Journal of the Neurological Sciences, 1978, 35: 317-330 © Elsevier/North-Holland Biomedical Press
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E T U D E Q U A N T I T A T I V E DES FIBRES NERVEUSES ISOLEES DANS LES POLYNEVRITES ALCOOLIQUES
GERARD SAID et PIERRE LANDRIEU Service de Neurologie et Laboratoire de Neuro-Pathologie (Prof_ Jean Lapresle), Centre Hospitalier de Bic~tre, 94270 Le Kremlin-Bic~tre (France) (Re~u le 25 juillet, 1977) (Accept6 le 16 Septembre, 1977)
RESUME
Pour d6terminer la fr6quence relative de la d6g6n6rescence Wall6rienne et de la d6my61inisation segmentaire dans les neuropathies alcooliques, les auteurs ont 6tudi6 10 biopsies nerveuses provenant de 9 malades; 100 fibres my61iniques cons6cutives ont 6t6 isol6es dans chaque cas et class6es en fonction des anomalies morphologiques. Des aspects de d6my61inisation segmentaire ont 6t6 not6s darts 3 nerfs, affectant 6 ~, 8 ~ des fibres. Les l~sions de d6g6n6rescence Wall6rienne ont 6t6 trouv6es dans tousles nerfs, touchant 31/t 98 ~ des fibres isol6es.
SUMMARY
Quantitative study of isolated nerve fibres in alcohoBc neuropathy This is a report of qualitative and quantitative study of nerve fibres in alcoholic neuropathy. In order to determine the frequency of segmental demyelination in alcoholic neuropathy, 10 nerve biopsies from 9 patients were studied by teasing; 100 consecutive fibres were isolated from each nerve and classified according to their morphology. This study confirms that segmental demyelination is a rare finding in this condition. Segmental demyelination of peripheral nerve fibres occurred in three cases and affected 6 to 8 per cent of the fibres. Wallerian degeneration of nerve fibres was found in all ten nerve biopsy specimens and affected 31 to 98 per cent of the isolated fibres.
INTRODUCTION
L'histog6n~se des neuropathies alcooliques reste un sujet de d6saccord, en d6pit de l'abondant materiel d'6tude que la fr~quence de cette affection apporte au clinicien.
318 D6g6n6rescence axonale, d6my61inisaDon segmentaire, ou processus 6ventuellement mixte? Les divergences des histopathologistes sont 6troitement refl6t6es par celles de~ 61ectrophysiologistes_ Dans leurs 6tudes morphologiques, Gombault (1886), Greenfield et Carmichael (1935) et Denny-Brown (1958) rapportent des 16slons de d6my61inisation segmentaire, tandis que Dyck, Gutrecht, Bastron, Karnes et Dale (1968), Walsh et MacLeod (1970) et Tredici et Minazzi (1975) mettent en 6vidence des 16sions de d6g6n6rescence axonale; Collins, Webster et Victor (1964) et Bischoff (1971) s ugg6rent la possibilit6 d'une conjugaison des deux processus. Les 6tudes 61ectrologiques conduisent Blackstock, Rushworth et Gath (1972) et Thiele et St~lberg (1975) a incriminer une d6g6n6rescence axonale; mais Mawdsley et Mayer (1965), Bathien et Guilheneuc (1974)et Dehen, Wilier et Cambier (1976) concluent ~. une d6my61inisation segmentaire. Dans le but de pr6ciser la fr6quencer elative de la d6my61inisation segmentaire et de la d6g6n6rescertce axonale darts la polyn6vrite alcoolique, nous avons essay6 de quantifier les anomalies des fibres my61iniques isol6es b. partir de 10 biopsies nerveuses provenant de 9 malades atteints de cette affection. METHODE ( I ) Sdlection des patients
L'dtude a port6 sur les biopsies nerveuses provenant de 9 patients explords entre 1973 et 1977, rdpondant aux conditions suivantes: (1) Neuropathie pdriphdrique symdtrique chez des rnalades ayant une intoxication 6thylique certaine, dtayde - - sans que cela ait constitu6 une condition pr~alable - - par la coexistence d'une ou plusieurs autres complications de l'intoxication alcoolique chronique. (2) Elimination d'une autre cause de neuropathie : la syphilis a dtd exclue par les dpreuves sdrologiques habituelles; le diab&e par des dosages de glycdmie ~ jeun, postprandiale et/ou une dpreuve d'hyperglycdmie provoqude; le bilan rdnal et l'dtude des protdines sanguines ont dtd syst6matiques. Cependant, deux malades absorbant du disulfiram ont dtd conservds dans l'dtude, leur neuropathie ne paraissant pas pouvoir ~tre rattachde ~ cette drogue. (3) Malades ayant fait l'objet de mesures des vitesses de conduction nerveuse; pour les malades l, 2, 3, 4, 6, 8 et 9 par le Pr. Metral, pour les malades 5 et 7 par le Dr. Bathien. Rdsumd des observations cliniques Cas 1. Abel P., 29 ans. Ethylisme depuls une date imprdclse (vin, bi6re, alcool). Depuis 8
