Satisfaction de vie et devenir psychosocial des traumatisés crâniens graves en Aquitaine

Satisfaction de vie et devenir psychosocial des traumatisés crâniens graves en Aquitaine

Annales de Réadaptation et de Médecine Physique 45 (2002) 456–465 www.elsevier.com/locate/annrmp Article original Satisfaction de vie et devenir psy...

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Annales de Réadaptation et de Médecine Physique 45 (2002) 456–465 www.elsevier.com/locate/annrmp

Article original

Satisfaction de vie et devenir psychosocial des traumatisés crâniens graves en Aquitaine Satisfaction of life and late psychosocial outcome after severe brain injury: a nine-year follow-up study in Aquitaine B. Quintard a, P. Croze a,b, J.M. Mazaux b,c,*, L. Rouxel b, P.A. Joseph b,c, E. Richer c, X. Debelleix c, M. Barat b,c b

a Laboratoire de psychologie EA 526, université Victor-Segalen, Bordeaux 2, 33076 Bordeaux cedex, France Groupe handicap et cognition EA 487, université Victor-Segalen, Bordeaux 2 et Service MPR, hôpital Pellegrin, CHU de Bordeaux, 33076 Bordeaux cedex, France c Réseau UEROS Aquitaine, centre de la Tour de Gassies, 33520 Bruges, France

Reçu le 10 janvier 2002; accepté le 28 mars 2002

Résumé Introduction : Les programmes de réadaptation et d’aide à la réinsertion sociale des traumatisés crâniens graves (TCC) doivent être établis en tenant compte de données précises et recueillies dans le contexte locorégional sur le devenir à long terme, les attentes et les besoins de ces blessés. Objectif : Étudier le devenir psychosocial et la satisfaction de vie de TCC graves plusieurs années après leur hospitalisation pour rééducation et réadaptation en Aquitaine. Matériel et méthodes : Enquête par questionnaires téléphoniques du blessé et d’un proche ; recueils de données standardisés (Document EBIS, échelle de satisfaction de vie) et entretiens non dirigés ; échantillon constitué de 79 patients consécutifs parmi les 158 TCC hospitalisés dans 14 des 17 établissements ayant accueilli ces blessés en Aquitaine en 1993. Résultats : On constate que 65 à 85 % des blessés ont retrouvé en 2000 une autonomie de vie quotidienne satisfaisante ; mais 35 à 55 % d’entre eux seulement ont retrouvé une autonomie complète dans la vie sociale, les autres restant dépendants d’une assistance, d’une supervision et/ou d’une protection juridique. La majorité des patients interrogés sont satisfaits de leur autonomie (67 %), de leurs relations familiales (66 %) et de leur situation financière (41 %), mais restent insatisfaits de leur statut professionnel (28 %), de leurs loisirs (36 %) et de leur vie sexuelle (32 %). Conclusion : Ces trois aspects de la qualité de la vie des personnes TCC représentent des objectifs prioritaires des programmes de réadaptation et d’aide à la réinsertion sociale. © 2002 E´ditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Objective: To assess late outcome and satisfaction of life of patients with severe traumatic brain injury (TBI) patients who received inpatient rehabilitation in Aquitaine. Design and patients: Seventy-nine consecutive patients out of the 158 who were hospitalized for rehabilitation in 1993 were asked for in 2000 by a phone interview including standardised scales and free talk as well. Results: The results showed that nine years on average after their injury, 65 to 85% of patients were independent for daily living, whereas 35 to 55% only were independent in social life. Most of them were satisfied with their autonomy (67%), family life (66%) and financial status (41%), but they were dissatisfied with leisure (36%), vocational adjustment (28%) and sexual life (32%). * Auteur correspondant. Service MPR, hôpital Pellegrin, CHU de Bordeaux, 33076 Bordeaux cedex, France. Adresse e-mail : [email protected] (J.M. Mazaux). © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. PII: S 0 1 6 8 - 6 0 5 4 ( 0 2 ) 0 0 2 9 6 - 9

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Conclusion: Return to work, leisure and sexuality are major parameters of satisfaction of life after a severe TBI, and should be emphasized in goal-directed rehabilitation programs. © 2002 E´ ditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. All rights reserved. Mots clés: Traumatisme crânien; Qualité de vie; Devenir social Keywords: Brain injury; Head trauma; Quality of life; Psycho-social outcome

