Rev MPd lnternr
Une polyarthrite
1996; 17 (Sup@ 2):226s-227s 0 Elsevier. Paris
J Schmidt’, A Klisnick’, S Hary2, JM Ristori”
Expert-consultant SetvIce
de mkdecine
inteme,
CHU Bichat-Claude-Bernard,
LES FAITS CLINIQUES Un patient de 67 ans Ctait hospitalise le 15 juillet 1992 pour une polyarthrite rhumato’ide (PR) severe, seropositive, non destructrice. Ses antecedents associaient une fibrillation auriculaire traitee par digitaliques, un diabete non insulinodependant trait6 par regime, une cholecystectomie et tabagisme a 10 paquetslannee (a&t en 1978). Depuis 1 an, il avait des douleurs inflammatoires symetriques (poignets. Cpaules, genoux), avec derouillage matinal superieur a 4 heures. une ankylose importante et une synovite mod&e. Les globules blancs (GB) Ctaient a 5,6 G/L dont polynucleaires neutrophiles (PNN) 3,47 G/L et lymphocytes (L) 2 G/L, htmoglobine (Hb) 125 g/dL, VGM a 87 et plaquettes 373 G/L. La VS etait B 17 mm (1” h) et le fibrinogene a 4,20 g/L. L’electrophorese des proteines sanguines, les enzymes htpatiques et les ASLO etaient normales. Le bilan immunologique donnait : Waaler Rose (WR) l/64’, latex 217 UI, ACAN l/2560’ saris anti-ADN natifs et anti-ECT faiblement positifs mais non identifiables ; cryoglobulinemie, TPHA-VDRL et test de Coombs direct etaient negatifs. Les radiographies Cvoquaient une chondrocalcinose articulaire, sans manifestations de PR. Le diagnostic de PR seropositive, non destructrice. &it retenu (ARA 1987). Le traitement initial (antalgiques. anti-inflammatoires non steroi’diens), puis associe a des antipaludeens de synthese Ctait inefficace. Une corticotherapie (CT) parent&ale (2 mg/kg/j) administree 3 jours de suite, puis orale (prednisolone 10 mg/j) n’etait efficace qu’une semaine. I1 Ctait hospitalise en raison de l’aggravation de la PR et de l’anemie inflammatoire (myelogramme, biopsie
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cedex
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medullaire), d’une perte de poids (18 kg) et d’une fievre hectique, sans frissons ni sueurs. Sous 15 mg de prednisolone. la polyarthrite restait symptomatique : epaules, coude gauche, poignets, MCP et IPP des deux mains, chevilles et rachis cervical. Le reste de l’examen somatique Ctait normal. La biologie donnait : GB 4,18 G/L (2,l PNN, 1,82 L), Hb 9.4 g/dL, VGM a 80, plaquettes 406 G/L, VS 93 mm, fibrinogene 63.5 g/L et CRP 42 mg/L, augmentation polyclonale des IgA et des IgM. La fonction renale, les enzymes musculaires et htpatiques ttaient normales. Le bilan immunologique Ctait perturb6 : latex positif, WR positif au I/64’, FAN positifs au l/10 240” sansantiADN natifs ni anti-ECT, fractions C4 et C3 a la limite inferieure, activite hemolytique de la voie classiqueltemoin a 40 % et facteur B normal. Le groupe HLA Ctait A2, A28 B 16, B35, DR4, DRX, DQl, DQ3. L’enquete infectieuse (hemocultures, ECBU, coprocultures, BK des crachats et urinaires) et serologique (brucellose, Lyme, EBV, toxoplasmose) s’averait negative. Les radiographies osseusesetaient inchangees.La radiographie pulmonaire, l’echographie abdominale, l’endoscopie digestive haute, la capillaroscopie et la biopsie cutanee Ctaient normales. Le diagnostic de PR valid& un traitement par mtthotrexate intramusculaire (10 mg/semaine) Ctait debut& La premiere injection, associeependant 3 jours a 800 mg de methylprednisolone en bolus (relayee par une CT orale 12 mg/j), ameliorait bien le patient. L’htmogramme a j3 notait une chute des GB a 2 310 G/L, la remontee a 3 060/mmj a j7 autorisait la deuxieme injection. Une nouvelle chute des GB a 1 100 G/L (7’ injection) faisait stopper le methotrexate, inefficace jusqu’alors. A cette date, une pericardite cliniquement suspectee Ctait confirmee par l’echocardiographie. Le diagnostic Ctait remis en cause.
