Gynécologie Obstétrique & Fertilité 31 (2003) 471–475
THÉRAPEUTIQUE
Hernie ombilicale. Technique nouvelle de réparation avec cicatrice a minima Umbilical hernia. Repair new technique with a minimal scar C. Cannistrà a,*, J.P. Marmuse b, P. Madelenat c a
Unité de chirurgie plastique, CHU Bichat–Claude-Bernard, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France Service de chirurgie générale, CHU Bichat–Claude-Bernard, 46, rue Henri-Huchard, 75018 Paris, France c Service de gynécologie–obstétrique, CHU Bichat–Claude-Bernard, 46, rue Henri-Huchard 75018 Paris, France b
Reçu le 12 novembre 2001 ; accepté le 29 janvier 2003
Résumé Objectif. – Mettre au point et décrire une technique chirurgicale pour le traitement des hernies ombilicales de moins de 5 cm de diamètre avec une réduction des reliquats cicatriciels. Patientes et méthode. – Après avoir analysé les différentes techniques utilisées pour la réparation des hernies ombilicales, les auteurs proposent une technique pratiquée chez neuf patientes. Le traitement chirurgical prévoit l’exérèse du sac de la hernie après une incision cutanée en double M, la réparation en paletot de la paroi, la plicature des muscles droits abdominaux et la reconstruction de l’ombilic. Résultats. – Les résultats obtenus chez neuf patientes avec un recul à deux ans démontrent la validité de la technique et l’importante réduction des reliquats cicatriciels. Discussion et conclusions. – Les reliquats cicatriciels consécutifs au traitement chirurgical des hernies ombilicales sont très importants et visibles parce qu’ils sont localisés au milieu de l’abdomen. Chez le sujet de sexe féminin, la cicatrice ombilicale représente une gêne psychologique très importante. L’utilisation de la technique en double M a pour intérêt d’une cicatrice invisible et apporte un bon résultat fonctionnel. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract Objective. – Describe a surgical technique concerning the treatment of umbilical hernias that have a diameter less than 5 cm, with a reduction of scars. Patients and method. – After analysing the different techniques of umbilical hernias repair, the authors suggest a new personal technique. The surgical treatment consists in removing the hernia sack after double M incision of the umbilical skin, repairing the abdominal wall by Quenu technique, folding the abdominal muscles and reconstructing the umbilicus. Results. – The results, which are achieved on nine patients, with check up two years after, confirm the validity of the technique. Discussion and conclusions. – The scars after umbilical hernia surgical treatment are very important and visible because of their being located on the middle line of the abdominal wall. For the female patient in particular, this scar represents a great psychological annoyance. The double M technique leaves only an invisible scar with a good functional result. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Hernie ombilicale ; Chirurgie ; Cicatrice a minima Keywords: Umbilical hernia; Surgery; Minimal scar
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (C. Cannistrà). © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. DOI: 10.1016/S1297-9589(03)00113-9
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1. INTRODUCTION Les hernies ombilicales peuvent être : • congénitales, parce que présentes dès la naissance et liées clairement à un défaut de fermeture embryonnaire de la paroi. Elles sont déjà visibles chez le nouveau-né mais augmentent d’importance plus tard lors d’une éventuelle grossesse ou d’un excès pondéral. Ces formes sont associées à un diastasis des muscles droits abdominaux ; • acquises par affaiblissement du tiers supérieur de l’ombilic à cause d’une pathologie engendrant une augmentation importante de la pression intra-abdominale (obésité morbide, grossesse, tumeur intra-abdominale, ascite, intoxication tabagique,constipation, dysurie). Les hernies ombilicales peuvent avoir : • une petite taille, elles sont occupées par un glissement de la graisse sous-péritonéale, sont asymptomatiques mais déforment l’ombilic ; • une taille moyenne avec un diamètre moyen de 2 à 4 cm, elles sont occupées par la graisse omentale, sont douloureuses et déforment l’ombilic ; • ou une grande taille avec un diamètre qui dépasse 5 cm, elles sont occupées par les viscères, sont douloureuses et déforment l’ombilic de façon importante. Ces dernières réalisent de véritables éventrations qui nécessitent une approche thérapeutique différente et plus complexe [1,2]. La correction chirurgicale du défaut représente la seule possibilité thérapeutique définitive. L’abord chirurgical des hernies ombilicales a été effectué selon différents types d’incision cutanée [3–6] entraînant des cicatrices cutanées localisées au centre de l’abdomen. L’inesthétisme de cette cicatrice et le retentissement psychologique qui peut suivre sont d’autant plus importants que le sujet traité est jeune. Nous avons mis au point une technique chirurgicale qui permet le traitement des hernies petites et moyennes laissant des reliquats cicatriciels peu visibles positionnés au fond de l’ombilic.
