Acné au Cameroun : qualité de vie et comorbidités psychiatriques

Acné au Cameroun : qualité de vie et comorbidités psychiatriques

Annales de dermatologie et de vénéréologie (2016) 143, 601—606 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com MÉMOIRE ORIGINAL Acné a...

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Annales de dermatologie et de vénéréologie (2016) 143, 601—606

Disponible en ligne sur

ScienceDirect www.sciencedirect.com

MÉMOIRE ORIGINAL

Acné au Cameroun : qualité de vie et comorbidités psychiatriques Acne in Cameroon: Quality of life and psychiatric comorbidities E.A. Kouotou a,b,c,∗, H. Adegbidi d, R. Bene Belembe a,c, I. Sieleunou e, J.R. Nansseu c, J.-P. Kamga c, E.C. Ndjitoyap Ndam c a

Centre hospitalier universitaire (CHU), Yaoundé, Cameroun Hôpital de District de Biyem-Assi, Yaoundé, Cameroun c Faculté de médecine et des sciences biomédicales, université de Yaoundé I, Yaoundé, Cameroun d Centre national hospitalier universitaire (CNHU), Cotonou, Bénin e School of public health, university of Montréal, Montréal, Canada b

Rec ¸u le 29 septembre 2015 ; accepté le 19 mai 2016 Disponible sur Internet le 3 aoˆ ut 2016

MOTS CLÉS Acné ; Qualité de vie ; Dépression ; Anxiété ; Cameroun



Résumé Introduction. — L’impact de l’acné sur la qualité de vie (QDV) des personnes atteintes n’avait pas été étudié au Cameroun. Notre objectif était donc d’évaluer la QDV des patients acnéiques au Cameroun et de rechercher les comorbidités psychiatriques associées. Méthodes. — Nous avons mené une étude transversale dans trois hôpitaux de la ville de Yaoundé et avons inclus, avec leur consentement, les patients diagnostiqués acnéiques au terme d’une consultation dermatologique. La grille ECLA a servi pour l’évaluation clinique de l’acné, la grille CADI pour celle de la QDV, et les questionnaires PHQ-9 et GAD-7, respectivement pour le dépistage de la dépression et de l’anxiété. Résultats. — Nous avons recruté 181 patients âgés de 13 à 56 ans. Le score de sévérité global de l’acné selon la grille ECLA variait entre 3 et 26 points. Il existait une altération de la QDV chez tous les malades. Le score de QDV selon la grille CADI variait de 1 à 15 points. Nous avons trouvé 11 cas (6,1 %) de dépression et 14 cas (7,7 %) d’anxiété. Une corrélation positive entre la sévérité de l’acné et l’altération de la QDV a été observée (r = 0,46 ; p < 0,001). La sévérité

Auteur correspondant. Adresses e-mail : [email protected], kearm [email protected] (E.A. Kouotou).

http://dx.doi.org/10.1016/j.annder.2016.05.011 0151-9638/© 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

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E.A. Kouotou et al. de l’acné était positivement corrélée aux scores de dépression (r = 0,347 ; p < 0,001) et d’anxiété (r = 0,291 ; p < 0,001). Conclusion. — L’acné a un impact négatif sur la QDV des patients qui en souffrent. La dépression et l’anxiété sont significativement associées à l’acné. © 2016 Elsevier Masson SAS. Tous droits r´ eserv´ es.