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Commumcatlon~
Initialement, le tableau peut evoquer une chondrocalcinose articulaire (CCA) dans sa forme <( PR like ~a, une hemochromatose en raison du diabete et de la CCA. Des observations de polyarthrites chroniques proches de la PR avec facteurs rhumato’ides et anticorps antinucleaires sont rapportees apres infection a parvovirus. Au tours de I’evolution, la survenue de la fievre fait discuter une endocardite bacterienne, la maladie de Still de I’adulte et la maladie de Whipple. La PR a debut tardif est generalement moins severe, a predominance rhizomelique, seronegative et sensible aux corticoides. La baisse du complement dans la PR peut exister en cas de vascularite, d’association a une cryoglobulinemie voire a un syndrome de Felty, dans lequel facteurs antinucleaires, anticorps anti-histones, cryoglobulinemie, presence de I’antigene DR4 ont ete rapportes. Un lupus et-ythemateux aigu et en particulier un lupus induit doit etre discute en raison de I’absence d’anticorps anti-ADN. Differents signes orientent cependant vers un syndrome paraneoplasique : I’age, I’amaigrissement, la fievre et I’inefficacite des traitements. Les polyarthrites paraneoplasiques peuvent se presenter comme une polyarlhrite rhumato’ide, s’accompagner d’une fasciite palmaire, d’une vascularite ou se reveler sous la forme d’un lupus. Un syndrome 11 lupus-like )) peut s’associer a une maladie de Hodgkin, un lymphome non hodgkinien, un myelome, une leucemie a tricholeucocytes ou a une tumeur (poumon, colon. sein, ovaire). Les anticorps antinucleaires sont souvent t&s Blew%, parfois associes a des anti-ADN et 5. une hypocomplementemie. La tendance a la neutropenie, I’elevation polyclonale des IgA et IgM chez ce patient sont possiblement liees a une hemopathie lympho’ide, peut-etre d’origine digestive. Le methotrexate a faible dose provoque une leucopenie dans 10 % des cas. Elle est favorisee par une carence en folate, I’age. I’insuffisance r&ale, des anomalies medullaires, I’hypoalbuminemie (amaigrissement chez ce patient). 1 Freundlich B, Makover D, Maul GG. A novel antinuclear antibody associated with a lupus like paraneoplastic syndrome Ann lntem Med 1988; 15:295 2 Goodman TA, Polisson RP. Methotrexate: adverse reactions and major toxicities. Rbeum Dis C/in North Am 1994;20:513-28
DkMARCHE
DIAGNOSTIQUE
L’absence de reponse aux traitements et le caractere
systemique (Ctat general tres altert, fievre hectique. PCricardite) avaient deja conduit a Climiner les etiologies infectieuses susceptibles de prendre le masque d’une PR, notamment l’endocardite d’osler. L’absence de criteres en faveur d’une autre connectivite ou d’une vascularite faisait evoquer l’hypothese paraneoplasique : cancer solide, syndromes lymphoou myeloproliferatif ou myelodysplasique. Un myelogramme et une biopsie medullaire s’imposaient en premittre intention. Le mytlogramme montrait une anernie refractaire avec exces de blastes (AREB). Sous CT (12 m&/j) et Aracytine8 sous-cutanee (5 mg matin et soir), le rhumatisme in1lammatoire, les signes generaux et la pericardite regressaient. DISCUSSION Les syndromes myelodysplasiques et myeloproliferatifs peuvent Ctre rev&%, par des manifestations articulaires et/au une vascularite [l-3], donnant le change avec un lupus, une PR, voire une PPR [4]. La prevalence est de IO % sur une serie retrospective de 162 patients [2]. Les manifestations articulaires Cvocatrices de PR surtout sent au premier plan dans les AREB ]2,3]. Notre observation illustre par les evolutions, clinique et biologique, et la reponse au traitement cytostatique, la relation certaine entre la <
)revelatrice et I’AREB secondairement diagnostiquee. Sa particularite reside dans le leurre diagnostique complet : l’hypothese de PR possible sur la presence de cinq criteres de I’ARA (1987) ttait confortee par l’appartenance au groupe HLA-DR4. RkFkRENCES I Pajus 1, Amor B. Manifestations syndromes mytlodysplasiques Mu/
Ostrocutic
1992;59:
rhumatologiques et my~loprolifbatifs.
associCes
aux
Rev Rhum
1 l-6
1 Castro M, Conn DL, Su WPD et al. Rheumatic manifestations in myelodysplastic syndromes. J Rheumurol I99 I ; IS:72 l-7 3 Kurmich PV. Ecker GA, Karah J. Rheumatic manifestations in patients with myelodysplastic and myeloproliferative diseases. J Rhemtrrol 1993;2 I : 1619-51 4 Kohli M, Bennett RM. An association of polymyalgia rheumatica with myelodybplastic syndromes. J Rhrumc~ol 1994;2 I : 1357-9