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Journal de pédiatrie et de puériculture (2016) xxx, xxx—xxx
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ARTICLE EMC
Exanthèmes viraux夽 C. Fleuret (Praticien hospitalier) ∗, P. Plantin (Praticien hospitalier, chef de service) Service de dermatologie, Centre hospitalier intercommunal de Cornouaille (CHIC), 14 bis, avenue Yves-Thépot, BP 1757, 29107 Quimper cedex, France
MOTS CLÉS Exanthème viral ; Toxidermie ; Virus Kawasaki ; Éruption paravirale
Résumé Les infections virales sont les principales causes des exanthèmes de l’enfant. Parmi les exanthèmes fébriles, les exanthèmes maculopapuleux sont les plus fréquents. Les hypothèses bactériennes, toxiniques ou médicamenteuses (toxidermie) doivent néanmoins être éliminées. Du fait de la pluralité fréquente des facteurs étiologiques, il est souvent difficile de porter avec certitude le diagnostic d’exanthème viral. Il est nécessaire d’évoquer les maladies éruptives et surtout de les confirmer du fait de la gravité potentielle de certaines d’entre elles (intérêt de la vaccination+++). Il convient également de reconnaître la maladie de Kawasaki qui représente une urgence diagnostique et thérapeutique : à évoquer devant tout exanthème fébrile persistant chez un enfant, sans point d’appel infectieux mais associé à un syndrome inflammatoire biologique. © 2016 Publi´ e par Elsevier Masson SAS.
夽 Grâce au partenariat mis en place en 2010 entre le Journal de pédiatrie et de puériculture et l’EMC, les articles de cette rubrique sont issus des traités EMC. Celui-ci porte la mention suivante : C. Fleuret. Exanthèmes viraux. EMC — Pédiatrie — Dermatologie 2015 [Article 4-108-A-20]. Nous remercions l’auteur qui a accepté que son texte, publié initialement dans les traités EMC, puisse être repris ici. ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : c.fl
[email protected] (C. Fleuret).
http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001 0987-7983/© 2016 Publi´ e par Elsevier Masson SAS.
Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001
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C. Fleuret, P. Plantin
Introduction L’exanthème est défini comme une éruption cutanée érythémateuse et diffuse d’apparition brutale et transitoire (apparaissant en quelques heures et guérissant en quelques jours), révélatrice d’une affection sous-jacente. Souvent, il comporte des macules érythémateuses qui peuvent être associées à d’autres lésions élémentaires (papules, plaques, vésicules, purpura, voire nécrose). Les exanthèmes fébriles sont une cause fréquente de consultation et/ou d’hospitalisation. Ils s’observent au cours de nombreuses maladies infectieuses principalement d’origine virale mais également bactérienne (éruptions toxiniques, septicémie à méningocoque, infection à mycoplasmes, etc.). Néanmoins, devant tout exanthème fébrile, il faut garder à l’esprit la possibilité d’une étiologie médicamenteuse (toxidermie), d’un syndrome de Kawasaki ou plus rarement de maladie auto-immune ou hématologique. Dans un certain nombre de cas, l’exanthème adopte une présentation clinique stéréotypée, permettant d’évoquer l’agent étiologique responsable, généralement viral, et de définir le mode d’évolutivité des symptômes. Considérés à tort comme l’apanage des enfants, la plupart de ces exanthèmes infectieux s’observe également, avec une fréquence moindre, chez l’adulte et sont de ce fait parfois sous-diagnostiqués. Malgré tout, la liste des étiologies infectieuses virales est longue et chaque agent infectieux n’est pas associé à un tableau clinique, en particulier dermatologique, stéréotypé. La démarche diagnostique doit intégrer l’ensemble des éléments à notre disposition : épidémiologiques, cliniques (signes dermatologiques et non dermatologiques) et biologiques.
Éléments d’orientation diagnostique
Tableau 1 Démarche diagnostique clinique devant un tableau d’exanthème. Éléments épidémiologiques Âge, vaccination, épidémie en cours, saison, contage potentiel, voyage récent à l’étranger, risque vectoriel (variable selon les zones géographiques), facteurs de risque d’infection sexuellement transmissible, antécédent de maladie éruptive, prise de médicament (interrogatoire « policier ») Signes dermatologiques Aspect et couleur de la lésion élémentaire (macule, papule, vésicule, bulle, pustule, purpura) Évolution de la lésion élémentaire Modalités d’extension de l’éruption Atteinte palmoplantaire et du cuir chevelu Atteinte muqueuse Prurit Desquamation postéruptive Signes extracutanés Organomégalie (adénopathie, splénomégalie, hépatomégalie) Arthralgies/myalgies Atteinte pulmonaire ou neurologique Fièvre Signes de gravité (hypotension, tachycardie, tachypnée, troubles neurologiques)
d’une séroconversion IgG pour faire le diagnostic ; enfin, il existe des tests de diagnostic rapide pour certaines maladies (dengue par exemple). La biopsie cutanée est inutile dans la majorité des cas car elle est non spécifique. Les résultats histologiques sont quasi similaires dans les éruptions d’origine virale ou médicamenteuse.