Dans les pays industrialisés, les traumatismes crâniocérébraux (TCC) représentent la première cause de mortalité et une cause majeure d’invalidité et de handicap résiduel des enfants et des adultes de moins de 40 ans. L’incidence annuelle des TCC graves, responsables d’hospitalisation ou de mort immédiate, atteint 180 à 280 pour 100 000 habitants, soit 12 000 décès et 10 000 personnes de plus gardant des séquelles permanentes chaque année en France [7,9,11]. Leur coût médicosocial est considérable, du fait de séjours très longs dans des unités hospitalières et dans des centres de rééducation spécialisés, du fait des soins prolongés et de l’aide humaine nécessaires pour la vie quotidienne et l’hébergement des plus dépendants, mais aussi du fait des très nombreuses journées de travail perdues pour la société par ces adultes jeunes. Sur un plan psychologique et humain, le TCC est responsable d’un bouleversement total et soudain de l’équilibre psychique et des projets de vie de la personne et de son groupe familial. Ses conditions de vie, et la satisfaction qu’elle en retirait, sont profondément perturbées, et pour beaucoup d’entre elles, de façon définitive. Les TCC graves représentent ainsi à la fois un drame individuel et familial et un problème majeur de Santé Publique. Leurs conséquences à long terme et les résultats des interventions de rééducation et de réadaptation dont ils font l’objet peuvent être analysés en termes de devenir fonctionnel et psychosocial, c’est-à-dire des conditions de vie et d’autonomie dans la vie quotidienne, familiale et sociale, et en termes de qualité de vie. Ce dernier concept, très utilisé en psychologie de la santé et en médecine de réadaptation, comme en cancérologie, en gériatrie et en psychiatrie, n’est toutefois pas facile à définir, et encore moins à évaluer. On admet qu’il fait référence à un sentiment de complet bien-être physique, moral et social perçu par l’individu, à la capacité d’atteindre les buts que l’on s’est fixé dans la vie, ou au fait de se comporter en conformité avec le rôle social que l’on considère jouer dans la société [5,6]. Dans tous les cas, il apparaît multidimensionnel et profondément subjectif. C’est pourquoi, il convient de bien distinguer la qualité de la vie, au sens de conditions de vie et d’autonomie, objectivables par un tiers, et le sentiment de satisfaction de vie et des soins reçus, qui reste lui entièrement subjectif [1]. L’optimisation de la qualité de la vie des blessés survivants et de leurs familles

représente ainsi l’objectif principal du projet thérapeutique et la préoccupation constante des rééducateurs et des acteurs de la réinsertion tout au long de l’évolution [3]. Le développement de programmes efficaces de réadaptation et d’aide à l’insertion sociale et professionnelle de ces blessés nécessitant de disposer de données précises sur leurs besoins, leurs attentes et ceux de leurs familles, nous avons étudié le devenir psychosocial et la satisfaction de vie de blessés plusieurs années après leur hospitalisation pour rééducation et réadaptation d’un TCC grave en Aquitaine. L’objectif principal était d’explorer deux dimensions principales relatives au devenir psychosocial des TCC : • l’ajustement psychosocial d’une population de ces patients, 7 à 10 ans après leur traumatisme ; • l’opinion des blessés et de leur entourage sur les conditions de leur prise en charge, leur devenir et leur qualité de vie à long terme.

1. Matériel, méthode, population 1.1. Méthode Dans cette perspective, nous avons réalisé une enquête par entretien téléphonique, avec interrogation directe du blessé et d’une personne de son entourage. Le recueil des données comportait quatre parties : 1.1.1. Données générales • données socio-démographiques : âge, sexe, situation familiale du patient ; • données médicales : date du TCC, évaluation de la profondeur du coma par le score à l’Échelle de Coma de Glasgow (GCS), de la durée du coma, séquelles majeures consécutives à l’accident, évaluation globale des incapacités et handicaps résiduels par le score à l’Échelle de Devenir de Glasgow (Glasgow Outcome Scale, GOS) dans sa version en cinq degrés. 1.1.2. Questionnaire Parent proche Ce questionnaire s’adressait à une personne de l’entourage, présente au moment de l’appel et vivant habituellement avec le patient. Parmi les 175 items constituant le

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Document Européen d’Evaluation des Traumatisés Crâniens [2], nous avons sélectionné les questions concernent le lieu de vie actuel (item 57), l’activité de vie quotidienne (items 131 à 142), le besoin d’une tierce personne (items 143 et 144), la nécessité d’une protection légale (item 145), le retentissement du handicap sur l’entourage (items 148, 153 et 171), la situation professionnelle (items 157 à 160), les activités sportives et loisirs (item 164) (Annexe 1). 1.1.3. Questionnaire Patient, adressé au blessé lui-même Questionnaire de Satisfaction de Vie de Fugl-Meyer et al. [5], qui comprend neuf items. Dans un premier temps, le sujet répondait à chaque item à l’aide d’une échelle de Likert en six degrés (de « pas satisfait » à « très satisfait »). Puis il devait choisir, parmi les neuf items, celui qui lui paraissait le plus important pour son confort de vie. 1.1.4. Évaluation qualitative de la prise en charge par un entretien libre avec le blessé et son proche, concernant leur satisfaction globale de la prise en charge et des conditions d’hébergement actuel (réponses binaires oui/non). Les patients retenus pour l’étude ont reçu une lettre explicative, puis ont été contactés par téléphone dans le mois suivant ce courrier. L’entretien durait de 30 à 45 min. Il a été réalisé par plusieurs examinateurs (PC, JMM, LR, ER). 1.2. Population Parmi les 17 établissements de santé accueillant des TCC graves en Aquitaine, 14 ont accepté de participer à l’étude. Deux cent neuf patients réputés TCC graves ont été identifiés comme ayant terminé leur séjour entre le 1er janvier et le 31 décembre 1993. Cent cinquante huit patients admis consécutivement correspondaient aux critères de gravité suivants : score GCS ≤ à 8 pendant 24 h ou plus en dehors de neurosédation et/ou aggravation neurologique secondaire ayant nécessité une intervention neurochirurgicale (critères de Kraus et al.) [9]. Cent cinq d’entre eux seulement ont pu être localisés. Seize n’ont pu ou voulu participer à l’enquête. Sur les 89 questionnaires restants, 79 patients étaient vivants au moment de la prise de contact, 10 décès postérieurs à la sortie de rééducation ont été recensés, soit un taux de mortalité de 11,2 % depuis 1993. Nous avons donc obtenu un échantillon représentant 56 % de la population initiale. Notre population d’étude (incluant les décès secondaires) se compose donc de 69 hommes (71 %) et de 20 femmes (29 %), soit un sex-ratio de 3/45. L’intervalle entre la date du TCC et celle de l’entretien était en moyenne de 9,24 ans (écart type : 3,4 ans ; extrêmes 7 à 24 ans). La plupart des patients étaient revus sept ans après leur sortie de rééducation initiale. La moyenne d’âge de l’échantillon était de 40,5 ans (écart type : 17 ; extrêmes : 13 à 85). La durée moyenne du

