADN VHB < 20 000 copies/mL

ALT normales

a b

ADN VHB < 400 copies/mL

Fig 4 – a) Interféron pégylé alpha 2a dans l’hépatite chronique B AgHBe-, d’après Marcellin et al. NEJM 2004;351:1206-17. Dans cette étude randomisée contrôlée avec 3 bras, un groupe de malades recevait de l’interféron pégylé alpha 2a en monothérapie, un deuxième de la lamivudine en monothérapie et un troisième la combinaison des deux. En terme de réponse (normalisation des ALT, ADN du VHB < 20 000 copies/mL), l’interféron pégylé en monothérapie donnait des résultats meilleurs que la lamivudine en monothérapie. Dans ce schéma d’étude, il n’y avait pas de bénéfice (biochimique ou virologique) de la combinaison lamivudine-interféron pégylé alpha 2a par rapport à l’interféron pégylé alpha 2a en monothérapie. a) In this three arm randomized controlled study, a group of patients received pegylated alpha 2a interferon alone, a second group received lamivudine alone and a third a combination of the two. There was a better response rate with pegylated interferon alone than with lamivudine (normalization of ALT, HBV DNA < 20 000 copies/mL). In this study there was no benefit (biochemical or virological) to the combination of lamivudine-pegylated alpha 2a interferon compared to pegylated alpha 2a interferon alone. b) Interféron pégylé alpha 2b dans l’hépatite chronique B AgHBe+, d’après Janssen et al. Hepatology 2003;38:246A.Dans cette étude randomisée contrôlée avec 2 bras, un groupe de malades recevait de l’interféron pégylé alpha 2b en monothérapie, un deuxième la combinaison lamivudine- interféron pégylé alpha 2b. En terme de réponse (normalisation des ALT, ADN du VHB < 400 copies/mL), l’interféron pégylé en monothérapie donnait des résultats équivalents à la combinaison lamivudine-interféron pégylé alpha 2b. À nouveau, dans ce schéma d’étude, il n’y avait pas de bénéfice (biochimique ou virologique) de la combinaison lamivudine-interféron pégylé alpha 2b par rapport à l’interféron pégylé alpha 2b en monothérapie. b) In this two arm randomized controlled study a group of patients received pegylated alpha 2b interferon alone, a second lamivudine-pegylated alpha 2b interferon. The response rate was the same for pegylated interferon alone and the combination therapy. Once again in this study, there was no advantage (biochemical or virological) to the combination of lamivudine-pegylated alpha 2b interferon compared to pegylated alpha 2b interferon alone.

La tolérance de l’IFN-PEG en monothérapie est globalement comparable à celle de l’IFN standard. Les effets secondaires sévères, en particulier psychiatriques, ne sont pas plus fréquents. Il est même intéressant de noter que la fréquence du syndrome dépressif observée avec l’IFN-PEG dans l’hépatite chronique B est inférieure à celle observée dans l’hépatite chronique C [18, 19]. Il est utile de rappeler à ce sujet qu’une étude antérieure avait montré, que sous interféron, une dépression survenait plus fréquemment en cas d’hépatite chronique C qu’en cas d’hépatite chronique B [20]. Dans cette étude 38 malades étaient atteints d’hépatite chronique C, 36 atteints d’hépatite chronique B, et 58 sujets étaient indemnes de maladie chronique du foie. Avant traitement, il n’y avait pas de différence en terme de dépression, dans les trois groupes de malades. Au cours du traitement, une dépression survenait plus fréquemment en cas d’hépatite chronique C et chez les femmes. Il n’y a pas d’explication à cette constatation.

Toujours dans l’hépatite chronique AgHBe positif, une étude contrôlée randomisée récente a inclu 266 malades séparés en deux groupes, 130 étaient traités par IFN-PEG D-2b à la posologie de 100 Pg par semaine en monothérapie, et 136 étaient traités par l’association IFN-PEG D-2b et lamivudine (100 mg par jour) (figure 4b) [8]. Dans les deux bras recevant l’IFN-PEG, la dose initiale de 100 Pg était diminuée à 50 Pg après la 32e semaine. La durée du traitement était de 52 semaines. Cette étude a confirmé l’efficacité de l’IFN-PEG D-2b, avec six mois après la fin du traitement, une normalisation des transaminases chez 34 %, une réponse virologique partielle (définie par un ADN viral inférieur à 200 000 copies/mL) chez 27 %, une réponse virologique complète (définie par un ADN viral non détectable par PCR avec une sensibilité de 400 copies/mL) chez 7 %, une négativation de l’AgHBe chez 36 % et une négativation de l’AgHBs chez 7 % des malades. Les résultats de la bithérapie IFN-PEG D-2b et lamivudine seront présentés dans le chapitre sur les associations thérapeutiques.

Le syndrome grippal et les signes cutanés inflammatoires au point d’injection ainsi que la neutropénie sont un peu plus fréquents. La posologie est diminuée un peu plus souvent avec l’IFN-PEG qu’avec l’IFN, essentiellement en raison de l’apparition d’une neutropénie.

Dans l’hépatite chronique AgHBe négatif, une étude contrôlée randomisée récente a inclus 537 malades recevant un des trois schémas thérapeutiques suivants : IFN-PEG D-2a à la posologie de 180 Pg par semaine en monothérapie (N = 177), l’association IFN-PEG D-2a et lamivudine (N = 179), ou lamivudine (100 mg par jour) en monothérapie (N = 181) [19]. La durée du traitement était de 48 semaines. Les résultats, 24 semaines après la fin du traitement, ont montré une meilleure efficacité de IFN-PEG D-2a en monothérapie par rapport à la lamivudine, que ce soit en terme de normalisation des transaminases (59 % versus 44 %), de réponse virologique (définie par un ADN viral inférieur à 20 000 copies/mL), (43 % versus 29 %), de négativation de l’AgHBs (5 % versus 0 %). Par contre il n’y avait pas de différence en terme d’amélioration histologique (47 % versus 39 %) (figure 4a) [18]. Les résultats de l’association IFN-PEG alpha 2a et lamivudine seront présentés dans le chapitre sur les associations thérapeutiques.

