Cahiers de nutrition et de diététique (2010) 45, 195—204
ÉPIDÉMIOLOGIE
Forts consommateurs de fruits de mer : cas particulier des pêcheurs à pied récréatifs dans le Finistère Shellfish consumption among recreational harvesters of Western Brittany Cyndie Picot , Franc ¸ois-Gilles Carpentier , Dominique Parent-Massin , Alain-Claude Roudot ∗ EA 3880, UFR sciences et techniques, laboratoire de toxicologie alimentaire et cellulaire, université européenne de Bretagne, université de Bretagne occidentale (UEB-UBO), 6, avenue Victor-Le-Gorgeu, CS93837, 29238 Brest cedex 3, France Rec ¸u le 20 novembre 2009 ; accepté le 9 mars 2010 Disponible sur Internet le 18 avril 2010
MOTS CLÉS Consommation ; Fruits de mer ; Pêcheurs à pied récréatifs ; Évaluation de l’exposition
KEYWORDS Shellfish; Consumption; Recreative shellfish harvesters; Exposure assessment
∗
Résumé Ce travail fournit l’ensemble des données de consommation de fruits de mer nécessaires à une évaluation des bénéfices et/ou des risques liés à ces denrées, pour une population potentiellement forte consommatrice : les pêcheurs à pied. Le pêcheur à pied « type » du Finistère est un homme, de plus de 60 ans, marié, à la retraite, vivant dans le Finistère et consommant sa pêche. Concernant la consommation de produits exclusivement issus de leur pêche, ils en consomment environ trois fois par mois ; les huîtres et les moules sont les espèces consommées en plus grande quantité ; les coques et les palourdes sont quant à elles consommées par le plus grand nombre ; et la consommation journalière est estimée à 11,6 g par personne par jour. En ajoutant les produits achetés, il ressort qu’ils en consomment environ sept fois par mois ; que les espèces consommées en plus forte quantité sont les araignées, les moules, les ormeaux et les huîtres ; et que la consommation journalière est de 26,2 g par personne par jour. © 2010 Société franc ¸aise de nutrition. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
Summary This work describes all shellfish consumption data useful in benefit/risk assessment of shellfish consumption among a potential high consumer population: recreational shellfish harvesters. Standard shellfish harvester in Western Brittany is a man, 60 years old and older, married, retired, living in western Brittany and eating his harvest. Data on shellfish consumption only derived from recreational harvesting show a frequency of three shellfish meals by month; show that the two species consumed by most harvesters are hard shell clams and cockles; show that the two species consumed in the greatest measure (gram per person per day) are oysters
Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (A.-C. Roudot).
0007-9960/$ — see front matter © 2010 Société franc ¸aise de nutrition. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.cnd.2010.03.002
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C. Picot et al. and mussels and show that harvested shellfish consumption rate is equal to 11.6 g per person per day. Adding consumption of purchased shellfish, data show a frequency of seven shellfish meals by month; show that the species consumed in the greatest measure (gram per person per day) are spider crabs, mussels, abalones and oysters and that all sources shellfish consumption rate is equal to 26.2 g per person per day. © 2010 Société franc ¸aise de nutrition. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.
Introduction Alors que pour les nutritionnistes, l’alimentation est source de vie en apportant les éléments nutritifs indispensables à l’individu ; pour les toxicologues, elle est plutôt perc ¸ue comme un vecteur de substances chimiques et biologiques, potentiellement dangereuses pour l’homme. Les fruits de mer sont une illustration parfaite de cette dualité puisqu’ils sont une source importante de protéines de bonne qualité, de minéraux et d’acides gras essentiels tels que les oméga 3 [1,2], mais également un vecteur potentiellement important de substances toxiques du fait de leur capacité de bioaccumulation [3]. L’évaluation du bénéfice nutritionnel et/ou du risque sanitaire lié à la consommation alimentaire requiert d’estimer la quantité de substance (nutritionnelle et/ou toxique) ingérée afin de pouvoir, par la suite, les comparer aux valeurs de référence. Pour cela, il faut disposer de deux types de données : la concentration de la substance présente dans les denrées concernées et la consommation des denrées concernées [4]. Or suivant la problématique, les données de consommation sont souvent inappropriées ou inexistantes. En effet, collecter des données valides sur les habitudes alimentaires d’une population est le problème le plus complexe à résoudre avant de pouvoir réaliser n’importe quelle évaluation du bénéfice et/ou risque alimentaire [5]. L’étude proposée ici portera sur ce volet « évaluation de la consommation ». La consommation de fruits de mer de la population franc ¸aise générale est documentée dans les études INCA I et II. Mais il existe une grande disparité entre les individus en matière de consommation, aussi, il est souvent utile de cibler un sous-groupe de population spécifique qui présente des caractéristiques particulières en termes de consommation. Il peut notamment s’avérer intéressant de considérer la population la plus à risque a priori, donc soit celle qui consomme la plus grande quantité, soit celle qui consomme les produits les plus contaminés, soit les deux. L’étude franc ¸aise Calipso menée de 2003 à 2006 s’est penchée sur les forts consommateurs de produits de la mer (en consommant au moins deux fois par semaine), que ce soit poissons ou fruits de mer [3]. Notre étude cherche à cibler plus précisément les consommations des forts consommateurs récréatifs de fruits de mer. Dans ce but, nous avons choisi de nous focaliser sur un sous-groupe de population très précis : les pêcheurs à pied récréatifs finistériens parce qu’ils sont potentiellement de forts consommateurs de par leur lieu d’habitation et leur pratique : les régions côtières sont reconnues pour être surconsommatrices de fruits de mer par rapport à la moyenne nationale [6] ; parmi les régions côtières, la région Nord-Ouest est la région la plus forte consommatrice à la fois de coquillages et de crustacés frais (indices de consommation respectivement de 174 et 240, par rapport à la moyenne nationale) [7] ; outre l’aspect géographique, le fait même de pratiquer la pêche à pied, est susceptible d’engendrer,