Démarche diagnostique devant un exanthème L’exanthème peut se définir comme une éruption érythémateuse diffuse aiguë généralisée. Cette définition ne préjuge pas de la lésion élémentaire ni de sa cause. La démarche diagnostique doit donc s’appuyer sur une description soigneuse de l’éruption cutanée et un examen clinique complet. L’épidémiologie est également fondamentale dans cette démarche diagnostique (Tableau 1). On peut aussi s’aider d’examens biologiques simples : numération—formule sanguine, plaquettes, C reactive protein (CRP), transaminases. Une lymphopénie et un syndrome mononucléosique sont plus en faveur d’une origine virale, alors que l’hyperéosinophilie orienterait davantage vers une étiologie médicamenteuse [1]. En dehors d’un drug reaction with eosinophilia and systemic symptoms (DRESS), l’existence d’une cytolyse est un argument en faveur d’une éruption virale (rougeole, Epstein-Barr virus [EBV], cytomégalovirus [CMV], virus de l’immunodéficience humaine [VIH], etc.). L’interprétation des sérologies virales est délicate. On peut désormais isoler le virus en cause à partir de prélèvements cutanés (virus zona—varicelle [VZV]), ou muqueux (rougeole) ; on dispose des immunoglobulines M (IgM) dans certaines maladies virales qui rendent inutile l’attente
Diagnostics différentiels des exanthèmes viraux Les étiologies principales des exanthèmes sont les infections virales et les toxidermies. Mais d’autres infections (bactériennes, rarement parasitaire telle que la toxoplasmose) et certaines maladies de système sont des causes d’exanthème. Chez l’enfant, les causes virales sont plus fréquentes [2,3]. Les meilleurs arguments en faveur d’une toxidermie sont : • l’existence d’un prurit ; • le polymorphisme lésionnel ; • l’absence d’énanthème ; • l’absence ou la discrétion de la fièvre ; • l’existence d’une hyperéosinophilie [4]. Les meilleurs arguments en faveur de l’origine virale sont : • épidémiologiques (jeune âge, notion de contage, période épidémique, absence de vaccination) ; • cliniques (énanthème associé, conjonctivite, absence de prurit, arthralgies, myalgies, fièvre, polyadénopathies, symptômes respiratoires ou digestifs) ;
Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001
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Exanthèmes viraux • biologiques (lymphopénie, syndrome mononucléosique, thrombopénie). Les étiologies des exanthèmes maculopapuleux et vésiculobulleux sont dominées par les infections virales. La présence d’un purpura doit faire envisager avant tout certains diagnostics d’urgence tels qu’une méningococcémie ou une fièvre hémorragique virale. Néanmoins, un purpura peut être banal au cours d’une éruption maculopapuleuse, notamment au niveau des membres inférieurs. Une étude italienne publiée en 2012 s’est penchée sur le diagnostic étiologique, souvent difficile, des exanthèmes atypiques [5]. Elle a inclus 260 patients présentant ce type de manifestations cutanées (dont 108 enfants). Le but de cette étude était d’établir une corrélation entre le tableau clinique et une origine infectieuse ou médicamenteuse. Il est apparu, entre autres, que la grande majorité des éruptions à caractère purpurique était d’origine infectieuse (avec une majorité d’étiologie virale). L’existence d’un énanthème était aussi un élément pour une origine infectieuse, et là encore le caractère purpurique de ce dernier était dans 80 % des cas associé à une étiologie infectieuse. On peut retenir de ce travail que le caractère purpurique de l’exanthème et/ou de l’énanthème serait vraisemblablement un élément en faveur de l’étiologie infectieuse.
Principaux exanthèmes viraux Exanthèmes vésiculeux d’origine virale Varicelle La varicelle est la primo-infection avec le VZV. L’incidence de la maladie est plus élevée au printemps. Neuf enfants sur dix auront eu la varicelle à l’âge de 10 ans. La varicelle est très contagieuse, sa transmission interhumaine se fait surtout par voie aérienne. La contagiosité s’étend de un à deux jours avant le début de l’éruption et jusqu’à la disparition des vésicules. L’incubation est de 14 jours en moyenne. Les prodromes (fièvre, céphalées) sont généralement peu importants. Un exanthème érythématomaculeux prurigineux intéressant principalement le tronc précède l’apparition des vésicules. Les papules puis les vésicules apparaissent initialement à la partie supérieure du corps et intéressent notamment le cuir chevelu. Le reste du corps est atteint avec une progression céphalocaudale des lésions. Il existe un énanthème associé avec des érosions postvésiculeuses retrouvées également dans la cavité buccale (vésicules le plus souvent rompues lors de l’examen de la cavité buccale du fait de leur fragilité). Les muqueuses génitales peuvent également être touchées. Les vésicules ombiliquées se troublent puis évoluent vers une croûte. Plusieurs poussées se succèdent sur trois à six jours précédées et accompagnées inconstamment de fièvre entraînant la coexistence d’éléments d’âges différents (il s’agissait autrefois d’un élément de diagnostic différentiel de la variole, une seule poussée dans cette dernière). La confirmation diagnostique n’est pas nécessaire dans les formes typiques non compliquées. Elle repose sur la sérologie (détection d’IgM, séroconversion IgG) et/ou la mise en évidence par polymerase chain reaction (PCR) du VZV
3 dans le liquide d’une vésicule (culture de la ponction d’une vésicule possible également).
Complications de la varicelle La varicelle est plus profuse et se complique plus volontiers chez l’adolescent et l’adulte ; la survenue d’une varicelle chez l’immunodéprimé expose à des complications (neurologiques, hépatiques, pulmonaires) plus fréquentes et plus sévères. La varicelle néonatale, secondaire à la survenue d’une varicelle maternelle entre j − 5 et j + 2 de l’accouchement, est associée à une mortalité élevée de 20 à 30 %, en raison de l’absence de transmission d’anticorps maternels. À ne pas confondre avec la varicelle congénitale, qui est secondaire à la survenue d’une varicelle maternelle avant la quatrième semaine de grossesse : l’infection fœtale par le VZV est à l’origine de cicatrices cutanées déprimées, achromiques ou pigmentées, de microphtalmie, de cataracte, de choriorétinite, de microcéphalie, de retard mental, d’hypoplasie d’un membre et de décès précoce. Après la 25e semaine de grossesse, le risque est celui d’un zona dans l’enfance [6]. Les complications intrinsèques sont assez rares chez l’enfant (pneumonie, méningite, ataxie secondaire à une cérébellite), mais les complications cutanées bactériennes sont au premier plan, en particulier chez l’enfant de moins de 4 ans. Un enfant ayant une hyperthermie persistante au cours d’une varicelle doit être soigneusement examiné à la recherche d’une surinfection cutanée bactérienne, à staphylocoque doré (tableau d’impétigos bulleux ou de lésions nécrotiques multiples) ou à streptocoque bêtahémolytique (tableau de dermohypodermite bactérienne pouvant évoluer vers l’abcédation ou au pire une fasciite nécrosante) [7]. Le rôle des traitements locaux a été documenté et plus particulièrement celui du talc comme facteur des plus graves complications infectieuses (à proscrire !).