Les résultats concernant les combinaisons thérapeutiques des IFN-PEG avec la lamivudine seront développés dans le chapitre suivant.

La lamivudine La lamivudine est un analogue nucléosidique qui inhibe directement l’ADN polymérase du VHB. La lamivudine a d’abord été développée comme inhibiteur de la reverse transcriptase du VIH. Elle s’est révélée être active à faible concentration sur le VHB. Plusieurs études contrôlées randomisées ont démontré l’efficacité de la lamivudine dans le traitement de l’hépatite chronique B [21-26]. Dans l’hépatite chronique B AgHBe positif, après un an de traitement, le taux de séroconversion HBe est de l’ordre de 1219

T. Asselah et al.

Chez les malades atteints d’hépatite chronique AgHBe négatif une étude contrôlée randomisée de la lamivudine a montré une efficacité équivalente à celle observée dans l’hépatite chronique AgHBe positif avec un taux de résistance comparable [31]. Après un an de traitement une réponse virologique (ADN VHB non détectable par PCR) était observée chez 70 % des malades traités avec une normalisation des transaminases chez 75 % (contre 5 % chez les malades recevant le placebo). Une amélioration histologique était observée chez 60 % des malades traités. Six mois après l’arrêt du traitement, seulement 5 % des malades avaient une réponse prolongée. À 30 mois de traitement, les réponses biochimiques et virologiques étaient respectivement de 60 % et 30 %. Les taux de résistance étaient similaires à ceux observés avec les malades atteints d’hépatite chronique AgHBe positif, avec 50-60 % de mutations à 3 ans de traitement [32].

20 % comparé à un taux de 6 à 12 % dans les groupes contrôles non traités. Même en l’absence de séroconversion, la majorité des malades a une réponse virologique avec diminution prolongée de l’ADN VHB (inférieur au seuil de détection des tests standard utilisés qui sont peu sensibles) associée à une diminution de l’activité histologique chez environ la moitié des malades traités et une diminution de la fibrose dans un sous groupe de malades. Le traitement par la lamivudine a, par rapport à l’IFN, les avantages suivants : administration per os, excellente tolérance, effet anti-viral rapide. Son principal inconvénient, lié à la nature même de la molécule (effet anti-viral pur) est la fréquence de la résistance liée à des mutations (YMDD). Le taux de séroconversion HBe pourrait être augmenté en prolongeant l’administration de la lamivudine. Les taux de séroconversion HBe sont de 16 % à 1 an, 27 % à 2 ans, 40 % à 3 ans et 50 % à 5 ans [27]. Cependant le traitement prolongé a pour inconvénient de favoriser l’apparition de virus résistant. En effet, la fréquence d’apparition de virus résistant à la lamivudine augmente avec le temps : 24 % à un an, 38 % à 2 ans, 50 % à 3 ans et 67 % à 4 ans [24]. Concernant la durabilité de la séroconversion HBe après arrêt de la lamivudine, une étude réalisée chez 67 malades Coréens traités par lamivudine (150 mg/jour) pendant 6 mois, avec une poursuite du traitement, soit de 2 mois, soit de 4 mois, chez les 34 malades ayant obtenu une séroconversion HBe, a montré qu’un traitement additionnel de 4 mois entraînait moins de rechute (séroréversion HBe) qu’un traitement additionnel de 2 mois (74 % versus 32 % à 2 ans, P = 0,014) [28].

L’adéfovir L’adéfovir dipivoxil est le précurseur de l’adéfovir. L’adéfovir est un analogue nucléotidique de l’adénosine monophosphate. In vivo, l’adéfovir dipivoxil est métabolisé en adéfovir qui est phosphorylé en adéfovir diphosphate, le métabolite actif qui interagit avec l’ADN polymérase du VHB. L’adéfovir diphosphate agit comme un inhibiteur compétitif et bloque la synthèse de l’ADN VHB.

Malades naïfs

La mutation la plus fréquente est la substitution d’une méthionine par une valine ou une isoleucine dans le motif YMDD du gène de l’ADN polymérase (rtM204V/I) [29]. Chez de nombreux malades cette mutation est associée à une deuxième mutation substituant une leucine par une méthionine (rtL180M). L’apparition d’une résistance à la lamivudine est favorisée par une forte réplication initiale.

Une étude contrôlée randomisée incluant 515 malades atteints d’hépatite chronique AgHBe positif, a démontré l’efficacité de l’adéfovir avec 12 % de séroconversion chez les malades recevant 10 mg par jour d’adéfovir contre 6 % chez les malades recevant le placebo [33] (figure 5a). Une normalisation des transaminases a été observée chez 48 % des malades dans le premier groupe et 16 % dans le second groupe. Une amélioration histologique (définie par la diminution du score d’activité de Knodell) a été observée respectivement chez 53 % et 25 % des malades. La tolérance de l’adéfovir, utilisé à la dose de 10 mg, était comparable à celle du placebo. Il n’a pas été noté d’émergence de mutant résistant après 48 semaines de traitement.

Si la réactivation de l’hépatite avec un VHB mutant est généralement modérée (augmentation modérée des transaminases), elle peut parfois être sévère surtout chez des malades atteints de cirrhose [30]. Il faut noter que l’apparition du virus mutant entraîne un retour progressif de l’activité de l’hépatite chronique rendant inutile la poursuite du traitement [24].

