Étude de l’expression du KI67 et du CD10 comme facteurs prédictifs de récidive de l’améloblastome

Étude de l’expression du KI67 et du CD10 comme facteurs prédictifs de récidive de l’améloblastome

Annales françaises d’oto-rhino-laryngologie et de pathologie cervico-faciale 132 (2015) 254–258 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedir...

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Annales françaises d’oto-rhino-laryngologie et de pathologie cervico-faciale 132 (2015) 254–258

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ScienceDirect www.sciencedirect.com

Article original

Étude de l’expression du KI67 et du CD10 comme facteurs prédictifs de récidive de l’améloblastome夽 A. Blel a , W. Ajouli a,∗ , A. Landoulsi b , N. Zneidi a , A. Arfaoui a , F. Faten a a b

Service de cytologie et d’anatomie pathologique, hôpital Charles-Nicolle, boulevard du 9-Avril Bab-Saadoun, 1007 Tunis, Tunisie Service de chirurgie maxillofaciale, hôpital Charles-Nicolle, boulevard du 9-Avril Bab-Saadoun, 1007 Tunis, Tunisie

i n f o

a r t i c l e

r é s u m é

Mots clés : Améloblastome Ki67 CD10 Immunohistochimie Récidive

Introduction. – L’améloblastome est une tumeur odontogène bénigne, rare, purement épithéliale, caractérisée par un potentiel élevé d’invasion locale et de récidive. But. – Étudier les caractéristiques épidémiologiques et anatomopathologiques de l’améloblastome. Étudier l’expression immunohistochimique du Ki67 et du CD10 dans l’améloblastome et de chercher une corrélation entre ces deux marqueurs et le taux de récidive de cette tumeur. Méthodes. – Une étude immunohistochimique, en utilisant des anticorps monoclonaux Ki67 et CD10, a été réalisée sur 37 blocs de paraffine colligés dans le service d’anatomie et de cytologie pathologiques de l’hôpital Charles-Nicolle de Tunis sur une période de 9 ans (2004–2012). L’étude statistique a été faite au moyen du logiciel de statistiques pour les sciences sociales (SPSS) version 15.1. Résultats. – Parmi les 37 cas étudiés, nous avons 21 hommes et 16 femmes (sex-ratio de 1,3). L’âge variait entre 7 et 70 ans avec une moyenne de 39 ans. Les améloblastomes étaient répartis en 36 cas intra-osseux et un cas gingival. Trente-deux cas étaient de type multikystique et 5 cas de type unikystique. Dix-huit cas ont récidivé. Aucune corrélation n’a été objectivée entre la récidive et les différents paramètres cliniques, histologiques et les modalités thérapeutiques. Une corrélation a été retrouvée entre la récidive et l’expression du Ki67 et du CD10 (p = 0,000 et 0,002, respectivement). Conclusion. – L’index de prolifération cellulaire Ki67 et l’expression de CD10 par les cellules stromales peuvent être considérés comme des facteurs prédictifs de récidive tumorale de l’améloblastome. © 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

1. Introduction

Cet aspect évolutif a des conséquences sur l’attitude thérapeutique, allant de la simple exérèse tumorale à l’exérèse élargie avec le souci permanent d’une exérèse radicale. Des études récentes ont suggéré que l’expression du Ki67 et de CD10 au niveau du tissu tumoral serait associée à un profil évolutif agressif et récidivant de certaines tumeurs, y compris l’améloblastome [6,7]. Les objectifs de notre étude étaient :

L’améloblastome est la tumeur odontogène la plus fréquente qui représente environ 1 % de toutes les tumeurs de la cavité buccale [1]. C’est une tumeur qui se développe à partir des reliquats épithéliaux de Malassez après régression de l’organe de l’émail. Elle atteint la mandibule et le maxillaire respectivement dans 80 et 20 % des cas [2]. Selon la dernière classification de l’OMS, l’améloblastome se divise en améloblastome intra-osseux (central) et tissulaire (périphérique) avec différentes variantes architecturales [3]. Il s’agit d’une tumeur localement agressive qui a une forte tendance à récidiver [4] et même à métastaser dans de rares cas [5].