chez les bassiers une plus forte consommation de fruits de mer que la population générale. Cela pouvant s’expliquer notamment par la gratuité de la denrée, l’aspect récréatif de l’activité, la proximité des lieux de pêche et l’aspect traditionnel ; en raison de sa localisation sur la côte atlantique, la région Bretagne constitue une région privilégiée pour la pêche à pied. Une étude sur les forts consommateurs franc ¸ais de produits de la mer montre que parmi les quatre villes franc ¸aises étudiées (le Havre, Lorient, la Rochelle et Toulon), Lorient est celle où la consommation de fruits de mer issus de la pêche à pied est la plus importante [3]. Les buts de cette étude sont donc de fournir des données précises et détaillées : sur les pratiques et les caractéristiques sociodémographiques des pêcheurs à pied ; de la consommation de fruits de mer issus de la pêche à pied ; de la consommation totale de fruits de mer (pêche et autres sources) ; des sources d’approvisionnement de fruits de mer ; des modes de consommation. Connaître et distinguer les tailles de portion et les consommations journalières issues de la pêche à pied de celles issues du commerce peut s’avérer très important, notamment lors d’une évaluation des risques. Dans le cas des denrées issues du commerce, toute contamination dépassant le seuil réglementaire entraînera une interdiction de vente. Le produit consommé ne sera jamais plus contaminé que le seuil légal, ce qui n’est pas le cas des produits issus de la pêche à pied. Dans ce cas, le contrôle sanitaire est plus faible et les fruits de mer prélevés et consommés peuvent l’être même en cas de dépassement du seuil, soit par méconnaissance de l’interdiction de pêche, soit délibérément.
Matériel et méthodes Conception de l’étude La population d’intérêt est celle des pêcheurs à pied récréatifs pratiquant cette activité dans le Finistère. Afin d’étudier la variabilité géographique, le département a été découpé en trois zones : le Nord Finistère, la Rade de Brest et le Sud Finistère. Ces zones comprenant chacune une ville principale du Finistère : Morlaix, Brest et Quimper. Le choix des sites d’intérêt dans chacune des zones a été établi selon trois critères : la présence de pêcheurs à pied ; la présence de plusieurs espèces de fruits de mer ; l’accessibilité . Pour cette étude, les fruits de mer ont été regroupés en trois catégories : les bivalves (moules, huîtres, coques, palourdes, coquilles Saint-Jacques, couteaux, praires, pétoncles, myes, tellines) ; les gastéropodes (bigorneaux, ormeaux, patelles) ; les crustacés (tourteaux, étrilles, crevettes, araignées). Parmi les différents moyens de recueil de données de consommation existants, deux ont été retenus : le questionnaire de fréquence et le carnet de consommation mensuel.
Forts consommateurs de fruits de mer De manière générale, le questionnaire de fréquence présente le grand avantage de collecter des données de consommation sur le long terme et l’inconvénient de ne pas être très précis au niveau quantitatif (notamment parce qu’il fait appel à la mémoire). Cet inconvénient peut être contrecarré en réalisant en sus un carnet de consommation, qui est une méthode d’enregistrement, prospective, ne faisant pas intervenir la mémoire. De manière concrète, le raisonnement aboutissant à ce choix repose sur le fait qu’il n’existe pas de recensement ou de base de données des pêcheurs à pied (contrairement aux pêcheurs à la ligne devant acheter un permis de pêche). Le seul moyen de cibler efficacement cette sous population est d’aller les rencontrer sur leurs lieux de pêche et de poser des questions sur leur consommation passée. Afin de ne pas décourager les participants, que ce soit avant ou pendant le questionnaire, celui-ci ne doit pas prendre trop de temps. Cela permet d’obtenir un fort taux de réponse et de remplissage des questionnaires. Après ce premier contact et avec leur accord, il est alors possible de leur confier un carnet de consommation qu’ils complètent à leur domicile. Celui-ci ayant pour but de comparer les résultats avec ceux obtenus avec le questionnaire de fréquence de manière à (in)valider les résultats et d’obtenir des données complémentaires sur la consommation du reste du foyer, sur les fruits de mer achetés, sur les provenances, ainsi que sur les modes de cuisson.
Enquête de consommation : questionnaire de fréquence Les questionnaires de fréquence ont été menés sous forme d’entretien en face-à-face sur les lieux de pêche. Ils ont eu lieu de février 2008 à février 2009 de fac ¸on à couvrir toutes les saisons de l’année dans le cas où la consommation de fruits de mer aurait un caractère saisonnier. Les entretiens ont eu lieu pour les marées ayant un coefficient supérieur ou égal à 95 (et parfois un jour avant), environ une heure avant et une heure après l’heure de basse mer. Le site d’interview et les personnes interrogées ont été déterminés aléatoirement. Chaque site a été prospecté plusieurs fois, de fac ¸on à réduire le biais de sélection des personnes interrogées. Les pêcheurs n’ont été interrogés qu’une seule fois. La durée d’entretien est d’environ dix à 15 minutes suivant le nombre d’espèces pêchées et les commentaires apportés par le pêcheur. Pour mener l’entretien, un questionnaire semi structuré a été utilisé, accompagné d’un support visuel pour aider à la détermination de la portion alimentaire. Le support a été développé uniquement pour les fruits de mer qui ne sont pas consommés « à la pièce », tels que les coques, les moules ou les bigorneaux. Pour estimer la taille de la portion, les participants avaient le choix entre trois tailles différentes de portion par espèce ou pouvaient l’estimer par eux-même. Le questionnaire était composé de quatre volets distincts : les pratiques de pêche, la consommation de fruits de mer issus de la pêche, la connaissance des interdictions et les données sociodémographiques. En fin d’entretien, le pêcheur a été sollicité pour participer au carnet de consommation.