jours, faiblessc des membres infdricurs avcc chutes, sans signes sensitifs subjectifs. Examen: paratysie distale des rncmbres inf&ieurs, prddominant sur les releveurs, avec abolition des rdflexcs ost6o-tendineux; douleur ~tla pression des troncs ncrveux; hypocstiadsiecutand¢ des orteils; tremblement d'attitude aux mcmbres sup6rieurs. Liquide c6phalo-rachidien et fond d'oeil normaux. Vitesse de conduction motricc= 32 m/see au sciatiquc poplit6 externe. Par ailleurs : foie gros et fcrme, a v ~ 6preuves biologiques standard ncttement pcrturb6es; histologie de eirrhose. Macrocytose sanguine (volume globulaire moyen ~ 100 #ma). Evolution progressivcment favorable sous renutrition ct vitaminothdrapie, avec un mois et dcmi de recul. Cas 2. Lucienne B., 37 arts. Ethylisme depuis 10 ans (vin + divers). Depuis 3 mois, amaigrisse-
319 ment de 10 kg, doulettrs et impotence des membres inf&ieurs, emp&:hant bient6t la marche. Examen • amyotrophie et diminution de la force musculaire proximale et surtout distale aux 4 membres; dipl6gie faciale confirm6e par un trac6 61ectromyographique de d6nervation; hypoesth6sie en chaussettes et en gants, avec troubles de la sensibilit6 profonde. Troncs nerveux douloureux h la pression; signe de Las6gue bilat6ral. Liquide c6phalo-rachidien: prot6inorachie -- 68 rag/100 ml, 0,2 616ment/mm3. Fond d'oeil normal. Vitesse de conduction motrice -- 36 m/sec au sciatique poplit6 externe. Par ailleurs: foie nettement pathologique; macrocytose sanguine (volume globulaire moyen = 100/~ma). Amelioration discr6te des signes moteurs, avec un recul de 3 semaines sous renutrition et vitaminoth6rapie. Cas 3. Marie Carmen B., 31 ans. Ethylisme depuis au moins 1 an (vin, bi6re, alcools). Depuis 3,5 mois, paresth6sies en chaussettes, faiblesse des membres inf6rieurs interdisant bient6t la marche. Prise de 1 comprim6 de disulfirarn depuis plusieurs mois avant l'apparition des troubles. Examen: amyotrophie diffuse; d6ficit moteur distal des 4 membres; r6flexes osl6o-tendineux abolis aux membres inf6rieurs; hypoesth6sie en gants et en chaussettes; tremblement d'attitude important. Liquide c6phalo-rachidien et fond d'oeil normaux. Vitesse de conduction motrice -- 45 m/sec au nerf cubital. Par ailleurs, 6preuves h6patiques standard normales (n'a eu cependant ni 6preuve h la B.S.P., ni biopsie h6patique); macrocytose sanguine (volume globulaire moyen = 100 pma). Sous vitaminoth6rapie B, am61ioration nette avec un recul de 3 mois (malgr6 la reprise du disulfiram). Cos 4. Claude G., 44 ans. Etbylisme ancien (vin + alcools). Depuis 3 tools, apparition progressive de paresth6sies et de faiblesse musculaire des 4 extr6mit6s. Amaigrissement de 20 kg depuis 15 mois. Examen: amyotrophie, diminution de la force musculaire proximale et surtout distale (releveurs du pied, muscles des mains); abolition des r6flexes ost6otendineux aux membres inf6rieurs; hypoesth6sie en chaussettes. Fond d'oeil et liquide cbphalo-rachidien n'ont pu ~tre examin6s. Vitesse de conduction motrice: 33 m/sec au sciatique poplit6 externe, 44 m/sec au neff cubital. Par ailleurs: h6patopathie avec perturbations de l'h6mostase connues depuis 1 an. Pas de recd. Cas 5. Appolina D., 60 ans. Ethylisme (vin ÷ divers) depuis une dizaine d'ann6es. Depuis 6 mois, paresth6sies des extr6mit6s, puis g~ne ~, la marche avec impotence complete depuis 2 mois. Examen: amyotrophie, d6ficit moteur diffus avec pr6dominance sur les releveurs des pieds et les muscles des mains. R6flexes ost,~o-tendineux abolis aux membres inf6rieurs. Anesth6sie /t tons les modes, en