Traitement Le traitement chez l’enfant immunocompétent est symptomatique (soins d’hygiène simples sans recourir de fac ¸on systématique et prolongée aux antiseptiques locaux, trop vite irritants ; paracétamol et antihistaminique). Le traitement fait appel à l’aciclovir chez l’enfant immunodéprimé ou dans la varicelle congénitale [8]. Enfin, devant un tableau de dermohypodermite bactérienne invasive du petit enfant, un traitement antibiotique intraveineux doit être rapidement débuté en milieu hospitalier. L’utilisation d’aspirine est totalement contre-indiquée pouvant être responsable du syndrome de Reye (encéphalopathie aiguë avec atteinte hépatique sévère). L’utilisation d’anti-inflammatoires non stéroïdiens (AINS) est aussi à éviter pouvant favoriser les complications à type de surinfections bactériennes cutanées. Il faut garder à l’esprit que le zona (lié à la récurrence du virus VZV) de l’enfant n’est pas une situation exceptionnelle et son évolution est généralement peu douloureuse et bénigne. Le recours à des investigations complémentaires et à un traitement spécifique n’est habituellement pas nécessaire, sauf dans le cas d’un zona ophtalmique ou en
Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001
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présence d’atypies cliniques et/ou d’extension des vésicules en dehors du métamère primitivement atteint [7].
Syndrome pieds—mains—bouche Le syndrome pieds—mains—bouche est un exanthème vésiculeux. Cet exanthème viral concerne essentiellement les enfants (de moins de 10 ans) [9] bien que des transmissions intrafamiliales soient souvent rapportées, et survient sous la forme de petites épidémies (crèches). Il s’agit d’une affection très contagieuse avec transmission interhumaine orale ou orofécale. En France, ce syndrome est lié à une infection à coxsackie A16 dans la grande majorité des cas (plus rarement aux coxsackies A4, A5, A6, A7, A9, A10, B1, B2, B3 ou B5). Des formes épidémiques graves ont été rapportées, principalement en Asie et en Australie, avec l’entérovirus 71 (complications essentiellement neurologiques) [10]. À la différence de la plupart des exanthèmes peu spécifiques associés aux entérovirus, le syndrome pieds—mains—bouche adopte une clinique caractéristique permettant en règle un diagnostic étiologique. La confirmation du diagnostic par prélèvement viral n’est de ce fait habituellement pas nécessaire [11]. Celui-ci peut être établi par l’isolement du virus dans les vésicules cutanées surtout et/ou sur le pharynx et dans les selles par cultures cellulaires ou inoculation au souriceau et par l’ascension du taux des anticorps à deux prélèvements à dix jours d’intervalle. L’incubation est de trois à six jours suivie de prodromes inconstants : fièvre, malaise général, anorexie, douleurs abdominales. Les vésicules apparaissent ensuite, siégeant électivement au niveau de la cavité buccale, dans la zone périorale, les paumes et les plantes. Une atteinte du siège, voire généralisée n’est pas rare (vésicules et/ou exanthème profus). Les vésicules sont caractéristiques : ovalaires, remplies d’un liquide clair et surmontées d’un toit grisâtre, cernées d’un liseré érythémateux. Des atteintes unguéales sont classiquement décrites quelques semaines suivant cet exanthème viral, à type de dépressions linéaires transversales (lignes de Beau) ou bien d’une onychomadèse (décollement de la tablette unguéale à départ proximal, mono- ou multidactylique, souvent progressif et indolore ; phénomène correspondant à un arrêt transitoire de la pousse de l’ongle) [12—14]. Le lien de causalité entre l’infection virale et l’onychomadèse est difficile à expliquer, du fait du diagnostic souvent tardif de l’onyxis qui s’exprime cliniquement entre trois et dix semaines après le début de la virose, rendant toute documentation virologique difficile à interpréter : s’agit-il d’un tropisme électif de certains virus pour la matrice unguéale, d’un effet systémique du sepsis (fièvre élevée mais inconstante) ou d’une conséquence postinflammatoire des vésicules cutanées périunguéales ? Le syndrome pieds—mains—bouche est une cause non rare d’onychomadèse multidactylique « épidémique » en population pédiatrique. II s’agit, dans tous les cas, d’une forme bénigne d’onyxis de pronostic toujours spontanément favorable [12]. L’évolution du syndrome pieds—mains—bouche est le plus souvent favorable, en moyenne en sept jours.
Point fort • Neuf enfants sur dix auront eu la varicelle à l’âge de 10 ans. • La confirmation diagnostique de la varicelle n’est pas nécessaire dans les formes typiques non compliquées. • La varicelle est plus profuse et se complique plus volontiers chez l’adolescent et l’adulte. Les complications cutanées bactériennes sont au premier plan, en particulier chez l’enfant de moins de 4 ans. • Le syndrome pieds—mains—bouche adopte une clinique caractéristique permettant en règle un diagnostic étiologique. La confirmation du diagnostic par prélèvement viral n’est de ce fait habituellement pas nécessaire. • Le syndrome pieds—mains—bouche est une cause non rare d’onychomadèse multidactylique « épidémique » en population pédiatrique.
Exanthèmes maculopapuleux d’origine virale Rougeole La rougeole est une infection aiguë liée à un virus à acide ribonucléique (ARN) appartenant à la famille des Paramyxoviridae. Son incidence en France avait considérablement diminué depuis la généralisation de la vaccination par vaccin vivant atténué, mais depuis quelques années on assiste à une « épidémie » liée à un taux de couverture vaccinale insuffisant de la population. Les deux tranches d’âge les plus touchées sont les nourrissons (avant 1 an), les adolescents et les jeunes adultes entre 10 et 30 ans [15]. La rougeole survient essentiellement en hiver et au printemps (pic d’incidence en mars et avril). La transmission est interhumaine par voie aérienne responsable des épidémies intrafamiliales ou en collectivités telles que les crèches ou les écoles. La phase d’incubation est de dix à 12 jours, suivie d’une phase d’invasion associant une altération variable de l’état général, une fièvre élevée et un catarrhe oculonasal et trachéobronchique (toux et mal de gorge). L’énanthème apparaît 24 à 48 heures après le début du catarrhe. Le signe (ou taches) de Köplik [15], discret et fugace (macules rouges centrées par un point blanc à la face interne des joues en regard des prémolaires) est inconstant (un quart des cas) et non pathognomonique, pouvant s’observer au cours d’autres infections, notamment à parvovirus B19. Après une période d’incubation en règle de 14 jours, l’exanthème morbilliforme (macules et papules confluentes avec des intervalles de peau saine) débute classiquement en région rétroauriculaire et à la racine des cheveux puis a une évolution descendante, sans épargner les paumes et les plantes. Cet exanthème généralisé peut prendre un caractère purpurique avec une desquamation inconstante après quelques jours. La personne atteinte est contagieuse depuis les prodromes jusqu’à quatre jours environ après le début de l’éruption.
Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001
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Exanthèmes viraux La confirmation du diagnostic repose sur la sérologie rougeole (présence d’IgM spécifiques) ou le prélèvement salivaire (détection du virus par PCR ou là encore d’IgM spécifiques). La détection du virus de la rougeole peut également se faire par PCR dans le sang, sur prélèvements rhinopharyngés ou urinaires. Il est important de rappeler que la rougeole n’est pas seulement une dermatose ! Une étude rétrospective franc ¸aise incluant plus de 500 adultes hospitalisés pour rougeole en 2010 et 2011 rapporte des complications dans 68 % des cas dont un décès (secondaire à une pneumonie virale sévère) [16]. La rougeole est habituellement bénigne en Europe, mais des complications bénignes pour la plupart sont néanmoins observées chez le nourrisson (avant 1 an) et chez l’adulte (diarrhées, otites purulentes). Les complications plus sévères sont plus rares (pneumonies virales ou bactériennes), voire exceptionnelles (neurologiques ou oculaires). La rougeole durant la grossesse expose à un risque maternel de complications pulmonaires. Le virus n’a pas d’effet malformatif pour le fœtus, mais la rougeole peut entraîner une mort fœtale ainsi que des accouchements prématurés. Les rougeoles congénitales et néonatales (naissance + dix jours) sont de gravité très variable.
5 recherchées, notamment les infections congénitales dont la rubéole, une hémolyse sévère et les pathologies tumorales.
Roséole infantile ou exanthème subit du nourrisson
Chez les sujets contacts, un rattrapage vaccinal est possible et indiqué dans les 72 heures suivant le contage, pouvant ainsi éviter la survenue de la maladie [15].
L’exanthème subit ou roséole infantile (sixième maladie) est une des principales étiologies d’exanthème chez l’enfant de moins de 2 ans (tranche d’âge de 6 mois à 2 ans). La human herpesvirus 6 (HHV6) en est le principal agent étiologique responsable, bien que d’autres virus aient été identifiés comme agents étiologiques potentiels (HHV7 et autres entérovirus). Ceux-ci peuvent expliquer des épisodes successifs d’exanthème subit chez un nourrisson [18]. L’incubation varie entre cinq et 15 jours, suivie d’une fièvre brutalement élevée (39—40 ◦ C) en règle bien tolérée. Dans moins d’un quart des cas (20 %), la primo-infection à HHV6 s’accompagne d’un exanthème qui survient classiquement au troisième jour de fièvre. Cet exanthème est maculopapuleux, discret et fugace, et prédomine au tronc. Des formes atypiques vésiculeuses d’exanthème subit ont cependant été rapportées [19]. Dans la roséole infantile, il est classiquement constaté que l’exanthème apparaît alors que la fièvre disparaît contrairement à la rougeole et la rubéole. Une leuconeutropénie est fréquente. La confirmation diagnostique n’est habituellement pas justifiée. À noter qu’une PCR sanguine ne permet pas d’affirmer le diagnostic de primo-infection à HHV6, puisque celle-ci peut être positive lors d’une réactivation virale (dans le cadre de toxidermie [20] ou lors d’infections sévères notamment en réanimation). La principale complication de la roséole est la convulsion fébrile.
Rubéole
Mégalérythème épidémique
La rubéole est une infection liée à un virus à ARN de la famille des Togaviridae. Comme pour la rougeole, des épidémies de rubéole ont été rapportées en Europe depuis quelques années (tranche d’âge des 15—25 ans) [17]. La rubéole se transmet par voie respiratoire ou par voie transplacentaire (exposant au risque de mort fœtale in utero ou de rubéole congénitale). La période d’incubation varie de 14 à 21 jours. Contrairement à la rougeole, les prodromes sont discrets, avec entre autres une fièvre modérée, et l’état général est en règle conservé. L’exanthème est inconstant, dure quatre à cinq jours lorsqu’il est présent et est peu caractéristique. Une polyadénopathie est le plus souvent objectivée, siégeant principalement dans les régions rétroauriculaires et occipitales. Celles-ci peuvent persister plusieurs semaines. Le diagnostic de certitude repose sur la sérologie (présence d’IgM spécifiques). Il s’agit d’une maladie infectieuse bénigne. La principale complication est la rubéole congénitale (rare en France), responsable d’un syndrome polymalformatif. Sur le plan dermatologique, elle peut se manifester par un tableau de blueberry muffin baby, syndrome cutané rare observé en période néonatale. Il est caractérisé par des papulonodules disséminés inflammatoires traduisant des réactions d’hématopoïèse dermique. Plusieurs causes doivent être
Le mégalérythème (cinquième maladie) touche l’enfant entre 5 et 10 ans, par petites épidémies printanières (fin de l’hiver au début de l’été). Le parvovirus B19 en est l’agent étiologique responsable (virus à acide désoxyribonucléique [ADN]) et sa transmission se fait classiquement par les sécrétions respiratoires. L’incubation est de 14 jours en moyenne (6—14 j). Après des prodromes en règle discrets (fièvre, céphalée, rhinite), l’exanthème évolue en trois phases : • érythème « souffleté » des joues (érythème bilatéral et symétrique) épargnant la zone périorale ; • apparition secondaire, 24 à 48 heures après, d’un érythème maculopapuleux des membres et des fesses prenant un aspect figuré en « guirlande » ou en « carte de géographie », d’une durée de une à trois semaines ; • exanthème fluctuant avec variabilité de l’éruption selon la lumière ou la température, parfois même selon les émotions [21,22]. Cet exanthème peut récidiver pendant les quelques semaines à mois suivants lors d’efforts ou d’exposition au soleil.
Point fort • La rougeole fait partie des maladies à déclaration obligatoire.
À noter que des arthralgies sont souvent associées chez le grand enfant. Le diagnostic peut être confirmé par la sérologie virale spécifique (présence d’IgM) ou la détection du virus par PCR.
Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001
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L’infection à parvovirus B19 peut se compliquer d’une anémie aiguë chez les patients souffrant d’une anémie hémolytique chronique (thalassémie, drépanocytose, etc.) [23]. Le parvovirus B19 peut également être responsable d’un autre tableau clinique : un purpura en « gants et chaussettes » mais celui-ci n’est pas pathognomonique puisque décrit avec d’autres agents étiologiques viraux (EBV, CMV, entérovirus, etc.) [23] (cf. infra).
