VI – Les voies de passage entre les différents systèmes d’indemnisation de réparation du dommage psychique : vers une harmonisation ?

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DÉVELOPPEMENT PROFESSIONNEL CONTINU L’EXPERTISE MÉDICO-PSYCHOLOGIQUE D’ÉVALUATION DU DOMMAGE PSYCHIQUE (SUITE)

VI – Les voies de passage entre les différents systèmes d’indemnisation de réparation du dommage psychique : vers une harmonisation ? Pathways between the various compensation systems (common law, occupational diseases, victims of war and attack, victims of medical accident): Towards harmonization? Yann Auxéméry Service médical de psychologie clinique appliquée à l’aéronautique, hôpital d’instruction des armées Percy, 101, avenue Henri-Barbusse, 92140 Clamart cedex, France Reçu le 5 juillet 2017 ; accepté le 17 août 2017

Résumé Dans cet article, nous abordons les voies de passage existant entre les différents cadres juridiques de réparation du dommage précédemment détaillés. Alors qu’en droit commun une personne blessée ne saurait être indemnisée doublement pour le même dommage, l’indemnisation peut parfois être obtenue selon plusieurs systèmes sollicités d’emblée ou séquentiellement. Nous détaillons en premier lieu les cadres indemnitaires déployés au profit des personnes victimes d’attentat avant d’aborder les apports de la commission d’indemnisation des victimes d’infractions. Nous précisons ensuite les avancées de la jurisprudence concernant le passage de la réparation forfaitaire à la réparation intégrale du dommage, sous conditions, au profit des salariés, des fonctionnaires et des militaires. Enfin, nous évoquons les voies d’indemnisations spécifiques concernant le droit assurantiel, la prise en charge du handicap, et les dispositions des commissions de conciliation et d’indemnisation statuant en cas d’accident médical avec ou sans faute. ß 2017 Publié par Elsevier Masson SAS.

Abstract In this paper, we discuss the existing pathways between the different legal frameworks of psychic repair. If an injured person cannot be compensated twice for the same damage, compensation can sometimes be obtained according to several systems solicited from the outset or sequentially. First, we detail the compensation frameworks for the victims of attacks before discussing the contributions of the commission for the compensation of victims of crime. We then point out the

Adresse e-mail : [email protected]. http://dx.doi.org/10.1016/j.amp.2017.08.010 0003-4487/ß 2017 Publie´ par Elsevier Masson SAS.

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contributions of the case-law concerning the transition from flat-rate compensation to full compensation for damage, under conditions, for the benefit of employees, civil servants and soldiers. Lastly, we discuss the specific compensation possibilities considering legislation of insurance, disability, and medical accident. ß 2017 Published by Elsevier Masson SAS.

Mots clés : Attentat ; Expertise ; Dommages et intérêts ; Guerre ; Législation ; Réparation ; Syndrome post-traumatique ; Traumatisme psychique ; Victime Keywords: Damages and interests; Expertise; Legislation; Psychic repair; Post traumatic stress disorder; Terrorist attack; Victim; War

1. INTRODUCTION Dans cet article, nous abordons les voies de passage existant entre les différents cadres juridiques de réparation du dommage précédemment détaillés. Alors qu’en droit commun une personne blessée ne saurait être indemnisée doublement pour le même dommage, l’indemnisation peut parfois être obtenue selon plusieurs systèmes sollicités d’emblée ou séquentiellement. Nous détaillons en premier lieu les cadres indemnitaires déployés au profit des personnes victimes d’attentat avant d’aborder les apports de la commission d’indemnisation des victimes d’infractions. Nous précisons ensuite les avancées de la jurisprudence concernant le passage de la réparation forfaitaire à la réparation intégrale du dommage, sous conditions, au profit des salariés, des fonctionnaires et des militaires. Enfin, nous évoquons les voies d’indemnisations spécifiques concernant le droit assurantiel, la prise en charge du handicap, et les dispositions des commissions de conciliation et d’indemnisation statuant en cas d’accident médical avec ou sans faute. 2. LES CADRES INDEMNITAIRES DÉPLOYÉS AU PROFIT DES PERSONNES VICTIMES DE TERRORISME : INDEMNISATION DU FONDS DE GARANTIE, DEMANDE DE PENSION MILITAIRE D’INVALIDITÉ, PRISE EN CHARGE PAR LA SÉCURITÉ SOCIALE 2.1. Généralités Plusieurs associations ont œuvré à une évolution favorable du droit français en faveur des personnes victimes de terrorisme, cheminement qui a secondairement profité aux personnes victimes d’autres infractions. L’instruction du 12 novembre 2015 détaille les chaînes de secours et de soins, dont la prise en charge psychologique, ainsi que la prise en charge sociale et administrative des personnes victimes, dont le suivi est établi en interministériel. Une liste unique des personnes victimes est générée en différenciant les personnes décédées, blessées et impliquées. Les autorités judiciaires organisent des rencontres entre les personnes victimes et les différents services de l’État (judiciaires, d’aide aux victimes, d’identification des corps, médico-psychologiques. . .). Depuis le 18 janvier 1996 est proposée aux personnes victimes une expertise commune destinée à éclairer les administrations mobilisées (fonds de garantie, Sécurité sociale, sous-direction

