Comment faire une adénoïdectomie chez l’enfant ?

Comment faire une adénoïdectomie chez l’enfant ?

Annales d’Otolaryngologie et chirurgie cervico-faciale 126 (2009) 162–164 COMMENT FAIRE Comment faire une adénoïdectomie chez l’enfant ? How to do a...

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Annales d’Otolaryngologie et chirurgie cervico-faciale 126 (2009) 162–164

COMMENT FAIRE

Comment faire une adénoïdectomie chez l’enfant ? How to do an adenoidectomy in children? D. Bakhos a,b, S. Pondaven a, M. Devault a, E. Lescanne a,*,b a b

Unité ORL et chirurgie cervico-faciale pédiatrique, CHRU de Tours, 37044 Tours, France Université François-Rabelais de Tours, Tours, France

Reçu le 29 mars 2009 ; accepté le 30 mars 2009 Disponible sur Internet le 1 mai 2009

L’adénoïdectomie permet l’ablation des végétations adénoïdes au niveau du rhinopharynx. Le but est double : ôter le tissu lymphoïde altéré par l’inflammation chronique et lever l’obstacle mécanique. Ce geste opératoire nécessite une bonne coopération entre tous les intervenants : chirurgien, anesthésiste et infirmières [1,2].

sera reportée de quelques jours. Pour éviter qu’une insuffisance vélaire se développe dans les suites opératoires, une fente palatine, une division sous-muqueuse ou une luette bifide doivent être recherchées à l’examen clinique. La découverte de troubles de la crase sanguine ne contre-indique pas l’intervention en cas de nécessité.

1. LES INDICATIONS OPÉRATOIRES [3]

3. LA TECHNIQUE OPÉRATOIRE [4]

L’adénoïdectomie est proposée en cas d’otites moyennes aiguës récidivantes (trois épisodes en moins de six mois avec un intervalle libre de six semaines entre chaque épisode). L’adénoïdectomie ne peut se concevoir qu’après échec des autres thérapeutiques (antibiothérapie curative, fer en cas de carence martiale). Elle est recommandée en association avec la pose d’aérateurs transtympaniques, dans le cadre d’une otite séromuqueuse persistante avec retentissement auditif (surdité de transmission) et ayant des répercussions dans la vie courante (familiale, scolaire ou sociale). Enfin, en cas d’obstruction chronique des voies aériennes supérieures, en rapport avec une hypertrophie adénoïdienne majeure, l’adénoïdectomie est recommandée.

Chez l’enfant non intubé, la coordination entre l’ORL et l’anesthésiste est fondamentale car le geste doit être très rapide. L’équipe doit bien se connaître et maîtriser les signes de réveils qui témoignent de la réapparition du réflexe de protection des voies aériennes. En pratique, la stimulation pharyngée à l’abaisse-langue provoque une contraction pharyngée et on doit attendre une contraction franche des piliers postérieurs pour réaliser l’adénoïdectomie. L’enfant est installé en décubitus dorsal. Le chirurgien est à sa droite, l’anesthésiste à sa tête qu’il maintient dans ses mains. Un bon éclairage est obtenu par la lumière frontale (miroir de Clar) ou bien à l’aide du scialytique. Un ouvre-bouche est placé en prenant soin de ne pas léser les dents de lait ou de pincer les lèvres. Un abaisse-langue panier est ensuite introduit jusqu’à la paroi pharyngée postérieure pour exposer l’isthme pharyngonasal et isoler les voies aériennes sous-jacentes. L’adénotome est saisi par la main dominante entre le pouce et l’index (le pouce étant au dessus et l’index en-dessous). Il est introduit jusqu’à atteindre la paroi postérieure du pharynx. On remonte l’adénotome sagittalement jusqu’au toit du rhinopharynx en restant parallèle à la paroi postérieure. Une légère poussée horizontale va permettre de faire rentrer les végétations adénoïdes au niveau de la partie tranchante de l’adénotome. L’instrument est ensuite basculé vers le bas pour détacher un paquet de végétations. Elles apparaissent dans l’oropharynx et

2. LES CONTRE-INDICATIONS [3] Il n’existe pas de contre-indications absolues, cependant nous ne réalisons pas ce geste pour des enfants porteurs du syndrome 22q11 du fait du risque de décompensation d’une insuffisance vélaire. De plus il est rare d’effectuer ce geste avant l’âge de neuf mois. En cas de syndrome fébrile, l’intervention * Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (E. Lescanne).