chaussettes. Le liquide c6phalo-rachidien contient 72 mg/100 ml de prot6ines et 4 616ments/ mm 3. Le fond d'oeil est normal. Les vitesses de conductions sont les suivantes: sciatique poplit6 interne: motrice = 35 m/sec, sensitive = 35 m/sec; sciatique poplit6 externe: motrice - 35 m/sec; cubital: motrice -- 54 m/sec; m6dian; motrice = 52 m/sec. Par ailleurs syndrome de Korsakoff mod6r6. Anomalies h6patiques cliniques et biologiques nettes. Macrocytose sanguine (volume globulaire moyen -- 100 #m3). Evolution: 16g6re am61ioration motrice ~, partir de la 6+me semaine, sons renutrition et vitaminoth6rapie. Cas 6. Mich61e C., 36 ans. Ethylisme majeur (vin, bi+re, ap6ritifs, alcool ~t 90°), depuis l'adolescence. Un an avant l'hospitalisation, 6pisode de d6ficit sensitivo-moteur des 4 membres, r6gressif. Depuis 3 mois, faiblesse motrice des 4 membres, douleurs des mollets, paresth6sies en chaussettes et en gants. Examen: amyotrophie g6n6ralis6e; d6ficit moteur proximal et surtout distal; abolition de tous les r6flexes ost6o-tendineux; douleurs ~, la pression des troncs nerveux; signe de Las6gue bilat6ral ; d6ficit de la sensibilit6 superficielle et profonde des 4 membres. Le liquide c6phalo-rachidien contient 60 rag/100 ml de prot6ines, et 4 616ments/mmL Vitesse de conduction motrice -- 41 m/sec au sciatique poplit6 externe_ Par ailleurs: anomalies h6patiques cliniques et biologiques; gastrite; an6mie macrocytaire. Evolution vers une r6cup6ration motrice discrete, au bout d'un mois de renutrition et de vitaminoth6rapie. Cas 7. G6rardo O., 55 arts. Ethylisme depuis 3 arts surtout (2 litres de vin par jour). Amaignssemerit r6cent de 10 kg. Hospitalis6 pour des troubles psychiatriques avec desorientation temporospatiale, 11 est not6 un d6ficit moteur des 4 membres, pr6dominant aux membres inferieurs et sur les releveurs du pied; r6flexes ost6o-tendineux abolis aux membres inf6rieurs ; hypoesth6sieen gants et en chaussettes. Le malade prend du disulfiram depuis environ 3 mois, ~t une dose non pr6cis6e. Liquide cephalo-raehidien normal; fond d'oeil non vu, Les vitesses de conduction sont les suivantes: sciatique poplit6 interne sensitif = 39 m/sec; sciatique popht6 interne moteur -- 30 m/sec; sciatique poplit6 externe moteur -- 49 m/sec. Par ailleurs: 6preuves h6patiques standard normales (B.S.P., biopsie h6patique non faites). Macrocytose sanguine (volume globulaire moyen -- 99 !~ma). Pas de recul. Cas 8_ Marie-Louise M., 61 ans. Ethylisme manifeste dont la nature et l'anciennet6 ne sont pas pr6cis6ment connus_ Hospitalis6e pour une alt6ration de l'6tat g6n6ral avec troubles psychlatriques, l'examen montre une 6bauche de Korsakoff, et d6couvre des troubles sensitifs et moteurs des 4 extr6-
320 mites, pr6dominant aux membres inf6rieurs. Les r6flexes ost6o-tendineux sont presents. Le liquJde c6phalo-rachidien est normal, ainsi que le fond d'oeil. Vitesse de conduction motrice - 44,5 m/see au sciatique poplit6 externe_ Par ailleurs, 11exlste des anomalies h6patiques patentes, et une rnacrocytose sanguine (volume globulaire moyen - 101 l~ma) Sous renutritlon et vJtaminoth6rapie, une am6lioration des slgnes moteurs est not6e, mais la malade sera r6hospitalis6e quelques sernames apr~s sa sortie pour un delirmm tremens. Cas 9. Ernest M., 58 arts. Ethylisme anclen (vm + bi~re) avec cmrrhose h6patique d6compensde depuis 3 ans. Hospitalis6 pour un syndrome de Korsakoff typique, on note une abolition des r6flexes ost6o-tendineux aux membres mf6rleurs, sans troubles sensitifs ou moteurs patents; tremblement d'attitude de 6-8 c/sec aux membres sup6rieurs ; dysm6trie aux membres superieurs. Le liquide cephalo-rachidien est normal; il existe une n6vrite optique bilat6rale. Vitesse de conduction motrice 45 m/sec au nerf cubital. Par ailleurs: macrocytose sanguine (volume globulaire moyen ~ 99 f~m:~); perturbations biologlques h6patiques franches. Pas de recul.
L'essentiel des donn6es cliniques et 61ectriques est rassembl6 sur le T a b l e a u I.