Adefovir 10 mg (n = 123)

Adefovir 10 mg (n = 171)

80 60

53***

48***

40

25

21*** 20

Placebo (n = 61)

100

Placebo (n = 167)

Patients (%)

Patients (%)

100

16

12* 0

80

51*** 33

40

29

20

0 0

ADN VHB indétectable

64***

60

6

0 ALT normales

72****

Séroconversion AgHBe

Inflammation > 2 points

ALT normales

ADN VHB indétectable

Inflammation > 2 points

***P<0,001

***P < 0,001,, *P < 0,05

Fig 5 – a) Adéfovir dipivoxil dans l’hépatite chronique B AgHBe+, d’après Marcellin et al. NEJM 2003;348:808-16. Dans cette étude randomisée contrôlée avec 2 bras, un groupe de malades recevait de l’adéfovir dipivoxil en monothérapie, un deuxième un placebo. En terme de réponse (normalisation des ALT, ADN du VHB indétectable, séroconversion HBe, diminution du score d’inflammation d’au moins deux points), l’adéfovir dipivoxil est supérieur au placebo. b) Adéfovir dipivoxil dans l’hépatite chronique B AgHBe-, d’après Hadziyannis et al. NEJM 2003;348:800-7. Dans cette étude randomisée contrôlée avec 2 bras, un groupe de malades recevait de l’adéfovir dipivoxil en monothérapie, un deuxième un placebo. En terme de réponse (normalisation des ALT, ADN du VHB indétectable, diminution du score d’inflammation d’au moins deux points), l’adéfovir dipivoxil est supérieur au placebo. a) In this 2 arms randomized controlled study, one group of patients received adefovir dipivoxil alone and a second received placebo. The response rate was better with adefovir dipivoxil than with placebo (normalization of ALT, undetectable HBV DNA, HBe seroconversion, reduction in the inflammation score by at least 2 points. b) In this 2 arms randomized controlled study, one group of patients received adefovir dipivoxil alone and a second received placebo. The response rate was better with adefovir dipivoxil than with placebo (normalisation of ALT, undetectable HBV DNA, reduction in the inflammation score of at least two points).

1220

Traitement de l’hépatite chronique B

malades ayant eu une interruption de l’adéfovir, une réactivation virale B a été observée dans tous les cas.

Une autre étude contrôlée de l’adéfovir réalisée chez des malades atteints d’hépatite chronique AgHBe négatif montre des résultats globalement équivalents à ceux observés chez les malades atteints d’hépatite chronique AgHBe positif [34] (figure 5b). Les résultats de l’adéfovir (notamment en terme de non détectabilité de l’ADN du VHB par PCR) paraissent meilleurs chez les malades AgHBe négatif que chez les malades AgHBe positif. Ceci est lié au fait que les malades AgHBe négatif ont une réplication virale initiale plus faible. La diminution de la charge virale est en fait similaire entre ces deux groupes, de l’ordre de 3,5 à 4 log, entre l’introduction du traitement et la 48e semaine.

Les associations thérapeutiques Étant donné l’efficacité limitée et/ou le risque de résistance des médicaments utilisés en monothérapie, il paraît logique d’évaluer l’efficacité, la tolérance et la fréquence de la résistance virale en associant les médicaments actuellement disponibles. Jusqu’à présent, un nombre limité d’études d’associations thérapeutiques a été réalisé et seules les associations de l’IFN ou de l’IFN-PEG avec la lamivudine et de l’adéfovir avec la lamivudine ont été étudiées.

Dans cette étude, le traitement par adéfovir en monothérapie a été poursuivi et l’on observe à 3 ans une efficacité maintenue avec une stabilité de la proportion de malades ayant des transaminases normales (69 %) et de la diminution moyenne de la charge virale (3,63 log) [35]. L’incidence de la résistance à l’adéfovir qui était nulle à 1 an de traitement est faible à 2 et 3 ans. Elle est respectivement de 2,5 % et 5,9 % [35].

Association interféron standard et lamivudine Dans une étude pilote, 14 malades atteints d’hépatite chronique B non répondeurs à l’interféron ont été traités par de la lamivudine en monothérapie (100 mg/j pendant 20 semaines), puis en association avec de l’interféron classique (5 MU trois fois par semaine) pendant 4 semaines. Puis l’interféron en monothérapie était poursuivi pendant 24 semaines [41]. Six mois après la fin de ce traitement séquentiel, l’ADN du VHB était indétectable chez 8/14 malades (56 %), une séroconversion HBe était observée chez 5 des 11 malades AgHBe positif (45 %), et une séroconversion HBs chez 3 des 14 malades.

Malades avec résistance à la lamivudine L’adéfovir est efficace sur le VHB résistant à la lamivudine (mutations YMDD) [36-39]. Une étude contrôlée randomisée a inclus 95 malades ayant développé une résistance sous lamivudine [38]. Les malades ont été randomisés en trois groupes : un groupe a continué la lamivudine en monothérapie, un groupe a continué la lamivudine associée à l’adéfovir, et un groupe a reçu de l’adéfovir seul. À 48 semaines de traitement, une réponse virologique était observée dans le groupe traité par adéfovir en monothérapie avec une diminution de la charge virale de l’ordre de 4 log (comparable à celle observée dans les études effectuées chez les malades naïfs de tout traitement par lamivudine), avec une normalisation des transaminases dans environ 50 % des cas. Chez les malades qui développent une résistance à la lamivudine, l’adéfovir est efficace mais doit être débuté rapidement chez les malades ayant une fibrose sévère ou une cirrhose, afin d’éviter le risque de décompensation. Il est donc important de diagnostiquer précocement la survenue d’une résistance grâce à la surveillance de l’ADN VHB sérique avec une méthode sensible. Une élévation d’au moins un log (facteur 10) de l’ADN VHB correspond généralement à l’apparition d’un VHB mutant qui précède de quelques mois la réactivation (avec élévation des transaminases). Bien que cela ne soit pas démontré, il est habituellement recommandé de poursuivre la lamivudine après la mise en route de l’adéfovir jusqu’à ce que l’adéfovir ait entraîné une réponse virologique (ADN VHB inférieur à 100 000 copies/mL).