Tableau 1 Répartition de la population initiale par degré d’incapacité et handicap résiduel à la sortie du service de MPR (N = 89) GOS

Nombre de patients

Pourcentage

1 2 3 4 .

22 38 24 5

24,7 42,7 27 5,6

GOS = Échelle de devenir de Glasgow. 1 : bonne récupération ; 2 : incapacité modérée ; 3 : incapacité sévère ; 4 : état végétatif chronique.

coma était de 29 jours, avec des extrêmes de 1 à 180 jours. La gravité du handicap résiduel évaluée par le score GOS à la sortie de rééducation apparaît sur le Tableau 1. 1.3. Traitement des données Les données collectées ont été saisies de façon anonyme sous Excel et traitées à l’aide des logiciels SPSS 7.5. et STATBOX. Nous avons procédé à une analyse en composantes principales (ACP)1 des réponses des sujets aux deux questionnaires : • Questionnaire Parent proche : nous avons pris uniquement les items se rapportant aux caractéristiques du blessé (items 2 à 16, puis 19, 20 et 23). Afin d’éviter un taux de réponse insuffisant à certaines questions, nous avons repris la base de données et effectué un regroupement des questions 16 et 17. • Questionnaire Blessé : nous avons pris en compte les neuf items de satisfaction, plus les deux questions concernant la prise en charge. Nous avons ensuite effectué diverses régressions linéaires simples et multiples pas à pas2, afin d’évaluer l’impact potentiel des variables : âge, sexe, degré de handicap ou

1 L’analyse en composantes principales (ACP) est une technique descriptive qui permet de faire la synthèse de l’information contenue dans un grand nombre de variables. Elle fait ressortir une structure latente qui n’apparaît pas quand on observe directement les données brutes. Les composantes principales issues de cette analyse sont de nouvelles variables, indépendantes, combinaison linéaire de variables initiales, possédant une variance maximum. 2 L’analyse de régression simple permet d’explorer les relations existant entre une variable explicative X et une variable quantitative « à expliquer » (ou à prédire) Y. Une telle analyse sert à évaluer la force de la relation entre X et Y par le calcul du R2 ajusté (coefficient de détermination corrigé qui exprime le pourcentage de variance de la variable à prédire Y expliqué par la variable explicative X). L’analyse de régression multiple pas à pas consiste à introduire, au départ, l’ensemble des variables X (potentiellement explicatives) dans l’analyse, puis à éliminer, au fur et à mesure, celles qui n’entraînent qu’une faible augmentation du pourcentage de variance en ne conservant que celles qui contribuent de manière significative à la variance de Y (variable à expliquer). Cette procédure est arrêtée lorsque le R2 ajusté commence à diminuer. Le modèle de régression alors retenu est celui qui explique le maximum de pourcentage de variance de la variable à expliquer.

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degré d’autonomie, sur le degré d’autonomie et de satisfaction actuelle du blessé et sur la détresse subjective actuelle du parent proche.

2. Résultats 2.1. Questionnaire Parent proche : Document EBIS 2.1.1. Données sociales et mode de vie (Tableau 2) La personne ayant répondu à l’enquête appartenait à la famille du blessé dans 72,16 % des cas. Le retentissement du traumatisme sur l’entourage a été évalué par la mesure analogique de la détresse subjective de l’accompagnant, seulement lorsque celui-ci était un membre de la famille (parents, conjoint ou fratrie). Il est déclaré important à insupportable dans près de 44 % des cas. L’étude de la situation familiale de ces patients révèle une nette prédominance de célibataires. La description du lieu de vie actuel montre une faible proportion de blessés placés en institution (10 %). On est également frappé par la forte proportion de blessés vivant chez leurs parents (31,6 %). Les difficultés de relations sociales s’expriment par le nombre important de patients n’ayant pas d’activité de loisir (34 %). 2.1.2. Autonomie et activité professionnelle L’autonomie des patients dans les actes de la vie courante (AVQ) a été étudiée à partir des items du Document Européen et figure sur le Tableau 3. Bien qu’on observe des scores d’autonomie relativement importants (65 à 80 %) pour certains AVQ, les vrais problèmes concernent les actes complexes, impliqués dans la vie sociale, et ce d’autant plus qu’ils nécessitent l’utilisation des fonctions cognitives. Par exemple, 84,8 % des blessés sont capables de s’alimenter seuls, 74,7 % sont autonomes dans les transferts et les déplacements à l’intérieur, mais tout juste la moitié sont capables de faire leurs courses et d’écrire une lettre. Tableau 2 Document EBIS. Conditions de vie, détresse du proche et loisirs du blessé à la date de l’enquête Situation de vie

Nombre Pourcentage

Proche interrogé

37 15 21 35 24 25 8 54 25 28 24 27

Parent Conjoint Détresse du proche Inexistante à très faible Importante à Insupportable Lieu de vie du blessé Domicile personnel Parental Institutionnel Situation familiale Seul (célibataire, séparé) En couple Loisirs Reprise des anciens Nouveaux Aucun .

