J Radiol 2008;89:21-34 © Éditions Françaises de Radiologie, Paris, 2008 Édité par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés
revue iconographique
ostéoarticulaire
Tumeurs et pseudo-tumeurs des tissus mous de la région pied-cheville V Bousson, B Hamzé, M Wybier, E Daguet, C Parlier, D Petrover, P Bossard et JD Laredo
Abstract
Résumé
Soft tissue tumors and pseudotumors of the foot and ankle J Radiol 2008;89:21-34
Les masses des tissus mous de la région pied-cheville sont fréquentes. Les étiologies bénignes sont deux fois plus fréquentes que les étiologies malignes mais ces dernières constituent tout de même un tiers des diagnostics. L’objectif principal de cet exposé est de proposer une approche systématique du diagnostic étiologique d’une masse des tissus mous de la région pied-cheville. Cette approche est basée sur cinq points : l’histoire et l’examen cliniques, le top 10 des étiologies, l’âge du patient, la localisation de la masse, l’aspect IRM de la masse. Dans un second temps, plusieurs étiologies seront décrites et illustrées, en mettant l’accent sur ces cinq points.
Soft tissue masses around the foot and ankle are frequent. While benign lesions are two times more frequent than malignant lesions, the latter still represent one third of all lesions. The main purpose of this article is to propose a systematic approach to the differential diagnosis of soft tissue tumors of the foot and ankle based on a combination of 5 elements: clinical history and physical examination, top 10 most frequent diagnoses, patient age, lesion location, and MRI features of the mass. Selected soft tissue tumors will be described and illustrated with emphasis on these 5 elements. Key words: Tumor. Pseudotumor. Foot. Ankle. MRI.
es masses des tissus mous de la région pied-cheville sont fréquentes. Tous âges confondus, elles sont malignes une fois sur trois (32 %) et bénignes deux fois sur trois (68 %) (1). Leur révélation est souvent précoce, pour plusieurs raisons : Elles sont facilement palpables à travers la fine épaisseur de graisse et de muscles. Les lésions proches des tendons sont responsables de douleurs et d’inconfort, par interférence avec la fonction tendineuse. Les lésions proches de structures nerveuses entraînent un syndrome de compression canalaire, responsable de douleurs et de paresthésies. Ces symptômes peuvent révéler des lésions de petite taille dont l’excision peut être complète. Les lésions bénignes sont certes deux fois plus fréquentes que les lésions malignes, mais manquer un diagnostic de malignité (une masse sur trois) expose à des conséquences dramatiques. En pratique, le radiologue doit reconnaître un certain nombre d’images spécifiques et savoir orienter le patient pour une biopsie en milieu spécialisé si les images ne sont pas spécifiques. Cet exposé propose une approche systématique pour analyser une masse des tis-
L
Mots-clés : Tumeur. Pseudo-tumeur. Pied. Cheville. IRM.
sus mous de la région pied-cheville. Dans un second temps, plusieurs étiologies seront décrites.
Plan d’analyse
Les éléments d’une approche systématique Nous n’avons considéré que les points suivants pour approcher le diagnostic : • l’histoire et l’examen cliniques ; • le top 10 des étiologies ; • l’âge du patient ; • le compartiment anatomique intéressé ; • l’aspect IRM de la masse. Bien que les radiographies n’entrent pas dans nos critères, elles doivent être réalisées systématiquement. La majorité des masses ne sont pas visibles sur les radiographies, sauf si elles sont grosses. Cependant, certains éléments sont suggestifs, comme les phlébolithes d’une malformation veineuse, l’hyperclarté graisseuse d’une masse lipomateuse, les calcifications intralésionnelles d’un synovialosarcome ou d’un léiomyome. Une extension osseuse indique un processus agressif, qu’il soit malin ou bénin.
Histoire et examen cliniques Service de Radiologie Ostéo-Articulaire, Hôpital Lariboisière, 2, rue Ambroise Paré, 75010 Paris. Correspondance : V Bousson E-mail :
[email protected]
L’étape de l’interrogatoire ne doit pas être négligée. Les éléments à noter sont : • les antécédents : diabète (infection), neurofibromatose (neurofibromes), poly-
arthrite rhumatoïde (nodules rhumatoïdes), hyperlipidémie familiale (xanthome), mélanome malin (métastases). • le temps d’évolution de l’affection : – une masse qui augmente progressivement de volume est évocatrice de malignité, y compris si cette évolution se fait sur plusieurs années (synovialosarcome, par exemple). – une masse qui se constitue en quelques semaines évoque davantage un processus infectieux ou inflammatoire que tumoral. • le mode de présentation : une masse douloureuse témoigne de l’existence d’un processus inflammatoire. • le caractère unique ou multiple de la lésion : – une tumeur des tissus mous est généralement unique ; – plusieurs affections peuvent donner des masses multiples : lipomes multiples, neurofibrome (neurofibromatose de type 1), nodules rhumatoïdes, fibromatose plantaire, xanthomes.
Le top 10 des étiologies Nous proposons une gamme des 10 diagnostics les plus fréquents chez l’adulte : sept pseudo-tumeurs et tumeurs bénignes puis trois tumeurs malignes. Cette gamme est basée sur les résultats histologiques de trois séries de la littérature : • une analyse rétrospective de 39 179 masses des tissus mous observées à l’Armed Forces Institute of Pathology (AFIP) sur
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une période de 10 ans (1/1/80-31/12/89) (1), avec pour la région pied-cheville, 1 118 tumeurs bénignes et 568 tumeurs malignes. • une analyse rétrospective de 20 980 exérèses d’une masse des tissus mous de la région pied-cheville dans un département spécialisé dans la chirurgie du pied et de la cheville (2). • une analyse rétrospective de 71 biopsies d’une masse des tissus mous de la région pied-cheville (3). Les sept pseudo-tumeurs et tumeurs bénignes les plus fréquentes sont : le névrome de Morton, les kystes mucoïdes et les bursopathies mécaniques, la fibromatose plantaire, le lipome, les malformations vasculaires à flux lent (« hémangiome »), les schwannomes et neurofibromes, la tumeur à cellules géantes des gaines tendineuses. Autres affections bénignes fréquentes : les nodules rhumatoïdes, les tophus goutteux, les xanthomes, les kystes épidermoïdes, les fasciites et ruptures du fascia plantaire. Les tendinoses, qui se présentent souvent comme une masse des tissus mous de la région pied-cheville ne figurent pas dans cette gamme établie à partir de séries chirurgicales ou biopsiques (1-3). Les trois tumeurs malignes les plus fréquentes sont : l’histiocytome fibreux malin (cf. p. 32), le synovialosarcome, le sarcome à cellules claires. Autres affections malignes : léiomyosarcome, fibrosarcome, liposarcome.