2. PATIENTES ET MÉTHODES 2.1. Technique opératoire La technique chirurgicale que nous avons proposée prévoit trois phases : • La libération du sac herniaire et le traitement de la hernie ; • le traitement chirurgical du diastasis des muscles droits abdominaux qui est associé à la hernie ombilicale ; • la reconstruction de l’ombilic. Après avoir tracé la ligne entre la xiphoïde et le pubis, on a positionné à l’extrémité du sac herniaire, sur la peau, à 12 h et à 6 h, deux crochets de Gillis (ou deux fils de traction).
Fig. 1. Schéma du marquage cutané au niveau de l’ombilic avant l’incision cutanée. Au niveau des points A et B, les crochets de Gillis sont positionnés.
Une traction verticale sur les crochets a permis l’exposition du fond de l’ombilic et du cylindre de peau qui enveloppait la hernie. On a pratiqué sur la peau de l’extrémité du sac, à l’aide d’une lame de bistouri, une incision cutanée en double M qui devait circonscrire le fond du sac. Les points A et B de l’incision correspondaient au point où étaient positionnés les crochets (Fig. 1). Après avoir incisé la peau, on a effectué une dissection entre le sac herniaire et la peau. La dissection devait être effectuée jusqu’au collet du sac herniaire. La dissection était par la suite étendue céphaliquement et caudalement le long de la ligne blanche sur 8–10 cm et latéralement afin d’exposer les muscles droits abdominaux. Un point à l’aide d’un fil coloré était positionné sur l’aponévrose du droit abdominal latéralement au collet de la hernie, de chaque côté, afin de marquer la position où sera reconstruit le nouvel ombilic. Après avoir ouvert le sac herniaire et avoir effectué la viscérolyse, le sac était réséqué à 1 cm du collet. La fermeture de l’anneau a été effectuée par une suture en paletot selon Quénu [7]. Une suture visant à rapprocher sur la ligne blanche les berges médiales des grands droits démarrait céphaliquement à 10 cm environ de l’ancien ombilic, passait sur la suture de la hernie et s’étendait sur 6–8 cm vers le pubis. Cette plicature de l’aponévrose des grands droits a été effectuée à l’aide de Panacril 0 ou Mersutur 2/0 (Ethicon). L’enfouissement vers la cavité abdominale de la suture de la hernie ombilicale a augmenté la résistance de la paroi abdominale et a réduit la possibilité de récidive.
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Fig. 2. Schéma de l’incision cutanée en double M après traitement chirurgical de la hernie. Les fils fixés sur l’aponévrose de la paroi abdominale sont passés dans le derme des berges cutanées du double M.