des pensions militaires d’invalidité, juridictions civiles le cas échéant). En pratique, les indemnisations au titre des accidents du travail (ou des accidents en service concernant les fonctionnaires et les militaires) peuvent être engagées prioritairement lorsque la personne victime a été touchée dans le cadre de ses fonctions professionnelles. La place du fonds de garantie reste le plus souvent centrale. 2.2. Indemnisation sous l’égide du fonds de garantie Le fonds de garantie concernant les personnes victimes d’actes de terrorisme a été créé en 1986. Ses attributions se sont ensuite étendues au profit des victimes d’autres infractions en 1990, d’où le nom actuel de Fonds de Garantie des victimes des actes de Terrorisme et d’autres Infractions (FGTI). Le FGTI est géré par le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de Dommage (FGAO) créé en 1951 pour indemniser les personnes victimes d’accidents de la route dont les auteurs n’étaient pas assurés ou identifiés (ce fonds couvre également les accidents de chasse, les accidents causés par les animaux sans maître, les risques miniers et technologiques). Le FGTI est financé par la solidarité nationale par prélèvement sur les contrats d’assurance de biens auxquels s’ajoutent des placements et les produits de l’action récursoire contre les agresseurs. Dès qu’un fait terroriste a lieu, le procureur de la République en France, ou l’autorité diplomatique à l’étranger, informe le FGTI de l’identité des personnes victimes, afin que le fonds les contacte pour les assister dans la constitution de leur dossier (toute personne peut également contacter directement le FGTI). Pour être qualifié de terroriste par le FGTI, l’acte doit réunir deux critères : être une infraction en relation avec une entreprise individuelle ou collective, et, avoir pour but de troubler gravement l’ordre public par l’intimidation ou la terreur. Le FGTI indemnise les personnes victimes des actes terroristes postérieurs au 31 décembre 1984. Si l’acte a lieu en France, toute victime peut être indemnisée. À l’étranger, seules les victimes françaises et leurs ayants droit sont concernés. La procédure d’indemnisation suit les principes de réparation intégrale du droit commun en se référençant aux postes de préjudices de la nomenclature Dintilhac qui, rappelons-le, inclut un poste exceptionnel mobilisable dans ce cadre. La procédure varie en fonction de trois cas de figure :  en cas de blessures avec guérison sans séquelle, l’offre d’indemnisation peut être établie sur la base de certificats médicaux, de justificatifs de frais et de pertes de revenus ;

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 en cas de blessures avec séquelles, le FGTI verse une ou plusieurs indemnisations provisionnelles puis, peut demander à son médecin-conseil d’examiner la personne victime assistée du médecin de son choix afin de compléter puis de finaliser l’indemnisation une fois l’état clinique stabilisé ;  en cas de décès, l’offre d’indemnisation est adressée aux ayants droit et comprend l’indemnisation des préjudices patrimoniaux et extrapatrimoniaux. Soit la personne victime accepte l’offre dans les quinze jours, soit elle discute avec le fonds, soit elle assigne le fonds devant le TGI (si le montant ne convient pas ou si le fonds conteste la nature terroriste des faits). Notons que si les pertes vestimentaires peuvent être indemnisées partiellement sur justificatif, les préjudices matériels relatifs aux biens endommagés lors de l’acte terroriste ne sont pas indemnisés par le fonds (ils peuvent l’être par des contrats individuels d’assurance). Les indemnisations du fonds opèrent en déduction des versements produits par les organismes sociaux ; en revanche, les indemnisations des assurances individuelles (vie et non-vie) sont cumulables.

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reconversion mais aussi dans des centres de formation conventionnés. Dans l’urgence, l’ONACVG peut mettre en œuvre des aides financières. Toute concession de pension militaire d’invalidité, même si elle est temporairement suspendue lorsque la somme d’autres moyens d’indemnisation lui est supérieure (mais une procédure d’aggravation est toujours possible), ouvre aux droits afférents du CPMIVG : emplois réservés, gratuité des soins et des appareillages, avantages fiscaux, pension, carte d’invalidité (droits de priorité et réductions tarifaires dans les transports publics ; carte de stationnement prioritaire), affiliation de droit à la Sécurité sociale à partir de 85 % de taux d’invalidité. Les conjoints survivants comme les titulaires d’un PACS, les orphelins et les ascendants peuvent également se voir ouvrir des droits en qualité d’ayant cause. Les orphelins de moins de 21 ans peuvent acquérir le statut de pupille de la nation sur jugement du TGI, ce qui permet à l’ONACVG d’engager des aides diverses adaptées à chaque situation (subventions d’entretien, d’études, de vacances, exonérations des droits de scolarité, droit à pension sous certaines conditions).