Âge Ce top 10 est à moduler en fonction de l’âge du sujet. L’âge est un critère majeur de notre approche diagnostique. La fréquence des lésions malignes augmente
avec l’âge. Dans la région pied-cheville, les lésions malignes représentent (1) : • jusqu’à 55 ans : moins d’un tiers des masses ; • entre 56 et 75 ans : entre un tiers et deux tiers des masses ; • après 76 ans : deux tiers des masses ; La nature des tumeurs malignes varie avec l’âge (1) : • jusqu’à 55 ans ; Les trois tumeurs malignes les plus fréquentes sont : le synovialosarcome (d’autant plus représenté que les sujets sont jeunes), le sarcome à cellules claires, l’histiocytome fibreux malin (cf. p. 32). • à partir de 56 ans ; Les trois tumeurs malignes les plus fréquentes sont : l’histiocytome fibreux malin (cf. p. 32), le léiomyosarcome, le sarcome de Kaposi (tumeur cutanée observée dans le cadre de transplantation d’organe, hémopathies et SIDA). La nature des lésions bénignes est, en revanche, peu dépendante de l’âge.
Compartiment anatomique intéressé Certaines lésions ont une prédilection pour un compartiment anatomique donné, de sorte qu’il est possible cliniquement d’évoquer des diagnostics en fonction du siège anatomique. • compartiment postérieur de la cheville (4) – pathologies du tendon calcanéen (fig. 1 et 2) : tendinose et déchirure (fig. 1), xanthome, nodules rhumatoïdes ; – bursite rétro-calcanéenne et rétroachilléenne (fig. 1) ; – Ténosynovite du fléchisseur long de l’hallux et des orteils ;
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– muscle soléaire accessoire. • canal tarsien (4-6) – tendinose des fléchisseurs (fig. 3) ; – kyste mucoïde (2) (fig. 4) ; – tumeur neurogène ; – varices ; – hypertrophie synoviale de la soustalienne postérieure (fig. 5) ; – tissu cicatriciel ; – muscle accessoire ou hypertrophié. • dos du pied – kystes mucoïdes ; – tendinose du tibial antérieur ou des extenseurs (fig. 6) ; – tophus goutteux ; • plante du pied (4) – pathologie du fascia plantaire superficiel (fig. 7, 8 et 9) : fasciite plantaire et rupture du fascia plantaire superficiel (fig. 7 et8), fibromatose plantaire (fig. 9), xanthome du fascia plantaire superficiel ; – lipome (fig. 10) ; – bursite infracalcanéenne ; – nodule rhumatoïde ; – tophus goutteux. • avant-pied et région métatarsienne (7) – névrome de Morton (fig. 11) ; – bursite inter et sous métatarsienne (fig. 12) ; – tophus goutteux ; – kyste épidermoïde ; – tumeur à cellules géantes des gaines tendineuses (fig. 13).
Imagerie IRM Diagnostics spécifiques La majorité des tumeurs et pseudotumeurs des tissus mous possèdent un signal faible à intermédiaire en T1, et élevé
a bc
Fig. 1 : a b c
Enthésopathie calcanéenne avec désinsertion partielle : le tendon est épaissi et son signal est anormalement élevé en T2. Il existe une bursite rétro calcanéenne (flèche) et un œdème du calcaneus. IRM séquence sagittale T1. IRM séquence sagittale rho avec saturation du signal de la graisse. IRM séquence axiale rho avec saturation du signal de la graisse. J Radiol 2008;89
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a bc d
Fig. 2 : a b c d
Infection à Pasteurella multocida du tendon calcanéen secondaire à une griffure de chat : signal inflammatoire et épaississement fusiforme étendu du tendon calcanéen, avec abcès intra tendineux et fistule cutanée (flèches). IRM, séquence sagittale T1. IRM, séquence sagittale T2 avec saturation du signal de la graisse. IRM, séquence sagittale T1 avec saturation du signal de la graisse après injection de Gadolinium. IRM, séquence axialeT1 avec saturation du signal de la graisse après injection de Gadolinium.
a bc
Fig. 3 : a b c
Ténosynovite fissuraire du tibial postérieur : syndrome de masse médial dû à une ténosynovite du tendon tibial postérieur. La fissure tendineuse est bien visible sur les trois séquences (flèches). IRM, séquence sagittale en pondération rho avec saturation du signal de la graisse. IRM, séquence axiale en pondération T1. IRM, séquence axiale en pondération T1 avec saturation du signal de la graisse, après injection de gadolinium.
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en T2. Certaines lésions bénignes comme les lipomes, malformations vasculaires, kystes mucoïdes, ont une morphologie et un signal typiques. D’autres lésions comme le névrome de Morton, la fibromatose plantaire, la tumeur à cellules géantes des gaines synoviales peuvent être correctement diagnostiquées en considérant leur siège et leur signal. Une liste de diagnostics qui peuvent être faits correctement à partir d’une bonne analyse de l’IRM est proposée dans le tableau I. Lorsque l’analyse IRM ne permet pas un de ces diagnostics, l’imagerie est dite aspécifique et le radiologue doit orienter son patient en milieu spécialisé.