DOI de l’article original : http://dx.doi.org/10.1016/j.anorl.2015.08.016. 夽 Ne pas utiliser pour citation la référence franc¸aise de cet article mais celle de l’article original paru dans European Annals of Otorhinolaryngology Head and Neck Diseases en utilisant le DOI ci-dessus. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (W. Ajouli). http://dx.doi.org/10.1016/j.aforl.2014.11.012 1879-7261/© 2015 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

• de dégager les caractéristiques épidémiologiques et anatomopathologiques de l’améloblastome ; • d’étudier l’expression immunohistochimique du Ki67 et du CD10 dans l’améloblastome, et de chercher une corrélation entre ces deux marqueurs et le taux de récidive de cette tumeur.

2. Matériel et méthodes Cette étude rétrospective a porté sur une série de 37 cas d’améloblastome colligés dans le service d’anatomie et de cytologie

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pathologique de l’hôpital Charles-Nicolle de Tunis sur une période de 9 ans (2004–2012). Nos buts étaient de dégager les caractéristiques épidémiologiques et anatomopathologiques de l’améloblastome, d’étudier l’expression immunohistochimique du Ki67 et du CD10 dans cette tumeur, et la relation possible entre ces deux marqueurs et le taux de récidive de l’améloblastome. Les données épidémiologiques, cliniques et évolutives ont été recueillies après l’étude des dossiers des patients au service de chirurgie maxillofaciale du même hôpital. Une relecture des lames a été réalisée et les tumeurs ont été classées selon la classification de l’OMS 2005 [3]. Les lames comportant le plus de tissu tumoral et ne contenant pas de fragment osseux ont été sélectionnées dans chaque cas et les blocs correspondants ont été retirés. La méthode d’immunohistochimie retenue était la technique d’immunoperoxydase en trois couches utilisant un kit LEICA (NovoLink) avec révélation par DAB (diaminobenzidine) chromogène. L’anti-Ki67 donne un signal de distribution exclusivement nucléaire de couleur brûnâtre et on considère positives, les cellules tumorales présentant un marquage nucléaire total, focal ou nucléolaire. On a considéré l’immunomarquage du Ki67 comme : • faible : 0 à 7 % des cellules tumorales sont marquées ; • modéré : 8 à 15 % des cellules tumorales sont marquées ; • intense : > 15 % des cellules tumorales sont marquées. Pour l’évaluation de l’anti-CD10, on a utilisé un score proposé par Ogawa et al. [8]. Initialement, on évalue l’immunomarquage cytoplasmique selon le score suivant : • • • •

0 : absence de marquage ; 1 : marquage cytoplasmique faible ; 2 : marquage cytoplasmique modéré ; 3 : marquage cytoplasmique intense. Puis, on l’évalue selon un score semi-quantitatif :

• • • •

0 : < 10 % des cellules sont marquées ; 1 : 10 à 25 % des cellules sont marquées ; 2 : 25 à 50 % des cellules sont marquées ; 3 : > 50 % des cellules sont marquées.

Après la combinaison des scores de l’intensité de marquage et le pourcentage des cellules marquées, le marquage est considéré : • • • •

négatif : score 0–1 ; + : score 2 ; ++ : score 3 ; +++ : score 4–5.

L’étude statistique a été réalisée au moyen du logiciel de statistiques pour les sciences sociales (SPSS) version 15.1. Nous avons effectué une étude descriptive et analytique de la série. 3. Résultats Notre série regroupait 21 hommes (56,8 %) et 16 femmes (43,2 %) avec un sex-ratio de 1,3. L’âge moyen des patients était de 39 ans avec des extrêmes de 7 à 70 ans.