Pour l’hépatite chronique AgHBe positif, une première étude randomisée, a inclus 226 malades naïfs, recevant soit de la lamivudine pendant 52 semaines en association avec de l’IFN administré pendant 16 semaines après les 8 premières semaines de lamivudine (N = 75), soit de l’IFN pendant 16 semaines (N = 69), soit de la lamivudine pendant 52 semaines (N = 82) [42]. Cette étude avait suggéré un bénéfice de l’association IFN et lamivudine par rapport à l’IFN seul. La différence en faveur de la bithérapie n’était pas significative en intention de traiter, mais elle le devenait lorsque l’analyse était effectuée en per protocole (c’est-à-dire en ne considérant que les malades ayant reçu le traitement complet). Dans une autre étude [43], 151 malades recevaient soit la combinaison IFN et lamivudine pendant 24 semaines, soit la lamivudine seule pendant 52 semaines. Le taux de séroconversion HBe était de 33 % pour la bithérapie, et était supérieur (en intention de traiter) à la lamivudine seule (15 %). Il faut remarquer que dans cette étude le taux de réponse biochimique (27 %) dans le groupe recevant la lamivudine seule était inférieur aux taux habituellement observés. Une troisième étude a inclus 238 malades non répondeurs à l’IFN. Il n’y avait pas de différence en terme de séroconversion HBe entre les trois bras : placebo (N = 56, 13 %), lamivudine (N = 119, 18 %) et bithérapie (N = 63, 12 %) [44].

Une étude ouverte multicentrique a également montré l’efficacité de l’adéfovir chez les malades résistants à la lamivudine, mais aussi chez ceux ayant une cirrhose décompensée (prétransplantation) [37] ou transplantés [39]. Dans ces deux populations de malades sévères, l’effet antiviral de l’adéfovir était comparable à celui observé chez les malades ayant une maladie compensée avec une amélioration de l’état clinique et de la fonction hépatique chez de nombreux malades. En pré-transplantation, l’amélioration sous adéfovir a permis de retirer de nombreux malades de la liste d’attente. La tolérance a été comparable à celle observée chez les malades ayant une maladie compensée, mais il est crucial d’adapter la dose d’adéfovir selon la fonction rénale.

Dans l’hépatite chronique AgHBe négatif [45], une étude a inclus 50 malades traités soit par lamivudine en monothérapie soit par la combinaison IFN et lamivudine, pour une durée de 48 semaines. Vingt et un malades avaient été antérieurement traités par IFN. La réponse virologique à 24 semaines était respectivement de 83 % et 62 % dans les groupes bithérapie et lamivudine. La réponse était maintenue en fin de traitement pour le groupe sous bithérapie, alors que 5 des 26 (20 %) malades sous lamivudine seule développaient une rechute avec apparition de mutant YMDD. Néanmoins, la réponse prolongée était identique dans les 2 groupes (17 % pour la bithérapie, 19 % pour la lamivudine). Il apparaissait dans cette étude que la bithérapie retardait l’apparition des mutants YMDD. Une autre étude pilote sur 29 malades consécutifs a rapporté des résultats similaires [46].

Dans une étude pilote chez 35 malades ayant une co-infection VIH-VHB et ayant développé une résistance à la lamivudine, un traitement par adéfovir (10 mg par jour) associé à la poursuite de la lamivudine, a entraîné un effet anti-viral équivalent à celui observé chez les malades VIH négatif (diminution de 4 log à la 48e semaine de traitement) [40]. Deux malades ont présenté une séroconversion HBe. À la 48e semaine, il n’a pas été observé de mutation au niveau de l’ADN polymérase du VHB ni au niveau de l’ARN de la reverse transcriptase du VIH. Chez les

Ainsi ces différentes études évaluant la combinaison IFN et lamivudine ont suggéré (sans le démontrer) que cette association pourraît être plus efficace que la lamivudine seule. Néanmoins, 1221

T. Asselah et al.

Une autre étude contrôlée a comparé l’association lamivudine adéfovir versus la lamivudine en monothérapie chez les malades naïfs (sans résistance à la lamivudine) [47]. Après 52 semaines de traitement, comme dans l’étude de Peters et al. [38], la cinétique et l’amplitude de la diminution de la charge virale n’étaient pas différentes dans les deux groupes avec une diminution moyenne de la charge virale de 4,8 log et 5,4 log respectivement dans le groupe monothérapie et le groupe bithérapie. À la fin du traitement, 41 % des malades en monothérapie et 39 % des malades en bithérapie avaient un ADN VHB non détectable par PCR. On notait logiquement une plus grande fréquence de résistance à la lamivudine (mutation YMDD) dans le groupe monothérapie que dans le groupe bithérapie (20 % versus des malades 2 % ; P < 0,003). Si cette étude montre que l’adéfovir prévient la survenue de la résistance à la lamivudine, elle n’apporte aucun argument en faveur de la bithérapie adéfovir et lamivudine par rapport à l’adéfovir en monothérapie puisqu’elle ne comporte pas de bras contrôle avec l’adéfovir seul.

les résultats peu encourageants pourraient être liés aux schémas thérapeutiques non optimaux. Dans ces études, certains malades étaient naïfs de tout traitement et d’autres étaient non répondeurs (principalement à l’IFN). Cette hétérogénéité rend l’analyse des résultats extrêmement délicate.