Mononucléose infectieuse La mononucléose infectieuse (MNI) est une maladie associée dans la grande majorité des cas à une primo-infection à EBV. Dans les pays développés, l’incidence concerne principalement les adolescents et jeunes adultes entre 18 et 25 ans. La transmission se fait essentiellement par les liquides biologiques (salive notamment) et l’incubation est relativement longue (30—50 j). Le signe cardinal est l’angine érythématopultacée ou plus rarement pseudomembraneuse, classiquement associée à une fièvre, une polyadénopathie et une splénomégalie. La MNI est aujourd’hui en France la première cause d’angine pseudomembraneuse depuis la quasi-disparition de la diphtérie. Ce type d’angine doit faire évoquer une MNI. L’exanthème n’est rapporté que dans moins d’un quart des cas, habituellement maculopapuleux, peu spécifique. En revanche en cas de prescription d’aminopénicilline, cet exanthème est quasi systématique (90—100 % des cas). En cas d’« éruption » survenant au cours d’une MNI, ne pas étiqueter « à tort » le patient allergique à la pénicilline qui peut être utilisé sans risque ultérieurement. Tout comme le parvovirus B19, la primo-infection à EBV peut également se manifester chez l’enfant par un tableau de purpura en « gants et chaussettes » ou encore un tableau d’acrodermatite papuleuse de Gianotti-Crosti (cf. infra). Sur le plan hématologique existe un syndrome mononucléosique dans 70 % des cas avec hyperlymphocytose et présence de grands lymphocytes atypiques et hyperbasophiles (30 % des lymphocytes). Ce sont des lymphocytes T CD8+ activés. L’augmentation des transaminases signe la cytolyse hépatique constante. L’évolution se fait vers la guérison en 15 à 20 jours. Une asthénie prolongée postinfectieuse est classique. Des complications peuvent être observées (purpura thrombopénique, rupture splénique, syndrome de GuillainBarré, méningite, encéphalite, myocardite, etc.) [24]. Le diagnostic repose sur le MNI-test et la sérologie virale EBV (IgM présentes dans 70 à 80 % des cas de MNI de l’adolescent, et disparaissant en quelques mois) [25]. En routine, les anticorps anti-viral capside antigen (VCA), antiearly antigen (EA) et anti-Epstein-Barr nuclear Ag (EBNA) sont recherchés dans le sang. Le diagnostic d’infection par l’EBV peut aussi se faire par immunohistochimie grâce à des anticorps monoclonaux correspondant aux diverses protéines et surtout par hybridation in situ mettant en évidence soit l’ADN viral, soit les transcrits Epstein-Barr virus encoded RNA (EBER) (exprimés en phase de latence). La PCR est une méthode très sensible mais qui ne permet pas de localiser l’infection par l’EBV à l’échelon cellulaire [26].
Primo-infection au virus de l’immunodéficience humaine La primo-infection au VIH est symptomatique dans plus de la moitié des cas. Après une incubation silencieuse de 15 jours à trois mois après la contamination, le tableau clinique associe, dans un contexte fébrile, un syndrome grippal (myalgies, arthralgies, pharyngite) et un exanthème maculopapuleux dans 40 % des cas [27]. Cet exanthème peut s’associer à une atteinte palmoplantaire pouvant simuler une syphilis secondaire, ainsi qu’à des ulcérations endobuccales, parfois génitales douloureuses. Trois types de marqueurs virologiques plasmatiques sont utilisables par ordre chronologique d’apparition [28] : • l’ARN du VIH : dix jours après la contamination, la virémie plasmatique atteint rapidement des taux très élevés, pour décroître progressivement et arriver au plateau d’équilibre quatre à six mois après la contamination ; • l’antigène p24 est détecté environ 15 jours après la contamination, il persiste une à deux semaines avant de disparaître ; • les anticorps anti-VIH sont mis en évidence par les tests enzyme-linked immunosorbent assay (Elisa) en moyenne 22 à 26 jours après le contage ; le western blot permet de préciser la cinétique d’apparition des anticorps, les premiers étant ceux dirigés contre les protéines d’enveloppe (gp160, gp120, gp41) et contre l’antigène p24 puis le western blot se complète en quelques semaines. La réalisation d’un test génotypique à la recherche de virus portant des mutations de résistance est recommandée dans le bilan initial d’une primo-infection dans l’objectif de choisir le traitement initial en cas de multirésistance et/ou d’échec virologique précoce. En France, la fréquence de virus résistants chez les sujets en primo-infection reste stable et inférieure à 10 %.
Autres virus responsables d’exanthèmes maculopapuleux Cytomégalovirus Le CMV est un virus de la famille des Herpesviridae. Sa transmission se fait essentiellement par les liquides biologiques et notamment la salive comme pour le virus d’Epstein-Barr mais également par le biais de l’allaitement, par voie fœtomaternelle ou par voie sexuelle. Le CMV est un virus très répandu (séroprévalence de 30 à 100 % chez l’adulte selon les pays). La primo-infection chez l’enfant immunocompétent est très souvent asymptomatique. Dans les formes symptomatiques (10 à 40 % des cas), l’exanthème n’a aucune spécificité. Tout comme l’EBV dans la MNI, un exanthème (maculopapuleux ou urticarien) est classiquement décrit après prescription d’aminopénicilline (ampi/amoxicilline) dans le cadre d’une primo-infection par le CMV [29]. Le diagnostic doit être suspecté devant une fièvre, souvent persistante, associée à des signes cliniques peu spécifiques. L’examen de référence permettant d’affirmer le diagnostic de primo-infection à CMV est la mise en évidence d’une séroconversion en IgG—CMV.
Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001
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Exanthèmes viraux
Point fort • L’infection à CMV est l’infection congénitale la plus fréquente.
Sur le plan dermatologique, le diagnostic est évoqué classiquement devant un tableau de blueberry muffin baby (cf. supra), les lésions cutanées témoignant d’une hématopoïèse dermique. Les signes extracutanés sont dominés par un retard de croissance intra-utérin, une organomégalie, une surdité, une choriorétinite et des anomalies du système nerveux central. Sur le plan biologique est notée une thrombopénie dans la plupart des cas. Cette présentation n’étant cependant pas spécifique, il convient de rechercher devant ce tableau une infection congénitale d’un des agents du complexe TORCH (toxoplasmose, others [parvovirus B19, syphilis], rubéole, CMV, herpesvirus).