2.3. Prise en charge par la Sécurité sociale Les personnes figurant sur la liste des victimes établie par le Parquet de Paris sont exonérées de participation aux soins pour l’ensemble des frais de santé engagés en lien avec cet événement. Cette prise en charge à 100 % du tarif de la Sécurité sociale est opérée sans avance de frais. La personne victime ou le proche parent d’une victime décédée ou blessée peut faire la demande, dans les dix ans suivant l’événement, d’une prise en charge à 100 % des consultations de suivi psychiatrique pendant deux ans et sans avance de frais. Les proches parents sont : le conjoint, le concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité, les ascendants et descendants jusqu’au 3e degré, les frères et sœurs nés au moment de la survenue de l’acte terroriste. Des secours et prestations, des aides humaines (constitution de dossier, écoute, lien avec d’autres administrations), et plus généralement des moyens supplémentaires de solidarité peuvent être engagés en fonction des besoins. En cas d’arrêt de travail, les assurés bénéficient du versement de leurs indemnités journalières sans jour de carence. Cette prise en charge des frais de santé peut se cumuler avec les prestations mobilisées en cas d’accident du travail, d’affection de longue durée, ou encore d’invalidité. 2.4. Dispositions du Code des Pensions Militaires d’Invalidité et des Victimes de la Guerre (CPMIVG) Par la loi du 23 janvier 1990 (rétroactive au 1er janvier 1982), la Direction Interdépartementale des Anciens Combattants attribue le statut de victime civile de guerre aux personnes victimes d’attentats. En tant que ressortissants de l’Office National des Anciens Combattants et Victimes de la Guerre (ONACVG), les personnes blessées peuvent bénéficier de l’action sociale et de l’assistance administrative de ses services départementaux, avec possibilité par exemple de prendre en charge des formations professionnelles dans les écoles de

3. PROCÉDURE D’INDEMNISATION DES PERSONNES VICTIMES D’INFRACTION : UNE JURIDICTION AUTONOME La Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infraction (CIVI) est une juridiction spécialisée autonome créée en 1983 et intégrée à chaque tribunal de grande instance afin d’indemniser des personnes victimes au cas où l’auteur de l’infraction serait inconnu ou insolvable. La CIVI peut être saisie indépendamment des juridictions judiciaires. La procédure est gratuite et la présence d’un avocat non indispensable. L’infraction concernée peut être volontaire ou involontaire mais ne sont pas pris en compte ici les accidents de chasse, les faits terroristes ni les accidents de la circulation sur le territoire national entrant dans le cadre de la loi Badinter. Si l’infraction a lieu sur le territoire national, peuvent être indemnisées les personnes de nationalité française, les ressortissants d’un état membre de la Communauté Européenne, et les personnes de nationalité étrangère. Si l’infraction a lieu à l’étranger, seules les personnes françaises peuvent prétendre à indemnisation. La faute de la victime peut exclure ou réduire l’indemnisation, elle est opposable aux ayants droit. Les faits reprochés doivent présenter le caractère matériel d’une infraction qui peut correspondre à une faute, une imprudence ou une négligence. Dans le cas d’une atteinte aux biens, le fait doit être qualifié de vol, d’escroquerie, d’abus de confiance, d’extorsion de fonds, de dégradation ou de détérioration. Le délai de saisine est de trois ans à compter de la date de l’infraction, délai prolongé d’un an à compter de la date de la dernière décision pénale mais, en cas de motif légitime à l’appréciation du président de la CIVI, ces délais peuvent être prolongés. Deux procédures d’indemnisation sont possibles :  en cas d’atteintes graves à la personne si les faits ont entraîné la mort, une incapacité permanente ou une incapacité

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Encadré 1. Rappel sur la définition de l’ITT pénale : Permettant de retenir le caractère contraventionnel, délictuel ou criminel d’une infraction, l’évolution jurisprudentielle de la notion d’Incapacité Totale de Travail (ITT « pénale ») l’a éloignée d’un référencement au « travail » : l’ITT correspond aujourd’hui à la perte de la totale capacité (et non de la capacité totale) d’effectuer les gestes de la vie courante. En d’autres termes, l’ITT ne signifie pas l’impossibilité de toute activité, mais impossibilité de réaliser l’intégralité d’une ou de plusieurs activités de la vie quotidienne (se lever, s’habiller, conduire. . .). Ainsi n’existe-t-il pas de relation strictement parallèle entre ITT et un éventuel congé de maladie : un nourrisson comme une personne en recherche d’emploi peuvent donc être concernés par l’ITT pénale. Des conséquences fonctionnelles sur la vie quotidienne d’un traumatisme psychique peuvent justifier de coter une ITT pénale, souvent prévisionnelle et qui doit donc être réévaluée.