KEYWORDS Acne; Quality of life; Depression; Anxiety; Cameroon

Summary Background and aims. — The impact of acne upon quality of life (QOL) among affected patients had not previously been investigated in Cameroon. The present study therefore sought to assess the QOL of patients with acne and related psychiatric comorbidities in this country. Patients and methods. — This was a cross-sectional study conducted in three hospitals in Yaoundé, Cameroon. We included patients diagnosed with acne after a consultation with a dermatologist, and who consented to participate in the study. The ECLA scale was used for the clinical evaluation of acne and the CADI score was used to assess QOL. PHQ-9 and GAD-7 questionnaires were used for the respective screening of depression and anxiety. Results. — We enrolled 181 patients aged between 13 and 56 years. According to the ECLA table, the acne global severity score ranged from 3 to 26 points. Impairment was observed in all patients’ QOL, which ranged from 1 to 15 points. We noted 11 cases of depression (6.1%) and 14 cases of anxiety (7.7%). There was a positive and significant correlation between the severity of acne and impairment of patients’ QOL (r = 0.46; P < 0.001). Likewise, the severity of acne and of depression and anxiety scores were positively and significantly correlated with one other: r = 0.347 (P < 0.001) and r = 0.291 (P < 0.001), respectively. Conclusion. — Acne negatively impacts the QOL of patients presenting acne in Cameroon and is associated with depression and anxiety, which must therefore be taken into account when treating these patients. © 2016 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Introduction L’acné est une dermatose inflammatoire chronique du follicule pilosébacé, caractérisée par des comédons, des papules et des pustules [1]. C’est une maladie très fréquente dont la prévalence dans le monde est de 80 % chez les adolescents et 40 % chez les adultes [2]. En milieu hospitalier, sa prévalence au cours des consultations dermatologiques est estimée à 5,3 % au Sénégal [3] et 31,2 % au Bénin [4]. Malgré sa bénignité, l’acné a un grand impact sur l’état psychologique du patient qui en souffre [5]. En Afrique, l’acné est volontiers considérée par la population comme banale, voire « normale » ; elle n’apparaît pas susceptible d’altérer la qualité de vie et les dermatologues ont tendance à sous-estimer la prévalence des comorbidités psychiatriques qui y sont associées [6,7]. Aussi, sa prise en charge se limite-t-elle en général au traitement médicamenteux et ne prend pas en compte le volet psychologique qui pourrait avoir un impact sur la qualité de vie (QDV) du patient. Or il a été montré que la présence de l’acné peut affecter négativement la QDV, l’estime de soi et l’humeur chez les adolescents [7,8]. L’acné est associée à une incidence accrue d’anxiété, de dépression et d’idéation suicidaire. La possibilité de ces troubles psychologiques devrait être prise en compte dans le traitement des patients atteints d’acné [8]. Une étude réalisée par Yazici et al. dans le

but d’objectiver les comorbidités psychiatriques chez les patients acnéiques a révélé que 26,2 % des patients présentaient une anxiété et 29,5 % une dépression [9]. Au Cameroun, l’acné est parmi les cinq motifs de consultations les plus fréquents (7,7 %) et constitue la première pathologie annexielle (86,5 %) régulièrement enregistrée [10]. Malgré cette fréquence, peu d’études camerounaises ont été menées sur cette affection et son impact psychologique. Aussi, nous sommes-nous proposés d’évaluer la QDV des patients acnéiques vus en consultation de dermatologie, de rechercher chez eux des comorbidités psychiatriques (dépression et anxiété) ; puis de déterminer la corrélation entre la QDV, la dépression, l’anxiété et la sévérité de l’acné.

Méthodes Nous avons réalisé une étude transversale analytique qui s’est déroulée sur une période de trois mois (février—avril 2015) dans trois hôpitaux de la ville de Yaoundé où exerce au moins un dermatologue, notamment l’hôpital central de Yaoundé (HCY), l’hôpital de district de Biyem-Assi (HDBA) et le centre médical d’arrondissement (CMA) d’Elig-Essono. Cette étude a obtenu un avis favorable

Acné au Cameroun : qualité de vie et comorbidités psychiatriques du comité d’éthique de la faculté de médecine et des sciences biomédicales de Yaoundé.

Malades Tous les patients acnéiques vus en consultation dermatologique dans ces hôpitaux, choisis par convenance, constituaient notre population d’étude. Ainsi, étaient inclus les patients présentant une acné vus et examinés par un dermatologue au cours d’une consultation pendant cette période. Par ailleurs, tous les patients ayant décidé de se retirer de l’étude en étaient exclus. Nous avons considéré comme adolescents les patients âgés de 13 à 17 ans et comme adultes jeunes ceux de 18 à 25 ans ; la tranche d’âge supérieur à 25 ans représentait l’âge adulte. Notre échantillonnage était ouvert au tout venant et le recrutement était consécutif et exhaustif.