Enquête de consommation : carnet de consommation mensuel Un carnet de consommation a été donné aux pêcheurs donnant leur accord lors des entretiens sur les lieux de pêche.
197 Le carnet est à compléter sur une durée d’un mois à compter de la date de réception. Sur ce carnet, il a été demandé aux volontaires de noter, à chaque consommation de fruits de mer : la date, l’espèce, la provenance, le type de cuisson et la quantité consommée par chaque personne du foyer. Contrairement au questionnaire de fréquence, le carnet ne tient pas compte uniquement des fruits de mer issus de la pêche à pied, mais également de ceux provenant du commerce. Le carnet permet également d’obtenir la consommation du reste du foyer et non pas seulement du pêcheur, comme c’est le cas pour le questionnaire de fréquence.
Analyse des données Pour chaque participant aux enquêtes, la consommation journalière de fruits de mer a été calculée de la manière suivante : C=
Ei ∗ P i ∗ F i
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où : • C’est la consommation journalière (exprimée en gramme par personne par jour) ; • E est la part comestible du fruit de mer (sans unité) ; • P est la taille de la portion par repas du fruit de mer (exprimée en gramme) ; • F est la fréquence de consommation du fruit de mer (exprimée en nombre par an) ; • i représente chaque espèce de fruits de mer. Les données collectées par le biais des enquêtes permettent de définir la portion par repas (notée portion dans le reste du document), la fréquence et les espèces de fruits de mer. Pour obtenir la consommation journalière, il a fallu, au préalable, déterminer la part comestible de chaque fruit de mer (que ce soit cru ou cuit). Tous les résultats présentés dans ce document sont calculés à partir des données des consommateurs uniquement. Au niveau quantitatif, ils aboutissent à déterminer la moyenne, la médiane et le 95e percentile de la taille de la portion et de la consommation journalière. Afin de comparer les consommations journalières obtenues par le questionnaire de fréquence et le carnet de consommation, ont été comparées les moyennes (t test), les médianes (test de Mann-Whitney) et les distributions (test de Wilcoxon-Smirnov).
Résultats Questionnaire de fréquence L’ensemble des données présentées dans cette section est obtenu à partir du questionnaire de fréquence. Toutes les données de consommation qui en découlent, que ce soient les tailles de portion, les fréquences de consommation et les taux de consommation ne concernent et ne décrivent que les consommations de fruits de mer provenant de la pêche à pied.
Données sociodémographiques des pêcheurs à pied Parmi les 532 pêcheurs à pied approchés, 512 (96 %) ont accepté de compléter le questionnaire de fréquence. Ce taux de refus de 4 % est très faible, il ne peut donc pas
198 biaiser les résultats. Les pêcheurs interrogés sont répartis de fac ¸on quasiment égale entre les différents secteurs d’interrogation (Nord Finistère, Rade de Brest et Sud Finistère). La proportion de femmes interrogées (38 %) est nettement plus faible que celle des hommes (62 %). Cette proportion varie notamment suivant les espèces pêchées et donc le site d’étude. La moyenne d’âge des enquêtés est de 57 ans. La dispersion est asymétrique : plus de trois quarts de la population a plus de 50 ans. Les tranches d’âge sur-représentées chez les pêcheurs à pied, par rapport à la population générale Finistérienne, sont les 60 à 69 ans et les 50 à 59 ans. Tandis que les tranches d’âge sous-représentées sont les 0 à 49 ans. Cependant, il faut noter, que selon notre protocole d’étude, n’ont été interrogés que les pêcheurs à pied adultes, considérant que les réponses des enfants, notamment concernant leur consommation n’étaient pas très fiables. Cette moyenne d’âge explique que cette population soit majoritairement composée de retraités (56 %). En ce qui concerne le lieu de résidence des pêcheurs à pied récréatifs pratiquant cette activité dans le Finistère, il faut noter qu’une forte majorité (84 %) vit dans le Finistère. Environ 30 % des participants ne vivant pas dans le Finistère proviennent des autres départements de la Bretagne, ce qui peut s’expliquer par la proximité. De surcroît, il est possible de noter qu’un peu plus de la moitié des participants ne vivant pas dans le Finistère proviennent tout de même d’un département côtier. Cela peut laisser penser qu’ils pratiquent également la pêche à pied dans leur département. De plus, environ 20 % des participants ne vivant pas dans le Finistère au moment de l’enquête sont nés dans le Finistère et la plupart du temps reviennent pêcher là où ils le faisaient étant enfants. En résumé, il ressort du volet sociodémographique que le pêcheur à pied pratiquant dans le Finistère est un homme (environ 62 %), a plus de 60 ans (58,2 %), est marié (74 %), est à la retraite (56,5 %) et habite dans le Finistère (85,3 %).