46,8 19 26,5 43,7 30 31 10,1 68 31 36 30 34

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Tableau 3 Document EBIS : autonomie des patients dans les actes de la vie quotidienne et sociale Activités de la vie quotidienne

Nombre de patients

Pourcentage

Alimentation Contrôle sphinctérien Toilette Habillage Transferts Déplacements à domicile Déplacement à l’extérieur Faire ses courses Écrire une lettre Transport en commun Conduire une voiture Formalités administratives .

67 65 52 50 59 56 51 42 41 48 29 28

84,8 81,7 65,8 63,3 74,7 70,9 64,6 53,2 51,9 61 37 35,9

Seulement un tiers peuvent conduire une voiture et effectuer des formalités administratives. 2.1.2.1. Besoins en aide humaine. Ils peuvent être vus soit comme des besoins à domicile, soit comme des aides administratives et de gestion (à distance). Sur le Tableau 4 est présentée la répartition de l’accès à ces prestations. Les associations de patients et de familles contribuent également à l’apport en aide humaine. Ainsi, la prise de contact avec une association de familles de TCC correspond à un besoin exprimé par 28 familles (42,5 %). Cependant, ces résultats doivent être interprétés avec prudence compte tenu de la formulation des items issus du Document Européen. Ainsi le groupe de sujets estimant le contact avec une association « non nécessaire » rassemble en réalité les patients et les familles qui n’en ressentent pas le besoin, mais aussi ceux qui ne se sont jamais posés la question d’un tel intérêt, et ceux qui ignorent l’existence de ce type d’aide (Tableau 5).

Tableau 4 Document EBIS : Blessés ayant besoin d’aide humaine Besoin Aide à domicile

Protection juridique .

Aucun

Discontinu Permanent

Pour raison : – physique 53 (67 %) 15 (19 %) 11 (14 %) – mentale 44 (56 %) 24 (30 %) 11 (14 %) 44 (56 %) – 35 (44,8 %)

Tableau 5 Document EBIS. Répartition des accès au tissu associatif Contact avec une association

Nombre

Pourcentage

Non nécessaire AFTC Association non spécifique Pas d’association disponible .

50 13 10 6

63,3 16,5 12,7 7,6

AFTC = Association des familles de traumatisés crâniens.

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Tableau 6 Document EBIS. Répartition des blessés dans le monde du travail

Tableau 8 Analyse en composantes principales des scores au Document EBIS

Formation

W plein temps W mi-temps W protégé

Sans activité

6 (9,5 %) .

18 (19 %)

44 (55 %)

Autonomie vis-à-vis de :

Facteur 1 Facteur 2 VP : 10,85 VP : 1,68 VT : 42,32 % VT : 23,29 %

Alimentation Contrôle sphinctérien Toilette Habillage Transferts Déplacement à domicile Déplacement à l’extérieur Faire ses courses Transport en commun Conduire une voiture Écrire une lettre Gestion financière Besoin tiers pour raison physique Besoin tiers pour raison mentale Activité actuelle du blessé Capacités professionnelles Activité sportive ou de loisir Activité du parent Tutelle .

– 0,85 – 0,81 – 0,83 – 0,81 – 0,93 – 0,91 – 0,82 – 0,74 – 0,76 – 0,34 – 0,53 – 0,30 – 0,82 – 0,49 – 0,18 – 0,55 – 0,28 – 0,11 – 0,05

5 (7 %)

6 (9,5 %)

W = activité professionnelle.

2.1.2.2. Activité professionnelle . Le taux de reprise d’une activité professionnelle est de 35 % chez nos patients, mais 18 % seulement travaillent à temps plein en milieu ordinaire (Tableau 6). 2.2. Questionnaire Blessé : satisfaction de vie Selon Fugl-Meyer et al. [5], nous avons considéré comme véritablement satisfaits uniquement les blessés ayant apporté à un item la réponse « satisfaisant » ou « très satisfaisant ». Nous avons aussi demandé aux patients de classer les items du questionnaire par ordre d’importance pour eux. Il est intéressant de noter une certaine discordance entre les réponses recueillies et le poids des items calculés à partir du questionnaire (Tableau 7). Vingt-huit pour cent seulement des sujets sont réellement satisfaits de leur vie professionnelle, 36 % de leurs loisirs, 32 % de leur vie sexuelle, 41 % de leur situation financière ; près de la moitié sont satisfaits de leur vie conjugale et amicale. On constate que la donnée la plus importante pour les patients est la situation professionnelle (27 %), contre 7,9 % qui déclarent que ce sont les amis, 3,2 % les relations sexuelles et 4,8 % la situation financière. Le tableau 7 présente aussi à titre indicatif l’opinion recueillie auprès de 163 sujets suédois sains, en activité professionnelle, d’âge moyen comparable à notre échantillon (43 ans). Les questions relatives à la satisfaction de la prise en charge des intéressés doivent être analysées avec prudence. Si l’on s’en tient aux données brutes, 91 % des blessés et 84 % de leur entourage se disent satisfaits de la prise en Tableau 7 Échelle de Fugl-Meyer. Répartition de la satisfaction en fonction des paramètres de qualité de vie, et importance perçue de ces paramètres par le blessé Paramètres de vie

Satisfaction

(N su)

Paramètre perçu comme le plus important par le blessé

Vie en général Autonomie Loisirs Vie professionnelle Situation financière Vie sexuelle Vie conjugale Relations familiales Relations amicales .