(11) l~tude morphologique L a biopsie a 6t6 pratiqu6e sous anesth6sie locale, sur le n e r f saph~ne externe h la cheville (nerf sural) dans les cas 1, 3, 5, 7, 9 et sur la b r a n c h e musculo-cutan6e du n e r f sciatique poplit6 externe au tiers inf6rieur de la j a m b e , dans les cas 2, 4, 6 et 8. Darts le cas N o . 5, la biopsie d u n e r f saph~ne a 6t6 pratiqu6e ~ 2 niveaux: dans la p o r t i o n r6tromall6olaire du t r a j e t du n e r f et au tiers sup6rieur du mollet. Le fascicule destin6 l'6tude des fibres isol6es a 6t6 fix6 dans le g l u t a r a l d e h y d e t a m p o n n 6 ~t p H 7,4, puis plac6 p e n d a n t quelques heures dans l'acide osmique ~t 2 ~ . Le f r a g m e n t a 6t6 ensuite laiss6 dans un m61ange de glyc6rol ~ 66 ~o, puis dissoci6 dans le glyc6rol pur. Cent fibres cons6cutives ont 6t6 isol6es p o u r chaque cas. Les fibres my61iniques o n t 6t6 class6es en f o n c t i o n des a n o m a l i e s m o r p h o l o g i q u e s selon une classification p r o c h e de celle de D y c k (1975): G r o u p e A : la my61ine est normale. Les n o e u d s de R a n v i e r ont u n aspect n o r m a l et sont r6guli~rement espac6s. G r o u p e B: irr6gularit6 de la f o r m e de la gaine de my61ine. G r o u p e C: 61argissement des n o e u d s de R a n v i e r ne d6passant pas 15-20 #m, 6ventuellement associ6 h des a n o m a l i e s du t y p e B. G r o u p e D : d6my61inisation de la fibre limit6e au voisinage des noeuds de Ranvier. G r o u p e E : d6my61inisation segmentaire d ' u n ou plusieurs espaces i n t e r n o d a u x . G r o u p e F : d6my61inisation segmentaire suivie de remy61inisation avec r a c c o u r cissement des espaces i n t e r n o d a u x . G r o u p e G : stade pr6coce de la d6g6n6rescence Wall6rienne avec f r a g m e n t a t i o n de la my61ine sur t o u t e la l o n g u e u r de la fibre. G r o u p e H : d6g6n6rescence Wall6rienne avec f o r m a t i o n d ' o v o i d e s et de boules de my61ine sur t o u t e la l o n g u e u r de la fibre. G r o u p e I : stade t a r d i f de la d6g6n6rescence Wall6rienne : les fibres initialement my61inis6es ne sont plus reconnues q u ' h l'existence de fines gouttelettes de my61ine en voie de r6sorption, sur t o u t e leur longueur.
321 TABLEAU 1 PRINCIPALES DONNEES CLINIQUES ET
PARACLINIQUES
M -- m a s c u l i n ; F ~ f6minin; SPE = nerf sciatique poplit6 externe; SPI -- n e f f sciatique poplit~ interne; Cub. = nerf cubital. No. A g e Signes cliniques (ans) et sexe
Evoluant depuis
Autres signes
Prot6ines V C (m/sec) L C R (rag/ (m = m o t e u r ) 100 ml) (s = sensitive)
1
29 M
Atteinte sensitivo-motrice des m e m b r e s inf6rieurs R6flexes achill6ens abolis
8 jours
Tremblement H6patopathie Macrocytose sanguine
35
SPE m = 32
2
37 F
Atteinte sensitivo-motrice des 3 mois m e m b r e s mf6rieurs et sup6rieurs R6flexes ost6otendineux tous abolis Signe de Las6gue Dipl6gie faciale
H6patopathie Macrocytose sanguine
68
SPE m = 36,5
3
31 M
Atteinte sensitivo-motrice des 3 m o i s 1/2 T r e m b l e m e n t m e m b r e s inf6rieurs et sup6rieurs Macrocytose R6flexes ost6otendineux abolis sanguine a u x m e m b r e s inf6rieurs
20
Cub. m = 45
4
44 F
Atteinte sensitivo-motrice des 3 mois mernbres inf6rieurs et sup6rieurs R6flexes ost6otendineux abolis a u x m e m b r e s inf6rieurs
H6patopathie Macrocytose sanguine
5
60 F
Atteinte sensitivo-motrice des 6 mois rnembres inf6rieurs et sup6rieurs R6flexes ost6otendineux abolis a u x m e m b r e s inf6rieurs
Korsakoff H6patopathie Macrocytose sanguine
72
SPIm = s= Cub. m = M~d m =
6
36 F
Atteinte sensitivo-motrice des I an m e m b r e s inf6rieurs et sup6rieurs R6flexes ost6otendineux tous abolis Signe de Las6gue
H6patopathie Gastrite Macrocytose sanguine
60
SPE m = 41
7
55 M
Atteinte sensitivo-motrice des ? m e m b r e s inf6rieurs et sup6rieurs R6flexes ost6otendineux abolis aux m e m b r e s inf6rieurs
Korsakoff Macroeytose sanguine
48
SPE m = 49 SPI m - - 39 SPI s = 30
8
61 F
Atteinte sensitivo-motrice des ? m e m b r e s inf6rieurs et sup6rieurs R6flexes ost6otendineux conserv6s