Entérovirus et exanthèmes maculopapuleux À côté du classique syndrome « pieds—mains—bouche » lié dans la grande majorité des cas au coxsackie A16 (mais également 10, 6 et plus rarement entérovirus 71), certains entérovirus sont associés à des exanthèmes maculopapuleux (responsables de 5 % des exanthèmes maculopapuleux de l’enfant). Ces exanthèmes viraux se manifestent essentiellement par petites épidémies estivales [30,31]. Ces exanthèmes ont peu de spécificité clinique ne permettant pas, bien souvent, de porter un diagnostic étiologique. Quelques cas d’éruptions purpuriques pétéchiales ont été décrits. La confirmation diagnostique n’est pas nécessaire dans la grande majorité des cas (prélèvements sanguins, de l’oropharynx, du liquide cérébrospinal [LCS] si encéphalite et des selles) [32].
« Retour de voyage » Chikungunya Le virus du chikungunya est une arbovirose présente dans certains pays d’Afrique et d’Asie, où il est responsable de cas sporadiques. Ses principaux vecteurs sont les moustiques (de la famille Aedes). En France métropolitaine, un moustique de cette famille (Aedes albopictus) est présent, depuis 2004, dans certaines régions géographiques du sud de la France et s’étend inexorablement en remontant vers le nord. Sur le plan clinique, l’infection chez l’enfant comme chez l’adulte se caractérise par un tableau pseudogrippal, associé à des douleurs articulaires parfois très invalidantes, des signes gastro-intestinaux et un exanthème maculopapuleux polymorphe (présent dans 60 à 70 % des cas). Le virus du chikungunya peut, comme d’autres virus, être responsable également d’une éruption purpurique pétéchiale. Des formes vésiculobulleuses ont même été décrites chez des nourrissons [33,34]. La transmission à l’enfant est possible mais le véritable problème réside dans les complications notamment articulaires, rapportées par une étude réunionnaise récente incluant une petite centaine d’adultes lors de l’épidémie de chikungunya durant la période 2005—2006 ; 44 % d’entre eux souffraient de prodromes articulaires et 63,6 % rapportent des polyarthralgies invalidantes et persistantes 18 mois après l’infection [35].
7 Des séquelles pigmentaires et autres (vasculites, syndrome de Raynaud) ont été décrites par les équipes indiennes [36]. Le problème le plus fréquent reste la gravité et la chronicité des atteintes articulaires, décrites après l’épidémie de chikungunya de 2005—2006 touchant les îles de l’océan Indien (Comores, Mayotte, île Maurice, les Seychelles et tout particulièrement la Réunion) [37]. La confirmation diagnostique se fait par la sérologie virale spécifique ou avec la PCR (surtout utiles en cas d’infection maternofœtale). Point fort • Le chikungunya est une maladie à déclaration obligatoire [33,34].
Dengue La dengue est une maladie infectieuse transmise par les moustiques du genre Aedes. Plus de 50 millions de personnes sont infectées dans le monde chaque année. En France, les cas rencontrés sont des cas d’importation. À noter deux cas autochtones en 2010 dans le sud-est de la France, secondaires à un cas d’importation, et favorisés par la présence croissante du moustique Aedes albopictus depuis 2004 dans certaines régions du sud de la France (cf. supra). L’incubation de la dengue est de cinq jours et les signes cliniques sont peu spécifiques. Après un érythème fugace du visage les deux premiers jours, un exanthème maculopapuleux apparaît classiquement vers le quatrième jour. Il débute au niveau du tronc, a une évolution centrifuge et touche les paumes et les plantes des pieds. Une desquamation palmoplantaire survient secondairement [38]. La principale complication est la dengue hémorragique (saignements cutanéomuqueux et purpura pétéchial) qui serait plus fréquente chez l’enfant avant 10 ans. L’examen de confirmation diagnostique dépend de la date de début des symptômes (DDS) : • DDS inférieure ou égale à sept jours : RT—PCR dengue et sérologie ; • DDS supérieure à sept jours : sérologie avec un second prélèvement de confirmation au plus tôt dix jours après le premier prélèvement.
Point fort • La dengue est une maladie à déclaration obligatoire.
Hépatites virales Les virus des hépatites A, B et E peuvent être responsables de manifestations dermatologiques à type d’exanthèmes. L’hépatite A est la plus fréquente des hépatites virales, même si son incidence a diminué ces vingt dernières années, en particulier dans les pays industrialisés. Le plus souvent, l’infection virale est asymptomatique ou paucisymptomatique, en particulier chez les enfants, et l’évolution habituellement favorable. Quelques manifestations dermatologiques sont décrites et notamment des éruptions
Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001
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maculeuses, urticariennes, purpuriques, parfois associées à des arthralgies, rapidement régressives, lors de la phase préictérique de l’hépatite [39]. L’urticaire aiguë associée ou non à un angio-œdème fait partie du « classique » syndrome préictérique de l’hépatite B avec une asthénie, des arthralgies ou des arthrites, des céphalées, ces manifestations régressant spontanément quand l’ictère apparaît. Un purpura maculopapuleux est également possible lors de la phase aiguë ou chronique de l’infection par le virus de l’hépatite B (vasculite leucocytoclasique cutanée) [40]. Enfin un exanthème peu spécifique est également décrit lors des infections par le virus de l’hépatite E.