Méthodes et recueil des données Le recueil des données, à l’aide d’une fiche technique structurée (Annexe 1), s’est déroulé en plusieurs étapes. Le recrutement des patients s’est fait lors des consultations dermatologiques. L’interrogatoire précisait les paramètres sociodémographiques (âge, sexe, profession). L’examen physique, fait par le dermatologue, précisait les types de lésions présentes, leur localisation et les formes cliniques. La sévérité de l’acné était évaluée à l’aide de la grille Échelle de cotation des lésions d’acné (ECLA) [11]. Pour évaluer l’impact de l’acné sur la qualité de vie et dépister les comorbidités psychiatriques, trois questionnaires étaient distribués systématiquement aux patients : une grille hyperspécifique de mesure de la QDV des patients acnéiques, le Cardiff Acne Disability Index (CADI) [12] ; le Patient Health Questionnaire-9 (P HQ-9) [13] pour le dépistage de la dépression et le General Anxiety Disorder-7 (GAD-7) [14] pour le dépistage de l’anxiété. Ces trois questionnaires étaient complétés par les patients à la fin de la consultation. Tous les cas de dépression et d’anxiété relevés étaient adressés au psychiatre de l’équipe.

Calcul et interprétation des scores Le score total ECLA, obtenu en additionnant les scores des facteurs F1, F2 et F3, était compris entre 0 et 36. Un score ECLA inférieur ou égal à 12 représentait une acné légère à modérée ; un score supérieur à 12 représentait une acné sévère. Pour établir le score CADI, les réponses (a) étaient cotées 3 points, (b) 2 points, (c) 1 point et (d) 0 point. Le score calculé en additionnant le nombre de points de chaque question variait entre 0 et 15. L’interprétation était la suivante : 0 = pas d’altération de la QDV ; 1 à 5 = altération légère de la QDV ; 6 à 10 = altération modérée de la QDV ; 11 à 15 = altération sévère de la QDV. Pour évaluer la dépression, chacun des items du PHQ9 était coté de 0 à 3 : 0 = jamais ; 1 = plusieurs jours ; 2 = plus de la moitié du temps et 3 = presque tous les jours. Le score total était obtenu en additionnant les scores de chaque item ; il variait de 0 à 27. Un score PHQ-9 supérieur ou égal à 10 ayant une sensibilité et une spécificité de 88 % pour le diagnostic de dépression [13], les résultats

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étaient interprétés comme suit : score inférieur à 10 = pas de dépression et score supérieur ou égal à 10 = dépression. Pour évaluer l’anxiété, chacun des items du GAD-7 était coté de 0 à 3 : 0 = jamais ; 1 = plusieurs jours ; 2 = plus de la moitié du temps et 3 = presque tous les jours. Le score total était obtenu en additionnant les scores de chaque item ; il variait de 0 à 21. Un score GAD-7 supérieur ou égal à 10 ayant une sensibilité de 89 % et une spécificité de 82 % pour le diagnostic d’anxiété [14], les résultats étaient interprétés comme suit : score inférieur à 10 = pas d’anxiété et score supérieur ou égal à 10 = anxiété.

Analyse statistique Les données recueillies étaient saisies sous le logiciel Epiinfo version 3.5.4. Le traitement et l’analyse des données étaient réalisés à l’aide du logiciel SPSS version 16. Nous avons utilisé le coefficient de corrélation de Pearson pour déterminer la corrélation entre la QDV, la dépression, l’anxiété et la sévérité de l’acné vu qu’il s’agissait de variables quantitatives. Le test t de Student a été utilisé pour comparer les moyennes du score de QDV CADI en fonction du sexe. Une valeur de p < 0,05 était considérée comme statistiquement significative.