totale de travail (ITT pénale) égale ou supérieure à un mois (Encadré 1), ou bien s’ils constituent une infraction de viol ou d’agression sexuelle, le dommage est réparé intégralement ;  en cas d’atteintes « légères » à la personne et autres faits, une indemnisation est possible en fonction de conditions de ressources, de preuve que l’auteur de l’infraction est inconnu ou insolvable, de subsidiarité (après réparation par une entreprise d’assurance, un organisme social ou tout autre débiteur), de se trouver dans une situation matérielle ou psychologique grave à cause de l’infraction. Le plafond de l’indemnisation est fixé à 4500 euros environ. Le requérant saisit la CIVI de son domicile, celle du lieu de la juridiction pénale saisie de l’infraction, ou la CIVI de Paris pour les infractions commises à l’étranger. La requête est envoyée ou déposée au secrétariat de la CIVI, pour transmission par le greffe au FGTI qui présente une offre dans un délai de deux mois. Si la personne victime ou ses ayants droit accepte(nt) l’offre, le constat d’accord est transmis pour homologation au président de la CIVI. La procédure devient judiciaire si le FGTI refuse l’indemnisation de manière toujours motivée, ou si la personne victime refuse l’offre. Un magistrat instruit alors la requête. Le procureur de la république et le FGTI présentent leurs observations au plus tard quinze jours avant l’audience. Après débat en audience non publique, la décision exécutoire est notifiée au demandeur et au fond de garantie. Un appel peut être formulé par les parties. 4. DE LA RÉPARATION FORFAITAIRE À LA RÉPARATION INTÉGRALE DU DOMMAGE AU PROFIT DES SALARIÉS, DES FONCTIONNAIRES ET DES MILITAIRES : LES APPORTS DE LA JURISPRUDENCE Historiquement établie d’après une réparation forfaitaire et non pas intégrale comme en droit commun, la

réparation juridique des accidents et maladies à caractère professionnel des salariés, des fonctionnaires et des militaires a évolué grâce à la jurisprudence vers une possibilité de réparation complémentaire voire intégrale du dommage. 4.1. La faute inexcusable de l’employeur La loi du 9 avril 1898 avait instauré une réparation particulière des incapacités résultant d’accidents du travail : favorablement d’un côté car le salarié n’avait pas à apporter la preuve d’une faute de l’employeur mais, en contrepartie, la réparation restait forfaitaire et non intégrale. Se substituant partiellement à la responsabilité de l’employeur, ce régime spécifique d’indemnisation garantit automaticité, rapidité et sécurité de la réparation. L’évolution jurisprudentielle édicte qu’un salarié ou ses ayants droit peu(veu)t obtenir une meilleure indemnisation à condition d’établir l’existence d’une faute inexcusable de l’employeur, lequel perd alors la subrogation de la Sécurité sociale pour se retrouver face à la personne victime (et ses ayants droit) selon les modalités de réparation du droit commun avec réparation intégrale des préjudices. D’après une jurisprudence ancienne, la faute inexcusable de l’employeur revêt les caractéristiques suivantes : gravité exceptionnelle (violation des règlements de sécurité par exemple) ; acte ou omission volontaire ; conscience du danger que devait en avoir son auteur (notamment en cas d’exercice du droit de retrait par un salarié, du droit d’alerte par le CHSCT, d’observations de l’inspection du travail) ; absence de cause justificative et d’intention. Par ses arrêts concernant les maladies professionnelles liées à l’amiante, la Cour de Cassation a précisé en 2002 les déterminants de la faute inexcusable de l’employeur qui doit avoir conscience du danger auquel est exposé le salarié envers lequel il est responsable d’une obligation de résultat de sécurité. La faute inexcusable de l’employeur n’est pas retenue dans les cas suivants : impossibilité objective de connaissance du danger, faute déterminante et exclusive de la victime ou d’un tiers, force majeure. Répondant à une question prioritaire de constitutionnalité, le Conseil Constitutionnel confirmait le 10 juin 2010 que les salariés peuvent, en cas de faute inexcusable de leur employeur, se voir octroyer une « indemnisation complémentaire » comportant une majoration des indemnités à laquelle peut s’adjoindre une demande de réparation plus large concernant les « souffrances physiques et morales » endurées, les préjudices esthétiques et d’agrément, et le préjudice résultant de la perte ou de la diminution des « possibilités de promotion professionnelle » (Décision n8 2010-8 QPC du 18 juin 2010). Toutefois, la réparation des préjudices pourrait ici ne pas être « intégrale » suivant les règles du droit commun car la jurisprudence fait cohabiter deux systèmes de réparation : forfaitaire, d’une part, et selon certains postes de préjudice de la nomenclature Dintilhac, d’autre part. De fait, le Conseil Constitutionnel précise qu’en cas de « faute intentionnelle de l’employeur », la personne victime et ses ayants droit peuvent