27 53 28 22 32 25 41 44 43

73 % 94 % 56 % 59 % 47 % 67 % 77 % 82 % 59 %

– 15 1 21 4 2 11 17 6

(35 %) (67 %) (36 %) (28 %) (41 %) (32 %) (52 %) (66 %) (55 %)

N su = normes population suédoise.

(19 %) (1,6 %) (27 %) (4,8 %) (3,2 %) (14,3 %) (22,2 %) (7,9 %)

– 0,16 – 0,23 – 0,31 – 0,33 – 0,19 – 0,19 – 0,34 – 0,49 – 0,53 – 0,70 – 0,53 – 0,73 – 0,30 – 0,52 – 0,66 – 0,66 – 0,57 0,01 – 0,74

VP = Valeur Propre ; VT = Variance Totale.

charge. De la même façon, 93 % des patients et 88 % des accompagnants seraient satisfaits du mode d’hébergement actuel. 2.3. Structure factorielle des questionnaires 2.3.1. Questionnaire Parent proche : Document EBIS Une analyse en composantes principales (ACP) a mis en évidence, après rotation Varimax3, deux facteurs spécifiques qui expliquent respectivement 42,3 % et 23,3 % de la variance totale (Tableau 8).Tous les items concernant la dépendance physique pour des AVQ routinières tels que l’alimentation, le contrôle sphinctérien, les transferts et les déplacements à l’intérieur du domicile sont fortement et négativement saturés4 sur le premier facteur. Il s’agit d’un facteur spécifique de dépendance versus autonomie vis-àvis des activités de la vie quotidienne (F1). Le second facteur sature négativement les items concernant la gestion financière, la conduite d’une voiture ou le fait d’avoir une activité de loisir ou sportive. Il pourrait donc s’agir d’un facteur spécifique de déficit versus maintien des aptitudes cognitives et sociales (F2).

3 Lorsque les composantes principales isolées après une ACP ne sont pas interprétables, il convient d’effectuer des rotations (varimax) qui permettent d’obtenir de nouveaux facteurs, en privilégiant l’obtention d’une structure factorielle simple. 4 Saturation : corrélation entre un item et un axe obtenu après une analyse en composantes principales.

B. Quintard et al. / Annales de Réadaptation et de Médecine Physique 45 (2002) 456–465 Tableau 9 Analyse en composantes principales des scores à l’Échelle de Fugl-Meyer et des questions sur la prise en charge Satisfaction vis-à-vis de :

Facteur 1 VP : 4,96 VT : 34 %

Facteur 2 Facteur 3 VP : 1,37 VP : 1,06 VT : 16,46 % VT : 16,76 %

La vie en général L’autonomie dans la vie quotidienne Les loisirs La situation financière Les amis La famille La situation professionnelle La vie sexuelle La vie conjugale La prise en charge et les soins L’hébergement .

– 0,75 – 0,70

0,18 0,37

– 0,20 – 0,18

– 0,74 – 0,73 – 0,70 – 0,69 – 0,64 – 0,36 – 0,10 – 0,18 – 0,19

0,09 0,09 0,26 0,15 0,07 0,08 0,04 0,88 0,86

– 0,17 – 0,10 – 0,29 – 0,33 0,001 – 0,81 – 0,92 0,04 – 0,15

VP = Valeur Propre ; VT = Variance Totale.

2.3.2. Questionnaire Blessé : Échelle de Fugl-Meyer Les résultats factoriels obtenus à partir d’une ACP suivie de rotation Varimax effectuée sur les réponses des sujets ont permis d’identifier trois facteurs spécifiques qui expliquent plus de 67 % de la variance totale (Tableau 9). Les items concernant la satisfaction de la vie en général tels que les loisirs, la situation professionnelle, la situation financière, la capacité à se débrouiller seul et les relations familiales et amicales (à l’exception des relations avec le conjoint et la vie sexuelle), sont fortement et négativement saturés sur un premier facteur que nous pouvons considérer comme concernant la satisfaction vis-à-vis de la vie en général. Les deux items concernant la qualité perçue de la prise en charge