Bénin/malin (8) ? Des tentatives, basées sur l’IRM, ont été faites afin de prédire le caractère bénin ou malin d’une masse des tissus mous. Une taille supérieure à 5 cm, le siège profond, l’hétérogénéité du signal en T2 et/ou T1, une zone de nécrose, un œdème périlésionnel, un envahissement des structures neurovasculaires, sont des éléments plutôt en faveur de la malignité. Mais une masse de petite taille, bien limitée et de signal homogène peut aussi correspondre à une tumeur maligne. L’intensité de la prise de contraste sur les séquences T1 gadolinium classiques n’a pas de valeur. En revanche,
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l’analyse de la prise de contraste sur des séquences dynamiques est intéressante. Les critères en faveur de la malignité sur les séquences dynamiques sont une prise de contraste précoce (dans les 6 secondes après le rehaussement artériel), une pente de prise de contraste raide, un rehaussement dynamique périphérique ou hétérogène. Il a été clairement montré que l’on augmente les performances diagnostiques de l’IRM lorsque l’on ajoute ces critères dynamiques aux critères de morphologie et de signal classiques (8).
Tableau synthétique Cf. tableau II.
Tableau I Diagnostic d’une masse des tissus mous de la région pied-cheville et sémiologie IRM. Sémiologie IRM
Diagnostics
Description de quelques lésions
Signal liquidien
HypoT1, hyperT2, pas de prise de contraste
Kyste mucoïde
Signal graisseux
HyperT1, hypoT2
Lipome et liposarcome différencié
Signal de l’hémosidérine
Franc hypoT1 et franc hypoT2 surtout en écho de gradient
Synovite villonodulaire et tumeur à cellules géantes (à composante hémorragique)
Signal de la mélanine
HyperT1
Sarcome à cellules claires
Localisation
Aponévrose plantaire Espace intercapito-métatarsien
Fibromatose plantaire Névrome de Morton
Signal + Localisation
Franc hypoT1 et franc hypoT2 (hémosidérine), Gaine tendineuse
Tumeur à cellules géantes
Tumeurs bénignes et pseudo-tumeurs
Signal + Forme
HypoT1, hyperT2 (flux lent) ; asignal T1 et T2 (flux rapide) Poches (flux lent), Serpigineux (flux rapide)
Malformation vasculaire à flux lent, à flux rapide
Tumeurs d’origine nerveuse Névrome de Morton (névrome intermétatarsien) (9)
Forme + Localisation
Fusiforme, avec aspect en queue de radis à un pôle, Sur un trajet nerveux
Tumeur nerveuse
Nous nous proposons de décrire brièvement les lésions fréquentes, ou qui ont des caractéristiques évocatrices en IRM. Cette description s’attache à répondre aux critères d’analyse énoncés plus haut.
Le névrome de Morton (fig. 11) représente une fibrose périnerveuse du nerf digital plantaire commun.
a bc
Fig. 4 :
a b c
Kyste mucoïde du canal tarsien : masse du canal tarsien, multiloculaire, de contenu liquidien, à paroi fine, avec une minime prise de contraste de la paroi du kyste (flèche). Compte tenu du caractère trompeur de bien des tumeurs malignes du pied, on n’affirme pas le diagnostic IRM de kyste mucoïde du pied sans une étude après contraste intraveineux. IRM, séquence axiale rho avec saturation du signal de la graisse. IRM, séquence axiale T1. IRM, séquence axiale T1 après injection de gadolinium.
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a bc de
Fig. 5 :
a b c d e
Synovite villonodulaire de l’articulation soustalienne postérieure et du sinus du tarse : masse hétérogène (flèches) avec des zones de franc hyposignal T1 et T2 correspondant à des dépôts d’hémosidérine. IRM, séquence axiale T1. IRM, séquence sagittale T1. IRM, séquence sagittale rho avec saturation du signal de la graisse. IRM séquence axiale T1 avec saturation du signal de la graisse après injection de gadolinium. IRM séquence sagittale T1 avec saturation du signal de la graisse après injection de gadolinium.
Tableau II Analyse synthétique pour le diagnostic d’une masse des tissus mous de la région pied — cheville. Masse des tissus mous de la région pied-cheville
Histoire clinique
Top10
Âge
↓
↓
↓
Compartiment anatomique ↓
IRM ↓
Antécédents
Névrome de Morton
âge ≤ 55 ans : moins d’un 1/3 des masses sont malignes
Compartiment postérieur de la cheville
Kystes mucoïdes
Temps d’évolution
Kyste mucoïde et bursopathie mécanique
56 ≤ âge ≤ 75 ans : 1/3 à 2/3 sont malignes
Canal tarsien
Lipome et liposarcome différencié
Mode de présentation
Fibromatose plantaire
âge ≥ 76 ans : > 2/3 des masses sont malignes
Dos du pied
SVN, TCG (à composante hémorragique)
Lipome
Plante du pied
Sarcome à cellules claires
Hémangiome
Avant-pied et région métatarsienne
Fibromatose plantaire
Unique ou multiple
Schwannome et neurofibrome
Névrome de Morton
Tumeur à cellules géantes des gaines tendineuses
Malformation vasculaire à flux lent, à flux rapide
Histiocytome fibreux malin (cf chapitre B1)
Tumeur nerveuse
Synovialosarcome Sarcome à cellules claires
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• élément clinique évocateur : oui, la douleur. Exacerbée par la marche avec des chaussures fermées et soulagée par l’arrêt et le retrait de la chaussure, il s’agit d’une véritable claudication neurogène d’un espace intermétatarsien. Plus tard, la douleur devient constante.
Type de brûlures, de décharges électriques, irradiant dans les orteils. Signe de Mülder : ressaut au rapprochement des métatarsiens • fréquence globale et fréquence par âge : – Six à 18 femmes pour un homme : ce sex-ratio peut être lié au port de chaussu-
a b c d
Fig. 6 : a b c d
Rupture complète du tendon tibial antérieur : perte de visibilité du tendon tibial antérieur, remplacé par un tissu de signal hétérogène (flèches), au dessus et à hauteur de l’interligne tibio-talien. IRM, séquence axiale T1. IRM, séquence axiale T1 située 7 mm plus distal que 6a. IRM séquence sagittale T1. IRM séquence sagittale rho avec saturation du signal de la graisse.
