EMC-Hépato-Gastroentérologie 2 (2005) 307–318
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Infections bactériennes et cirrhose alcoolique Bacterial infections in alcoholic cirrhosis C. Silvain (Professeur des Universités, praticien hospitalier) *, C. Chagneau-Derrode (Praticien hospitalier) Service de gastroentérologie, hôpital de Poitiers, 350, avenue Jacques-Cœur, 86000 Poitiers, France
MOTS CLÉS Cirrhose ; Alcool ; Infection bactérienne ; Ascite ; Traitement antibiotique
Résumé Les infections bactériennes sont des complications fréquentes et graves de la cirrhose alcoolique. Leur incidence chez les malades hospitalisés se situe entre 30 et 50 %. Les infections spontanées du liquide d’ascite, associées ou non à une bactériémie, les infections urinaires et les pneumopathies sont les infections bactériennes le plus souvent rencontrées. Les infections spontanées du liquide d’ascite et les pneumopathies bactériennes ont le pronostic le plus sévère avec 30 à 40 % de décès. La survenue d’une infection bactérienne est un événement grave car elle est le témoin de la sévérité de l’insuffisance hépatique, mais aussi un facteur aggravant le pronostic de la cirrhose. Les infections spontanées du liquide d’ascite sont dues essentiellement à des germes aérobies à Gram– d’origine intestinale (60 à 80 %) surtout E. coli. La pathogénie de ces infections met vraisemblablement en jeu un phénomène de translocation bactérienne et la colonisation de l’ascite se fait par voie hématogène. L’insuffisance hépatocellulaire sévère et des protides intra-ascitiques bas sont les facteurs prédictifs de survenue de l’infection de l’ascite. Les hémorragies digestives sont aussi un facteur prédisposant et l’infection est de plus un événement favorisant la récidive hémorragique liée à l’hypertension portale. Le traitement de l’infection active est une urgence et repose sur des antibiotiques non néphrotoxiques soit par voie intraveineuse (céfotaxime), soit par voie orale (fluoroquinolone) chez les malades n’ayant pas d’encéphalopathie hépatique ou d’insuffisance rénale. La prophylaxie de l’infection est justifiée chez les malades ayant eu une première infection du liquide d’ascite et chez ceux hospitalisés en particulier pour une hémorragie digestive. Les germes responsables des septicémies sont identiques à ceux trouvés dans les infections du liquide d’ascite et leur traitement fait appel aux mêmes antibiotiques. Les infections urinaires sont surtout dues à E. coli et sont responsables de cinq à 15 % des infections du liquide d’ascite et des septicémies. Les pneumopathies et les méningites sont dues au pneumocoque mais aussi à des bacilles à Gram–. La cirrhose n’est pas, en soi, un facteur de risque de tuberculose mais le diagnostic de tuberculose péritonéale doit être évoqué systématiquement devant une évolution atypique. Grâce au diagnostic et au traitement précoces, le pronostic des infections bactériennes sévères du cirrhotique s’est amélioré mais, à terme, seule la transplantation hépatique restaure des fonctions hépatiques normales et améliore la survie. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (C. Silvain). 1769-6763/$ - see front matter © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi: 10.1016/j.emchg.2005.07.003
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KEYWORDS Cirrhosis; Alcohol; Infection; Spontaneous bacterial peritonitis; Antibiotic therapy
C. Silvain, C. Chagneau-Derrode Abstract Bacterial infections are frequent and severe complications of alcoholic cirrhosis. Their in-hospital incidence rate fluctuates between 30 and 50%. Spontaneous bacterial peritonitis (SBP) with or without bacteremia, urinary tract infections and pneumonia are the most frequent. SBP and bacterial pneumonia prognosis are the most severe (30 to 40% of death). These bacterial infections are almost always seen in the setting of advanced liver disease. Organisms normally found in the gastrointestinal tract are the predominant causative agents of SBP. The pathogenesis of these infections involves bacterial translocation and ascitis is