Delirium tremens Korsakoff H6patopathie Macrocytose sanguine
25
SPE m = 44,5
58 M
R6flexes ost6otendineux abolis a u x m e m b r e s inf6rieurs
latente
SPE m = 33 SPE s = 44
T r e m b l e m e n t 46 N6vrite optique Korsakoff Hepatopathie
35 35 54 52
Cub. m = 45
322 TABLEAU 2 ETUDE ANALYTIQUE DES LESIONS DES FIBRES NERVEUSES ISOLEES Stade A, my61ine normale, noeuds de RanvJer ayant un aspect normal et r6guh/~rement espaces, stade B, irr6gularit6 de la forme de la gaine de my61ine; stade C, 61argissement des noeuds de Ranvier ne d6passant pas 15-20/zm, 6ventuellement associ6 ~t des anomalies du type B; stade D, d6my61inlsation de la fibre limit6e au voisinage des noeuds de Ranvier; stade E, d6my61inisationsegmentaire d'urt ou plusieurs espaces internodaux; stade F, d6my61inisationsegmentaire suivie de remy61inisation avec racourcissement des espaces internodaux; stade G, stade pr6coce de la d6g(m6rescence Wall6rienne avec fragmentation de la my61ine sur toute la longueur de la fibre; stade H, d6g6n6rescence Wall6rienne avec formation d'ovoIdes et de boules de my61ine sur toute la longueur de la fibre', stade I. stade tardif de la d6g6n6rescence Wall6rienne ; fines gouttelettes de my61ineen vole de r6sorptlon, sur toute la longueur de la fibre. Stade
Cas 1
2
26 25 7
3
4
A B C D E F H
21 20 12 3 4
21 2 7 5 1
36 10
5
3
1
5
6
1
22
J
30
33
63
32
5
6
Mollet
Cheville
50 17 2
6 13 20 4
8
7
2
8 3 3
54 14
9
49 11 4
Moyenne o/ (~o)
27 16 0.7
4
4 2
10
5
6
4
69
10
30
7
21
47
29
71
12
23
6 55
R6sultats de l'dtude des fibres nerveuses isoldes, lls sont rassembl6s sur les Tableaux 2 et 3. T o u s l e s nerfs sont s6v6rement 16s6s, puisque le pourcentage de fibres n o r m a l e m e n t my61inis6es n'exc~de pas 54 %, et n'est en m o y e n n e que de 27 %. Les 16sions de d6g6n6rescence axonale 6volu6es (stades H, I, J) sont constantes (Figs. 1, 2) et largement p r 6 d o m i n a n t e s ; elles sont retrouv6es dans 31-98 % des fibres, avec une m o y e n n e de 55 %. Les L6sions de d6my61inisation segmentaire (stades D, E, F) ne sont retrouv6es que chez 3 malades (Fig. 3), et affectent 6, 7 et 8 % des fibres isol6es. Les fibres pr6sentant des 16sions discr~tes (stades B e t C) sont ~ u n taux compris entre 0 et 33 %, avec une m o y e n n e de 16 %. COMMENTAIRES
(A) Sur le plan clinique N o s malades sont conformes aux descriptions classiques (Victor et A d a m s 1953; Victor 1975) de la polyn6vrite alcoolique, qui c o m p o r t e habituellement u n e atteinte sensitivo-motrice sym6trique, p r 6 d o m i n a n t aux m e m b r e s inf6rieurs, avec u n m a x i m u m distal. O n note, dans notre s6rie, la fr6quence de signes 6 v o q u a n t une atteinte radiculon6vritique, puisque 2 malades o n t u n signe de Las~gue bilat6ral, 3 malades u n e protginorachie sup6rieure ~t 50 mg/100 ml (Tableau 1). U n malade a en outre une dipl6gie faciale confirm~e par l ' e x a m e n 61ectrique; ce signe, n o n signal6 par Victor, a 6t6 rap-
323
D Fig. 1. Cas No. 2, biopsie de nerf musculo-cutan6 du sciatique poplit6 externe. Fibre my61iniqueisol~e apr~s impr6gnation par l'acide osmique. Stade pr6cocede la d6g6n6rescence Wall6rienne (Groupe G). port6 dans 5 des 80 cas de neuropathie b6rib6rique de Pekelharing et Winkler (1887). Aucun de nos malades ne pr6sente d'atteinte patente du syst6me nerveux autonome (Victor 1975). Par contre, d'autres complications de l'6thylisme sont toujours associ6es, la plus constante 6rant la macrocytose sanguine, retrouv6e chez tous nos malades; l'atteinte h6patique est not6e 7 fois sur 9, le syndrome de Korsakoff 4 fois sur 9.
( B) Sur le plan histopathologique Nos r6sultats concordent avec les donn~es les plus r6centes de la litt6rature, qui concluent toutes au caract6re pr6dominant, sinon exclusif, des 16sions de ddg~n~rescen-
324
Fig. 2. Cas No. 1, biopsie du nerf saph~ne externe ft.la cheville. F~bre my61irtiqueisolge apr~s imprggnation par l'acide osmique. Stade tardif de la d6g6n6rescence Wall6rienne (Groupe 1). Les fl&ches indiquent les d6bris my61iniques.