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res à talons hauts, poussant le nerf contre le ligament intermétatarsien. – Âge moyen : 50 ans. • compartiment anatomique évocateur ? : oui, espaces intermétatarsiens (3e dans 75 % des cas, 2e dans 19 % des cas), à hauteur des têtes métatarsiennes. • IRM – spécificité ? : oui, par le siège dans l’espace intermétatarsien sur le trajet du nerf digital plantaire. – forme : masse ovoïde infracentimétrique, bien limitée, homogène. – signal : le névrome est plus facile à voir en t1, avec un signal intermédiaire qui contraste avec la graisse voisine. le signal en t2 est très variable mais jamais aussi intense que celui du liquide. – prise de contraste : variable. • remarque : une bursite, chevauchant le névrome ou située à sa partie proximale, est fréquemment associée.
Tumeurs bénignes des gaines des nerfs (schwannome — ou neurinome — et neurofibrome) (9) Ces tumeurs (fig. 14) contiennent des cellules proches des cellules de Schwann, dont on pense qu’elles sont issues. Leur croissance est lente et elles sont longtemps asymptomatiques. Le schwannome est encapsulé et tend, en grossissant, à excentrer les fibres du nerf ; il comporte deux zones histologiques différentes, une zone compacte centrale (Antoni A) et une zone périphérique myxoïde (Antoni B). Le neurofibrome n’a pas de capsule ; en grossissant, il
a b
Fig. 7 : a b
Fasciite plantaire postérieure : anomalie de signal de type œdème de l’insertion calcanéenne du fascia plantaire superficiel et de la graisse sous-jacente (flèches). IRM, séquence sagittale pondérée T1. IRM séquence sagittale rho avec saturation du signal de la graisse (b).
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Fig. 8 : a b
Rupture du fascia plantaire superficiel gauche : solution de continuité des fibres proximales du fascia plantaire superficiel gauche (flèches). IRM, séquence sagittale T1. IRM, séquence coronale T1.
a b c
Fig. 9 : a b c
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Fibromatose plantaire : présence de deux petits nodules (flèches) localisés au sein du fascia plantaire superficiel médial. IRM, séquence sagittale T1. IRM, séquence sagittale T1, image 7 mm plus latérale que 9a. IRM, séquence frontale T1.
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a b
Fig. 10 : a b
Fig. 11 :
Lipome de la région plantaire médiale : Masse de la région plantaire médiale (flèches), bien limitée, homogène, dont le signal est identique à celui de la graisse souscutanée. Présence de quelques fines cloisons internes. IRM, séquence axiale pondérée T1. IRM, séquence axiale pondération rho avec saturation du signal de la graisse.
Névrome de Morton : masse du 3e espace intermétatarsien (flèche), piriforme, centimétrique, bien limitée, homogène, dont le signal proche de celui des muscles contraste avec celui de la graisse voisine. IRM, séquence coronale T1.
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disperse les fibres nerveuses et entraîne un élargissement fusiforme du nerf. • élément clinique évocateur : oui, l’éventuelle multiplicité (neurofibromatose de type I). Les schwannomes peuvent être associés à une maladie de Recklinghausen. • fréquence globale et fréquence par âge : Les schwannomes surviennent entre 20 et 50 ans et touchent autant les hommes et chez les femmes. Les neurofibromes surviennent plutôt entre 20 et 30 ans, sans prédominance de sexe. Les schwannomes sont un peu moins fréquents que les neurofibromes. Quatre pour cent des schwannomes intéressent la cheville (7). • compartiment anatomique évocateur : canal tarsien, les fléchisseurs pour les schwannomes • IRM – spécificité ? : oui, par le siège et la forme ; – siège : à proximité d’une structure neurovasculaire ; – forme : fusiforme, avec le nerf que l’on voit entrer et sortir de la masse (image en queue de radis). Ce signe très précieux peut manquer quand il s’agit de petits nerfs. Le schwannome est excentré par rapport au nerf, alors que le neurofibrome est centré par lui. Le neurofibrome franchit souvent l’épinèvre et infiltre les tissus adjacents. – signal : typiquement, équivalent ou un peu supérieur à celui des muscles en t1. en t2, le signal est hétérogène mais typiquement élevé. Le signe de la cible associe en T2 un signal central faible (éléments fibreux) et un signal périphérique élevé (éléments
•
Fig. 12 : a b
a b Bursite d’appui de la première tête métatarsienne droite : masse centrée sous la tête du premier métatarsien droit, dont la densité est de nature liquidienne (plan sagittal) (flèches). La TDM n’est pas un examen adapté au diagnostic des bursites. L’échographie et l’IRM sont bien plus performantes. TDM, image frontale passant par les sésamoïdes du premier rayon. TDM, image sagittale passant par le premier rayon.
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Fig. 13 :
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Tumeur à cellules géantes du tendon du fléchisseur long de l’hallux : masse bien limitée englobant le tendon du fléchisseur long de l’hallux (flèches). Le signal est hétérogène en T1 associant des zones de signal intermédiaire et des zones de franc hyposignal. Les zones de franc hyposignal correspondent à des dépots d’hémosidérine. IRM, séquence axiale T1. IRM séquence axiale en pondération rho avec saturation du signal de la graisse. IRM, séquence sagittale T1.
a bc d
Fig. 14 : a b c d
Neurinome du nerf tibial postérieur : masse rétromalléolaire interne, fusiforme, développée aux dépens de la gaine du nerf tibial postérieur (flèches) — que l’on voit entrer dans la masse —, de signal homogène intermédiaire en T1 et de signal intense en T2. IRM, séquence sagittale T1. IRM, séquence sagittale T1. IRM, séquence sagittale en pondération rho avec saturation du signal de la graisse. IRM séquence axiale T1 après injection de gadolinium.
myxomateux). Ce signe a été décrit avec les neurofibromes (présent dans 70 % des cas) mais n’est pas rare avec les schwannomes. Possible anneau périphérique de faible signal qui correspondrait à une pseudocapsule fibreuse. Ceci est plutôt le fait des schwannomes. J Radiol 2008;89
Possible anneau périphérique graisseux, qui s’observerait avec toutes les tumeurs intermusculaires. – prise de contraste : intense ou faible, focale ou diffuse. • remarque : une atrophie musculaire (groupe musculaire distal) peut être associée aux tumeurs neurogènes. Cependant
cet élément est inhabituel pour les tumeurs neurogènes du pied.