Association Interféron pégylé et lamivudine Dans l’hépatite chronique AgHBe positif, une étude contrôlée randomisée a inclus 266 malades. Bien que la bithérapie IFN-PEG et lamivudine ait montré une meilleure efficacité à la fin des 52 semaines de traitement, celle-ci avait une efficacité similaire à l’IFN-PEG en monothérapie 24 semaines après la fin du traitement (figure 4b) [8]. En effet, à la fin du traitement, on observait respectivement dans le groupe bithérapie et le groupe monothérapie, une normalisation des transaminases chez 51 % des malades versus 34 % ; une réponse virologique complète (définie par un ADN viral non détectable par PCR avec une sensibilité de 400 copies/mL) chez 33 % des malades versus 10 % ; une négativation de l’AgHBe chez 44 % des malades versus 29 % et une négativation de l’AgHBs chez 7 % des malades versus 5 %. Par contre, 24 semaines après l’arrêt du traitement, on observait une efficacité équivalente de l’IFN-PEG D-2b en monothérapie par rapport à l’association IFN-PEG D-2b et lamivudine, que ce soit en terme de normalisation des transaminases (32 % versus 35 %) qu’en terme de réponse virologique (définie par un ADN viral non détectable par PCR avec une sensibilité de 400 copies/mL) (7 % versus 9 %) (figure 4b) [8]. Il faut noter dans cette étude un taux relativement élevé de négativation de l’AgHBs (7 % dans les deux bras).

Ainsi, il n’y a actuellement aucun argument pour utiliser la lamivudine et l’adéfovir en association. Des études contrôlées sont nécessaires pour évaluer l’intérêt à long terme de la bithérapie par rapport à une monothérapie en terme d’efficacité antivirale et/ou de prévention des résistances.

Les nouvelles molécules L’entécavir L’entécavir est un analogue nucléosidique de la guanosine qui a une action anti-virale par son métabolite triphosphate. Ce métabolite inhibe la polymérase virale et réduit le taux d’ADN intrahépatique superenroulé. Chez la marmotte, l’entécavir est bien toléré et il n’y a pas d’apparition de résistances virales. Une étude de phase II chez l’homme a montré une diminution significative de plusieurs log de l’ADN du VHB après 28 jours de traitement sans effet secondaire [48]. In vitro, l’entécavir est actif sur les mutations développées sous traitement par la lamivudine.

Dans l’hépatite chronique AgHBe négatif, des résultats équivalents ont été observés avec une étude contrôlée randomisée qui a inclus 537 malades (figure 4a) [19]. En effet, à la fin du traitement, on observait respectivement dans le groupe bithérapie IFN-PEG et lamivudine et le groupe INF-PEG en monothérapie, une normalisation des transaminases chez 49 % des malades versus 38 %, une réponse virologique complète (définie par un ADN viral non détectable par PCR avec une sensibilité de 400 copies/mL) chez 87 % des malades versus 63 %. Par contre, 24 semaines après l’arrêt du traitement, on observait une efficacité équivalente de l’IFN-PEG D-2b en monothérapie par rapport à l’association IFN-PEG D-2b et lamivudine, que ce soit en terme de normalisation des transaminases (59 % des malades versus 60 %) qu’en terme de réponse virologique (définie par un ADN viral non détectable par PCR avec une sensibilité de 400 copies/mL) (19 % des malades versus 20 %) (figure 4a) [19]. D’autres études seront nécessaires afin d’évaluer l’association thérapeutique de l’IFN-PEG avec la lamivudine, selon différents schémas (séquentiel, posologie différente, durée prolongée).

Une étude a inclus 181 malades ayant un taux d’ADN VHB supérieur à 10 mEq/mL (Quantiplex) ou une mutation prouvée YMDD sous lamuvidine. Ils ont été traités par entécavir avec 3 doses (0,1 ; 0,5 et 1 mg) ou par lamivudine seule [49]. Après 48 semaines de traitement, l’ADN du VHB a diminué de 2,8 ; de 4,6 et de 4,7 log chez les malades atteints d’hépatite chronique HBe positif, ayant reçu respectivement une dose de 0,1 mg, 0,5 mg et 1 mg d’entécavir versus 1,8 log chez les malades ayant reçu la lamivudine seule. La diminution de l’ADN du VHB a été de 2,9, de 4,0 et 5,6 log, chez les malades atteints d’hépatite chronique HBe négatif, ayant reçu respectivement une dose de 0,1 mg, 0,5 mg et 1 mg d’entécavir versus 0,7 log pour les malades ayant reçu la lamivudine seule.

Association adéfovir lamivudine

Chez les malades transplantés, dont la prophylaxie par lamivudine associée ou non aux immunoglobulines spécifiques a échoué, on observe une diminution de la charge virale sous entécavir [50]. Huit malades transplantés ayant une réinfection par le VHB, avec ADN du VHB supérieur à 10 mEq/mL (Quantiplex bDNA assay), et une activité de l’ALAT inférieure à 10 fois la limite supérieure de la normale ont reçu un traitement de 1 mg/jour d’entécavir pendant 48 semaines après arrêt du traitement par la lamivudine. À 12 semaines de traitement, on observait une diminution moyenne de la charge virale de 3,4 log. Il n’a pas été noté d’effet secondaire. L’entécavir semble donc efficace sur la diminution de la charge virale chez les malades transplantés avec récidive de l’infection par le VHB et représente donc une alternative importante pour ce type de malades.