Pratiques de pêche des pêcheurs à pied En moyenne, le nombre d’années de pratique de la pêche à pied récréative est relativement élevé : 25,5 ans. Ce résultat est à mettre en parallèle avec l’âge de la population enquêtée. Cette pratique est souvent exercée depuis l’enfance, de manière continue ou alors reprise au moment de la retraite. L’expérience est forte quel que soit le lieu de résidence des personnes interrogées, cependant celles résidant dans le Finistère ont une expérience supérieure (26,4 ans en moyenne contre 20,1 ans). Un facteur primordial concernant la pêche à pied est le coefficient de marée. La majorité des participants (58 %) sortent pêcher seulement pour les marées d’un coefficient supérieur à 95. En comparant le coefficient minimal de pêche des participants résidant ou non dans le Finistère, il est intéressant de noter que les non finistériens sont les plus nombreux à pêcher uniquement pour de très forts coefficients (≥ 100). Le nombre moyen de jour de pêche par an est de 13, ce qui correspond à un peu plus d’un jour de marée par mois. Ce résultat semble cohérent, puisqu’en général, il y a une marée de fort coefficient (> 90—95) par mois. La fréquence de pêche est quasiment double pour les pêcheurs résidant dans le Finistère par rapport aux autres (14,3 jours par an versus 7,4 jours par an).
C. Picot et al. Le nombre moyen d’espèces pêchées par les pêcheurs interrogés est de 3,2. Ceux qui ne pêchent qu’une seule espèce sont en plus grande proportion les pêcheurs ne résidant pas dans le Finistère. Les deux espèces pêchées par le plus grand nombre de personnes sont les palourdes et les coques (respectivement pêchées par 75 % et 64 % des pêcheurs interrogés). Les espèces de fruits de mer pêchées varient en fonction du lieu d’interview, puisque suivant les sites, les espèces de fruits de mer présentes sont différentes. En ce qui concerne les sites de pêche, environs 40 % des participants pêchent uniquement sur le site où ils ont été interrogés. Cependant, une majorité (55,9 %) de ceux qui pêchent sur d’autres sites sont prêts à parcourir une distance supérieure à 25 km pour se rendre sur le lieu de pêche souhaité. Cela peut facilement se relier aux espèces recherchées, puisque l’ensemble des fruits de mer ne peut être trouvé sur le même site, suivant l’espèce désirée, il peut donc s’avérer nécessaire de se déplacer pour la trouver. En résumé, le coefficient de marée privilégié des pêcheurs à pied, à partir duquel ils vont pêcher est 95. La fréquence de pêche annuelle moyenne est de 13 sorties par an et environ la moitié des pêcheurs (49,8 %) ont une expérience supérieure ou égale à 21 ans. Le nombre d’espèces pêchées est en moyenne de 3,2 par pêcheur. Seulement 11,4 % des participants en pêchent une seule, tandis que plus d’un tiers en pêchent quatre ou plus. Les deux espèces pêchées par le plus grand nombre de personnes sont les palourdes et les coques (respectivement pêchées par 75 % et 64 % des pêcheurs interrogés).
Devenir de leur pêche Dans le cadre d’une évaluation des risques, il est intéressant de savoir ce que les pécheurs font de leur pêche. Il leur a été demandé si : ils consommaient leur pêche sous 48 à 72 heures (sans congélation) ; ils la congelaient ; ils la donnaient. Les participants ont eu la possibilité de choisir plusieurs des propositions, dans le cas où, par exemple, ils en mangent une partie, en congèlent une autre partie et en donnent une dernière partie. Cela explique pourquoi, pour une espèce donnée, la somme des trois pourcentages peut excéder 100 % (Tableau 1). En ne considérant que les personnes qui consomment leur pêche, il apparaît que la très grande majorité des participants (> 94 %) consomment au moins une partie de leur pêche sous 48 à 72 heures. Les fruits de mer les plus fréquemment congelés sont les palourdes (principalement sous forme farcies). De plus, la consommation de fruits de mer issus de la pêche à pied ne se limite pas aux pêcheurs à pied, puisqu’il est assez fréquent que ceux-ci partagent leur pêche (une partie tout du moins), généralement avec leur famille et leur voisinage.
Consommation de fruits de mer issus de la pêche à pied Toutes les données de consommation décrites dans cette section proviennent des questionnaires de fréquence (n = 512) et ne décrivent que les consommations de fruits de mer provenant de la pêche à pied :
Nombre de consommateurs La majorité des pêcheurs (> 95 %) consomment leur pêche, au moins en partie, hormis pour deux espèces : les couteaux et les myes. Celles-ci pouvant également être pêchées pour servir d’appâts pour la pêche à la ligne et aux casiers (Tableau 2).
Forts consommateurs de fruits de mer
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Tableau 1 Pourcentage des participants déclarant : consommer au moins une partie de leur pêche dans les 48 heures ; congeler au moins une partie de leur pêche ; et donner au moins une partie de leur pêche. Résultats issus du questionnaire de fréquence mené en face-à-face (n = 512), ayant uniquement trait aux produits issus de la pêche à pied. Le total horizontal peut être supérieur à 100 % car un pêcheur peut manger sa pêche, en donner une partie et en congeler une autre partie. Mangé dans les 48 heures (%)
Congelé (%)
Donné (%)
99,04 98,59 99,39 97,38 100,00 100,00 100,00 100,00 100,00 100,00 100,00
2,88 14,79 20,86 34,82 11,32 17,65 25,00 0,00 0,00 22,22 0,00
25,00 23,94 26,38 25,13 16,98 14,71 27,50 0,00 50,00 22,22 20,00
Bigorneau Patelle Ormeau
98,60 94,44 94,87
15,81 11,11 12,82
17,21 16,67 15,38
Crevette Tourteau Étrille Crabe vert Araignée
98,88 100,00 100,00 100,00 100,00
15,73 12,50 3,33 0,00 25,00
15,73 50,00 16,67 25,00 50,00
Huître Moule Coque Palourde Praire Pétoncle Couteau Saint-Jacques Mye Bucarde Telline
Les bivalves sont consommés par environ deux fois plus de personnes que les gastéropodes, eux-même consommés par environ deux fois plus de personnes que les crustacés.Les deux espèces consommées par le plus grand nombre de pêcheurs à pied sont les coques et les palourdes. Viennent ensuite les bigorneaux, les moules, les couteaux et les huîtres.
les gastéropodes et environ 3,5 fois plus que les crustacés (Tableau 2). Les deux espèces consommées en plus grande quantité sont les huîtres et les moules (respectivement 8,25 et 6,05 g par personne par jour en moyenne). Cela s’explique à la fois par une forte fréquence de consommation (huîtres) et une forte taille de portion (moules).