Kyste mucoïde (soft tissue ganglion, ganglion cyst) (1) Il s’agit d’une petite lésion fréquente uni ou multiloculaire contenant un liquide épais, dont la paroi fibreuse ressemble à
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de la synoviale et que des septums fibreux peuvent compartimenter (fig. 4). Le kyste mucoïde siège généralement au voisinage d’une capsule articulaire ou d’une gaine tendineuse, mais peut en être complètement séparé. La présence d’une communication entre la lésion et une articulation voisine n’est pas nécessaire au diagnostic de kyste mucoïde. • élément clinique évocateur : oui. Le volume de la masse est variable, souvent augmenté après effort. Douleur fréquente. • fréquence globale et fréquence par âge : pic d’incidence dans les 2e, 3e et 4e décennies. La fréquence au pied est la deuxième, après la main et le poignet. • compartiment anatomique évocateur : oui. La plupart des kystes mucoïdes sont dans les tissus mous des faces dorsale et dorsolatérale du pied. Sinus du tarse. • IRM – spécificité ? : oui, lorsque le signal est franchement liquidien ; – signal : bas à intermédiaire en t1 et élevé en T2 ; – siège : parfois raccordé à un tendon ou une articulation voisine ; – prise de contraste : non. compte tenu du caractère trompeur de bien des tumeurs malignes au pied, on n’affirme pas le diagnostic IRM de kyste mucoïde au pied sans une étude après contraste intraveineux.
Fibromatose plantaire (9, 10) Les fibromatoses sont une famille de lésions des tissus mous caractérisées par une prolifération de tissu fibreux bénin. Les fibromatoses sont classées par leur localisation anatomique, superficielle ou profonde. Les fibromatoses profondes correspondent aux fibromatoses agressives (ou tumeurs desmoïdes). Elles sont histologiquement bénignes mais elles grossissent de façon agressive, infiltrative. L’atteinte de la région pied-cheville est rare. La fibromatose plantaire (fig. 9) ou maladie de Ledderhose appartient au groupe des fibromatoses superficielles (comme la maladie de Dupuytren). La fibromatose plantaire se caractérise par une prolifération de tissu fibreux au sein du fascia plantaire superficiel. Cette prolifération peut s’étendre à la peau et aux structures profondes adjacentes. • élément clinique évocateur : oui. – nodule ferme fixé aux plans souscutanés, de 2 à 3 centimètres. l’atteinte est
multiple chez 10 à 30 % des sujets. les formes multifocales s’observent plutôt en cas de récidive postopératoire ; – atteinte plantaire bilatérale dans 20 à 50 % des cas ; – atteinte palmaire et plantaire dans 50 % des cas. • fréquence globale et fréquence par âge Typiquement dans les troisième, quatrième et cinquième décennies mais la fibromatose plantaire se rencontre à tout âge, même chez l’enfant. Certains auteurs mentionnent une prédominance masculine (2/1) (9). • compartiment anatomique évocateur ? : oui, plante du pied. • IRM – spécificité ? : oui, par la localisation ; – siège : les nodules se localisent au sein du fascia plantaire superficiel avec une prédominance pour le fascia médial ; – forme : les nodules sont bien définis en superficie, contre la graisse sous-cutanée, mais sont difficilement individualisable du muscle en profondeur ; – taille : inférieure à 3 cm ; – signal : hétérogène en T1 et en T2 ; – prise de contraste : variable en homogénéité et en intensité.
Lipome (1) Les lipomes (fig. 10) peuvent être superficiels ou profonds. Les lipomes superficiels sont de loin les plus fréquents : • élément clinique évocateur : oui, la multiplicité. Après une période initiale de croissance sensible, leur taille se stabilise. Peu de symptômes habituellement. Multiplicité : l’incidence des lipomes multiples varie de 5 à 15 %. Les lipomes multiples se rencontrent chez les hommes (sex-ratio : 6/1). • fréquence globale et fréquence par âge Les lipomes sont les tumeurs des tissus mous les plus fréquentes, toutes localisations confondues. Les lipomes ne sont pas très fréquents dans la région du pied et de la cheville car ils surviennent habituellement dans des régions riches en tissu adipeux (le tronc, l’épaule et le membre supérieur, le cou). Les lipomes se rencontrent à tout âge (80 % entre 26 et 65 ans), mais surtout à la cinquième et la sixième décennie. Pas de prédominance de sexe pour le lipome solitaire. • compartiment anatomique évocateur ? : oui La plante du pied, riche en tissu adipeux. Ils peuvent être localisés dans une gaine tendineuse.
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Deux formes particulières de lipome ont une prédilection pour les pieds, en particulier les orteils : la lipomatose congénitale, affection rencontrée en pédiatrie, et la macrodystrophie lipomateuse. La macrodystrophie lipomateuse correspond à une forme de gigantisme localisé avec une croissance excessive de l’os et des tissus mous d’un ou plusieurs orteils ou doigts adjacents. Elle est plus fréquente aux pieds qu’aux mains, et est plutôt décrite sur les 2e et 3e orteils. La prolifération de la graisse sous-cutanée et la croissance osseuse sont localisées dans un territoire nerveux. Au pied, ce sont les nerfs digitaux plantaires qui sont le plus souvent intéressés. • IRM – spécificité ? : oui, par le signal ; – signal : la masse a le même signal que la graisse sous-cutanée. souvent d’ailleurs, le lipome superficiel se confond avec la graisse sous-cutanée et ne se détecte que par la présence d’un repère placé sur la peau avant l’examen ou par comparaison au côté opposé. La présence d’une composante non graisseuse doit faire envisager le diagnostic de liposarcome, même s’il existe des variantes bénignes de lipome qui ont une composante non graisseuse. – taille : 80 % des lipomes mesurent moins de 5 cm ; – forme : bien limitée, parfois lobulée avec de fins septums ; – siège : dans les zones qui contiennent habituellement de la graisse ; – prise de contraste : non. • remarque : il peut exister une métaplasie cartilagineuse au sein du lipome.