Dyck et al. (1968), dans un cas 6tudi6 en "teasing", souligne que ces 16sions sont parfois si importantes que route 6tude quantitative y serait d6pourvue de sens. Walsh et MacLeod (1970), chez 9 malades 6tudi6s en "teasing", trouvent des 16sions Wall6riennes d'autant plus marqu6es que ta maladie est cliniquement plus aigu6; dans les formes chroniques, la fr6quence des fibres my61inis6es dont les espaces internodaux sont uniform6ment courts, t6moigne d'un processus de r6g6n6ration. L'6tablissement de corr61ation entre la clinique et l'6tude des fibres isol6es doit cependant rester prudente, pour plusieurs raisons: - Le param&re d'anciennet6 est souvent difficile ~ appr6cier, beaucoup de formes "aiguEs" traduisent en r6alit6 l'aggravation d'une forme chronique ou latente, comme chez notre malade No. 6. Par ailleurs, le param6tre de s6v6rit6 a sans doute une importance tout aussi grande : notre malade No. 1, qui a pourtant une forme cliniquement "aiguE", a des 16sions histologiques qui restent relativement mod6r6es (Fig. 2). - La juxtaposition, ~ des stades diff6rents, de processus de d6g6n~rescence et de r6g6n6ration, multiplie les difficult6s d'analyse: l'6tude des fibres isol6es ne concerne pas les fibres my61inis6es ayant achev6 la r6sorption de la my61ine apr~s d6g6n6rescence axonale, et peut donc sous-estimer celles-ci darts les formes chroniques : il est possible que les constatations de Walsh et MacLeod soient li6es ~t ce simple ph6nom6ne. En microscopie 61ectronique, Tredici et Minazzi (1975) confirment, chez 6 patients, la nature axonale des lesions de la neuropathie alcoolique, lls soulignent l'abondance relative des fibres amy61iniques et des fibres my61inis6es de petit diam~tre, t6moignant des processus de r6g6n6ration: un certain nombre de fibres class6es "normales" dans notre &ude ne sont donc probablement pas des fibres pr6serv6es de la maladie, mais des fibres r6g6n6r6es. Enfin, le niveau auquel est pratiqu6 la biopsie est un facteur essentiel, dans un neff faisant l'objet d'un processus de "dying back degeneration". Ceci est illustr6 par notre cas No. 5 (Fig. 3), dont la biopsie 6tag6e montre une nette pr6dominance de 16sions axonales au niveau de la cheville, alors qu'elles restent mod6r6es au niveau du mollet. Ces constatations peuvent ~tre rapproch6es de celles faites dans les polyneuroce a x o n a l e .
-
325
[L
. . . . . . . .
T..
-
-
-
Fig. 3. Cas No. 5, biopsie du nerf saph6ne externe/L la cheville. Deux fibres my61iniques ont 6t6 laiss6es accol~es. La fibre sup6rieure pr6sente un aspect de remy61inisation apr6s dgmy61inisation segrnentaire (F). Les noeuds de Ranvier sont indiqu6s par des lettres : de A/t B il existe une gaine my61inique large; de B ft. C, de C ~t D, de D ~t E et de E / t F, la my61ine est fine, les espaces internodaux raccourcis t6moignent de la remy61inisation. En B, C, D, E et F, les noeuds de Ranvier sont 61argis. De F / t la fin de la derni~re bande, la fibre reprend l'aspect qu'elle avait entre A et B. Une fibre en d6g6n6rescence WaJl6rlenne est accol6e ~t la fibre pr6c6dente. Les d6bris my61iniques sont dgsign~s par des fl/~ches.
326 TABLEAU 3 JUXTAPOSITION DES PRINCIPALES DONNEES CLINIQUES, ELECTRIQUES ET HISTOPATHOLOGIQUES No. Age Evolution (arts) gravit6
Nerf biopsi6
~ fibres % alt6ranormales tJons asp6(st. A) cifiques (st.B÷C)
% d6g6n6rescence axonale (st. Hq l+J)
% d6my61i- VC (m/sec) nisation segmentaire ( s t . D ÷ E I-F)
1
29
aigu8 mod6r6e
saph6ne externe
21
32
40
7
SPE moteur: 32
2
37
subaigu6 tr~s s6v6re
musculo 26 cutan6
32
42
0
SPE moteur: 36,5
3
31
subaigu~ s6v~re
saph6ne externe
21
9
64
6
cubital moteur: 45
4
44
subaigu6 s6v6re
musculo 36 cutan6
10
54
0
SPE moteur: 33
5
60
subaigu8 s6v6re
saph6ne externe: Mollet 50 Cheville 6
SP1 19 33
31 53
0 8
moteur: 35 sensitif: 35
6
36
chronique ÷ musculo aigu~ s6v6re cutan6
2
0
98
0
SPE moteur: 41
7
55
? s6v6re
saph6ne externe
8
6
86
0
SPE moteur: 49 SPI moteur: 39 SPI sensitif: 30
8
61
? s6v6re
musculo 54 cutan6
14
42
0
SPE rnoteur: 44,5
9
58
latente
saph6ne externe
15
36
0
cubital moteur: 45
49
pathies nutritionnelles humaines, ainsi que de celles faites chez le pigeon, le chien, le r a t t h i a m i n o carenc6s (Prineas 1970). L a parent6 clinique et pathog6nique de la n e u r o p a t h i e 6thylique ave celle du b6ri-b6ri a 6t6 maintes fois soulign6e ( D e n n y - B r o w n 1958; Fennetly, F r a n k , Baker et L e e r y 1964; M a y e r 1966). Le fair que T a k a h a s h i et N a k a m u r a (1976) r e t r o u v e n t les mSmes aspects de d6g6n6rescence axonale et de r6g6n6ration apr~s t r a i t e m e n t vitaminique, chez 9 m a l a d e s atteints de b6ri-b6ri, d o n t le n e r f a 6t6 6tudi6 en " t e a s i n g " et en ultrastructure, constitue u n a r g u m e n t suppl6mentaire en faveur de la nature axonale des n e u r o p a t h i e s alcooliques. Les 16sions de ddmydlinisation segmentaire, au cours de la n e u r o p a t h i e alcoolique, p o s e n t le d o u b l e p r o b l 6 m e de leur i m p o r t a n c e et de leur patbog6nie. Plusieurs consid6rations d o i v e n t 8tre envisag6es, p o u r tenter d'6clairer ce p r o b l 6 m e : H i s t o r i q u e m e n t , la th~se de la d6my61inisation segmentaire, 16sion p r 6 d o m i nante et r6versible de la n e u r o p a t h i e alcoolique, n ' a 6t6 en r6alit6 soutenue que p a r D e n n y - B r o w n (1958), qui n o t a i t en o u t r e l'absence compl/:te de globules ovoides de -