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Fig. 1. Positivité nucléaire des cellules tumorales pour le Ki67 avec un index de 14 % (×200). Flèche sur les cellules marquées. Tableau 1 Expression du Ki67 en fonction des caractéristiques anatomopathologiques des améloblastomes. Intensité du marquage du Ki67

Siège Mandibulaire Maxillaire Taille ≤ 4 cm > 4 cm Type histologique Multikystique Unikystique Variante architecturale Folliculaire Plexiforme Autres

Faible

Modérée

Intense

11 (32 %) 1 (33 %)

14 (42 %) 1 (33 %)

9 (26 %) 1 (33 %)

6 (26 %) 5 (36 %)

10 (44 %) 8 (57 %)

7 (30 %) 1 (7 %)

8 (25 %) 3 (60 %)

17 (53 %) 1 (20 %)

7 (22 %) 1 (20 %)

7 (39 %) 3 (30 %) 2 (22,1 %)

7 (39 %) 4 (40 %) 4 (44,5 %)

4 (22 %) 3 (30 %) 3 (33,4 %)

La tumeur siégeait au niveau de la mandibule dans 34 cas (94 %) et au niveau du maxillaire dans 3 cas (6 %). La taille tumorale variait entre 1 et 15 cm de grand axe avec une moyenne de 4 cm. Ces améloblastomes se répartissaient en 36 cas d’améloblastome intra-osseux (97 %) et un cas gingival extraosseux (3 %). Trente-deux cas étaient de type multikystique/solide (86 %) et 5 cas de type unikystique (14 %). Parmi ces derniers, 4 cas était de sous-type mural et 1 cas de sous-type luminal. Pour les différents types d’améloblastomes, on a précisé la variante architecturale correspondante. 4. Expression du Ki67 Dans notre étude, l’index de prolifération Ki67 variait entre 2 % et 22 % avec une moyenne de 10,5 % (Fig. 1, Tableau 1). Ce marquage était faible dans 12 cas (30 %), modéré dans 15 cas (49 %) et intense dans 10 cas (21 %). La comparaison de l’expression de Ki67 avec le siège de la tumeur, sa taille, ses variantes architecturales et les types histologiques n’a pas montré de différence statistiquement significative. Nous avons relevé cependant que l’immunomarquage était modéré et intense dans la variante folliculaire. 5. Expression de CD10 par les cellules tumorales L’immunomarquage était négatif dans 9 cas (24 %) (Fig. 2, Tableau 2). Une positivité faible était notée dans 10 cas (27 %), une

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A. Blel et al. / Annales françaises d’oto-rhino-laryngologie et de pathologie cervico-faciale 132 (2015) 254–258 Tableau 3 Relation entre la récidive et les différents paramètres prédictifs de récidive. Paramètres prédictifs

Groupes

Nombre des cas récidivants

Valeur (p)

Âge (ans)

À 35 > 35 Masculin Féminin Mandibule Maxillaire À4 >4 Multikystique Unikystique Folliculaire Plexiforme Mixte Acanthomateuse A ¢ granuleuses Traitement conservateur Traitement radical Faible Modérée Intense Négative Faible Modérée Intense

10 8 11 7 17 1 13 5 17 1 8 3 2 5 0 16 2 2 8 8 3 1 11 3

0,618

Sexe Siège tumoral Taille tumorale (cm) Type histologique Variante architecturale

Fig. 2. Immunomarquage des cellules stromales pour l’anti-CD10 avec une positivité modérée (CD10 × 200). Flèche sur les cellules marquées.

Tableau 2 Expression du CD10, par les cellules stromales, en fonction des caractéristiques anatomopathologiques des améloblastomes.

Modalités thérapeutiques Expression du Ki67

Expression du CD10

Marquage du CD10 des cellules stromales Négatif Siège 8 (23,5 %) Mandibulaire 1 (33,3 %) Maxillaire Taille 3 (13 %) ≤ 4 cm 4 (28,6 %) > 4 cm Type histologique 6 (20 %) Multikystique Unikystique 1 (20 %) Variante architecturale 5 (28 %) Folliculaire 4 (40 %) Plexiforme Autres 0

Faible

Modérée

Intense

8 (23,5 %) 2 (33 %)

15 (44 %) –

3 (9 %) –

6 (26 %) 5 (36 %)