À part : maladie ou syndrome de Kawasaki Au sein de ces exanthèmes maculopapuleux viraux, habituellement bénins, il faut reconnaître la maladie ou syndrome de Kawasaki qui touche l’enfant surtout de moins de 5 ans et dans la moitié des cas avant 2 ans [41,42]. Il s’agit d’une vascularite dont l’étiologie virale est suspectée. Certaines études virologiques ont incriminé l’EBV mais, à l’heure actuelle, l’origine virale n’est pas démontrée [43]. Son diagnostic positif repose sur un faisceau d’arguments cliniques : • une fièvre élevée durant plus de cinq jours (95 % des cas) ; • des signes cutanéomuqueux très variés : conjonctivite, chéilite, langue framboisée, érythro-œdème palmoplantaire, exanthème polymorphe (90 % des cas) qui régresse généralement en une semaine, desquamation du siège et des extrémités ; • des adénopathies (région cervicale principalement), pas toujours présentes (75 % des cas) ; • et, en revanche, une altération constante de l’état général. Il s’agit d’un exanthème atypique par l’intensité de l’érythème et de l’œdème palmoplantaire avec desquamation secondaire en « doigts de gants » au niveau des extrémités. L’atteinte du siège est évocatrice avec atteinte bien limitée, maculeuse ou en « plaques », de l’ensemble ou d’une partie de la région périnéale (érythème en « culotte ») et rapidement suivie d’une desquamation. Ce tableau clinique s’associe constamment à un syndrome inflammatoire biologique. La principale complication de ce syndrome est le risque cardiovasculaire, actuellement bien connu, avec la survenue d’anévrismes coronariens (14 % des cas en France). Les facteurs prédictifs de complications sont l’âge élevé de l’enfant, la thrombocytose, et l’association vitesse de sédimentation et CRP élevées. Certaines publications ont mis l’accent sur l’augmentation du risque d’athérosclérose après une maladie de Kawasaki [41,42].
Le traitement repose sur les Ig polyvalentes intraveineuses associées à l’aspirine (à dose anti-inflammatoire).
Point fort • Depuis quelques années on assiste à une « épidémie » de rougeole liée à un taux de couverture vaccinale insuffisant de la population. • La principale complication de la rubéole est la rubéole congénitale (rare en France), responsable d’un syndrome polymalformatif. • La principale complication de la roséole est la convulsion fébrile. • Le parvovirus B19 peut être responsable d’un purpura en « gants et chaussettes », non pathognomonique (éruption « paravirale »). • L’infection à CMV est l’infection congénitale la plus fréquente. • La rougeole, le chikungunya et la dengue sont des maladies à déclaration obligatoire. • La maladie de Kawasaki est à évoquer devant tout exanthème fébrile persistant chez un enfant, sans point d’appel infectieux mais associé à un syndrome inflammatoire biologique. • Rechercher une primo-infection au VIH est indispensable chez tout sujet à risque, présentant un exanthème atypique, dans un contexte fébrile.
Éruptions dites « paravirales » Ce concept, décrit en 2005 par J.H. Saurat et D. Lipsker [44], s’applique à des dermatoses pour lesquelles l’étiologie n’est pas univoque : • exanthèmes viraux avec agents responsables multiples (syndrome de Gianotti-Crosti, syndrome « gants et chaussettes »), par opposition à certaines maladies virales pour lesquelles il n’existe qu’un seul agent responsable (la varicelle par exemple) ; • exanthèmes pour lesquels une étiologie virale est hautement probable mais n’a jamais été démontrée (APEC syndrome [asymetric periflexural exanthem of childhood], pseudoangiomatose éruptive) ; • exanthèmes pouvant relever d’une cause infectieuse mais également d’une cause médicamenteuse. Le pityriasis rosé de Gibert en est l’exemple type, mais bien d’autres dermatoses peuvent rentrer dans ce cadre, qui ne sont pas détaillées dans ce chapitre (érythème polymorphe, pityriasis lichénoïde, pustulose exanthématique aiguë généralisée, etc.).
Acrodermatite papuleuse de Gianotti et Crosti Point fort Syndrome de Kawasaki • Il représente une urgence vitale imposant une hospitalisation immédiate pour traitement. • Il reste le diagnostic à garder systématiquement à l’esprit devant toute fièvre inexpliquée de l’enfant.
Ce syndrome, décrit en 1955 par deux dermatologues italiens qui lui ont donné son nom, est principalement rencontré chez l’enfant, avec un pic d’incidence entre 1 et 6 ans, plus rarement chez l’adolescent. Initialement décrite en association à une primo-infection par le virus de l’hépatite B, cette dermatose est désormais
Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001
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Exanthèmes viraux associée à d’autres étiologies virales et principalement à l’EBV, au CMV ou aux coxsackies [45,46]. Des observations plus récentes de syndrome de GianottiCrosti ont été rapportées avec le parvovirus B19 ou le virus respiratoire syncytial (VRS) ou encore au décours de vaccinations. Aucune étiologie n’est retrouvée dans près de la moitié des cas [47]. Cette dermatose débute brutalement, après des prodromes habituellement discrets, et se caractérise, dans sa forme typique, par l’apparition de lésions papuleuses ou papulovésiculeuses des quatre membres, parfois des joues et/ou des fesses. Les muqueuses sont respectées et l’évolution des lésions cutanées est spontanément favorable en quelques jours à plusieurs semaines (extrêmes cinq jours à un an), parfois laissant place à des séquelles pigmentaires (hypo- ou hyperpigmentation postinflammatoire). Une hépatite biologique anictérique est habituellement à rechercher surtout s’il existe un autre point d’appel clinique (altération de l’état général ou organomégalie). Lorsque cette recherche s’avère positive, elle est le plus souvent en rapport avec une primo-infection à l’EBV ou au CMV mais impose la recherche d’une hépatite virale A, B ou C [46]. Le traitement reste symptomatique, limité le plus souvent à des antihistaminiques oraux en cas de prurit, couplés éventuellement à l’application de dermocorticoïdes.
Syndrome « gants et chaussettes » Le syndrome papulopurpurique en « gants et chaussettes », décrit en 1990, est caractérisé par un exanthème purpurique des extrémités (mains et pieds), parfois associé à une atteinte du siège et de la muqueuse buccale [48]. Cet exanthème purpurique s’accompagne d’un œdème prurigineux des extrémités. Les lésions sont souvent douloureuses et une altération de l’état général est souvent constatée (fièvre, arthralgies et anorexie). L’incubation est d’une dizaine de jours et la guérison est la règle en quelques semaines, sans récidive. Ce tableau clinique est associé à une primo-infection par le parvovirus B19 dans deux tiers des cas, mais d’autres agents infectieux ont été mis en évidence (rougeole, infections à EBV, CMV ou à HHV6 en particulier) [49].