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hospitalière et de la réinsertion, sont fortement et positivement saturés par un deuxième facteur qui peut être interprété comme concernant la satisfaction relative à la prise en charge hospitalière et à la réinsertion. Enfin, les deux items relatifs aux perceptions des sujets quant à leurs relations sexuelles et affectives avec leur conjoint sont négativement saturés par un troisième facteur qui constitue ainsi un facteur spécifique de satisfaction relative à la vie affective et sexuelle, qui apparaît ici distincte de la satisfaction de vie en général. 2.4. Influence des facteurs démographiques et lésionnels L’influence de l’âge, du sexe, des facteurs lésionnels et de l’autonomie a été recherchée par régressions linéaires multiples pas à pas entre les variables issues du questionnaire final, la détresse subjective de l’accompagnant et les notes en facteur obtenues aux questionnaires Parent proche et Blessé. 2.4.1. Dépendance vis-à-vis de la vie quotidienne (Tableau 10) Le score obtenu à la GOS en 1993 explique à lui seul plus de 65 % (p < 0,0001) de la variance de la dépendance actuelle du sujet (7 ans, en moyenne, après le traumatisme). 2.4.2. Détresse du parent proche (Tableaux 11 et 12) Le score obtenu à la GOS explique 9,2 % de la variance de la détresse du parent proche (p = 0,03). En contrepartie, une durée courte de coma et une indépendance du sujet vis-à-vis des activités de la vie quotidienne expliquent

Tableau 10 Régression simple entre le score GOS et la dépendance actuelle du sujet vis-à-vis de la vie quotidienne R2 0,659941

R2 ajusté 0,652384

F 87,329963

Variable

Coefficient

Centré et réduit

Corrélation/Y

t de Student

ddl

Probabilité

GOS .

0,217076

0,812367

0,812367

9,34505

45

4,1543E – 12

Tableau 11 Régression simple entre le score GOS et la détresse du parent proche R2 0,114781

R2 ajusté 0,092083

F 5,056938

Variable

Coefficient

Centré et réduit

Corrélation/Y

t de Student

ddl

Probabilité

GOS .

– 0,749591

– 0,338795

– 0,338795

2,248763

39

0,03025088

Tableau 12 Régressions multiples pas à pas entre la durée du coma, la dépendance vis-à-vis des activités quotidiennes et la détresse du parent proche R2 0,357792

R2 ajusté 0,322114

F 10,02832

Probabilité 0,00034527

Variable

Coefficient

Centré et réduit

Corrélation/Y

t de Student

ddl

Probabilité

COMA F1dep .

– 0,03911 – 2,722516

– 0,472351 – 0,308085

– 0,51444 – 0,372615

3,503373 2,285027

36 36

0,00124717 0,02830709

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ensemble 32,2 % de la variance de la détresse actuelle du parent (p = 0,0003). 2.4.3. Satisfaction de vie et de la prise en charge du blessé Le score obtenu à la GOS d’une part, et une dépendance du sujet pour les transferts et un besoin en tierce personne pour raison mentale (BTRM) d’autre part, expliquent respectivement 47,6 % (p < 0,0001) et 55 % (p < 0,0001) de la variance de l’insatisfaction générale du sujet (Tableaux 13 et 14). Un score faible à la GOS, un âge élevé et le fait de ne pas vivre seul expliquent, ensemble, 23,9 % (p = 0,003) de la variance de la satisfaction du sujet, relative à la qualité de sa prise en charge hospitalière et de sa réinsertion (Tableau 15). Enfin, avoir un score faible à la GOS, être âgé et de sexe masculin expliquent ensemble 34,1 % (p = 0,0001) de la

variance de l’insatisfaction du sujet relative à sa vie affective et sexuelle (Tableau 16).

3. Discussion Cette étude visait à documenter le devenir psychosocial et la satisfaction de vie de TCC graves, sept ans en moyenne après une hospitalisation pour rééducation et réadaptation en Aquitaine. Globalement, nos résultats montrent que, selon les activités considérées, 65 à 85 % de ces sujets ont retrouvé en 2000 une autonomie de vie quotidienne satisfaisante; mais 35 à 55 % d’entre eux seulement ont retrouvé une autonomie complète dans la vie sociale, les autres restant dépendants d’une assistance, d’une supervision et/ou d’une protection juridique. Tate et al. [14], avec six ans de recul, et Ponsford et al. [12], avec deux ans de recul seulement,

Tableau 13 Régression simple entre le score GOS et l’insatisfaction générale du blessé R2 0,488004

R2 ajusté 0,476627

F 42,891448

Variable

Coefficient

Centré et réduit

Corrélation/Y

t de Student

ddl

Probabilité

GOS .

– 7,587708

– 0,698574

– 0,698574

6,549156

45

4,7639E – 08

Tableau 14 Régressions multiples pas à pas entre l’autonomie pour les transferts et les besoins d’une tierce personne pour raison mentale (BTRM) et l’insatisfaction générale du blessé R2 0,570742

R2 ajusté 0,550302

F 27,92173

Probabilité 1,9367E – 08

Variable

Coefficient

Centré et réduit

Corrélation/Y

t de Student

ddl

Probabilité

TRANSF BTRM .

3,01624 5,127101

0,474833 0,419732

0,652897 0,621171

4,253254 3,759692

42 42

0,00011513 0,00051978

Tableau 15 Régressions multiples pas à pas entre l’âge, le score GOS et la situation familiale et la satisfaction du blessé relative à la qualité de sa prise en charge et de sa réinsertion R2 0,305617

R2 ajusté 0,239485

F 4,621338

Probabilité 0,00349836

Variable

Coefficient

Centré et réduit

Corrélation/Y

t de Student

ddl

Probabilité

AGE GOS SIT. FAM .

