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P. Vandel et al. / Annales Me´dico-Psychologiques 167 (2009) 219–223
Discussion apre`s les communications du Pr Robert et du Pr Vandel
Dr Re´mi Tourtauchaux, mode´rateur – La prise en charge non pharmacologique des troubles du comportement en e´tablissement (e´tablissement d’he´bergement pour personnes aˆge´es de´pendantes [EHPAD]) s’inscrit dans le projet de vie du re´sident et, au-dela`, dans le projet d’e´tablissement. L’e´valuation des troubles est une des e´tapes de la prise en charge et doit eˆtre re´alise´e par une e´quipe soignante forme´e. Une des perspectives d’avenir est e´galement la mise en place et la re´alisation de programmes de recherche dans les e´tablissements d’he´bergement, ce qui est encore assez rare actuellement. Ces remarques devraient permettre d’optimiser les interventions du psychiatre au sein des structures afin que son roˆle ne se limite pas a` des prises en charge ponctuelles et ge´ne´ralement me´dicamenteuses dans des situations aigue¨s de gestion des troubles du comportement. S’il faut rappeler et insister sur le fait de privile´gier, en premier lieu, la prise en charge non pharmacologique des troubles du comportement dans la maladie d’Alzheimer, ne´anmoins la place des traitements me´dicamenteux reste entie`re. Bien que des donne´es contradictoires subsistent, nous disposons d’un e´ventail de psychotropes assez large qu’il faut utiliser en appre´ciant particulie`rement chez le sujet aˆge´ les rapports be´ne´fices/risques/iatroge´nie. Re´ponse du Pr P. Robert – Je suis tout a` fait d’accord avec votre intervention. C’est bien l’objectif de l’e´tude TNM en EHPAD de montrer qu’il est possible de re´aliser des essais cliniques sur les traitements non pharmacologiques dans ces e´tablissements. Pr J.-D. Guelfi – Un commentaire et deux questions pour Philippe Robert et Pierre Vandel. Le commentaire porte sur les demandes d’autorisation temporaire d’utilisation (ATU) qui peuvent eˆtre faites a` propos de la trazodone. Cet antide´presseur au profil se´datif– anxiolytique a e´te´ commercialise´ jadis en France sous les de´nominations de Pragmarel et Pragmazon. Il semble en effet qu’un effet inte´ressant du produit chez des personnes aˆge´es soit la re´duction de l’agitation et des troubles du comportement. Une demande d’ATU doit eˆtre justifie´e par l’e´chec de produits qui ont, eux, l’indication the´rapeutique sur les troubles du comportement et qui sont commercialise´s et qui ont e´choue´. Les autorisations d’ATU ne sont en effet de´livre´es qu’en cas d’e´chec des the´rapeutiques existantes et commercialise´es. Mes deux questions concernent le NPI. Quelle est la dure´e moyenne de passation de cet outil ? L’e´tude de validation publie´e par P. Robert a-t-elle porte´ sur la sensibilite´ du changement ? Si deux a` quatre points (sur 120) conduisent parfois a` une ame´lioration statistiquement significative, a` partir de quel nombre de points peut-on parler d’ame´lioration cliniquement significative ? Re´ponse du Pr P. Robert – Je vous remercie pour vos questions. En ce qui concerne le NPI, la dure´e moyenne de
passation est de 30 minutes. Celle-ci peut eˆtre cependant beaucoup plus courte si la personne ne pre´sente pas de trouble du comportement. Le NPI est un instrument tre`s pre´cis pour la description des troubles du comportement. Sa sensibilite´ au changement est moins satisfaisante. Cela me`ne actuellement au de´veloppement d’une nouvelle version qui doit aussi eˆtre utilise´e dans le cadre des essais the´rapeutiques. Re´ponse du Pr P. Vandel – L’inventaire neuropsychiatrique comporte des e´chelles d’e´valuation de la fre´quence et de la se´ve´rite´ de certains comportements courants dans la MA, mais inclut e´galement des e´chelles destine´es a` d’autres de´mences. Il s’agit d’un questionnaire simple et largement diffuse´ qui est, entre autres, utilise´ dans la plupart des e´tudes d’e´valuation d’efficacite´ des traitements des troubles psychocomportementaux de la de´mence. Pr J.-M. Vanelle – N’est-il pas dommage de faire fi de l’expe´rience francophone sur la diversite´ des neuroleptiques et de leur index the´rapeutique (rapport efficacite´/tole´rance) dans le vaste champ du traitement des psychoses, et notamment des troubles du comportement des sujets atteints de de´mence ? Je pense a` l’inte´reˆt des benzamides : tiapride, sulpiride. . . de petites doses de cyame´mazine chez le de´ment, agite´ ou non, encore tre`s prescrites et passe´es sous silence lors des revues de la litte´rature. Re´ponse du Dr P. Vandel – Effectivement, peu d’e´tudes e´valuent l’efficacite´ et la tole´rance de ces mole´cules encore largement prescrites dans ces indications. Il semble que l’expe´rience montre que les faibles posologies sont efficaces dans la prise en charge de ces troubles avec une bonne tole´rance globale. Re´ponse du Pr P. Robert – En ce qui concerne l’utilisation des neuroleptiques chez les sujets pre´sentant une maladie d’Alzheimer ou une pathologie apparente´e, la tendance actuelle et que je soutiens est d’essayer de les e´viter le plus possible. Pr M. Laxenaire – Un groupe de chercheurs nance´ens en relation avec le centre de recherche de sante´ du Luxembourg effectue actuellement des recherches sur une substance appele´e « Lipidomix » dont l’un des acides gras, en particulier l’ome´ga 3 DHA, aurait un effet protecteur sur la survenue de la maladie d’Alzheimer. Il semble en effet que les sujets pre´dispose´s a` la maladie d’Alzheimer auraient un de´faut d’assimilation de ces acides gras au niveau du cerveau. Avezvous entendu parler de ces recherches ? Re´ponse du Pr P. Vandel – Plusieurs recherches concernent l’inte´reˆt des ome´ga 3, en particulier dans le traitement de la de´pression. En ce qui concerne la de´mence, certaines recherches ciblent ces approches die´te´tiques non me´dicamenteuses. Re´ponse du Pr P. Robert – Je vous remercie de votre question. Non je n’ai pas entendu parler spe´cifiquement de cette e´tude. En revanche, je sais qu’il y a de nombreuses recherches sur la nutrition dans le cadre de la maladie d’Alzheimer.