Dans l’étude de Peters et al. [38] incluant 95 malades résistants à la lamivudine, après 48 semaines de traitement, il n’y avait pas de différence d’efficacité entre le groupe recevant la bithérapie lamivudine et adéfovir et le groupe recevant l’adéfovir en monothérapie. À 48 semaines de traitement, les réponses biochimique et virologique étaient équivalentes dans les deux groupes avec une normalisation des transaminases chez 47 % des malades en monothérapie et 53 % des malades en bithérapie, et une diminution moyenne de la charge virale de 3,59 log dans le groupe monothérapie et 4,04 log dans le groupe bithérapie. Une étude des mutations YMDD à 48 semaines de traitement a montré l’absence de détection de VHB lamivudine résistant chez 37 % des malades en monothérapie et 5 % des malades en bithérapie, ce qui suggère que la poursuite de la lamivudine favorise la persistance de la réplication du VHB lamivudine résistant.

Dans une étude de phase II contrôlée randomisée ayant porté sur 216 malades atteints d’hépatite chronique B AgHBe 1222

Traitement de l’hépatite chronique B

tre semaines après la fin du traitement, la diminution médiane de la charge virale était respectivement de 1,2 ; 1,4 ; 2,7 et 1,6 logs dans les bras 10, 50, 100 et 200 mg. Il est intéressant de constater qu’après l’arrêt du traitement, la charge virale augmentait lentement, contrairement à ce qui est habituellement observé après l’arrêt d’un traitement par analogue nucléosidique ou nucléotidique. À la fin du suivi la charge virale moyenne était plus basse que la charge virale pré-thérapeutique. Sept malades (28 %) ont perdu l’AgHBe, et 5 (19 %) ont eu une séroconversion HBe. Il n’a pas été observé de mutation induite par la clévudine. La clévudine a été bien tolérée.

positif, l’entécavir (à deux posologies de 0,1 et 0,5 mg/j per os ; N = 142) était comparé à un placebo (N = 71) [51]. La diminution de la charge virale à 28 jours était plus importante dans le groupe entécavir par rapport au groupe placebo. La posologie de 0,5 mg/j était la plus efficace. La tolérance était bonne et aucun effet secondaire grave n’a été rapporté. Les résultats concernant le type et le taux de mutations sous entécavir sont attendus.

L’emtricitabine L’emtricitabine (FTC) est un analogue nucléosidique ayant une structure voisine de celle de la lamivudine (3TC). Il est efficace dans le traitement du VIH et a une activité anti-virale sur le VHB in vitro et chez l’homme [52, 53]. Une première étude de phase I a montré une diminution de 3 log de la virémie après 3 semaines de traitement. Une deuxième étude, randomisée, en double aveugle, a évalué l’efficacité et la tolérance d’un traitement par emtricitabine avec 3 doses différentes : 25 mg, 100 mg et 200 mg/jour [52]. Les résultats ont montré que, chez les 77 malades AgHBe positif, à la 48e semaine de traitement, 40 % avaient négativé l’AgHBe. L’ADN du VHB avec un seuil de détection à 4 700 copies/mL était indétectable respectivement chez 38 %, 42 % et 61 % des malades recevant 25, 100 et 200 mg d’emtricitabine. Un faible taux de résistance virale était noté à 1 an (6 % dans le groupe recevant 200 mg d’emtricitabine). Chez les 21 malades AgHBe négatif, à la 48e semaine de traitement, 16 malades sur 21 (76 %) avaient un ADN du VHB indétectable et tous les malades ayant reçu la dose de 200 mg d’emtricitabine avaient une virémie indétectable à 1 an. Les transaminases étaient normales chez 95 % des malades. Ces résultats préliminaires montrent une efficacité anti-virale tant chez les malades infectés par un virus sauvage que chez ceux infectés par un mutant pré-C. Les résultats préliminaires de l’étude phase III comparant l’emtricitabine à la dose de 200 mg par jour au placebo, montrent après 48 semaines de traitement, une diminution moyenne de la charge virale de 3 log versus 0,44 log, une négativation de la charge virale (test utilisé ayant une sensibilité de 4 700 copies/mL) chez 56 % des malades versus 7 %, une amélioration histologique chez 62 % des malades versus 25 %. Ces résultats suggèrent que l’emtricitabine a une efficacité anti-virale non supérieure à la lamivudine ou à l’adéfovir. Par ailleurs l’incidence des mutations associées à une résistance à l’emtricitabine à un an était d’environ de 6 % dans le groupe recevant 200 mg/j et de 12 % pour les groupes recevant une posologie plus faible. À deux ans de traitement, dans le groupe de malades recevant de l’emtricitabine, 13 % des malades avaient une mutation YMDD. La mutation YMDD dans le gène de la polymérase confère une résistance à la lamivudine et à l’emtricitabine.

Une étude de la clévudine administrée pendant 12 semaines montre des résultats comparables. Les résultats définitifs de cette étude sont attendus pour préciser la place de cette molécule dans le traitement de l’hépatite chronique B.

Ténofovir Le ténofovir est un analogue nucléotidique dont la structure est voisine de celle de l’adéfovir. Le ténofovir a obtenu l’AMM dans le traitement de l’infection VIH. Des études in vitro ont démontré son efficacité anti-virale sur le VHB. Une étude prospective non randomisée a évalué le ténofovir disoproxil fumarate par rapport à l’adéfovir chez les malades résistants à la lamivudine [55]. Parmi les 40 malades, 25 recevaient le ténofovir à une posologie de 245 mg/j et 15 de l’adéfovir. La réponse virologique à 6 mois était supérieure pour le groupe recevant le ténofovir avec une non détectabilité de l’ADN du VHB (seuil à 400 copies/mL) chez 80 % des malades versus 37 % des malades recevant l’adéfovir. Aucune mutation n’était observée.