Fréquence annuelle de consommation
Mode de cuisson
De manière générale, les personnes interrogées déclarent consommer environ 38 fois par an, soit environ trois fois par mois des fruits de mer (au moins une des espèces). Les bivalves sont en moyenne consommés environ deux fois par mois. Ceux-ci sont environ consommés deux fois plus fréquemment que les gastéropodes et les crustacés (consommés en moyenne environ une fois par mois) (Tableau 2). L’espèce dont la fréquence de consommation est la plus forte (environ 16 repas par an) est l’huître ; suivent ensuite les bigorneaux, les palourdes, les myes, les coques, les patelles et les crevettes (avec environ entre dix et 12 repas par an).
Connaître les modes de cuisson peut s’avérer extrêmement précieux, par exemple dans le cas où le contaminant est affecté par la cuisson (dégradation) ou lorsqu’il est relargué dans l’eau de cuisson, etc. . . (Tableau 3). Il ressort des interrogations que les crustacés et les gastéropodes (excepté la patelle) sont uniquement consommés cuits. En revanche, pour les bivalves, les modes de cuisson sont plus variés. Les bivalves majoritairement consommés crus sont les huîtres et les praires. À l’inverse, les bivalves consommés majoritairement cuits sont les Saint-Jacques et les tellines, suivis des moules et des couteaux.
Carnet de consommation
Taille de la portion La taille de la portion décrite dans cette section correspond à la quantité comestible de fruits de mer consommée par repas, c’est-à-dire la quantité de chair, sans les coquilles (Tableau 2). En considérant les fruits de mer dans leur ensemble, la taille de la portion est de 132,2 g. Les tailles de la portion des bivalves et des crustacés sont du même ordre de grandeur (environ 140 g) ; alors que celle des gastéropodes est inférieure (environ 90 g).
Consommation journalière En considérant l’ensemble des fruits de mer, la consommation journalière moyenne est de 11,63 g par personne par jour. Les bivalves sont consommés environ cinq fois plus que
L’ensemble des résultats décrits dans cette section est calculé à partir du carnet de consommation (n = 232). Toutes les données de consommation qui en découlent, que ce soient les tailles de portion, les fréquences de consommation et les taux de consommation concernent les consommations de fruits de mer provenant de toutes les sources (pêche à pied et autres sources).
Consommation totale de fruits de mer (pêche et autres sources) Nombre de consommateurs De manière générale, les bivalves sont consommés par environ deux fois plus de personnes que les gastéropodes et
200
C. Picot et al.
Tableau 2 Nombre de consommateurs, fréquence de consommation annuelle, taille de la portion (moyenne, médiane et 95e percentile) et consommation journalière (moyenne, médiane, et 95e percentile) pour chaque espèce de fruits de mer. Résultats issus du questionnaire de fréquence mené en face-à-face (n = 512), ayant uniquement trait aux produits issus de la pêche à pied. % de consommateurs
Nombre de consommateurs
Nombre de repas par an
Taille de la portion (g)
Consommation (g/personne/jour)
Moyenne Médiane P95
Moyenne Médiane P95
Huître Moule Coque Palourde Praire Couteau Pétoncle Mye Telline Saint-Jacques
104 141 327 382 53 120 34 6 6 2
20,4 27,6 64,1 74,9 10,4 23,5 6,7 1,2 1,2 0,4
16,5 8,8 10,5 11,5 8,6 7,6 6,1 11,5 5,0 5,5
180,3 251,9 170,6 98,8 70,6 118,6 63,2 61,6 120,4 34,2
172,8 264,0 181,0 79,2 48,6 100,7 37,9 49,0 109,6 34,2
345,6 396,0 271,5 259,5 241,5 288,0 225,0 nc nc nc
8,3 6,0 4,9 3,3 1,9 2,4 1,4 2,0 1,7 0,3
3,9 4,3 2,5 1,7 0,9 1,4 0,4 1,0 1,0 0,3
33,2 17,0 17,9 12,5 9,3 6,5 5,1 nc nc nc
Bivalves Patelle Ormeau Bigorneau
503 18 39 215
98,6 3,5 7,6 42,2
24,9 10,4 5,0 12,4
144,7 78,8 292,1 40,8
132,5 31,7 233,7 32,1
271,5 10,1 nc 3,7 779,0 3,3 84,0 1,5
4,9 0,7 2,6 0,8
35,5 nc 8,5 4,8
Gastéropodes Étrille Crevette Araignée Tourteau Crabe Vert
238 60 89 4 8 4
46,7 11,8 17,5 0,8 1,6 0,8
12,8 6,7 9,5 4,0 4,3 2,4
90,7 155,3 56,0 307,5 244,4 135,5
32,1 139,0 40,8 307,5 218,0 125,1
337,5 305,8 163,0 nc nc nc
2,2 2,8 1,7 3,4 3,3 1,1
0,9 1,5 0,8 2,8 2,1 1,0
6,3 11,0 5,4 nc nc nc
Crustacés
127
24,9
10,2
142,0
97,8
442,6
2,9
1,5
12,1
Fruits de mer
510
100,0
38,2
132,2
118,9
264,0 11,6
5,5
40,4
nc : non calculable. Dans le cas où le nombre d’individus est insuffisant, le 95e percentile ne peut être calculé.