327 my61ine, caract6ristiques de la d6g6n6rescence axonale; il ne pr6cisait cependant nile nombre, ni les param~tres cliniques des malades 6tudi6s, ni la m6thode histologique utilis6e. Gombault (1886), qui avait 6t6 le premier h rapporter ces 16sions dans la neuropathie alcoolique, consid6rait en fait que les rang6es lin6aires d'ovoides my61iniques constituaient la 16sion dominante. De m~me, si Gudden (1896) plaidait pour une combinaison de d6g6n6rescence Wall6rienne et de d6my61inisation segmentaire, un seul des 5 malades qu'il avait 6tudi6s pr6sentait ces dernibres 16sions. Ult6rieurement et jusque r6cemment, ce sont essentiellement des 61ectrophysiologistes qui d6fendent la thbse de la d6my61inisation segmentaire. Mawdsley et Mayer (1965), qui consid6raient cette 16sion comme pr6dominante, appuyaient en fait leurs conclusions sur les constatations morphologiques de Denny-Brown; de faqon plus restrictive, Dehen et al. (1976) consid~rent ces 16sions comme responsables de l'abaissement des vitesses de conduction sensitives, portant sur les fibres IA, h u n stade pr6coce, infra-clinique, de la maladie. A cet 6gard, notre 6tude ne permet pas de corr61ation statistique, mais ne semble pas indiquer que les vitesses de conduction soient significativement plus diminu6es chez les malades pr6sentant des 16sions de d6my61inisation segmentaire, que chez ceux qui n'en pr6sentent pas (Tableau 3). I1 nous semble en r6alit6 difficile d'extrapoler, h partir de donn6es purement 61ectriques - - dont rien n'indique d'ailleurs qu'elles varient de faqon importante avec l'6volution de la maladie - - que la 16sion dominante pourrait &re une d~my61inisation segmentaire ~ un stade pr6coce, puis Wall6rienne 5, un stade plus 6volu6. Du point de vue morphologique, il est vraisemblable que, faute d'une m6thode d'analyse et de quantification universellement utilis6e, les auteurs ont parfois interpr6t6 diff6remment des faits morphologiques identiques. Ainsi, les alt6rations my61iniques initiales de la d6g6n6rescence Wall6rienne, consistant en une r6traction de la my61ine de part et d'autre des noeuds de Ranvier (stade C) sont identiques h celles que l'on retrouve au d6but d'une d6my61inisation segmentaire (Allt et Cavanagh 1969). Ce risque de confusion justifie de ne juger du type histopathologique de la 16sion que sur des fibres ~ un stade suffisamment avanc6 de d6g6n~rescence (Dyck 1975; Tredici et Minazzi 1975). Mais ~ l'inverse, il faut 6galement souligner que la fr6quence des fibres en d6my61inisation segmentaire peut ~tre sous-estim6e: si celle-ci ne survient que par places, il est possible que les fibres soient alt6r6es dans d'autres portions que celles sur lesquelles porte l'6tude. Du point de vue pathog6nique, la d6my61inisation segmentaire peut Etre consid6r6e soit comme une atteinte primitive de la cellule de Schwann et de la my61ine, soit comme 6tant cons6cutive ~ une atteinte axonale. Dans cette optique, plusieurs hypotheses sont susceptibles d'expliquer les 16sions de d6my61inisation segmentaire au cours des neuropathies alcooliques : (1) h l'6tat normal, les aspects de d6my61inisation segmentaire et de remy61inisation sont visibles dans un petit nombre de fibres, n'exc6dant pas 3 ~ , avec une fr6quence croissante avec l'~ge du sujet (Lascelles et Thomas 1966; Arnold et Harriman 1970). I1 est possible que l'6tat multicarentiel habituel aux alcooliques ne fasse que majorer ce ph6nom~ne physiologique, par le biais de perturbations m6taboliques touchant - - comme beaucoup d'autres tissus - - la cellule de Schwann. Walsh et MacLeod consid~rent que les aspects de d6my61inisation segmen-
-