Telbivudine La telbivudine est un analogue nucléosidique efficace sur le VHB. Une étude randomisée contrôlée de phase IIb, a porté sur 104 malades atteints d’hépatite chronique AgHBe positif traités pendant 52 semaines soit par lamivudine, soit par telbivudine (à différentes posologies), soit par l’association des deux [56]. Il a été observé à 52 semaines, une meilleure efficacité du telbivudine par rapport à la lamivudine, que ce soit en terme de normalisation des transaminases (86 % versus 63 %), ou en terme de diminution de la charge virale (6 log versus 4,5 log). À noter qu’à 52 semaines, le taux de disparition de l’AgHBe était de 28 % (5/18) pour la lamivudine seule, de 33 % (14/42) pour le telbivudine seul, et de 17 % (7/41) pour l’association des deux. Là encore, l’association des deux molécules n’était pas supérieure au telbivudine seul.

Les immuno-modulateurs et les vaccins thérapeutiques

Les études de phase III en cours permettront de préciser l’efficacité anti-virale de l’emtricitabine et le taux de résistance, comparés à ceux observés avec la lamivudine et l’adéfovir.

De nombreux immuno-modulateurs (en dehors de l’interféron alpha) ont été essayés dans l’hépatite chronique B [57]. Comme l’interféron gamma [58], l’interféron bêta [59], l’interleukine 2 [60], l’interleukine 12 [61] et la thymosine alpha 1 [62]. Ces différents traitements ont globalement montré une efficacité plus faible que l’interféron alpha et une tolérance équivalente voire moins bonne.

La clévudine La clévudine est un analogue nucléosidique de la pyrimidine qui inhibe la réplication du VHB in vitro et in vivo chez la marmotte. Une dose quotidienne de 10 mg/kg diminue la charge virale de 9 log, sans rechute après l’arrêt du traitement avec un suivi de 56 semaines. Dans une étude multicentrique ouverte de phase I/II, 32 malades naïfs infectés par le VHB avec un ADN VHB supérieur à 3x106 copies/mL ont reçu pendant 28 jours des doses de 10, 50, 100, ou 200 mg de clévudine (N = 5, 10, 10, 7 respectivement) [54]. Le suivi a été de 24 semaines après l’arrêt du traitement. Après 28 jours de traitement, la diminution médiane de la charge virale était respectivement de 2,5 ; 2,7 ; 3,0 et 2,6 logs dans les bras 10, 50, 100 et 200 mg. Vingt-qua-

Avec les vaccins commercialisés, aucune étude n’a montré d’efficacité significative par rapport à un traitement classique. Une étude contrôlée multicentrique incluant 118 malades naïfs atteints d’hépatite chronique B a comporté trois bras : Vaccin PreS2/S (GenHevac B ; 20 Pg, 5 injections intra-musculaires ; N = 47) ; Vaccin S (Recombivax, 5 injections intra-musculaires, N = 34) ; aucun traitement (N = 37) [63]. Après un an de suivi, 1223

T. Asselah et al.

avec l’hépatite chronique C, il est logique de penser que I’excès pondéral pourrait augmenter le risque d’évolution de la fibrose par les mêmes mécanismes que ceux impliqués dans l’hépatite chronique C (insulino-résistance ; stéatose et stéato-hépatite). De toute évidence, il existe un intérêt sur la santé globale de l’individu de recommander l’absence de consommation excessive d’alcool, de tabac et d’éviter le surpoids.

il n’y avait pas de différence entre les groupes en ce qui concerne la négativation de l’ADN du VHB ou le taux de séroconversion HBe. Cependant dans le groupe ayant reçu le vaccin, la charge virale avait diminué entre 6 et 12 mois. L’intérêt du concept de vaccin thérapeutique a été relancé récemment par une étude évaluant l’association lamivudine et vaccin [64]. Chez des malades atteints d’hépatite chronique AgHBe positif, 57 malades ont reçu de la lamivudine seule et 15 autres de la lamivudine en association avec un vaccin. L’administration de vaccin était débutée à la 12e semaine avec des injections toutes les 2 semaines (12 injections). L’efficacité paraissait meilleure dans le groupe avec vaccin (non détectabilité de l’ADN : 100 % versus 67 %, P < 0,05 ; séroconversion HBe 55 % versus 16 %, P < 0,05). Aucune séroconversion HBs n’a été observée. Il n’a pas été observé de résistance dans le groupe vacciné contrairement au groupe sous lamivudine seule.

Surveillance d’un malade ayant une cirrhose virale B Il est évident, qu’en cas de cirrhose, la réalisation d’une endoscopie digestive haute est indiquée afin de dépister des varices oesophagiennes, et si elles sont présentes (au moins grade 2) un traitement préventif de l’hémorragie digestive par bêtabloquants doit être mis en route. De plus, un dépistage régulier du carcinome hépatocellulaire est recommandé afin de pouvoir proposer un traitement curatif, précoce. Ce dépistage consiste en la réalisation d’une échographie hépatique et d’un dosage de l’alpha-foetoprotéine tous les six mois. Une étude multicentrique en cours (carcinome hépatocellulaire 2000) permettra de préciser si une surveillance plus rapprochée (tous les trois mois) améliore l’efficacité du dépistage.