0,020013 – 0,278424 – 0,327621

0,335661 – 0,368439 – 0,35034

0,069314 – 0,363442 – 0,269433

2,254321 2,764216 2,387938

42 42 42

0,02945139 0,00843742 0,02151758

Tableau 16 Régressions multiples pas à pas entre le sexe, l’âge et le score GOS et l’insatisfaction du blessé relative à sa vie affective sexuelle R2 0,384252

R2 ajusté 0,341293

F 8,944613

Probabilité 0,00010123

Variable

Coefficient

Centré et réduit

Corrélation/Y

t de Student

ddl

Probabilité

SEXE AGE GOS .

– 3,093776 0,122901 – 2,108071

– 0,33053 0,341938 – 0,46275

– 0,362091 0,212311 – 0,414855

2,745401 2,770769 3,733396

43 43 43

0,00878638 0,00822736 0,00055039

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avaient observé la même dissociation, avec toutefois une meilleure proportion de patients autonomes dans la vie sociale (66 %) dans l’étude de Ponsford et al. [12]. Les patients que nous avons interrogés sont satisfaits de leur vie en général, de leur autonomie, de leurs relations familiales et de leur situation financière, mais restent insatisfaits de leur statut professionnel, de leurs loisirs et de leur vie sexuelle. Dans la littérature, peu d’études ont été menées avec un recul aussi prolongé et des outils d’évaluation standardisés. Klonoff et al. [8] ont montré en 1986 l’influence négative sur la qualité de vie perçue de facteurs physiques : difficultés de déplacement, fatigue, ralentissement psychomoteur, de facteurs psychiques : détresse émotionnelle et troubles de la communication, et surtout de restrictions de la vie sociale, des loisirs et des activités professionnelles. Utilisant un modèle d’analyse multidimensionnel, Webb et al. [15] constataient avec un recul de deux ans en Alabama l’influence de la race, de l’accès aux structures de rééducation, de l’indépendance fonctionnelle, de la qualité du support familial, et surtout du statut professionnel, ce dernier facteur ayant l’influence la plus importante. En France, dans les études menées par Joseph et al. [6] en 1995 et Dehail et al. [4] en 1998, les paramètres relationnels : investissement occupationnel, vie de loisir, relations sociales et amicales étaient les plus déficitaires, alors que Mailhan et al. [10] retrouvaient avec quatre à cinq ans de recul l’influence à la fois de paramètres physiques : déficiences motrices, incapacités pour les actes élaborés, de paramètres psychologiques : manifestations anxiodépressives, et du statut professionnel. La présente étude permet d’aller un peu plus loin dans l’analyse, en distinguant trois grands facteurs de satisfaction de vie. En analyse multivariée (régressions linéaires), la satisfaction en général est influencée à la fois par des paramètres physiques : autonomie aux transferts et de vie quotidienne, et par des paramètres psychiques : dépendance d’un tiers pour raisons cognitives et/ou comportementales. La satisfaction vis-à-vis des soins et de la réinsertion est influencée par l’âge et le statut marital, alors que la satisfaction de vie affective et sexuelle paraît influencée par l’âge et le sexe. Ces trois facteurs sont significativement corrélés au degré d’incapacité évalué par la GOS. Enfin, la détresse de la famille est en relation avec la sévérité du traumatisme évaluée par la durée du coma, le degré d’autonomie dans la vie quotidienne (F1), le degré de récupération des aptitudes cognitives et sociales (F2), et le niveau d’incapacité évalué par la GOS. Il convient néanmoins de considérer ces résultats avec prudence. Sur le plan méthodologique, nous avons pu interroger seulement la moitié des 158 patients hospitalisés en 1993. Les 16 personnes ayant refusé de répondre à l’enquête étaient peut-être insatisfaites, refusant tout contact avec le milieu hospitalier. De plus, bien que nous ayons

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respecté un plan d’enquête par admissions consécutives, l’échantillon sur-représente probablement les blessés les plus dépendants, plus faciles à localiser géographiquement car encore en contact avec le système sanitaire. Ceci se trouve confirmé lorsqu’on compare la répartition de nos patients vis-à-vis de la GOS : 24,7 % de bonne récupération, 42,7 % d’incapacité modérée, 27 % d’incapacité sévère, par rapport à celle retrouvée par Masson et al. [11] chez 27 TCC graves sélectionnés en conditions épidémiologiques : 40,8 % de bonne récupération, 44,4 % d’incapacité modérée, 14,8 % d’incapacité sévère. Le recul de notre étude par rapport au traumatisme était suffisant (7 à 10 ans en moyenne), mais hétérogène. Le mode de recueil des données a pu influencer l’opinion du blessé‚ et des familles. Nous ne disposons pas encore de données normatives sur les taux de satisfaction aux items du questionnaire de FuglMeyer dans la population française. D’autre part, l’entretien téléphonique a bien mis en évidence l’extrême diversité des séquelles et des situations vécues par les traumatisés crâniens, et conduit à considérer le problème de façon très individuelle, sans généraliser les résultats : tel blessé se déclare satisfait d’une situation qu’un autre jugera insupportable. Chez certains blessés, nous avons eu également le sentiment qu’il persistait, malgré les années écoulées, une anosognosie qui les empêchait peutêtre de se percevoir tels qu’ils étaient, et les conduisaient à surévaluer la qualité de leur vie, les protégeant en quelque sorte de la tristesse et de la dépression. Mais la notion de qualité de la vie doit de toutes façons garder sa dimension subjective.