328 taire, dans la neuropathie alcoolique, ne sont pas significativement plus fr6quents que chez le sujet normal. Dans notre s6rie, elles sont tr~s inconstantes, mais, lorsqu'elles sont not6es, sont sup6rieures aux taux normaux, sans manifester toutefois de rapport avec l'~ge. (2) I1 est possible que la coexistence si fr6quente - - manifeste dans notre s6rie - - d'une h6patopathie, joue un r61e, plusieurs auteurs (Dayan et Williams 1967; Knill-Jones, Goodwill, Dayan et Williams 1972; Chari, Katiyar, Rastogi et Bhattacharya 1977) ayant rapport6 dans des h6patopathies de diff6rente nature, aussi bien aigu~s que chroniques, des 16sions de d6my61inisation segmentaire parfois tr6s importantes. Bischoff (1971) sugg6re que, dans la neuropathie alcoolique, les 16sions de d6g6n6rescence axonale pourraient ~tre li6es h la carence vitaminique et nutritionnelle, et les 16sions de d6my61inisation segmentaire b. la maladie h6patique. Darts notre 6tude, il n'y a aucune corr61ation apparente entre h6patopathie et d6my61inisation segmentaire: un malade pr6sentant ce type de 16sion n'a pas d'anomalie h6patique (cas No. 3) alors que 5 malades (cas No. 2, 4, 6, 8 et 9), ayant une h6patopathie nette, ne pr6sentent que des 16sions axonales. Cela nous conduit h penser, comme Asbury (1975), que l'autonomie d'une neuropathie d'origine h6patique reste sujette h caution. Autre facteur susceptible d'interf6rer, la prise d'un toxique dolt ~tre syst6matiquement envisag6e. Le disulfiram, souvent administr6 chez l'6thylique en cours de d6sintoxication, est susceptible d'entrainer exceptionnellement des neuropathies. Dans une telle observation ~,tudi6e suivant les m~mes m6thodes, 14 ~o des fibres du neff saph~ne externe la cheville pr6sentaient une d6my61inisation segmentaire avec effondrement des vitesses de conduction (Said et Bathien 1978). Seul un de nos deux malades absorbant cette drogue pr6sente de telles 16sions, ~t un taux faible, de sorte que cette cause nc nous semble pas pouvoir ~tre retenue. (3) Enfin, il est reconnu que des aspects de d6my61inisation segmentaire peuvent ~tre r6alis6s par une souffrance de l'axone. Cette explication, sugg6r6e par Collins et al. d~s 1964 h propos des neuropathiques thiaminocarentielles a 6t6 reprise b. propos de la neuropathie ur6mique par Dyck, Johnson, Lambert et O'Brien (1971), qui, ~t cette occasion, ont isol6 deux types de d6my61inisation segmentaire: la plus habituelle serait li6e ~ une atteinte primitive de la my61ine, ou de la cellule de Schwann; l'autre, secondaire, serait li6e ~ la d6g6n6rescence axonale, et pourrait ~tre interpr6t6e: (a) soit comme un aspect pr6coce de la d6g6n6rescence Wal16rienne, ainsi que l'avait con~u Gombault; (b) soit comme un aspect interm6diaire, sur une fibre en "dying back degeneration" entre le segment proximal encore normal, et le segment distal en d6g6n6rescence Wall6rienne nette. Cette hypoth6se, 6raise par Hopkins et Gilliatt (1971), ~t propos d'autres neuropathies, est 6galement sugg6r6e par Dyck (1975). Dans notre observation No. 5, on pourrait interpr6ter la d6my61inisation segmentaire de 8 ~ des fibres isol6es b. la cheville comme une preuve de la souffrance de la pattie distale des fibres, puisque l'on ne trouve pas cette d6my61inisation la pattie plus proximale, o?a les alt6rations Wall6riennes sont moins nombreuses; (c) soit comme une alt6ration directement li6e ~, la diminution du volume de l'axone, sur certains segments de certains types de fibres, dont la souffrance axonale reste mod6r6e et serait r6versible. Cette hypoth~se restrictive parait la moins incompatible avec les constatations morphologiques, qui, en tout 6tat de cause, montrent qu'h quelque stade
329 clinique q u ' o n se situe, les 16sions sont essentiellement celles de destructions axonales irr6versibles. Le sch6ma le plus probable de d6g6n6rescence des fibres dans la polyn6vrite alcoolique pourrait ~tre consid6r6 c o m m e suit: apparition d'irr6gularit6s du diambtre de la gaine de my61ine (stade B), puis, inconstamment, r6traction de la my61ine nodale avec 61argissement mod6r6, inf~rieur b. 15-20 #m, des noeuds de Ranvier (stade C). Les anomalies de ce type ne sont pas un stade obligatoire, et peuvent pr6c6der la d6g6n6rescence Wall6rienne proprement dite (stades H, I, J), puis la r6sorption complete de la my61ine, et 6ventuellement la r6g6n6ration, A partir du stade, H, l'6volution vers les stades suivants (I et J) est ineluctable. Les aspects de d6my61inisation segmentaire avec ou sans remy61inisation sont rares, mais sup6rieurs b. ce que l'on peut rencontrer chez le sujet normal, et pourraient &re expliqu6s par une atteinte schwannomy61inique secondaire ~t la souffrance axonale. Enfin, les 16sions pr6dominent dans la pattie distale des fibres. En pratique, la mise en 6vidence, dans l'6tude morphologique d'une neuropathie p6riph6rique, d ' u n processus de d6my61inisation segmentaire exclusif ou pr6dominant ne nous para~t pas compatible avec une polyn6vrite alcoolique pure. CONCLUSION Les 16sions des fibres my61iniques au cours de la polyn6vrite alcoolique sont presque exclusivement repr6sent6es par des d6g6n6rescences axonales. Les aspects de d6my61inisation segmentaire 6tendue sont rares, et pourraient &re la cons6quence d'alt6rations axonales moins intenses que celles qui sont responsable de la d6g6n6rescence Wall6rienne.
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