Résultats Entre février et avril 2015, 181 patients ont été inclus. L’âge moyen était de 25,4 ± 7,1 ans, avec des extrêmes de 13 et 56 ans. Près de la moitié (48,1 %) des patients étaient des adultes jeunes. Une nette prédominance féminine (149/181 ; 82,3 %) était relevée, avec une sex-ratio H/F de 0,21. Les élèves ou étudiants étaient majoritairement représentés (58,6 %). Le visage était atteint dans 100 % des cas, seul ou en association à des lésions de la poitrine (26,5 %), du cou (16,5 %), du dos (7,2 %), des bras ou des épaules (3,3 %). Dans notre série, les lésions d’acné fréquemment rencontrées étaient les comédons (180/181 ; 99,4 %), les macules hyperpigmentées (175/181 ; 96,7 %) et les papules (168/181 ; 92,8 %). L’acné papulopustuleuse représentait la forme clinique la plus fréquente (74/181 ; 40,9 %). Les autres formes cliniques observées étaient l’acné rétentionnelle (69/181 ; 38,1 %), l’acné pigmentaire (20/181 ; 11,1 %) et l’acné nodulaire (18/181 ; 9,9 %). Le score de sévérité global ECLA était en moyenne de 11,0 ± 4,5 avec des extrêmes de 3 et 26. L’acné était jugée légère à modérée chez 126 patients (69,6 %) et sévère chez 55 (30,4 %). La moyenne du score CADI était de 6,3 ± 3,4 avec des extrêmes de 1 et 15. L’altération de la QDV était jugée légère chez 89 patients (49,2 %), modérée chez 75 (41,4 %) et sévère chez 17 (9,4 %). Il n’y avait pas de corrélation entre le score CADI et l’âge (r = 0,079 ; p = 0,292) ou le sexe (p = 0,70) des patients. Le Tableau 1 illustre la distribution des patients selon l’âge, le sexe et les grilles d’évaluation (ECLA et CADI). Les scores du PHQ-9 variaient de 0 à 16 ; ce questionnaire nous a permis de relever 11 cas de dépression

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E.A. Kouotou et al.

Tableau 1 Répartition des patients, sévérité de l’acné (ECLA) et retentissement sur la qualité de vie (CADI) selon le sexe et l’âge.

Âge 13—17 ans 18—25 ans > 25 ans Sexe Féminin Masculin

Tableau 2

Effectif (%)

ECLA (moyenne ± écart-type)

CADI (moyenne ± écart-type)

18 (9,9) 87 (48,1) 76 (42,0)

11,50 ± 4,99 11,17 ± 4,27 10,75 ± 4,64

5,94 ± 2,62 6,41 ± 3,46 6,17 ± 3,44

149 (82,3) 32 (17,7)

10,72 ± 4,08 12,47 ± 5,88

6,22 ± 3,29 6,47 ± 3,74

Scores moyens ECLA et CADI des patients dépressifs et anxieux.

Patients dépressifs Patients anxieux

Tableau 3

Moyenne score ECLA

Moyenne score CADI

17,82 ± 5,38 14 ± 5,14

9,55 ± 3,17 9,36 ± 2,73

Corrélations entre le score global CADI et les facteurs F1, F2, F3 de la grille ECLA. ECLA

Score global CADI (r) Valeur de p

Tableau 4

Facteur 1

Facteur 2

Facteur 3

0,43 < 0,001

0,23 < 0,001

0,31 < 0,001

Corrélations entre le score global ECLA et les items du score CADI. CADI

Score ECLA total (r) Valeur de p

Item 1

Item 2

Item 3

Item 4

Item 5

0,26 < 0,001

0,39 < 0,001

0,42 < 0,001

0,30 < 0,001

0,28 < 0,001

parmi nos 181 patients acnéiques (6,1 %). De même, les scores du questionnaire GAD-7 variaient de 0 à 13 ; ce questionnaire permettait de dépister 14 cas d’anxiété parmi les 181 patients (7,7 %). La majorité des participants découverts dépressifs (10/11 ; 90,9 %) ou anxieux (11/14 ; 78,6 %) présentaient une acné sévère avec un score ECLA moyen largement supérieur à 12, ainsi qu’une altération de la QDV (Tableau 2). Par ailleurs, 68 % d’entre eux avaient des antécédents familiaux d’acné (fratrie : 76,9 % ; mère : 38,5 % ; père : 15,4 % ; oncle ou tante : 15,4 %). Il existait une corrélation entre les scores ECLA et CADI, avec un coefficient de corrélation de Pearson r = 0,46 et une valeur de p < 0,001. Il existait aussi une corrélation positive entre le score CADI et les facteurs F1, F2 et F3 de la grille ECLA (p < 0,001) (Tableau 3), ainsi qu’entre le score ECLA et les cinq items du score CADI (Tableau 4). Enfin, le score ECLA était significativement corrélé aux scores de dépression (PHQ-9 : r = 0,347 ; p < 0,001) et d’anxiété (GAD-7 : r = 0,291 ; p < 0,001).