Tableau 3 Description des modes de cuisson de chaque espèce de fruits de mer. Résultats issus du questionnaire de fréquence mené en face-à-face (n = 512), ayant uniquement trait aux produits issus de la pêche à pied. Uniquemenent Cru (%)
Uniquemenent Cuit (%)
Cru et Cuit (%)
Huître Moule Coque Palourde Praire Pétoncle Couteau Saint-Jacques Mye Bucarde Telline
83,65 0,00 3,37 17,54 52,83 5,88 0,00 0,00 0,00 22,22 0,00
0,96 98,59 82,21 50,52 18,87 79,41 95,83 100,00 83,33 77,78 100,00
15,38 1,41 14,42 31,94 26,42 14,71 4,17 0,00 0,00 0,00 0,00
Bigorneau Patelle Ormeau
0,00 33,33 0,00
100,00 55,56 100,00
0,00 11,11 0,00
Crevette Tourteau Étrille Crabe vert Araignée
0,00 0,00 0,00 0,00 0,00
100,00 100,00 100,00 100,00 100,00
0,00 0,00 0,00 0,00 0,00
Forts consommateurs de fruits de mer
201
Tableau 4 Nombre de consommateurs, fréquence de consommation mensuelle, taille de la portion (moyenne, médiane et 95e percentile) et consommation journalière (moyenne, médiane, et 95e percentile) pour chaque espèce de fruits de mer. Résultats issus du carnet de consommation rempli chez soi (n = 232), ayant trait aux produits issus de toutes les sources (pêche à pied et achat). Nombre de consommateurs
% de consom- Nombre de Taille de la mateurs repas par mois portion (g)
Consommation (g/personne/jour)
Moyenne Médiane P95
Moyenne Médiane P95
Huître Moule Coque Palourde Praire Couteau Pétoncle Mye Telline Saint-Jacques
101 125 103 132 18 33 12 8 4 47
43,5 53,9 44,4 56,9 7,8 14,2 5,2 3,4 1,7 20,3
2,1 1,5 1,5 2,0 1,7 1,5 1,4 1,5 1,5 1,3
128,0 233,9 145,6 94,3 67,6 183,5 63,1 106,1 33,5 74,7
127,3 173,5 135,8 86,5 39,3 134,2 47,4 104,7 36,8 68,4
172,8 8,3 500,0 10,4 271,5 5,9 230,6 5,4 179,0 2,4 684,0 8,0 120,0 2,9 nc 5,5 nc 1,7 150,0 3,0
5,3 7,6 4,5 3,1 1,8 4,7 2,3 2,0 1,9 2,2
21,9 22,8 17,9 15,2 5,9 45,0 10,9 nc nc 8,2
Bivalves Patelle Ormeau Bigorneau
220 9 9 103
94,8 3,9 3,9 44,4
4,6 1,7 1,2 1,7
152,9 124,9 259,7 41,5
126,8 67,5 233,7 32,1
349,2 18,2 nc 5,4 nc 10,0 91,5 1,9
13,9 2,9 12,8 1,4
45,8 nc nc 5,5
Gastéropodes 107 Étrille 28 Crevette 68 Araignée 67 Tourteau 46 Crabe vert 1 Langoutsine 54 Homard 10 Gambas 4
46,1 12,1 29,3 28,9 19,8 0,4 23,3 4,3 1,7
1,8 1,9 1,4 2,0 1,6 1,0 1,5 1,4 1,0
55,5 115,1 79,0 185,9 123,7 556,0 81,5 106,1 36,6
37,8 83,4 65,2 197,1 109,3 nc 91,5 119,0 36,6
168,0 3,2 331,9 6,3 250,0 3,4 341,7 11,1 263,8 6,2 nc 18,3 146,4 4,2 nc 4,9 nc 1,2
1,6 4,7 2,1 6,7 6,9 18,3 3,0 3,9 1,2
9,9 14,6 8,7 33,7 14,4 nc 14,1 nc nc
Crustacés
150
64,7
3,0
119,3
108,6
220,2 11,7
8,7
33,7
Fruits de mer
232
100,0
7,1
133,3
113,4
257,3 26,2
22,5
61,0
nc : non calculable. Dans le cas où le nombre d’individus est insuffisant, le
par environ 1,5 fois plus de personnes que les crustacés (Tableau 4). Les cinq espèces consommées par le plus grand nombre de participants (entre 43 et 57 % des participants) sont les palourdes, les moules, les coques, les bigorneaux et les huîtres.
Fréquence mensuelle de consommation De manière générale, les personnes participant au carnet de consommation reportent consommer des fruits de mer (quels qu’ils soient) environ sept fois par mois. Les bivalves sont en moyenne consommés environ 4,5 fois par mois. Ceuxci sont consommés environ 2,5 fois plus fréquemment que les gastéropodes et 1,5 fois plus fréquemment que les crustacés (Tableau 4). Les espèces consommées le plus fréquemment sont les huîtres, les palourdes et les araignées, avec environ deux repas par mois.
Taille de la portion La taille de la portion décrite dans cette section correspond à la quantité comestible de fruits de mer consommée par repas, c’est-à-dire la quantité de chair, sans les coquilles (Tableau 4). En considérant les fruits de mer dans leur ensemble, la taille de la portion est de 133,3 g. Les tailles de la portion
95e
percentile ne peut être calculé.
des bivalves et des crustacés sont du même ordre de grandeur (respectivement de 153 et 120 g) ; alors que celle des gastéropodes est inférieure (environ 56 g). Les espèces dont les tailles de portion sont les plus importantes sont les ormeaux, les moules et les araignées (le crabe vert a été écarté du fait qu’une seule personne en consomme).