12 (53 %) 4 (28,6 %)

2 (9 %) 1 (7 %)

9 (31 %) 2 (40 %)

14 (48,2 %) 2 (40 %)

3 (10,7 %) –

6 (33,3 %) 3 (30 %) 1 (11,1 %)

6 (33,3 %) 2 (20 %) 7 (77,8 %)

1 (5,5 %) 1 (10 %) 1 (11,1 %)

positivité modérée dans 15 cas (41 %) et une positivité intense dans 3 cas (8 %). L’expression du CD10 par les cellules stromales n’a pas montré de relation statistiquement significative en fonction du siège de la tumeur, la taille, le type histologique et les différentes variantes architecturales. 6. Modalités thérapeutiques Tous les patients ont été traités chirurgicalement. Trente-deux patients (86 %) ont eu un traitement conservateur et les 5 autres (14 %) ont subi un traitement radical d’emblée. 7. Évolution et récidive La durée moyenne de suivi des malades était de 79 mois (2 à 300 mois) (Tableau 3). Deux patients étaient perdus de vue après un mois. L’évolution était favorable chez 19 malades (51 %). Dix-huit patients (49 %) ont présenté des récidives, dont 11 étaient uniques et 7 étaient multiples. La survie globale sans récidive était de 61 % à 6 mois et de 45 % à 5 ans. Les paramètres prédictifs de récidive étaient d’ordre cliniques (âge, sexe, siège de la tumeur, taille de la tumeur), d’ordre histologiques (variante architecturale, type histologique), immunohistochimiques (expression de Ki67 et de CD10) et les modalités thérapeutiques.

0,603 0,912 0,219 0,168 0,087

0,677 0,000

0,002

Il n’a pas été retrouvé de corrélation entre récidive-paramètres cliniques, récidive-paramètres histologiques. Une corrélation statistiquement significative a été révélée entre récidive-expression de Ki67 (p = 0,000) et entre récidive-expression de CD10 (p = 0,002). 8. Discussion L’améloblastome est une tumeur rare qui ne représente que 1 % de toutes les tumeurs de la cavité buccale [1] et environ 11 % de l’ensemble des tumeurs odontogènes [9,10]. Cette tumeur atteint le plus souvent l’adulte jeune mais peut survenir à tout âge avec une moyenne d’âge de 40 ans [11,12] et sans prédilection du sexe [13,14]. Dans notre étude, l’âge moyen des patients était de 39 ans avec une légère prédominance masculine (sex-ratio = 1,3). Conformément aux séries publiées, ayant rapporté une localisation mandibulaire prédominante de l’améloblastome (80 à 99 %) [14,15], et plus rarement maxillaire (3 à 20 %) [15,16], notre série retrouvait la localisation mandibulaire dans 92 % des cas et maxillaire dans 8 % des cas. Généralement, la taille tumorale varie entre 3 et 24 cm avec une moyenne de 4,3 cm [17]. Dans notre travail, elle était de 4 cm avec des extrêmes allant de 1 à 15 cm. Selon la classification de l’OMS 2005 [3], l’améloblastome se divise selon le siège en améloblastome intraosseux (central) et extraosseux (tissulaire ou périphérique). Notre série était composé de 36 cas (97 %) intraosseux et un cas (3 %) gingival. Histologiquement, trois types sont reconnus : améloblastome solide/multikystique, unikystique et desmoplastique. Des variantes architecturales sont identifiées : folliculaire, plexiforme, acanthomateuse, à cellules granuleuses et mixte. Les variétés folliculaires et plexiformes sont les plus répandues avec des fréquences respectives de 34 et 30 %. La variété acanthomateuse est moins fréquente (11 %) [18]. Nos résultats étaient concordants avec les données de la littérature, montrant une prédominance de la variante folliculaire (45 %), suivie par la variété plexiforme (26 %), alors que la variété acanthomateuse ne représentait que 16 % des cas. Le traitement est chirurgical ayant comme objectif principal l’exérèse tumorale sans récidive et avec des résultats fonctionnels et esthétiques acceptables. Dans notre étude, l’énucléation