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demander une réparation du préjudice causé conformément aux règles de droit commun, en vue d’une réparation intégrale. Enfin, la jurisprudence la plus récente nous semble celle de la Cour de Cassation qui ouvre la voie à une réparation intégrale de tous préjudices en cas de faute inexcusable de l’employeur (sauf le DFP et le retentissement professionnel pris en charge par la rente en accident de travail ou maladie professionnelle) (Civ. 2e, 4 avril 2012). En pratique, le salarié envoie un courrier à la caisse de Sécurité sociale en indiquant qu’il invoque la faute inexcusable de son employeur. Si la conciliation échoue, le salarié devra saisir le TASS sous réserve d’un délai de prescription fixé à deux ans à compter du jour de l’accident ou de la cessation du paiement de l’indemnité journalière. La détermination du taux de majoration de la rente et son montant dépendent du caractère de gravité de la faute imputable à l’employeur et non de la gravité du préjudice. La réparation des préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l’employeur. La jurisprudence qui tendait au départ à mieux prendre en charge les victimes de risques physiques (machines dangereuses) et chimiques (produits dangereux) tend à s’étendre à l’ensemble des risques pesant sur la santé physique et mentale : violences physiques ou morales au travail dont le harcèlement, souffrance au travail, « burn-out ». 4.2. La réparation intégrale du dommage au profit des fonctionnaires Afin de compenser les pertes de revenus et l’incidence professionnelle causées par les infirmités résultant d’accident en service ou de maladies contractées ou aggravées par le fait du service, un fonctionnaire peut prétendre à une réparation forfaitaire prenant la forme d’une allocation temporaire d’invalidité, voire, en cas d’incapacité permanente à poursuivre l’exercice de sa fonction sans possibilité de reclassement, d’une pension de retraite rémunérant les services, pension qui s’associe à une rente viagère d’invalidité. Par son arrêt dit « Moya-Caville », le Conseil d’État ajoute que ces dispositions « ne font pas obstacle » à une indemnisation complémentaire du fonctionnaire par la personne publique même en l’absence de faute de celle-ci, en prenant en compte les « souffrances physiques et morales et les préjudices esthétiques ou d’agrément ». Cette évolution est justifiée par la haute juridiction dans le cadre de « l’obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu’ils peuvent courir dans l’exercice de leurs fonctions » (Conseil d’État, Assemblée, no 211106, 4 juillet 2003). La responsabilité de l’administration est donc engagée, même sans faute, sur la base du risque créé par l’activité du service. Ce régime de responsabilité et de réparation est applicable aux contractuels et aux collaborateurs occasionnels du service public comme les sapeurs pompiers volontaires. Le fonctionnaire établit une déclaration d’accident en service ou de maladie à caractère professionnel à l’administration, laquelle peut s’aider du médecin agréé et de la commission de réforme pour statuer.

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De surcroît, la haute juridiction ne voit pas non plus d’obstacle à la possibilité pour le fonctionnaire d’engager une action de droit commun en vue d’aboutir à une réparation intégrale, « notamment » en cas de faute de l’État (CE n8 211106, 4 juillet 2003). L’agent peut prétendre à ce supplément d’indemnisation en cas de faute engageant la responsabilité de la collectivité ou de l’établissement (manquement à une obligation de prévention, organisation défaillante, insuffisance des moyens collectifs et individuels de protection, défaut d’adaptation de poste ou de reclassement nécessaire. . .) ; la faute lourde ou inexcusable ou d’une particulière gravité n’est pas exigée ; la faute simple, dès lors qu’elle est prouvée, suffit. Cette jurisprudence a été précisée près d’un an plus tard, en statuant sur les conséquences d’un accident de la circulation survenant pendant le service d’un fonctionnaire des postes devenu tétraplégique (CE, n8 224276, 15 juillet 2004). L’indemnisation complémentaire que l’accidenté en service peut demander correspond à la réparation des « souffrances physiques et morales ainsi que des préjudices esthétiques et des troubles dans les conditions d’existence ». De surcroît, le blessé peut, « à la condition d’établir » une faute de l’administration, prétendre à l’indemnisation de « ses autres chefs de préjudice, dans la mesure où ceux-ci ne le seraient pas déjà par le versement de pensions ». La haute juridiction retiendra pour cette affaire qu’en l’absence de faute de l’administration, le requérant ne peut pas demander une indemnisation pour les frais de tierce personne et d’aménagement de son appartement, ainsi que pour le préjudice de carrière. Toutefois, le Conseil note qu’en sus des souffrances endurées et du préjudice esthétique subi, l’invalidité interdit au blessé « l’accomplissement de la plupart des actes de la vie courante, comporte des conséquences graves sur sa vie personnelle et sur ses activités professionnelles dont il a été privé ; qu’il subit ainsi de graves troubles de caractère personnel dans ses conditions d’existence ; qu’il sera fait une juste appréciation de la part personnelle du préjudice subi par l’intéressé en l’évaluant à 200 000 euros » (CE, n8 224276, 15 juillet 2004). Cette jurisprudence du Conseil d’État a été confirmée en 2013. Alors que l’allocation temporaire d’invalidité comme la rente viagère d’invalidité réparent forfaitairement les « pertes de revenus et l’incidence professionnelle », pour le Conseil d’État ces avantages « ne font pas obstacle » à l’indemnisation complémentaire « des préjudices patrimoniaux d’une autre nature ou des préjudices personnels » même en l’absence de faute de l’administration (CE, n8 353798 du 16 décembre 2013). En particulier, l’allocation temporaire d’invalidité n’ayant pas pour objet de rembourser les « frais de santé », ceux-ci sont indemnisables (CE, n8 353798 du 16 décembre 2013). Le fonctionnaire ne peut prétendre à l’indemnisation d’un préjudice professionnel que si la responsabilité de son établissement n’est engagée « à un autre titre que son obligation de protéger ses agents contre les risques qu’ils peuvent courir dans l’exercice de leurs fonctions » (car cette disposition est couverte par la rente et la pension) (CE, n8 353798 du 16 décembre 2013).