colonised from an episode of bacteremia. Severe cellular insufficiency and low ascitis protid are predictive factors of SBP. Gastrointestinal bleeding is another predisposing factor and furthermore, infection predisposes to portal hypertension-related bleeding recurrence. Treatment of active infection is an emergency and is based on non nephrotoxic antibiotics such as IV cefotaxime or oral fluoroquinolones in patients with no encephalopathy or renal insufficiency. Antibiotic prophylaxis is justified in patients recovering from a first spontaneous bacterial peritonitis episode or admitted for variceal bleeding. Bacteremia is due to the same bacteria as spontaneous bacterial peritonitis and their treatment is based on the same antibiotics. Urinary tract infections are mainly due to E Coli and are responsible for 5 to 15% of SBP and bacteremia cases. The causative germs of pneumonia and meningitis are pneumococcus but also gram-negative organisms. When the SBP outcome is unusual the diagnosis of tuberculosi must be ruled out. Finally, early diagnosis and treatment have improved severe bacterial infections prognosis in alcoholic cirrhotic patients but survivors of SBP should be considered for liver transplantation. © 2005 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Introduction Les infections bactériennes sont des complications fréquentes et graves de la cirrhose alcoolique.1 L’incidence de ces complications infectieuses se situe entre 20 et 50 % chez les malades cirrhotiques hospitalisés.2 Les infections spontanées du liquide d’ascite (ILA) associées ou non à une bactériémie, les infections urinaires et les pneumopathies sont les infections bactériennes le plus souvent rencontrées.3 Les infections du liquide d’ascite et les pneumopathies bactériennes ont le pronostic le plus sévère avec 30 à 40 % de décès. L’infection du liquide d’ascite est la complication la plus fréquente et la plus grave. Si la guérison de l’épisode infectieux est obtenue dans 80 à 100 % des cas, la mortalité hospitalière est d’environ 30 % en rapport avec des causes non directement infectieuses comme le syndrome hépatorénal, les hémorragies digestives, l’insuffisance hépatocellulaire terminale ou le carcinome hépatocellulaire.4 Ainsi, chez le malade cirrhotique, l’infection bactérienne est responsable de plus de 25 % des décès.5 La présence ou la survenue d’une insuffisance rénale est le principal facteur prédictif de décès au cours de l’hospitalisation chez ces malades.6 Les infections bactériennes sont trouvées chez 35 à 65 % des malades cirrhotiques ayant une hémorragie digestive.7 Par ailleurs, il a été montré que l’infection est un facteur pronostique indépendant de récidive hémorragique précoce après rupture de varices œsophagiennes.8 Le pronostic à long terme reste toujours dépendant de la gravité de la maladie
sous-jacente devant faire discuter, chez certains malades, l’indication de la transplantation hépatique. Chez les malades en attente de transplantation, la fréquence des bactéries multirésistantes isolées dans les ascites infectées a augmenté au cours des dix dernières années pour atteindre près de 40 %. Chez ces malades, l’insuffisance rénale reste un facteur prédictif indépendant de mortalité.9 La survenue d’une infection bactérienne est un événement grave car elle est le témoin de la sévérité de l’insuffisance hépatique mais aussi un facteur aggravant le pronostic de la cirrhose.10 Les infections bactériennes du malade cirrhotique sont donc des urgences diagnostiques et thérapeutiques. Les traitements, en particulier ceux des ILA, sont actuellement bien codifiés qu’ils soient curatifs ou préventifs. Grâce au diagnostic et au traitement précoces, le pronostic des infections bactériennes sévères du malade cirrhotique s’est amélioré mais il ne faut pas oublier qu’à terme, seule la transplantation permet de restaurer des fonctions hépatiques normales et d’améliorer la survie. Nous envisagerons successivement les ILA, les infections urinaires, les infections pleuropulmonaires et les autres infections bactériennes moins fréquentes.