Discussion La moyenne d’âge des participants était de 25,4 ± 7,1 ans, avec des extrêmes de 13 et 56 ans. Ce résultat est proche de ceux d’autres études réalisées en milieu hospitalier : 25,6 ans au Sénégal [3], 23,8 ± 4,4 ans au Maroc [15], 26 ± 8,7 ans en Inde [16]. Cet âge relativement élevé s’expliquerait par le fait que l’acné des adolescents est négligée par la population des pays considérés, qui la regardent comme un phénomène normal, « un passage obligatoire ». De ce fait, les parents ne sollicitent pas toujours une consultation dermatologique pour leurs enfants présentant une acné. Dans notre série, nous avons trouvé aussi une forte prédominance féminine 82,3 % avec une sex-ratio de 0,21. Cela s’expliquerait par le fait que les femmes consultent volontiers plus facilement que les hommes pour toute maladie « affichante » et disgracieuse. Les lésions d’acné siégeaient sur le visage chez tous les patients. Cette localisation préférentielle au visage, confirmée par d’autres travaux [4,16,17], fait de l’acné une

Acné au Cameroun : qualité de vie et comorbidités psychiatriques affection très « affichante » difficile à dissimuler, et qui a un impact important sur l’état psychologique du patient. L’acné papulopustuleuse était la forme clinique la plus représentée, comme dans d’autres études [3,4]. Les lésions d’excoriation étaient fréquentes (64,6 % des cas). Cette tendance à l’automutilation par excoriation peut refléter des troubles obsessionnels et est souvent accompagnée d’une dépression ou d’une anxiété, comme l’ont souligné Odlaug et al. [18]. En Afrique sub-saharienne en général et au Cameroun en particulier, l’acné peut être induite, entretenue ou aggravée par certaines pratiques cosmétiques telles que la dépigmentation volontaire, avec pour autre corollaire l’induction ou l’aggravation des lésions hyperpigmentées [17,19]. Ces lésions dyschromiques cosméto-induites, très souvent affichantes et difficiles à prendre en charge, peuvent à court et moyen terme altérer la QDV des patients et engendrer à leur tour anxiété, voire dépression. À l’aide d’une échelle hyper-spécifique, le CADI, nous avons relevé que l’acné entraînait une altération de la qualité de vie de tous les patients de notre cohorte. Au Cameroun, une précédente étude avait évalué que 74 patients parmi 123 (60,2 %) admettaient l’effet négatif de l’acné sur leur aspect extérieur [20]. Dans notre étude, la moyenne du score CADI était de 6,3 ± 3,4. Ce résultat est proche de ceux d’autres travaux qui ont trouvé respectivement des moyennes de 4,86 ± 3,11 et 4,8 ± 2,9 [6,20]. Chez tous nos patients, les lésions d’acné se localisaient au niveau du visage. Le caractère « affichant » et inesthétique de cette maladie pourrait rendre compte de son impact sur la qualité de vie. Le patient considèrerait également l’acné comme un frein à ses stratégies de séduction et cela pourrait se vérifier dans notre population d’étude, qui était représentée essentiellement par des femmes adultes jeunes en quête de partenaires. De nombreuses études utilisant d’autres échelles ont également mis en évidence la détérioration de la QDV des patients acnéiques [9,21,22]. Les résultats de ces travaux prouvent que la présence de l’acné peut affecter négativement la QDV, l’estime de soi et l’humeur du patient. En utilisant les questionnaires PHQ-9 et GAD-7, nous avons relevé 11 cas (6,1 %) de dépression et 14 cas (7,7 %) d’anxiété dans notre échantillon. En Afrique du Sud, Bhagwanjee et al. [23] avaient noté la présence de troubles psychiatriques chez 81 patients acnéiques, avec des proportions de 4,8 % pour la dépression et de 3,7 % pour l’anxiété. Avec ceux d’autres études [7,24], nos résultats prouvent que l’acné est associée à des troubles psychiatriques, notamment dépression et anxiété, dans différents contextes et différentes régions du monde. Nous avons trouvé une forte corrélation positive entre le score de sévérité ECLA et le score de QDV CADI. Cela indique que la sévérité de l’acné influe sur la QDV du patient. Nous avons relevé que la sévérité de l’acné du visage, celle hors visage et celle des cicatrices avaient chacune une influence sur la QDV globale du patient. De plus, la sévérité globale de l’acné a un impact sur chacun des items constituant l’échelle de QDV que sont : les émotions ressenties, les relations du malade, les conduites d’évitement, les sentiments d’angoisse et la perception globale de l’acné par le patient. Ces résultats sont proches de ceux trouvés au Maroc [15] et en Tunisie [25]. De plus, d’autres études [18,24] utilisant des outils différents des nôtres ont également montré une