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4.3. Vers la réparation intégrale du dommage pour les militaires blessés en service 4.3.1. Évolution de la jurisprudence Le CPMIVG permet une indemnisation forfaitaire visant réparation du dommage causé par une séquelle temporaire ou définitive, résultant d’une blessure ou d’une maladie, survenue dans des conditions précises de service et sous réserve d’un taux d’invalidité minimum. Si les préjudices patrimoniaux sont à la charge de l’État grâce à d’autres moyens (maintien en service avec dérogation aux normes d’aptitude, emploi dans une autre spécialité, emploi civil de la défense éventuellement reconnu comme travailleur handicapé. . .), les préjudices extrapatrimoniaux de droit commun sont globalement exclus des PMI. La PMI détermine ainsi forfaitairement la réparation dans le cadre de l’obligation incombant à l’État de garantir les militaires contre les risques qu’ils courent dans l’exercice de leur mission. Une jurisprudence très récente rappelait que la PMI a pour objet de réparer « d’une part, les pertes de revenus et l’incidence professionnelle de l’incapacité physique et, d’autre part, le déficit fonctionnel, entendu comme l’ensemble des préjudices à caractère personnel liés à la perte de la qualité de vie, aux douleurs permanentes et aux troubles ressentis par la victime dans ses conditions d’existence personnelles, familiales et sociales », à l’exclusion des souffrances endurées avant consolidation, des préjudices esthétiques, d’agrément, sexuel et d’établissement (Cour Administrative d’Appel de Bordeaux, Recueil Lebon N8 13BX00567, 11 mai 2015). La possibilité de bénéficier dans le cadre de la PMI du recours à une tierce personne est prévue à l’article L18 du CPMIVG. Premier assouplissement de ce système, la loi n8 83–605 permettait aux conscrits du service national et à leurs ayants droit, en cas d’accident si la responsabilité de l’État était engagée, de bénéficier d’une réparation intégrale du dommage selon les règles du droit commun. À partir de 1999, les militaires blessés pendant une période de réserve bénéficient aussi d’une réparation intégrale du préjudice lorsque la responsabilité de l’État est engagée. L’arrêt du Conseil d’État du 1er juillet 2005, dit « Brugnot », instaure un changement radical car il offre pour tout militaire ayant présenté un « accident de service » et/ou une « maladie à caractère professionnel », voire à ses ayants droit en cas de décès, la possibilité d’une indemnisation complémentaire même en l’absence de faute de l’État. Cette indemnisation complémentaire concerne uniquement certains préjudices extrapatrimoniaux : « des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d’agrément [. . .] distincts de l’atteinte à l’intégrité physique » (CE, 1er juillet 2005, n8 258208). De surcroît, la haute juridiction notait la possibilité pour les militaires, « notamment » en cas de faute de l’État, d’engager une action de droit commun en vue de demander réparation intégrale de tous les préjudices. Dans ce cadre, l’indemnisation d’un préjudice moral est prévue pour les ayants droit en sus de la pension au titre du CPMIVG. La haute juridiction administrative rappelle dans un arrêt rendu le 7 octobre 2013 que si le titulaire d’une pension a subi

du fait de l’infirmité imputable au service d’autres préjudices, il peut prétendre à une indemnité complémentaire égale au montant de ceux-ci. Dans l’hypothèse où le dommage « engage la responsabilité de l’État à un autre titre que la garantie contre les risques courus dans l’exercice des fonctions, et notamment lorsqu’il trouve sa cause dans des soins défectueux [. . .] l’intéressé peut prétendre à une indemnité complémentaire au titre des préjudices que la pension a pour objet de réparer, si elle n’en n’assure pas une réparation intégrale » (CE n8 337857, arrêt du 7 octobre 2013). 4.3.2. Procédure La durée de prescription est de quatre ans à compter de la date à laquelle la personne victime est en mesure de connaître l’origine du dommage ou du moins de disposer d’indications suffisantes selon lesquelles ce dommage pourrait être imputable au fait de l’administration. En pratique, la date retenue pour fixer le point de départ de la prescription est celle de la consolidation médicale des lésions ou celle du décès : il y a prescription au 1er janvier de l’année qui suit ces quatre ans. Une aggravation ou une nouvelle infirmité fait courir un nouveau délai de quatre ans. Le militaire doit établir une demande au service local du contentieux (SLC) en joignant un certificat de consolidation : une expertise médicale est ensuite diligentée afin qu’une proposition d’indemnisation soit établie (en cas de blessure ou de maladie contractées en OPEX, seul le SLC de Villacoublay est compétent). Les contestations sont portées devant le tribunal administratif en cas de réponse défavorable de la commission de recours des militaires. Les ayants droit d’un militaire décédé par le fait ou à l’occasion du service s’adressent directement à la direction des affaires juridiques (DAJ) du Secrétariat Général pour l’Administration (SGA). Une personne victime ayant commis une faute ayant participé à la réalisation de son dommage peut voir son indemnisation limitée. En cas de faute détachable du service, le droit à indemnisation du militaire est exclu. Enfin, si une blessure est causée à un militaire en service par un tiers identifié et qu’une action directe est possible à son encontre par le militaire, cette solution peut être privilégiée. 4.3.3. L’articulation pratique des PMI et de la jurisprudence Brugnot Même si une PMI est refusée par la SDP pour des raisons de non-imputabilité au service ou d’un pourcentage d’invalidité inférieur au minimum indemnisable dans ce système, la jurisprudence Brugnot peut être mobilisée, car :  l’imputabilité au service est ici étudiée par les services du commissariat alors que l’éventuelle faute de l’État est appréciée par la direction des affaires juridiques du SGA ;  il n’existe pas de déficit fonctionnel seuil pour procéder à l’indemnisation. En cas d’accident de la circulation du fait d’un véhicule terrestre à moteur (civil et/ou militaire) peut se voir également appliquée la jurisprudence Brugnot (notamment en l’absence de tiers responsable identifié).