Effet à long terme du traitement Le bénéfice à long terme du traitement a été évalué pour les molécules les plus anciennement disponibles, c’est-à-dire l’interféron standard et la lamivudine. Les différentes études sur l’effet à long terme de l’interféron doivent être interprétées avec prudence en raison de nombreux biais possibles. D’une part, l’ensemble des études comportant un groupe contrôle sans traitement n’était pas randomisé ; d’autre part il y a une grande hétérogénéité dans le suivi des malades. Certaines études ont montré un bénéfice du traitement par IFN à long terme avec une diminution de la progression vers la cirrhose [65], et des complications de la cirrhose et de survenue du carcinome hépatocellulaire, essentiellement chez les répondeurs biochimiques [66] et chez les répondeurs biochimiques et virologiques [67]. Néanmoins, l’ensemble de ces études est à interpréter avec prudence et des études randomisées prospectives seront nécessaires afin de connaître l’effet à long terme de l’IFN dans l’hépatite chronique B.

Conclusion : en pratique Place de la biopsie hépatique Le principal facteur à prendre en compte dans l’indication du traitement est la sévérité de la maladie hépatique appréciée au mieux, à l’heure actuelle, par la ponction biopsie hépatique. En évaluant le degré d’activité et de fibrose, elle permet d’apprécier le pronostic, et fait partie intégrante de la prise en charge du malade. Ainsi, si l’on utilise le score METAVIR, le traitement est recommandé chez les malades ayant un score d’activité d’au moins A2 et/ou un score de fibrose d’au moins F2.

Molécules ayant actuellement l’autorisation de mise sur le marché

Concernant la lamivudine, une large étude contrôlée randomisée a montré pour la première fois chez les malades atteints d’hépatite chronique B sévère, le bénéfice de ce traitement sur la progression de la maladie en terme de décompensation de la cirrhose et de survenue du carcinome hépatocellulaire [68]. En effet dans cette large étude randomisée incluant 651 malades traités soir par la lamivudine, soit par le placebo, après une durée de traitement de 3 ans, une progression de la maladie était observée chez 8 % des malades dans le bras lamivudine et 18 % des malades dans le bras placebo (P < 0,001). La survenue du carcinome hépatocellulaire était de 4 % chez les malades sous lamivudine et 7 % chez les malades sous placebo (P = 0,047). Quarante-neuf pour cent des malades sous lamivudine ont développé une mutation YMDD à 3 ans.

Trois molécules ont actuellement l’autorisation de mise sur le marché (AMM) pour le traitement de l’hépatite B : l’interféron, la lamivudine et l’adéfovir. On peut penser que l’interféron pégylé (IFN PEG), avec une efficacité au moins équivalente à l’IFN standard et un usage plus pratique (une injection par semaine), le remplacera prochainement dans le traitement de l’hépatite chronique B. Le traitement de première intention doit prendre en compte la forme d’hépatite chronique B (AgHBe positif ou négatif), les chances de réponse, le risque de résistance, la tolérance et le coût du traitement. L’IFN standard a été recommandé en première intention par le jury de la conférence de consensus européenne, avec une posologie de 5 MU par jour ou de 10 MU trois fois par semaine par voie sous-cutanée, pour une durée de 24 semaines dans l’hépatite chronique AgHBe positif ou de 48 semaines pour l’hépatite chronique AgHBe négatif [1]. Depuis 2002, des informations complémentaires ont été disponibles sur l’efficacité, la faible incidence de résistance et la bonne tolérance à long terme de l’adéfovir [33, 34]. Ces informations complémentaires ont conduit de nombreux experts à considérer que, dans l’hépatite chronique AgHBe positif, du fait de la possibilité d’obtention d’une séroconversion HBe, l’IFN peut être préféré. En revanche dans l’hépatite chronique AgHBe négatif où le traitement par IFN doit être prolongé (avec des problèmes de tolérance), un traitement par adéfovir ou par lamivudine peut être préféré. La faible incidence de résistance sous adéfovir comparé à la lamivudine plaide en faveur de l’adéfovir. Un avantage de la lamivudine est néanmoins son coût moins élevé que celui de l’adéfovir, ce qui explique son utilisation en première intention dans de nombreux pays.

Rappelons que la vaccination reste la stratégie la plus efficace pour prévenir les complications de l’hépatite B et la survenue du carcinome hépatocellulaire [69].

Autres mesures du traitement Mesures associées Dans tous les cas, Il faut recommander le traitement de tout cofacteur pouvant aggraver la maladie du foie et/ou diminuer la réponse au traitement. Il faut conseiller l’arrêt de toute consommation d’alcool, la correction d’un excès pondéral et d’une surcharge en fer… L’effet péjoratif de l’alcool a été démontré. Par contre l’effet néfaste de l’excès pondéral n’a pas été démontré dans l’hépatite chronique B. Cependant par analogie 1224

Traitement de l’hépatite chronique B

Avec les résultats préliminaires disponibles, il paraît justifié de proposer l’IFN-PEG en monothérapie (aux mêmes doses que celles utilisées dans le traitement de l’hépatite C, c’est-à-dire IFN-PEG D-2a à la posologie de 180 Pg par semaine ou IFN-PEG D-2b à la posologie de 1,5 Pg par semaine) pendant une durée de 24 semaines dans l’hépatite chronique AgHBe positif ou de 48 semaines pour l’hépatite chronique AgHBe négatif.

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La durée du traitement pour la lamivudine et l’adéfovir n’est pas clairement établie étant donné que, dans les essais thérapeutiques effectués avec ces molécules, il a été décidé a priori de poursuivre le traitement. En cas de séroconversion HBe, il est recommandé de poursuivre le traitement pendant 3 à 6 mois pour diminuer le risque de réactivation à l’arrêt du traitement. En l’absence de séroconversion HBe dans l’hépatite chronique AgHBe positif et dans l’hépatite chronique AgHBe négatif il est recommandé de poursuivre le traitement tant qu’il est efficace (absence de réactivation liée à l’apparition d’une résistance) puisque l’on sait qu’en cas d’arrêt, la réactivation est de règle, et qu’elle peut etre potentiellement grave en cas de fibrose importante..

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