4. Conclusion Au total, retrouver une vie affective et sexuelle harmonieuse, des relations humaines et amicales valorisantes, des loisirs, une activité professionnelle et un statut social représentent les principales attentes des personnes ayant survécu à un TCC grave. Nous retrouvons le célèbre work, love and play de Prigatano [13]. Ces facteurs doivent donc constituer les objectifs prioritaires des programmes d’aide à l’insertion et à la réadaptation de ces personnes. Améliorer la qualité de la vie de la famille du traumatisé crânien est aussi un objectif prioritaire. Le TCC bouleverse de façon durable, et souvent définitive, l’équilibre matériel et moral de la famille. Des actions d’aide matérielle, d’écoute psychologique et d’assistance humaine au moins périodique devraient être développées. Le rôle du secteur associatif est considérable dans ce domaine. C’est enfin en changeant le regard porté par la société, en réduisant l’indifférence du public et le sentiment d’isolement et d’incompréhension dont souffrent trop de patients et de familles que nous participerons à l’amélioration de la qualité de leur vie.

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ANNEXE 1 DOCUMENT EBIS D’ÉVALUATION DES TRAUMATISÉS CRÂNIENS ; ITEMS UTILISÉS DANS L’ÉTUDE 57- Où le blessé dort-il habituellement la nuit ? (Domicile personnel = 0 ; Domicile familial = 1 ; Appartement thérapeutique/relais = 2 ; Hébergement institutionnel = 3 ; Autre = 4) Activités de la vie quotidienne : (Normal/Indépendant = 0 ; Indépendant malgré une certaine limitation, c’est à dire lenteur ou nécessité d’une aide technique = 1 ; Partiellement dépendant, nécessitant parfois une aide humaine = 2 ; Dépendance, dans la majorité des situation et du temps = 3) 131- Alimentation et boisson 132- Contrôle sphinctérien 133- Toilette 134- Habillage 135- Transfert (lever, coucher, passage du lit au fauteuil…) 136- Déplacements à domicile 137- Déplacements à l’extérieur 138- Faire ses courses 139- Prendre les transports en commun 140- Conduite automobile 141- Écrire une lettre 142- Gestion financière et formalités administratives Tierce personne (Non = 0 ; Besoins discontinus =1 ; Besoins continus = 2) 143- Le patient a-t-il besoin d’une tierce personne pour des raisons d’ordre physique ? 144- Le patient a-t-il besoin d’une tierce personne pour des raisons d’ordre mental ? 145- Protection légale (Non nécessaire = 0 ; Souhaitable mais non mise en œuvre = 1 ; En cours d’instruction = 2 ; Fixée = 3) 148- Un membre de la famille a-t-il dû interrompre ou modifier son emploi ou sa formation pour s’occuper du blessé ? (Non = 0 ; Oui = 1) 153- Détresse subjective de l’accompagnant : échelle analogique visuelle à 7 degrés École et travail : 157- Type d’activité actuelle (Travail à temps plein = 0 ; Travail à mi-temps du fait du traumatisme = 1 ; Travail à mi-temps pour d’autres raisons = 2 ; Formation ou apprentissage = 3 ; École = 4 ; Sans activité professionnelle ou scolaire : 5)

158- École/ou Travail : quelle description définit le mieux le blessé ? (Retour sans aide au même niveau = 0 ; Retour au même niveau mais avec aide initiale = 1 ; Retour au même niveau mais avec aide persistante = 2 ; Retour à un niveau inférieur ou à temps partiel, sans aide = 3 ; Retour à un niveau inférieur ou à temps partiel avec aide persistante = 4 ; Travail protégé ou scolarité spéciale pour handicapés = 5 ; Sans activité professionnelle ou scolaire = 6) 159- Rémunération du travail (Salaire identique/supérieur = 0 ; Salaire inférieur = 1 ; Indemnités journalières seulement = 2 ; Non payé/prestations sociales = 3 ; Ne travaille pas = 4). 160- Sans activité scolaire ou professionnelle : quelle description définit mieux le blessé ? (Compétence prouvée pour travailler ou être scolarisé, avec les mêmes capacités, mais pas de travail ni d’école disponibles = 0 ; Capable, a priori, de travailler ou d’être scolarisé avec les mêmes capacités mais pas de travail ni d’école disponibles = 1 ; capable de travailler ou d’être scolarisé avec des capacités inférieures mais pas de travail ni d’école disponibles = 2 ; Orientation en cours = 3 ; À repris l’école ou un emploi mais en a été exclu = 4 ; Trop tôt pour envisager un emploi = 5 ; Incapable de travailler ou d’être scolarisé = 6 ; En activité = 7) Aspects sociaux 164- Le blessé a-t-il des activités sportives ou des loisirs ? (Activités anciennes et nouvelles = 0 ; Activités anciennes = 1 ; Activités nouvelles = 2 ; Aucune = 3) 171- Le blessé et son entourage sont-ils aidés par un groupe ou une association ? (Ce n’est pas nécessaire = 0 ; Association consacrée aux traumatisés crâniens = 1 ; Association non spécifique = 2 ; Pas d’association impliquée ou disponible = 3)

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