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5. VOIES DE PRISES EN CHARGE TRANSVERSALES ET MOBILISABLES PAR TOUS 5.1. Assurances privées et mutuelles – Cas particulier de la loi Badinter 5.1.1. Assurances privées et mutuelles Chacun peut souscrire des contrats d’assurance en vue d’indemniser, par exemple, l’incapacité de travail temporaire ou permanente, la perte totale et irréversible d’autonomie, ou encore l’invalidité absolue définitive. Un contrat d’assurance privée peut proposer des indemnités journalières en cas d’hospitalisation ; une mutuelle peut prendre en charge des frais de consultation de psychiatrie ou de psychologie restés à charge. Le barème fait souvent référence au concours médical même si un assureur peut contractualiser son propre barème. Des exclusions de garantie concernent souvent les troubles psychiques. Notons que les personnes blessées doivent parfois, pour des raisons contractuelles, déclarer leurs troubles dans des temps ne correspondant par forcément à leurs possibilités psychiques. La procédure contentieuse est amiable avant une médiation puis, une contestation devant les juridictions civiles. 5.1.2. Loi Badinter : une procédure d’indemnisation rapide des accidents de circulation selon les principes du droit commun Destinée à accélérer les procédures assurantielles concernant les accidents impliquant un véhicule terrestre à moteur, la loi Badinter du 5 juillet 1985 permet un règlement amiable sur le modèle de la réparation intégrale du droit commun. Les piétons, cyclistes ou passagers sont intégralement indemnisés de leurs dommages (sauf provocation volontaire du fait générateur comme suite à une tentative de suicide par exemple), alors que l’indemnisation du conducteur peut être limitée en fonction de sa responsabilité et des dispositions de son contrat d’assurance. Les salariés, les fonctionnaires et les militaires peuvent en bénéficier en cas d’accident en lien avec leurs fonctions professionnelles, notamment en cas de tiers responsable. L’assureur garantissant la responsabilité civile du tiers responsable organise les expertises médicales et fait une offre d’indemnisation dans les trois mois après la déclaration d’accident (ou dans les huit mois si le préjudice n’est pas entièrement quantifié ou que la responsabilité n’est pas clairement établie). Si le responsable de l’accident est inconnu ou n’est pas assuré, ou si l’accident a été causé par un animal sauvage, c’est le Fonds de garantie des assurances obligatoires de dommages (FGAO) qui peut intervenir. 5.2. Prise en charge du handicap par les Maisons Départementales des Personnes Handicapées Les Maisons Départementales des Personnes Handicapées (MDPH) ont été créées par la loi du 11 février 2005 pour