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chirurgicale était privilégiée (86,5 %), toutefois la chirurgie radicale a été réalisée d’emblée dans 13,5 % des cas. L’améloblastome est une tumeur localement agressive, occasionnant une destruction osseuse et un envahissement des parties molles [18]. Il se caractérise, en outre, par un risque très élevé de récidive, même en cas d’une exérèse complète avec des marges de résection saines [3,4]. Plus de 50 % récidivent dans les 5 premières années postopératoires [12] et le taux de récidive varie entre 9 et 65 %. Dans notre série, le taux de récidive était de 49 %. L’âge et le sexe n’ont pas été considérés comme des facteurs prédictifs de récidive tumorale d’après les études publiées [19], comme c’était le cas dans notre étude. Les améloblastomes mandibulaires sont plus récidivants que les améloblastomes maxillaires [20]. Dans notre série, 94 % des tumeurs récidivantes étaient de localisation mandibulaire contre 6 % de localisation maxillaire, mais sans différence significative (p = 0,912). Aucune corrélation significative entre la récidive et la taille tumorale n’a été objectivée (p = 0,375) par AbdelAziz et Amin [17], qui ont rapporté en outre une récidive plus fréquente (60 % des cas) pour les améloblastomes mesurant plus que 4 cm. Cependant, dans notre étude, 72 % des tumeurs récidivantes avaient une taille inférieure ou égale à 4 cm alors que seulement 28 % des cas avaient une taille supérieure à 4 cm, mais sans différence significative (p = 0,219). Par ailleurs, il existe des éléments anatomopathologiques qui peuvent prédire le potentiel évolutif de l’améloblastome. Certains d’entre eux sont déjà validés et d’autres sont récemment proposés tels que l’index de prolifération cellulaire Ki67 et l’expression du CD10 par les cellules stromales. Généralement, le type unikystique est moins récidivant (13 à 30 %) que le type multikystique (50 à 90 %) [20]. La variante folliculaire avait plus tendance à la récidive locale que les autres variantes architecturales [21]. Dans notre série, 44 % des tumeurs récidivantes étaient d’architecture folliculaire, mais sans différence significative (p = 0,087). Le Ki67 est utilisé pour déterminer le taux de prolifération de nombreuses tumeurs, y compris l’améloblastome et d’autres tumeurs odontogènes. L’évaluation de l’index de prolifération dans l’améloblastome est un complément important à l’histologie. Elle présente un intérêt potentiel comme un indicateur de comportement biologique, d’agressivité locale et de récidive tumorale [17]. Florescu et al. ont montré, à travers une série de 14 améloblastomes, qu’il y avait une différence significative entre l’expression du Ki67 au niveau des cellules centrales et des cellules périphériques ; considérées comme des zones de prolifération [22]. Dans notre étude, l’index de prolifération variait entre 2 et 22 % avec une moyenne de 10,5 %, comparables ainsi à la majorité des séries de la littérature décrivant un taux entre 1,6 et 19,8 % avec une moyenne de 8,2 % [23]. Nous avons constaté que l’activité de prolifération cellulaire évaluée par le Ki67 était significativement plus élevée dans les tumeurs récidivantes (p = 0,000) en déduisant ainsi que le Ki67 peut être considéré comme un marqueur prédictif du profil agressif et récidivant de l’améloblastome. Le CD10 est une endopeptidase qui joue un rôle enzymatique de type métalloprotéinase zinc-dépendante [8]. L’expression du CD10 au niveau des cellules du stroma tumoral est associée à la différenciation et à la prolifération des cellules néoplasiques. Certaines études objectivent une liaison significative entre la progression tumorale et la dissémination métastatique de certains types de cancers notamment le cancer du sein, le cancer colorectal et le mélanome malin [8]. De rares études ont étudié l’expression du CD10 dans l’améloblastome et les résultats étaient hétérogènes [17,24]. Des études récentes ont rapporté une forte expression stromale du CD10 dans les améloblastomes récidivants [17,24]. Ces données