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Dr J. McNicoll (psychiatre a` Que´bec, mais actuellement a` ` votre avis, y a-t-il une Tours dans le service du Pr Camus) – A place pour les psychostimulants tel le me´thylphe´nidate dans le traitement de l’apathie et est-ce que les ge´riatres l’utilisent, comparativement aux psychiatres ? Re´ponse du Pr P. Robert – Il y a eu plusieurs e´tudes sur le me´thylphe´nidate pour traiter l’apathie. Ces e´tudes ont porte´ sur un nombre relativement limite´ de patients. Actuellement, en France, je crois que ce traitement est tre`s peu, voire pas utilise´. Re´ponse du Pr Vandel – La prise en charge de l’apathie est complexe et de nombreuses mole´cules sont essaye´es, dont les psychostimulants tels que le me´thylphe´nidate et dextroamphe´tamine. Ces mole´cules augmentent la transmission noradre´nergique et dopaminergique. Dr J. Garrabe´ – Comment se fait actuellement la tenue a` jour des dossiers des sujets atteints de maladie d’Alzheimer en institution ? Il a e´te´ e´voque´ ce matin la ne´cessite´ d’une psychothe´rapie institutionnelle analogue a` celle pratique´e dans les hoˆpitaux psychiatriques pour d’autres pathologies chroniques. Des liens sont-ils faits entre les diffe´rents intervenants, les prescriptions des divers traitements pharmacologiques et non pharmacologiques, les circonstances et les raisons pour lesquelles ils ont e´te´ prescrits ainsi que leurs effets a` plus ou moins long terme, de manie`re a` reconstituer l’histoire personnelle du malade ? Re´ponse du Pr P. Robert – Monsieur, je vous remercie pour votre intervention et votre question. Vous avez raison de souligner l’importance des dossiers cliniques en institution et tout particulie`rement en EHPAD. Ces dossiers cliniques sont probablement beaucoup moins fournis que par le passe´. Dans certains cas, des informations peuvent eˆtre re´cupe´re´es d’une manie`re tre`s fiable par l’interme´diaire de syste`mes informatiques.
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Dans tous les cas, ces syste`mes ne remplacent pas l’importance des re´unions de synthe`ses entre les e´quipes, re´unions qui constituent l’un des pivots de la prise en charge institutionnelle que vous avez si bien de´crite. Dr R. Ropert – Une des questions qui se posent, chez ce type et dans cette cate´gorie d’aˆge des patients, est celle non seulement des effets secondaires que peuvent de´terminer les me´dicaments qui leur sont prescrits, mais e´galement de l’« acceptabilite´ » de ces traitements au sein des e´quipes soignantes. Ainsi est-il devenu beaucoup plus difficile aujourd’hui de prescrire, dans ces e´tats, des neuroleptiques « classiques » susceptibles de de´terminer assez fre´quemment des effets secondaires neurologiques, ou encore un e´tat confusionnel. L’emploi des inhibiteurs du recaptage de la se´rotonine ainsi que celui des « antipsychotiques atypiques » a aujourd’hui pallie´ en assez grande partie les inconve´nients qu’avaient, il y a quelques dizaines d’anne´es, les neuroleptiques classiques et les antide´presseurs tricycliques. Certains effets secondaires ont parfois un retentissement impre´visible sur les e´quipes soignantes : ainsi, en 1985, e´poque ou` la trazodone fut introduite en pratique the´rapeutique (et alors qu’elle se re´ve´lait en effet un antide´presseur re´ellement actif), nous avions eu la surprise de constater que ce me´dicament avait e´te´, au bout de quelque temps, ve´ritablement rejete´ par l’e´quipe d’un « service de long se´jour », et ce parce que ce produit de´terminait parfois, chez les patients aˆge´s, l’apparition d’un priapisme et qu’un semblable effet secondaire, par rapport a` l’aˆge des patients traite´s, avait e´te´ estime´ « quasi inacceptable » par les soignants. . . Re´ponse du Pr P. Robert – Monsieur, je vous remercie pour votre commentaire.
DOI of original article: 10.1016/j.amp.2009.01.011 0003-4487/$ – see front matter # 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits re´serve´s. doi:10.1016/j.amp.2009.01.012