Malformations veineuses (cavernous hemangioma, cavernous angioma, venous angioma) (11) Le terme « hémangiome » est utilisé pour désigner des lésions, ayant un nombre anormalement élevé de vaisseaux, dont les aspects cliniques et histologiques sont très différents. Certaines de ces lésions sont de véritables tumeurs (le terme d’hémangiome est alors approprié) et d’autres sont des malformations vasculaires. Nous recommandons la classification et les termes proposés par l’International Society fot the Study of Vascular Anomalies (ISSVA) qui distingue : • les tumeurs vasculaires : hémangiomes capillaires, hémangiomes intramusculaires, qui s’observent chez l’enfant et l’adulte jeune ; • les malformations vasculaires (fig. 15) J Radiol 2008;89
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– à flux lent (hémodynamiquement inactives) : malformations capillaires, veineuses, capillaroveineuses, lymphatiques ; – à flux rapide : malformations artérioveineuses. Nous ne décrirons que les aspects cliniques et radiologiques des malformations vasculaires à flux lent, en particulier veineuses (ou capillaroveineuses) (MV) en raison de leur fréquence dans la région pied-cheville. Dans la littérature, les MV sont décrites sous les termes de « cavernous hemangioma », « cavernous angioma », ou encore « venous angioma ». • élément clinique évocateur : oui Présence de la malformation dès la naissance et majoration discrète avec l’âge ; douleurs et gonflement qui apparaissent ou sont majorés par la marche et l’activité physique ; et lorsqu’il fait froid, couleur bleutée de la peau s’il y a des ectasies veineuses dans le derme • fréquence globale et fréquence par âge : Enfants, adolescents et adultes jeunes. • compartiment anatomique évocateur ? : non • IRM
Tumeurs et pseudo-tumeurs des tissus mous de la région pied — cheville
– spécificité ? : oui, par la forme et le signal ; – forme : juxtaposition de poches (lacs de sang stagnant) ; – signal : homogène, hypo à isointense en T1 et hyperintense en T2. Cependant la présence de thromboses, phlébolithes et tissu adipeux engendre des modifications du signal ; – taille : variable ; les MV des membres sont le plus souvent localisées (segmentaires) mais peuvent être diffuses (extensives). Les MV peuvent s’étendre à la peau, aux muscles, à l’os, aux articulations ; – Prise de contraste : oui, homogène. • remarque : les radiographies peuvent montrer des phlébolithes, éléments très évocateurs de MV mais qui témoignent seulement d’une minéralisation au sein d’un thrombus organisé.
Tumeur à cellules géantes des gaines tendineuses (forme localisée) (9) La tumeur à cellules géantes des gaines tendineuses (fig. 13) est la forme la plus fréquente de la synovite villonodulaire pigmentée, dont elle est une forme locali-
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sée. La région pied-cheville en abrite 5 à 15 % des cas (contre 65 à 89 % des cas à la main et au poignet). La synovite villonodulaire des gaines tendineuses de forme diffuse ne représenterait que l’extension d’une synovite villonodulaire articulaire et nous ne ferons que la citer puisqu’elle sort du cadre de ce chapitre. • élément clinique évocateur : non Masse à croissance lente, parfois stable pendant des années, douloureuse ou non. Masse mobilisable par rapport à la peau mais fixée aux plans profonds. • fréquence globale et fréquence par âge : pic d’incidence dans les 3e, 4e et 5e décennies, avec une prédominance féminine de 2 pour 1. • compartiment anatomique évocateur ? : oui, avant pied et région métatarsienne, en particulier les deux premiers orteils. • IRM – spécificité ? : oui, par le siège et le signal ; – siège : adjacent à un tendon ; – signal : hyposignal t1, hétérogène t2. des grains noirs en t1 et en t2, qui correspondent à des dépôts d’hémosidérine, sont évocateurs ;
a bc d
Fig. 15 : a b c d
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Malformation veineuse extensive du membre inférieur gauche : juxtaposition de poches de signal homogène liquidien, de la loge postérieure de la jambe, étendue à la cheville et au pied, de localisation superficielle et profonde. IRM, séquence coronale en pondération rho avec saturation du signal de la graisse. IRM, séquence sagittale en pondération rho avec saturation du signal de la graisse. IRM séquence sagittale en pondération rho avec saturation du signal de la graisse. IRM, séquence axiale en pondération rho avec saturation du signal de la graisse.
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Tumeurs et pseudo-tumeurs des tissus mous de la région pied — cheville
– forme bien limitée ; – prise de contraste : intense et plutôt homogène. • remarque : l’os voisin peut être encoché (radiographies, scanner).
Autres pseudo-tumeurs et tumeurs bénignes Nodules rhumatoïdes Les nodules rhumatoïdes font partie des sept critères diagnostiques proposés par l’American College of Rheumatology en 1987 et constituent la manifestation extraarticulaire la plus fréquente de la polyarthrite rhumatoïde. Ils affectent 10 à 30 % des malades atteints de polyarthrite rhumatoïde et sont exceptionnels dans les autres connectivites. Cliniquement, on observe des nodules sous-cutanés le plus souvent mobiles, indolores, arrondis ou polylobés, en moyenne de 0,5 à 1 cm de diamètre. • élément clinique évocateur : oui, polyarthrite rhumatoïde, forme sévère et évoluée. Les nodules rhumatoïdes s’observent le plus souvent au bout de plusieurs années d’évolution et dans les polyarthrites séropositives dont le taux de facteur rhumatoïde est élevé. Dans la vascularite rhumatoïde, qui complique les polyarthrites rhumatoïdes anciennes et destructrices, les nodules rhumatoïdes sont présents une fois sur deux. • compartiment anatomique évocateur ? : oui, compartiment postérieur et plante du pied. Les nodules rhumatoïdes siègent dans le tissu sous-cutané des régions soumises aux frottements et aux microtraumatismes et sont fréquents en regard du tendon calcanéen et dans la graisse sous-calcanénne.