Consommation journalière En considérant l’ensemble des fruits de mer, la consommation journalière moyenne est de 26,21 g par personne par jour. Les bivalves sont consommés environ cinq fois plus que les gastéropodes et environ 3,5 fois plus que les crustacés (Tableau 4). Les espèces consommées en plus grande quantité sont les araignées, les moules, les ormeaux et les huîtres (respectivement 11,05 ; 10,41 ; 9,96 et 8,30 g par personne par jour en moyenne). Cela s’explique par une forte fréquence de consommation pour les huîtres ; par une forte taille de portion pour les moules et les ormeaux et par l’association des deux pour les araignées.
Provenance des fruits de mer Pour chaque espèce, ce pourcentage est calculé en sommant les quantités consommées issues d’une provenance particulière (exemple : pêche personnelle) puis en divisant par
202
C. Picot et al.
Tableau 5 Provenance des fruits de mer consommés exprimée pour chaque espèce, en pourcentage de la quantité consommée issu de chacune des sources. Pêche personnelle
Achat dans une grande surface
Achat dans une poissonnerie
Achat au marché
Achat directement auprès d’un ostréiculteur, pêcheur. . .
Don de la part d’un ami, famille. . .
Autre (restaurant, consommé à l’extérieur de son domicile)
Huître Moule Coque Palourde Praire Pétoncle Couteau Saint-Jacques Mye Telline
47,5 32,7 97,2 96,4 53,7 31,3 100,0 25,7 100,0 29,1
12,3 42,6 2,0 1,2 33,4 59,7 0,0 36,3 0,0 35,5
5,9 18,5 0,8 0,0 7,1 0,0 0,0 11,9 0,0 0,0
5,8 1,2 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 6,3 0,0 35,5
25,4 4,2 0,0 0,9 5,8 9,0 0,0 16,4 0,0 0,0
3,2 0,8 0,0 1,5 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0
0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 3,3 0,0 0,0
Bivalves Bigorneau Patelle Ormeau
63,4 88,3 100,0 100,0
18,5 4,9 0,0 0,0
7,6 2,8 0,0 0,0
1,8 0,8 0,0 0,0
7,3 3,2 0,0 0,0
1,2 0,0 0,0 0,0
0,1 0,0 0,0 0,0
Gasteropodes 92,9 Crevette 26,2 Tourteau 5,1 Étrille 80,3 Crabe vert 100,0 Araignée 38,9 Langoustine 6,5 Homard 44,8 Bucarde 100,0 Langouste 0,0 Gambas 0,0 Crevette grise 0,0
3,0 44,5 50,2 5,2 0,0 20,5 20,1 0,0 0,0 0,0 100,0 50,0
1,7 14,0 11,0 0,0 0,0 2,2 22,8 22,7 0,0 0,0 0,0 0,0
0,5 0,8 4,9 0,0 0,0 1,6 19,4 0,0 0,0 0,0 0,0 50,0
1,9 7,1 27,5 0,0 0,0 23,3 18,7 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0
0,0 7,4 1,3 14,6 0,0 13,6 12,5 32,5 0,0 100,0 0,0 0,0
0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0 0,0
Crustacés
33,0
25,6
7,7
4,0
17,6
12,1
0,0
Fruits de mer
56,4
19,6
7,3
2,4
9,9
4,2
0,1
la quantité totale consommée issue de toutes les sources (Tableau 5). Un peu plus de la moitié (56,4 %) des consommations totales des fruits de mer est issue de la pêche à pied. La seconde source d’approvisionnement est la grande surface (19,7 %), puis l’achat directement auprès d’un ostréiculteur ou d’un pêcheur (9,9 %), puis de l’achat en poissonnerie (7,3 %). Les gastéropodes forment la catégorie dont les consommations sont les plus largement issues de la pêche à pied (92,9 %) ; viennent ensuite les bivalves (63,5 %) puis les crustacés (33,0 %). Ces derniers ont la particularité de provenir presque autant de la pêche personnelle que de l’achat dans des grandes surfaces. Il ressort également qu’ils sont plus achetés directement auprès de pêcheurs (17,7 %) ou issus de dons (12,1 %) que les bivalves et les gastéropodes. Il est à noter que la consommation de certaines espèces est uniquement issue de la pêche à pied. C’est le cas des couteaux, des myes, des patelles, des ormeaux, des crabes verts et des bucardes. A contrario, la consommation de certaines espèces n’est quasiment pas issue de la pêche à pied (tourteaux, langoustines, langoustes, gambas et crevettes grises).
Comparaison des consommations journalières obtenues par le questionnaire de fréquence et le carnet de consommation Dans cette étude, deux méthodes de recueil d’informations ont été employées, de manière à ce que les inconvénients de l’une soient contrecarrés par l’autre. De plus, cela permet de comparer et ainsi de (in)valider les données obtenues par l’étude. Cette comparaison est effectuée : sur les données des participants ayant répondu à la fois au questionnaire de fréquence et au carnet de consommation (soit 124 volontaires) ; et sur les consommations de fruits de mer issus de la pêche à pied. Les distributions de consommation obtenues par les deux méthodes sont présentées (Fig. 1). Hormis pour les crustacés, les consommations journalières obtenues par les deux méthodes sont du même ordre de grandeur. La différence entre les moyennes (t test), les médianes (test de Mann-Whitney) et les distributions (test de Wilcoxon-Smirnov) des consommations journalières obtenues par les deux méthodes est étudiée (Tableau 6). Étant donné que la moyenne, la médiane et la distribution des consommations journalières de gastéropodes
Forts consommateurs de fruits de mer
203
Figure 1. Comparaison des consommations journalières des bivalves, gastéropodes, crustacés et l’ensemble des fruits de mer obtenues par le questionnaire de fréquence et le carnet de consommation. Cette comparaison est réalisée entre les consommations journalières (issues de la pêche) obtenues par le questionnaire de fréquence et par le carnet de consommation, des participants ayant complété les deux questionnaires.
