La Revue de médecine interne 32 (2011) 195
Lettre à la rédaction Utilité diagnostique de l’hypo-uricémie dans l’hyponatrémie par sécrétion inadéquate d’hormone antidiurétique : commentaire sur l’article de Passeron et al. Hypo-uricemia in the diagnosis of syndrome of inappropriate secretion of antidiuretic hormone: Comment on the article of Passeron et al. Keywords: Hypo-uricemia Uric acid
Mots clés : Hyponatrémie Acide urique
Nous avons lu avec intérêt l’article de Passeron et al. sur la faible utilité de la mesure de l’uricémie dans le diagnostic différentiel des hyponatrémies [1]. La sensibilité, la spécificité et le rapport de vraisemblance diagnostique de l’hypo-uricémie dans le diagnostic d’hyponatrémie par sécrétion inadaptée d’ADH (SIADH) étant évidemment dépendant des critères utilisés pour retenir le diagnostic de SIADH, il nous a paru utile de discuter certains points de méthodologie. Les patients ont été classés en hyponatrémie secondaire à un SIADH notamment en fonction de la natriurie. Il est possible, voire probable que certains patients classés comme n’ayant pas de SIADH (SIADH−) en raison d’une natriurie inférieure à 40 mmol/L présentaient en fait un SIADH dont les apports sodés étaient bas (par anorexie, etc.). La natriurie conservée, typique du SIADH, n’a de valeur diagnostique que si les apports sodés sont normaux. Dans environ 30 % des SIADH, la natriurie est inférieure à 30 mmol/L. Seule l’évolution de la natriurie sous l’effet d’une perfusion sodée permet de classer les patients correctement (ce qui en pratique n’est en général pas nécessaire grâce à l’anamnèse ou à l’évaluation du contexte clinique) [2]. Par ailleurs, l’exigence d’une osmolarité urinaire supérieure à 250 mOsm/kg H2 O pour pouvoir retenir le diagnostic de SIADH nous paraît également critiquable : des valeurs d’osmolarité plus basses que 250 mOsm/kg H2 O sont déjà inappropriées chez un patient cliniquement euvolémique, puisqu’elles ne correspondent pas au pouvoir de dilution maximal des urines. Dans le groupe SIADH− de cette série, certains patients ont une osmolalité urinaire très basse (94 et 123 mOsm/kg H2 O) et une natriurie très basse.
L’hyponatrémie de ces patients résulte en général d’un excès d’eau combiné à une déplétion sodée (tableau mixte le plus souvent) [3]. Il faut aussi rappeler que dans la cirrhose hépatique une hypouricémie secondaire à une clairance rénale d’acide urique augmentée est aussi fréquente [4]. Notons qu’aucun cas d’hyponatrémie secondaire à une cirrhose n’a été observé dans cette série, probablement parce que la prise de diurétiques était un critère de non-inclusion. Nous considérons que la mesure combinée de la fraction d’excrétion du sodium et de l’urée est le paramètre le plus performant pour différencier un SIADH d’une hyponatrémie de déplétion [2,5]. Nous partageons l’avis des auteurs que d’autres paramètres que l’uricémie doivent être utilisés pour diagnostiquer une hyponatrémie secondaire à un SIADH. Conflit d’intérêt Aucun. Références [1] Passeron A, Blanchard A, Capron L. Utilité diagnostique de l’hypo-uricémie dans l’hyponatrémie par sécrétion inadéquate d’hormone antidiurétique. Rev Med Interne 2010;31:665–9. [2] Decaux G, Musch W. Clinical laboratory evaluation of the syndrome of inappropriate secretion of antidiuretic hormone. Clin J Am Soc Nephrol 2008;3:1175– 84. [3] Musch W, Xhaet O, Decaux G. Solute loss plays a major role in polydypsia-related hyponatremia in both water drinkers and beer drinkers. Q J Med 2003;96:421– 6. [4] Decaux G, Dumont I, Naeije R, Mols P. High uric acid and urea clearance in cirrhosis secondary to “increased vascular volume”. Am J Med 1982;73: 328–34. [5] Musch W, Hedeshi A, Decaux G. Low sodium excretion in SIADH patients with low diuresis. Nephron Physiol 2004;96:11–8.
G. Decaux ∗ F. Vandergheynst Service de médecine interne, université Libre de Bruxelles, CHU d’Erasme, 808, route de Lennik, 1070 Bruxelles, Belgique ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (G. Decaux).
Disponible sur Internet le 6 janvier 2011
0248-8663/$ – see front matter © 2010 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.revmed.2010.12.003