Tophus goutteux Les tophus sont des dépôts uratiques plus ou moins volumineux, sous cutanés, de consistance dure, constitués au cours de réactions inflammatoires chroniques déclenchées par les dépôts de microcristaux d’urate monosodique. Une fois installés, ils augmentent progressivement en volume et en nombre. Ils peuvent s’ulcérer. • élément clinique évocateur : oui, goutte chronique. • fréquence globale et fréquence par âge : affection masculine Les tophus se déposent en général assez tardivement, souvent une dizaine d’années après la première crise, mais sont parfois précoces ou peuvent ne jamais apparaître. • compartiment anatomique évocateur ? : oui, les tophus s’observent sur le dos et la
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plante du pied mais surtout à la face médiale de la 1re articulation métatarsophalangienne, • IRM – spécificité ? : images évocatrices par le polymorphisme du signal ; – signal : en T1, les tophus ont un signal faible à intermédiaire. En T2, il existe des plages en hyposignal, qui correspondent aux dépôts microcristallins et aux réactions fibreuses chroniques. Il existe des plages en hypersignal qui correspondent à des phénomènes inflammatoires actifs. – prise de contraste : hétérogène. • remarque : en IRM, le diagnostic prête à discussion avec une arthrite infectieuse ou une tumeur ; en radiographie, le diagnostic est souvent évident.
• élément clinique évocateur : oui Antécédent de traumatisme ; syndrome de Gorlin : la prévalence des kystes dermoïdes et épidermoïdes est élevée chez les sujets ayant ce syndrome. • fréquence globale et fréquence par âge : le kyste épidermoïde est une pseudotumeur fréquente. • compartiment anatomique évocateur ? : oui, avant pied et région métatarsienne. la plupart des kystes épidermoïdes sont situés sous la tête des 1er et 2e métatarsiens ou à la face médiale de la 1re tête métatarsienne. • IRM : spécificité ? : images très évocatrices par la localisation et l’existence d’une capsule fibreuse épaisse en hyposignal T1 et T2.
Xanthomes Les xanthomes sont des pseudo-tumeurs constituées d’amas d’histiocytes qui contiennent de grande quantité de lipides. Ils se localisent dans la peau et le tissu sous-cutané, parfois dans les tendons ou la synoviale. • élément clinique évocateur Les xanthomes sont une des caractéristiques cliniques des hyperlipidémies primitives. Les xanthomes tendineux s’observent chez les patients avec une hyperlipidémie de type II ou III, Les xanthomes des tendons calcanéens s’observent aussi dans la xanthomatose cérébrotendineuse, L’importance de l’atteinte est proportionnelle au taux de cholestérol sanguin et à la durée de l’hypercholestérolémie. • compartiment anatomique évocateur : oui Le tendon calcanéen est un site de prédilection des xanthomes. Les dépôts se font à proximité de son insertion distale. L’atteinte est généralement bilatérale et symétrique. Le fascia plantaire superficiel est également un siège classique (atteinte moins fréquente que celle du tendon calcanéen). • IRM Spécificité : images évocatrices lorsque l’atteinte tendineuse est bilatérale et symétrique, ou lorsque plusieurs tendons sont touchés (calcanéens, tibiaux, fibulaires), avec un tendon très élargi, strié verticalement.
Tumeurs malignes
Kyste épidermoïde Le kyste épidermoïde est une pseudotumeur fréquente du tissu sous cutané. Il s’agit probablement d’une lésion posttraumatique, réactionnelle.
Histiocytome fibreux malin (9, 12) L’histiocytome fibreux malin (HFM) constituait jusqu’à tout récemment le plus fréquent sarcome des tissus mous de l’adulte. Le terme de HFM, introduit en 1963, provient de l’observation des fibroblastes qui en culture acquièrent des propriétés phagocytaires. La nouvelle classification des tumeurs des tissus mous proposée en 2002 par la World Health Organization (WHO) considère que l’HFM n’est plus une entité propre mais un ensemble de sarcomes pléiomorphes indifférenciés et constitue dorénavant un diagnostic d’exclusion. L’HFM nouvelle classification représenterait 5 % des sarcomes des tissus mous. Cette révolution anapathologique est basée sur les progrès de la microscopie électronique, de l’immunohistochimie et de la génétique moléculaire (12). Dans notre article, le terme et la fréquence de l’HFM font référence à l’HFM ancienne classification. La clinique, la fréquence globale, par âge, et par localisation anatomique, l’aspect IRM sont à redéfinir.
Synovialosarcome (1) Le synovialosarcome (fig. 16) survient typiquement à proximité d’une articulation, d’un tendon ou d’une bourse, mais il n’est que rarement intra-articulaire. Il prendrait origine de cellules mésenchymateuses primitives dont la différenciation ressemble à celle des synoviocytes. • élément clinique évocateur : non Masse de croissance si lente (des délais de vingt ans ont été rapportés) qu’elle simule un processus bénin. Douleur souvent présente. J Radiol 2008;89
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• fréquence globale et fréquence par âge Entre 15 et 35 ans, sans prédominance de sexe. Quatre-vingt à 95 % des synovialosarcomes intéressent les membres, 60 à 70 % siégeant aux membres inférieurs. C’est la tumeur maligne la plus fréquente du pied et de la cheville entre 6 et 45 ans. • compartiment anatomique évocateur ? : non Le synovialosarcome est typiquement profond mais peut être superficiel. • IRM – spécificité ? : non, images parfois évocatrices ; – signal proche de celui du muscle en T1 et hétérogène en T2. attention, les synovialosarcomes de petite taille ont généralement un signal homogène qui simule une lésion bénigne ; – composante hémorragique dans 40 % des cas ; – niveaux liquide-liquide dans 10 à 25 % des cas ; Environ un tiers des synovialosarcomes ont des calcifications, le plus souvent en périphérie de la tumeur : l’existence de
Tumeurs et pseudo-tumeurs des tissus mous de la région pied — cheville
trois intensités de signal en T2 avec saturation du signal de la graisse (sang, liquide, fibrose ou calcifications) est évocatrice du diagnostic. – siège : souvent le synovialosarcome adhère à un tendon ou à la capsule articulaire ; – forme : habituellement ronde ou multiloculée, bien limitée, entouré d’une pseudocapsule. la présence de septums est un élément évocateur du diagnostic ; – prise de contraste : non spécifique.