de mer. A contrario, les consommations journalières de crustacés obtenues par le carnet de consommation sont significativement supérieures à celles déduites du questionnaire de fréquence. Cela pourrait s’expliquer par une méprise entre le participant et l’interviewer lors du questionnaire de fréquence sur la plage. Lorsqu’ils sont pêchés, ces crustacés l’étant majoritairement avec des casiers posés à partir d’un bateau, il est forte-
ne sont pas significativement différentes selon la méthode employée (p > 0,05), ces données peuvent être considérées comme très fiables. La fiabilité des données obtenues pour les bivalves est plus faible, mais acceptable, puis qu’il n’y a pas de différence significative entre les moyennes (p > 0,05) et les médianes (p > 0,01) obtenues par les deux méthodes. Cela permet de valider les données de consommation journalière de ces deux sous-groupes de fruits
Tableau 6 Comparaison des moyennes (t test), des médianes (test de Mann-Whitney) et des distributions (test de Wilcoxon-Smirnov) des consommations journalières obtenues par le questionnaire de fréquence et le carnet de consommation. Analyse effectuée sur la consommation de fruits de mer issus de la pêche à pied des volontaires ayant participé aux deux enquêtes (questionnaire de fréquence et carnet de consommation) (n = 124). p < 0,05 indique une différence significative entre les deux taux. Consommation (g/personne/jour)
n (consommateurs) Carnet de Questionnaire consom- de fréquence mation
Bivalves 98 Gastéropodes 58 Bivalves et 102 gastéropodes Crustacés 27 Ensemble des 105 fruits de mer
Moyenne
Médiane
Distribution
Carnet de Questionnaire p consom- de fréquence mation
Carnet de Questionnaire p consom- de fréquence mation
p
124 68 124
13,8 3,3 15,1
11,9 2,1 13,0
> 0,05 > 0,05 > 0,05
8,7 1,4 9,5
5,7 1,1 6,8
0,013 0,009 > 0,05 > 0,05 0,018 0,017
36 124
9,6 17,2
3,4 14,0
0,0008 7,7 > 0,05 9,8
1,6 7,3
0,002 0,005 0,007 0,007
204 ment possible qu’ils n’aient pas été déclarés comme issus de la pêche à pied, alors que dans le calendrier de consommation, ils sont comptabilisés comme « pêche personnelle ».
Discussion Comparaison des consommations journalières au niveau franc ¸ais La comparaison des consommations journalières au niveau franc ¸ais est à considérer avec précaution puisque les différentes études menées en France ne portent pas sur les mêmes populations que la notre. Ces consommations journalières de fruits de mer, de bivalves et de gastéropodes obtenues par notre étude, sont respectivement environ six, dix et 80 fois supérieures à celles obtenues pour l’ensemble de la population générale franc ¸aise [8—10]. Ce constat confirme que la population cible de notre étude est en effet, une population forte consommatrice de fruits de mer. Les consommations journalières des pêcheurs à pied peuvent également être comparées à celles obtenues pour des sous-populations repérées comme potentiellement fortes consommatrices de fruits de mer. Les femmes de notre étude ont une consommation de fruits de mer environ 1,3 fois supérieure à celle obtenue par Guldner et al. [11]. Les consommations obtenues pour les adultes de notre population sont du même ordre de grandeur que celles obtenues par Leblanc [3]. Ces comparaisons permettent de conforter nos résultats puisqu’ils sont du même ordre de grandeur que ceux obtenus pour des populations de forts consommateurs. De plus, étant légèrement supérieurs, ils confirment que les pêcheurs à pied sont bien une souspopulation de forts consommateurs. Cela leur confère une légitimité comme population cible dans le cas d’étude des bénéfices et/ou risques liés à la consommation de fruits de mer.
Conclusion Le travail présenté ici fournit l’ensemble des données de consommation nécessaires à une évaluation des risques, tant en termes de risque aigu (avec les données de taille de portion) qu’en termes de risque chronique (avec les consommations journalières). De surcroît, sont décrits avec précision les types d’espèces consommées, les modes de cuisson, les sources d’approvisionnement, et ce, pour chaque espèce de fruits de mer. L’utilisation de deux méthodes de recueil des données de consommation permet : d’étoffer les données recueillies lors de la première interrogation et ainsi d’augmenter le niveau de précision des données ; de comparer et de valider les données obtenues, ce qui leur confère un fort degré de fiabilité.
C. Picot et al. Cette étude apporte donc des données précises, détaillées et validées sur la consommation de fruits de mer, d’une sous-population spécifique que sont les pêcheurs à pied pêchant dans le Finistère. Cette population étant potentiellement forte consommatrice de fruits de mer ; et de surcroît, de fruits de mer dont le contrôle sanitaire est faible, elle en devient le sujet d’étude idéal pour évaluer les bénéfices et/ou les risques liés à la consommation de fruits de mer. Ainsi, ces résultats pourront s’avérer très utiles pour calculer les apports nutritionnels dans une évaluation des bénéfices et pour évaluer l’exposition à divers contaminants dans une évaluation des risques liés à la consommation de fruits de mer.
Conflit d’intérêt Les auteurs déclarent ne pas être en conflit d’intérêt.
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