Après avoir vérifié l’hémostase, on a placé quatre fils de Vicryl 3/0 sur les quatre côtés d’un rectangle tracé sur la ligne blanche au niveau du nouvel ombilic. Le rectangle a le côté majeur parallèle à la ligne blanche et mesure environ 1 cm de longueur, le côté mineur mesure environ 0,5 cm. Le rectangle a été centré sur la ligne blanche à la hauteur des fils de repère colorés qui avaient été positionnés sur l’aponévrose des droits abdominaux lors de la dissection du sac herniaire. Les quatre fils 1-2-3-4, fixés à l’aponévrose de la paroi abdominale ont été fixés au derme des berges de l’incision cutanée en double M. Le fil 1 sur le lambeau A, le 4 sur le B, le 2 sur le C et le 3 sur le D (Fig. 2). Ces points ont permis l’invagination du cylindre cutané qui avait été éversé par la hernie ombilicale. Les fils ne doivent pas être réséqués au niveau du nœud et doivent être conservés très longs (Fig. 3). Pour éviter la rétraction de la cicatrice et la possible fermeture de la cavité ombilicale reconstruite, il a été nécessaire de positionner au fond de la cavité du néombilic une petite greffe cutanée (0,5 × 0,5) pour réépithélialiser cette surface (Fig. 4). Un bourdonnet de tulle gras a été positionné dans la cavité ombilicale et fixé en parachute par les fils en vicryl qui avaient été laissés longs lors de la fermeture de la peau ombilicale (Fig. 5). L’ablation du bourdonnet a été effectuée à partir du quatrième jour postopératoire.
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Fig. 3. Les quatre fils sont laissés longs une fois serrés et noués pour permettre la fixation de la greffe cutanée.
Un drainage positionné dans le décollement a été ôté après 48 h. 2.2. Patientes Nous avons traité par cette technique entre 1998 et 2000, neuf patientes avec un âge compris entre 18 et 40 ans. Trois patientes présentaient une hernie ombilicale congénitale de taille petite et étaient de race noire et six patientes présentaient une hernie de taille moyenne apparue après grossesse. Aucun antécédent médical et chirurgical en relation avec la hernie ombilicale n’a été décelé. Aucune des patientes n’était obèse.
Fig. 4. La greffe cutanée est placée sur la surface désépithélialisée.
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Fig. 5. Un bourdonnet de tulle gras maintient en position la greffe. Le tulle gras est fixé en parachute avec les fils observés sur la Fig. 3.
3. RÉSULTATS Nous avons utilisé cette technique chez neuf sujets porteurs d’une hernie ombilicale avec un anneau qui varie entre 2 et 5 cm (Fig. 6). La durée d’intervention a été d’environ 60 minutes. Les patientes sont restées hospitalisées jusqu’à l’ablation des redons, en moyenne 48 h. Dans un cas, nous avons observé un hématome sus ombilical qui a été drainé à l’aide d’une seringue à J14 sans séquelles fonctionnelles et esthétiques. L’évolution postopératoire a été simple et le contrôle le plus long à deux ans n’a pas révélé de récidive. La qualité de la cicatrice a été satisfaisante donnant l’aspect d’un ombilic naturel (Fig. 7). Cela a été confirmé par la satisfaction des patientes qui ont observé un abdomen sans hernie et sans cicatrice. 4. DISCUSSION Chez la femme, la hernie ombilicale est souvent décelée lors d’une grossesse qui cause une augmentation de la
Fig. 6. Patiente de peau noire qui présente une hernie ombilicale d’environ 4 cm de diamètre.