Pseudoangiomatose éruptive Décrite en 1993 [50], la pseudoangiomatose éruptive est une entité rare, classiquement pédiatrique mais observée également chez l’adulte, parfois même du troisième âge [51]. Cet exanthème peut survenir sous la forme de petites épidémies. D’exceptionnelles épidémies ont été décrites en milieu hospitalier de plus ou moins grande ampleur [52,53], ainsi que de rares cas intrafamiliaux [54]. L’exanthème, précédé de prodromes peu spécifiques à type de fièvre, d’infection oto-rhino-laryngologique ou digestive [54], est constitué de petites papules angiomateuses bordées d’un halo anémique caractéristique. Les lésions siègent principalement au niveau du visage et des membres, et régressent spontanément en moins de 15 jours. Une évolution prolongée sur plusieurs mois ou des récurrences ont été décrites.
9 Une étiologie virale est suspectée (entérovirus) [55] mais non prouvée encore à l’heure actuelle.
Exanthème unilatéral latérothoracique ou APEC L’acronyme APEC définit une éruption asymétrique siégeant initialement sur la paroi thoracique ou la racine du membre supérieur à proximité d’un creux axillaire, prenant un aspect caractéristique en « feuillet de livre ». Cet exanthème est observé principalement dans la petite enfance, entre 2 et 3 ans, le plus souvent par épidémies hivernales ou printanières [56]. Un cas chez l’adulte a été rapporté [57]. Cliniquement, il s’agit de papules érythémateuses groupées en placards mal limités d’aspect eczématiforme. Les lésions sont prurigineuses dans la moitié des cas. L’exanthème a une évolution centrifuge et peut devenir bilatéral. Cette dermatose bénigne a une évolution spontanément favorable en quatre à huit semaines [56]. L’étiologie virale de l’APEC est suspectée mais n’a jamais été démontrée [58].
Pityriasis rosé de Gibert Le pityriasis rosé est une dermatose aiguë banale cosmopolite qui touche les sujets surtout entre 5 et 40 ans, sans prédilection de sexe. L’exanthème survient après parfois quelques prodromes (fébricule, malaise, céphalées, arthralgies) et présente des caractéristiques : • médaillon unique initial érythématosquameux, siégeant sur la face antérieure du thorax ou les membres supérieurs ; • puis apparition de plus petites lésions érythémateuses finement squameuses, peu prurigineuses, avec atteinte symétrique du tronc, du cou et de la partie proximale des membres. Elles apparaissent en plusieurs poussées et se disposent suivant les lignes de tension cutanée réalisant ainsi le classique « sapin de noël » sur le dos ; • l’état général est conservé et le sujet apyrétique ; • cet exanthème évolue sur plusieurs semaines (six à huit semaines) en trois phases : extension, stabilité puis régression, chacune d’environ deux semaines. Une étiologie virale est suspectée (HHV6 et HHV7) mais n’a, là encore, jamais été démontrée [59,60].
Papillite linguale éruptive familiale Cette affection se manifeste par l’apparition brutale de difficultés alimentaires en rapport avec une stomatite douloureuse avec glossite caractérisée par une hypertrophie des papilles fongiformes de la pointe et du dos de la langue. Elle survient par petites épidémies familiales [61,62]. Elle s’accompagne d’adénopathies cervicales dans près de la moitié des cas, et guérit en 15 jours. La survenue en petites épidémies familiales atteste de sa probable origine infectieuse (et potentiellement virale), mais l’agent responsable n’a pas été encore identifié [62].
Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001
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Conclusion
Déclaration de liens d’intérêts
Cet article aborde les principaux exanthèmes d’origine virale observés principalement chez l’enfant, mais également, avec une fréquence moindre, chez l’adulte. Dans un certain nombre de cas, l’exanthème adopte une présentation clinique relativement stéréotypée permettant d’évoquer l’agent étiologique responsable et de définir l’évolutivité des symptômes (la varicelle par exemple). Cependant, l’exanthème est parfois peu spécifique (exanthèmes maculopapuleux à entérovirus par exemple) et/ou atypique, ou encore avec agents déclenchants potentiels multiples (éruptions dites « paravirales »), rendant le diagnostic étiologique et la prise en charge qui en découle plus délicats. La difficulté de prise en charge est liée, d’une part, au grand nombre de causes possibles et, d’autre part, à l’exposition fréquente d’un même patient à plusieurs facteurs potentiellement étiologiques (virus et médicaments notamment). Les progrès de la biologie permettront d’identifier d’autres agents infectieux et de mettre dans le futur le nom d’un agent microbien sur certaines formes et syndromes particuliers. Il est important d’évoquer les maladies éruptives et surtout de les confirmer du fait de la gravité potentielle de certaines d’entre elles, comme la rougeole, l’infection par le VIH, parfois l’EBV ou le CMV (mortalité, morbidité, danger chez la femme enceinte) mais aussi les pathologies d’importation (telles que le chikungunya et la dengue, bientôt en France ?). Il paraît donc important de rappeler l’intérêt de se vacciner correctement contre les maladies éruptives. Enfin, il convient également de reconnaître la maladie de Kawasaki qui représente une urgence diagnostique et thérapeutique : à évoquer devant tout exanthème fébrile persistant chez un enfant, sans point d’appel infectieux mais associé à un syndrome inflammatoire biologique.
Les auteurs déclarent ne pas avoir de liens d’intérêts.
Points essentiels • Les étiologies principales des exanthèmes sont les infections virales et les toxidermies. • Les infections virales sont les principales causes des exanthèmes de l’enfant. • Parmi les exanthèmes fébriles, les exanthèmes maculopapuleux sont les plus fréquents. • La rougeole, le chinkungunya et la dengue font partie des maladies à déclaration obligatoire. • L’exanthème est parfois peu spécifique (exanthèmes maculopapuleux à entérovirus par exemple) et/ou atypique, ou encore avec agents déclenchants potentiels multiples (éruptions dites « paravirales »). • Rechercher une primo-infection au VIH est indispensable chez tout sujet à risque, présentant un exanthème atypique, dans un contexte fébrile. • Le syndrome de Kawasaki reste le diagnostic à garder systématiquement à l’esprit devant toute fièvre inexpliquée de l’enfant : il s’agit d’une urgence diagnostique et thérapeutique.
Annexes. Matériels complémentaires Les matériels complémentaires accompagnant la version en ligne de cet article sont disponibles sur http://www. sciencedirect.com et http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp. 2016.04.001.
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Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001
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Pour citer cet article : Fleuret C, Plantin P. Exanthèmes viraux. Journal de pédiatrie et de puériculture (2016), http://dx.doi.org/10.1016/j.jpp.2016.04.001