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l’égalité des droits et des chances des personnes handicapées. Elles attribuent des prestations via la Commission des Droits et de l’Autonomie des Personnes Handicapées (CDAPH) qui reconnaît le handicap et statue sur l’aptitude à l’emploi. Les aides attribuées sont de plusieurs types :  administratives, avec délivrance de cartes d’invalidité ou de reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH) ;  financières, telles l’allocation adulte handicapé (AAH) et la prestation de compensation du handicap (PCH) ;  de formation et d’orientation professionnelle ;  diverses prestations comme le renouvellement de l’allocation pour tierce personne. La RQTH a pour objectif de faire bénéficier d’aide à la réadaptation professionnelle, d’obtenir un soutien pour la recherche d’emploi, d’accéder plus facilement à la fonction publique, d’aménager le poste et les horaires de travail. La PCH est une compensation pour réaliser les actes essentiels de la vie quotidienne avec cinq aides possibles : humaines, techniques, animalières, aménagement du logement et du véhicule, dépenses liées au handicap. La décision rendue par la MDPH peut faire l’objet d’une demande de conciliation amiable ou d’un recours gracieux. La voie de recours contentieuse est différente en fonction de la nature de la décision :  les compensations du handicap sont du ressort du tribunal du contentieux et de l’incapacité (TCI) ;  les recours concernant la RQTH, l’orientation professionnelle, les primes de reclassement, l’AAH sont du ressort du tribunal des affaires sanitaires et sociales (TASS) ;  le contentieux concernant le renouvellement d’une AAH ou d’une carte d’invalidité est du ressort du tribunal administratif (TA). 5.3. Les Commissions de conciliation et d’Indemnisation (CCI) concernant les accidents médicaux avec ou sans faute L’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux (ONIAM) a pour principales missions d’indemniser les personnes victimes :  d’aléa thérapeutique ou d’accident médical non fautif ;  d’accident médical fautif en cas de défaillance de l’assureur ;  d’infections nosocomiales ;  de la recherche biomédicale lorsque le promoteur de la recherche a prouvé l’absence de faute à sa charge ;  contaminées par le VIH dans les suites d’une transfusion ;  présentant des dommages consécutifs à une vaccination obligatoire. Si l’indemnisation peut être fixée par un magistrat dans le cadre d’une procédure contentieuse, la personne victime peut aussi saisir la commission de conciliation et d’indemnisation des accidents médicaux (CCI). La CCI favorise la résolution des conflits entre usagers et professionnels de santé et permet, dans le cadre du décret du 4 avril 2003, l’indemnisation des patients victimes d’un accident médical grave, ayant pour origine un acte de prévention, un acte

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de diagnostic ou un acte thérapeutique, à condition que l’acte en cause soit postérieur au 4 septembre 2001. Offrant la possibilité d’une résolution amiable, la CCI peut être saisie directement par la personne victime dans un délai de dix ans à compter de la consolidation du dommage, ou par ses ayants droit en cas de décès. La conciliation concerne les patients insatisfaits des soins reçus et/ou en désaccord avec un professionnel ou un établissement de santé, et/ou se retrouvant victime d’un dommage dont la gravité est inférieure au seuil requis pour permettre une indemnisation. Pour bénéficier d’une procédure de règlement amiable en CCI, le dommage lié à l’acte médical doit remplir l’une des conditions suivantes :  entraîner un taux d’AIPP supérieur à 24 % ;  impliquer un arrêt temporaire des activités professionnelles pendant au moins six mois consécutifs (ou six mois non consécutifs sur une période de douze mois) ;  entraîner des gênes temporaires constitutives d’un déficit fonctionnel temporaire (DFT) supérieur ou égal à un taux de 50 % pendant au moins six mois consécutifs (ou six mois non consécutifs sur une période de douze mois), et à titre exceptionnel ;  lorsque la personne victime est déclarée définitivement inapte à exercer son activité professionnelle, ou lorsque ses conditions d’existence se trouvent gravement troublées. Une expertise est alors réalisée par un praticien inscrit sur une liste spécifique, avant convocation des parties devant la CCI qui émettra un avis en précisant les éléments nécessaires à une offre d’indemnisation selon les principes du droit commun. Si la commission conclut à un aléa ou à une infection nosocomiale grave, elle transmet un avis en ce sens à l’ONIAM, en précisant par ailleurs la nature des préjudices subis par la victime, ou ses ayants droit, ainsi que leur étendue. En cas d’aléa, l’ONIAM ne peut indemniser que la victime directe, ou les ayants droit de la victime uniquement en cas de décès de cette dernière. Si la commission conclut à une faute, l’avis est adressé au responsable et à son assureur qui aura la charge de faire une offre à la victime (ou/et aux victimes par ricochets ainsi

qu’éventuellement aux ayants droit en cas de décès). Quand l’ONIAM intervient en substitution d’un assureur défaillant, il applique les règles de droit commun au profit des personnes victimes directes et indirectes. 6. CONCLUSIONS Alors qu’en droit commun nul ne pourrait être indemnisé doublement pour le même dommage, plusieurs cadres juridiques peuvent souvent être articulés. Alors que la jurisprudence tend vers une harmonisation des principes de la réparation des préjudices, cet exercice peut être complexe en pratique car la définition des concepts médico-légaux de même que les barèmes ne sont pas strictement superposables d’un cadre indemnitaire à un autre. DÉCLARATION DE LIENS D’INTÉRÊTS L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts. Les idées exprimées dans cet article ne sont que celles de l’auteur et ne constitues aucunement le point de vue officiel du service de santé des armées français. POUR EN SAVOIR PLUS Auxéméry Y. Première partie de ce dossier de Développement Professionnel Continu publié aux Annales Médico-Psychologiques. L’expertise médico-psychologique d’évaluation du dommage psychique. Ann Med Psychol 2017;175(4):384–5. Auxéméry Y. I – Les points clés de l’expertise médico-psychologique d’évaluation du dommage en psychotraumatologie. Ann Med Psychol 2017;175(4):386–92. Auxéméry Y. II – Le code des pensions militaires d’invalidité applicable aux personnes victimes civiles de guerre et d’attentats. Ann Med Psychol 2017;175(4):393–400. Auxéméry Y. III – L’évaluation du dommage psychique en droit commun. Ann Med Psychol 2017;175(4):401–9.