pression intra-abdominale et une dilatation de l’anneau ombilical. La cure de la hernie ombilicale a été décrite par d’autres auteurs avec différentes techniques qui ont toujours engendré une cicatrice apparente au centre de l’abdomen [2,3,5,6,8] et qui ont souvent causé une déformation de l’ombilic. La technique que nous avons proposée souligne l’importance du traitement du diastasis des muscles droits abdominaux par plicature de l’aponévrose. Dans notre expérience, le diastasis des muscles droits abdominaux est souvent accompagné d’une hernie ombilicale. Le tissu fibreux de la ligne blanche étiré et affaibli par la distension secondaire à l’augmentation de la pression abdominale représente le point de faiblesse de la paroi qui est à l’origine des récidives souvent observées après la seule cure de la hernie. Le traitement du diastasis des muscles droits abdominaux par une suture étendue depuis la xiphoïde jusqu’au pubis, passant sur la fermeture en paletot de l’anneau herniaire, nous permet également de renforcer la cure de la hernie. Nous avons utilisé le Mersuture® 2/0 pour effectuer cette suture, mais l’utilisation du Panacril® à résorption lente est possible et réduit le problème d’infection des fils. Il est important de rappeler la possibilité de blessure de l’artère hypogastrique lors de la suture de l’aponévrose musculaire. Cela peut entraîner l’apparition d’hématomes sous-cutanés. Nous avons adapté à la cure de la hernie ombilicale une incision cutanée déjà décrite [9] et utilisée pour repositionner l’ombilic lors des lipectomies abdominales. Le résultat obtenu dans la cure de la hernie ombilicale par incision cutanée périombilicale en double M nous montre qu’il est possible de : • traiter un défaut de l’aponévrose abdominale et passant par une brèche cutanée qui peut être déplacée vers le haut et vers le bas, traiter un défaut des muscles abdominaux sans augmenter la dimension de l’incision cutanée ;
Fig. 7. Résultat obtenu après traitement chirurgical. Il n’y a pas de cicatrice visible, l’ombilic est de forme naturelle.
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• repositionner une cicatrice à la place d’une ancienne cicatrice. Les techniques proposées auparavant restent toujours valides et efficaces comme traitement chirurgical dans le cas des hernies avec un collet majeur de 5 cm ; mais nous pensons que chez les sujets jeunes, ou chez les enfants, il est très important de faire attention au reliquat cicatriciel de l’intervention. Ce problème est d’une extrême importance dans la chirurgie esthétique où nous sommes de plus en plus appelés à réduire l’importance et la visibilité des cicatrices. Une étude américaine a souligné l’importance de l’ombilic comme focus sexuel [10] et aujourd’hui, on observe souvent des piercing effectués pour le mettre en valeur et pour l’exhiber. La société moderne de plus en plus en quête de l’esthétisme, ne peut accepter de voir l’abdomen d’un sujet marqué d’une cicatrice déformant souvent l’ombilic et la technique proposée associe un bon résultat esthétique et fonctionnel. 5. CONCLUSION La cure chirurgicale de la hernie ombilicale présentant un collet inférieur à 5 cm peut être effectuée selon une technique qui réduit les cicatrices résiduelles. Cette attitude doit être prise en compte en particulier chez les sujets jeunes pour éviter le retentissement psycho-
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logique d’une cicatrice localisée au milieu de l’abdomen impossible à cacher. Il est important de souligner la nécessité d’effectuer un traitement conjoint du défaut de la paroi abdominale et du diastasis des muscles droits abdominaux afin de prévenir les récidives.
RÉFÉRENCES [1]
Testut L, Jacob O. Trattrato di Anatomia topografica, II volume. Torino: UTET; 1995 p.391. [2] Premont M, Clotteau JE. Hernie ombillicale de l’adulte. Encycl Med ChirTechniques chirurgicales Paris 1989:40145–54. [3] Mayo WJ. Remarks on the radical cure of hernia. Ann Surg 1899;29: 51. [4] Borges A. Reconstruction of the umbilicus. BritJPlastSurg 1975;28: 73–6. [5] Farris JM. Umbillical hernia. “Hernia”. Philadelphia: J.B. Lippincott; 1964. [6] Anson B, Mc Vay C. Surgical Anatomy, vol. I. Philadelphia: Saunders C; 1975 p.532. [7] Quénu J. Opération sur la paroi abdominale. Bull Soc Chir 1986:179. [8] Park S, Hata Y, Ito O, Tokioka K, Kagawa K. Repair of mild umbillical hernia. Ann Plast Surg 1999;42(6):634–7. [9] Cannistrà C, Pecorelli E. Umbilical restoration in abdominal dermolipectomy: A simple double-Y, double-M technique. Aesth Plast Surg 1999;23:364–6. [10] Brown ES. The umbilicus as sexual focus. Int J Psychoanal 1997;28: 577.