Sarcome à cellules claires (9, 13) Il s’agit d’une tumeur productrice de mélanine, encore appelée mélanome malin des tissus mous. • élément clinique évocateur : non, la croissance est très lente, sur plusieurs années ; • fréquence globale et fréquence par âge : 20 à 40 ans. • tumeur rare : 1 % de tous les sarcomes des tissus mous mais 75 % des cas touchent le membre inférieur avec une prédilection pour le pied et la cheville. • compartiment anatomique évocateur ? : non • IRM
a b c de
Fig. 16 :
a b c d e
Synovialosarcome plantaire gauche : volumineuse masse plantaire avec élargissement du premier espace intermétatarsien. La masse franchit le fascia plantaire superficiel. Le signal est hétérogène avec une plage de signal hyperintense en T1 qui correspond à du sang (aspect évocateur du synovialosarcome). radiographie du pied gauche de face. IRM, séquence sagittale en pondération rho avec saturation du signal de la graisse (saturation imparfaite). IRM, séquence axiale en pondération rho avec saturation du signal de la graisse. IRM séquence axiale T1. IRM séquence axialeT1 après injection de gadolinium.
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– spécificité ? : oui, par le signal, si la tumeur contient beaucoup de mélanine dont l’effet paramagnétique donne un hypersignal T1. Dans une série de 21 sarcomes à cellules claires prouvés histologiquement, 11 cas étaient en hypersignal T1 relatif aux muscles (13). – siège : à proximité d’un tendon, d’un ligament ou d’un fascia ; – prise de contraste non spécifique. • remarque : dans 86 % des cas le signal est homogène en T1 et en T2, avec dans 67 % des cas des limites nettes (13). Cette fausse apparence de bénignité rend en partie compte du mauvais pronostic de ces lésions par le biais d’une prise en charge chirurgicale initiale inadéquate.
Léiomyosarcome (1) • élément clinique évocateur : non • fréquence globale et fréquence par âge : Âge médian dans les 5e et 6e décennies. Neuf pour cent des sarcomes des tissus mous, toutes localisations confondues. Il est beaucoup plus fréquent dans le tractus urinaire et le tube digestif. Il s’agit de la 3e tumeur maligne des tissus mous après l’his-
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Tumeurs et pseudo-tumeurs des tissus mous de la région pied — cheville
tiocytome fibreux malin (cf. p. 32) et le liposarcome. Dans la région pied-cheville, c’est la 3e tumeur maligne après 56 ans. • compartiment anatomique évocateur : non ; • IRM : spécificité ? : aucune.
Liposarcome (1) Le liposarcome a une origine mésenchymateuse. • élément clinique évocateur : non • fréquence globale et fréquence par âge : Cinquième et 6e décennies (comme le lipome) mais, aux membres, le liposarcome se manifeste 5 à 10 ans plus tôt qu’un liposarcome de situation rétropéritonéale par exemple. Le liposarcome est la deuxième tumeur maligne en fréquence après l’histiocytome fibreux malin (cf. p. 32), toutes localisations confondues, mais seulement 1,8 % des cas siègent au pied. • compartiment anatomique évocateur : non • IRM – spécificité ? : plus un liposarcome est différencié, plus son signal est proche de celui de la graisse. Un liposarcome très peu différencié peut ne pas contenir de graisse. Le liposarcome bien différencié peut simuler un lipome Les formes myxoïde, pléiomorphe, à cellules rondes, sont pauvres en graisse. Le liposarcome myxoïde peut ressembler à un kyste homogène ; il est considéré comme la forme histologique la plus fréquente dans les extrémités. Les deux autres formes sont plus hétérogènes. – taille : généralement supérieure à 5 cm ; – forme : bien limitée.
Conclusion Toute masse des parties molles de la région pied-cheville est présumée maligne, quelles que soient son image et son ancienneté, sauf si des caractéristiques à la fois cliniques et radiologiques permettent d’identifier sans équivoque une lésion bénigne stéréotypée. Pour la survie du patient, seul un centre très spécialisé doit se charger de sa biopsie et de son exérèse éventuelle.
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Remerciements L’auteur tient à remercier les Éditions Sauramps qui ont donné l’autorisation de reprendre des éléments préalablement publiés dans « Tumeurs et pseudotumeurs des parties molles du pied et de la cheville, (V Bousson, M Wybier, P Bossard, JD Laredo) ; collection SavoirFaire en radiologie ostéo-articulaire coordonné par JD Laredo, M Wybier, L Bellaïche ; n° 6 ; p141-162 ; 2004.
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Références 1.
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Chapter 2. Soft Tissue Tumors in a Large Referral Population: Prevalence and Distribution of Diagnoses by Age, Sex, and Location. p. 3-35; Chapter 4. Lipomatous Tumors. p. 57-101; Chapter 8. Muscle Tumors. p. 217-33; Chapter 10. Synovial Tumors. p. 275-315. In: Kransdorf M, Murphey M, editors. Imaging of Soft Tissue Tumors. Philadelphia: W.B. Saunders Company; 1997. Berlin SJ. A laboratory review of 67,000 foot tumors and lesions. J Am Podiatr Assoc 1984;74:341-47. Kirby EJ, Shereff MJ, Lewis MM. Soft-tissue tumors and tumor-like lesions of the foot. J Bone Joint Surg 1989;71A:621-6.
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