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montrent que l’expression du CD10 par les cellules stromales est associée à une invasion tumorale de la matrice extracellulaire et que la prolifération des cellules stromales exprimant le CD10 peut représenter une partie du mécanisme du profil invasif de l’améloblastome [17,24]. Nos résultats soutiennent ceux de la littérature en montrant une corrélation significative entre l’expression du CD10 et le taux de récidive (p = 0,002). Ces résultats suggèrent que le CD10 pourrait être considéré comme un marqueur du comportement agressif et récidivant de l’améloblastome et par conséquent, un marqueur pronostique. Le taux de récidive de l’améloblastome est variable également en fonction des modalités thérapeutiques. En effet, il varie entre 50 et 87 %, après chirurgie conservatrice alors qu’il est entre 0 et 50 % après chirurgie radicale [20]. Dans notre série, 89 % ont récidivé après chirurgie conservatrice contre 11 % après chirurgie radicale, sans différence significative (p = 0,677). 9. Conclusion Notre série, comparée aux différentes séries de la littérature, a montré que l’index de prolifération Ki67 et l’expression de CD10 par les cellules stromales semblent être des marqueurs significatifs d’agressivité locale et de récidive de l’améloblastome donc des facteurs pronostiques. Leur positivité impliquera une surveillance postopératoire rigoureuse et rapprochée et l’éventualité d’une chirurgie radicale lors des récidives. D’autres études, avec des effectifs plus élevés, sont nécessaires afin de mieux caractériser le rôle du Ki67 et de CD10 dans la tumorogénèse de l’améloblastome, permettant ainsi d’ouvrir la voie à de nouvelles thérapies. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Références [1] Melrose RJ. Benign epithelial odontogenic tumors. Semin Diagn Pathol 1999;16:271–87. [2] Adou A, Souaga K, Konan E, et al. Ameloblastoma of the maxillary sinus. A propos of a case. Odontostomatol Trop 2001;24:42–4. [3] Barnes L, Eveson JW, Reichart P, Sidransky D. Pathology and genetics of head and neck tumours. Odentogenic tumours. Lyon: IARC Press; 2005. p. 296–300. [4] Pinheiro JJ, Freitas VM, Moretti AI, et al. Local invasiveness of ameloblastoma. Role played by matrix metalloproteinases and proliferative activity. Histopathology 2004;45:65–72. [5] Gilijamse M, Leemans CR, Winters HA, et al. Metastasizing ameloblastoma. Int J Oral Maxillofac Surg 2007;36:462–4. [6] Chauvel P, Courdi A, Gioanni J, et al. The labelling index: a prognostic factor in head and neck carcinoma. Radiother Oncol 1989;14:231–7. [7] Iwaya K, Ogawa H, Izumi M, et al. Stromal expression of CD10 in invasive breast carcinoma: a new predictor of clinical outcome. Virchows Arch 2002;440:589–93. [8] Ogawa H, Iwaya K, Izumi M, et al. Expression of CD10 by stromal cells during colorectal tumor development. Hum Pathol 2002;33:806–11. [9] Becelli R, Carboni A, Cerulli G, et al. Mandibular ameloblastoma: analysis of surgical treatment carried out in 60 patients between 1977 and 1998. J Craniofac Surg 2002;13:395–400. [10] Williams TP. Management of ameloblastoma: a changing perspective. J Oral Maxillofac Surg 1993;51:1064–70. [11] Chidzonga MM, Lopez Perez VM, Portilla Alvarez AL. Ameloblastoma: the zimbabwean experience over 10 years. Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod 1996;82:38–41. [12] Kim SG, Jang HS. Ameloblastoma: a clinical, radiographic and histopathologic analysis of 71 cases. Oral Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod 2001;91:649–53. [13] Sehdev MK, Huvos AG, Strong EW, et al. Proceedings: ameloblastoma of maxilla and mandible. Cancer 1974;33:324–33. [14] Gardner DG. Critique of the 1995 review by Reichart et al. of the biologic profile of 3677 ameloblastomas. Oral Oncol 1999;35:443–9.

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