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relation entre la sévérité de l’acné et la QDV du patient. Cependant, il nous semble important d’évaluer la QDV des patients acnéiques quel que soit le degré de sévérité de l’acné car, selon Dréno et al. [26], l’acné même minime peut avoir un impact négatif sur la QDV. Il existait une corrélation positive entre le score de sévérité ECLA et les scores aussi bien de dépression (PHQ-9) que d’anxiété (GAD-7). Dans notre série, le fait qu’une acné cliniquement sévère était présente chez 10 des 11 patients dépressifs (90,9 %) et chez 11 des 14 patients anxieux (78,6 %) indique bien que la sévérité de l’acné influe sur la survenue de ces pathologies psychiatriques. Ce résultat est similaire à celui de Öztürk et al. en Turquie [27], qui avaient relevé que les moyennes des scores de dépression et d’anxiété étaient plus élevées chez les patients ayant une acné sévère que chez ceux ayant une acné légère à modérée. Ces corrélations toutes positives pourraient s’expliquer par le fait qu’une acné sévère attire plus le regard des autres ; le patient est pris en pitié ou parfois repoussé par certaines personnes qui trouvent ses lésions disgracieuses, voire effrayantes. Les patients ont également tendance à se décourager face à un traitement qu’ils jugent trop long et pas toujours efficace. Tous ces phénomènes pourraient retentir sur la QDV de patients qui, avec le temps et en absence de tout soutien ou accompagnement, sont susceptibles de développer une dépression ou une anxiété. Le fait que notre population d’étude soit essentiellement hospitalière, et par conséquent non représentative de la population générale, pourrait constituer une limite de notre travail. De même, nous avons réalisé un choix de convenance pour les différents hôpitaux où s’est déroulé le recrutement des patients. Enfin, la taille de notre échantillon ainsi que la durée de cette étude pourraient elles aussi constituer des limites de ce travail. D’où notre exhortation à une étude similaire qui tienne compte de toutes ces limites.

Conclusion L’acné est une affection chronique assez fréquente dans nos consultations et qui a un impact négatif sur la QDV des patients qui en souffrent. Cette étude a permis de relever que l’altération de la QDV des patients acnéiques était fortement corrélée avec la sévérité clinique de l’acné. La dépression et l’anxiété sont des comorbidités psychiatriques significativement corrélées à la sévérité de l’acné dans notre contexte. L’acné a donc un retentissement majeur sur l’état psychologique du patient, d’où l’intérêt d’évaluer la QDV des patients et de rechercher les comorbidités psychiatriques associées. Bien qu’au Cameroun, pays en voie de développement du Sud du Sahara, l’acné soit le plus souvent banalisée et considérée comme une situation normale, un suivi psychologique du patient acnéique s’avère important afin d’améliorer la prise en charge de ces patients généralement de bas niveau socio-économique.

Déclaration de liens d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.

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Annexe 1. Matériel complémentaire Le matériel complémentaire accompagnant la version en ligne de cet article est disponible sur http://www. sciencedirect.com et http://dx.doi.org/10.1016/j.annder. 2016.05.011.

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