0003-438X/$ see front matter ß 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. doi:10.1016/j.aorl.2009.03.007

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sonde d’intubation en cas d’intubation nasotrachéale. Si on désire une exposition large du rhinopharynx, le voile est relevé par deux sondes introduites dans chaque fosse nasale puis récupérées dans la bouche avant d’être nouées sur la lèvre supérieure. 4. SOINS ET SUIVI POSTOPÉRATOIRE Des lavages des fosses nasales peuvent être prescrits, associés à des antalgiques, à la demande en évitant l’acide salicylique. Cette intervention se pratique en ambulatoire. La sortie est autorisée après un examen clinique à la recherche d’un saignement actif. Fig. 1. Instrumentation lors d’une adénoïdectomie. 1 : adénotome ; 2 : abaisse-langue panier.

tombent dans l’abaisse-langue panier. Cette manœuvre est répétée de manière parasagittale à droite puis à gauche pour cureter au mieux les végétations. Ce geste terminé, l’enfant est immédiatement placé en décubitus latéral droit grâce à une bonne coordination de l’équipe. L’ORL horizontalise l’abaisselangue puis le retire pour récupérer les débris adénoïdiens. L’oropharynx est aspiré énergiquement car le saignement est actif. Le reliquat de végétations est écrasé à la compresse en introduisant l’index dans la bouche puis sous le voile afin de reprendre la place de l’adénotome. L’ouvre-bouche est retiré. De nouveau, l’aspiration de l’oropharynx, de la bouche et du nez est nécessaire. Ce geste est effectué en alternance avec l’oxygénation au masque. Le saignement se tari très rapidement (Fig. 1 et 2). Dans le cas contraire, on procède à un tamponnement pharyngé à l’index ; ce doigt étant recouvert d’une compresse : « le toucher appuyé ». L’enfant est transféré en salle de réveil. Chez un enfant intubé, l’intervention se déroule en position de Rose. Le curetage est réalisé en repoussant latéralement la

5. LES ALTERNATIVES OPÉRATOIRES [5–8] Lorsqu’une adénoïdectomie sous contrôle de la vue est nécessaire, l’intervention est faite sous guidage vidéoendoscopique. C’est le cas d’une obstruction choanale par des végétations adénoïdes d’implantation haute. Dans ce cas, l’utilisation du microdébrideur améliore le confort opératoire en réséquant les végétations tout en aspirant le sang. Après avoir relevé le voile, une lame courbe introduite dans le cavum par voie buccale permet une exérèse précise. Il est possible d’effectuer une adénoïdectomie totale ou partielle [5]. D’autres auteurs utilisent l’électrocoagulateur [6]. Enfin, certains utilisent un système d’aspiration–coagulation qui permet d’après les équipes l’utilisant une exérèse très précise du tissu adénoïdien et une hémostase de bonne qualité [7,8]. 6. LES COMPLICATIONS [2,9,10] Elles sont dominées par les complications hémorragiques et infectieuses. Les complications fonctionnelles et les récidives sont moins fréquentes. 6.1. Hémorragiques Il s’agit de complications rares dont la fréquence est inférieure à 1 %. La survenue des complications hémorragiques est précoce, c’est-à-dire dans les heures suivant l’intervention, dans 80 % des cas, sinon elles surviennent dans les six premiers jours.

Fig. 2. Photographie peropératoire. Abaisse-langue (1), adénotome (2) et écarteur de Boyle-Davis (3) en place dans l’attente d’une contraction pharyngée.

6.1.1. Précoces Une exérèse incomplète du tissu adénoïdien, une blessure de l’artère vomérienne et/ou une blessure de la paroi pharyngée dans la région amygdalienne peuvent être responsables de saignements précoces. Plus rares sont les troubles de la crase sanguine passés inaperçus au cours du bilan préopératoire. Une compression par le « toucher appuyé » est alors effectué. En cas de saignement passé inaperçu, une obstruction d’une bronche souche peut survenir. Elle est secondaire à une coagulation intrabronchique après inhalation de sang quand l’intervention est réalisée sans étanchéité des voies aériennes inférieures. Ce risque est normalement prévenu par la mise en

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place de l’abaisse-langue contre la paroi pharyngée postérieure afin d’isoler les voies respiratoires supérieures. Sur le plan de la technique chirurgicale, il est à noter qu’outre-atlantique le geste est réalisé sous contrôle visuel, avec un releveur du voile et une rhinoscopie postérieure. L’inspection du nasopharynx, avant le curetage, prévient le risque de blessure d’une artère (carotide interne, pharyngienne ascendante) au trajet aberrant [10]. 6.1.2. Tardives Une surinfection locale peut être responsable de saignements retardés, d’où l’importance de réaliser le geste opératoire en dehors d’épisodes infectieux. 6.2. Infectieuses, inflammatoires L’otite moyenne aiguë est la complication infectieuse la plus fréquente. Les autres (adénophlegmons, infections bronchopulmonaires) sont plus rares. Devant une pneumopathie postopératoire, on pensera à un corps étranger bronchique (débris adénoïdes, dent de lait). Le syndrome de Grisel, subluxation C1-C2, peut survenir en postopératoire. Il se manifeste par un torticolis sous forme d’une douleur cervicale intense et d’une aversion à la rotation de la tête. Certains enfants, atteints d’une hyperlaxité ligamentaire congénitale, sont particulièrement à risque. C’est le cas des enfants porteurs d’une trisomie 21 pour qui un dépistage par des clichés dynamiques doit être systématique. 6.3. Fonctionnelles L’insuffisance vélaire, avec pour conséquence une rhinolalie et un reflux pharyngonasal, doit être prévenue par l’examen préopératoire systématique du voile. Une luette bifide, un voile court ou encore une division vélaire (parfois seulement sousmuqueuse), doivent alerter. Une attention particulière est nécessaire chez les enfants atteints du syndrome vélocardiofacial (microdélétion 22q11). Chez ces enfants, les

techniques récentes d’adénoïdectomie partielle sont particulièrement intéressantes permettant un contrôle optique de la résection. 6.4. Récidives [11] Selon la littérature, l’incidence des récidives reste inférieure à 1 % [11]. Cependant, d’après notre expérience, les enfants opérés jeunes présentent plus de risques de récidive. RÉFÉRENCES [1] François M. Indications de l’adenoïdectomie et de l’amygdalectomie. Rev Prat 2007;57:1778. [2] Nicollas R, Bonneru JJ, Roman S, Triglia JM. Tonsillectomy and adenoidectomy. EMC Otorhinolaryngol 2003;1:301–17. [3] Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES). Indications de l’adénoïdectomie et/ou de l’amygdalectomie chez l’enfant. Recommandations et références médicales; 1997. [4] Guerrier Y. Adénoïdectomie. In: Portman M, Guerrier Y, editors. Traité de technique chirurgicale ORL et cervicofaciale, 3. Paris: Masson; 1977. p. 815. [5] Stanislaw P, Koltai P, Feustel P. Comparaison of power-assisted adenoidectomy vs adenoid curette adenoidectomy. Arch Otolaryngol Head Neck Surg 2000;126:845–9. [6] Elluru RG, Jonhson L, Myer 3rd CM. Electracautery adenoidectomy compared with curettage and power-assisted methods. Laryngoscope 2002;112:23–5. [7] Wynn R, Rosenfield R. Outcomes in suction coagulator adenoidectomy. Int J Pediatr Otorhinolaryngol 2003;129:182–5. [8] Jonas NE, Sayed R, Prescott CAJ. Prospective, randomized, single-blind, controlled study to compare two methods of performing adenoidectomy. Int J Pediatr Otorhinolaryngol 2007;71:1555–62. [9] Manach Y, Van Den Abbeele T, Lescanne E. Complications des amygdalectomies et adenoïdectomies. In: Laccourreye O, rapport de la SFORL; 2008. pp. 297–316. [10] Windfuhr JP, Schloendorff G, Sesterhenn AM, Prescher A, Kremer B. A devastating outcome after adenoidectomy and tonsillectomy: Ideas for improved prevention and management. Otolaryngol Head Neck Surg 2009;140:191–6. [11] Monroy A, Behar P, Brodsky L. Revision adenoidectomy: A retrospective study. Int J Pediatr Otorhinolaryngol 2008;72:565–70.