Infections spontanées du liquide d’ascite Les ILA sont une complication sévère et fréquente et surviennent chez environ 20 % des malades cir-
Infections bactériennes et cirrhose alcoolique rhotiques ayant une ascite et presque toujours chez les malades ayant une atteinte hépatique sévère. Plus de la moitié de ces infections est diagnostiquée au moment de l’hospitalisation et le reste va survenir au cours de l’hospitalisation. Chez les malades non hospitalisés, la prévalence de l’ILA est faible, inférieure à 5 % avec une incidence dépendante de la concentration intra-ascitique en protides.
Germes responsables Les ILA sont généralement dues à un seul germe qui est le plus souvent d’origine digestive.11 Des germes sont isolés seulement dans la moitié des cas même lorsque les prélèvements pour les cultures sont effectués au lit du malade. Les germes aérobies à Gram– sont les plus souvent isolés (60 à 80 %) surtout Escherichia coli (40 % à 70 %) suivi de Klebsiella (5 % à 15 %). Les ILA à cocci à Gram+ sont moins fréquentes (5 à 20 %), surtout Streptococcus pneumoniae (5 à 15 %), autres streptocoques (5 à 15 %) et staphylocoques (1 à 5 %).12 Les germes anaérobies et microaérophiles sont rarement en cause (5 à 10 %).
Pathogénie La survenue d’une ILA est liée à des facteurs généraux et à des facteurs locaux. Les facteurs systémiques dépendent des modifications immunes survenant au cours de la cirrhose favorisant d’une part la survenue de bactériémies et d’autre part l’absence d’élimination sanguine et ascitique des bactéries pathogènes. L’origine hématogène de l’ILA est la plus vraisemblable. Étant donné le type de germe mis en évidence, l’origine des germes est intestinale. Les bactéries intestinales passent à travers la barrière digestive par un mécanisme appelé translocation bactérienne. Chez le rat cirrhotique, les taux de translocation bactérienne sont élevés et le sont encore plus en cas d’ILA associée (45 à 88 %).13 Les facteurs associés à la survenue d’une translocation bactérienne expérimentale sont la pullulation microbienne, l’hypertension portale, le choc hémorragique, l’endotoxinémie, le déficit des mécanismes de défense intestinaux, l’augmentation de la perméabilité intestinale et la malnutrition.14–16 Les germes à l’origine de la bactériémie vont persister plus longtemps dans le sang en raison d’une altération du système monocytes-macrophages.17 Au cours de la cirrhose, il existe aussi une diminution de la destruction des bactéries par les polynucléaires neutrophiles en raison d’une réduction de l’activité opsonisante et du chimiotactisme associée à des taux de complément sérique abaissés. À
309 partir du sang circulant, les bactéries vont passer dans l’ascite grâce aux échanges constants de fluides entre ces deux compartiments. Une fois dans l’ascite, les bactéries ne sont pas éliminées en raison d’une altération des défenses locales intraascitiques. La diminution de l’activité antimicrobienne de l’ascite est corrélée aux taux intraascitiques de protides et de la fraction C3 du complément18 (Fig. 1). L’intestin est donc la principale source de germes, mais les infections urinaires, pleuropulmonaires et des tissus mous peuvent également être responsables d’ILA à bactéries à Gram+.
Facteurs prédisposants Les ILA surviennent presque toujours chez un malade cirrhotique ayant une insuffisance hépatocellulaire sévère.11 La probabilité de survenue d’une ILA est de 11 % à 1 an et de 15 % à 3 ans.19 Les variables prédictives de survenue d’une ILA sont un taux de protides intra-ascitique inférieur à 10 g l–1, une élévation des taux sériques de bilirubine audessus de 25 mg l–1, une élévation de l’activité sérique des aspartate aminotransférases, une baisse du temps de Quick et un mauvais état nutritionnel.19 Chez ces malades à risque, la probabilité cumulée d’avoir une ILA est respectivement de 21 % et de 29 % à 6 mois et 12 mois.20 L’incidence des bactériémies est particulièrement augmentée au cours et au décours immédiat des hémorragies digestives (65 % des cas). De plus, les infections augmentent le risque de récidives précoces du saignement.8,21 La fréquence des bactériémies est plus élevée lors des sclérothérapies de varices œsophagiennes effectuées en urgence par rapport aux endoscopies urgentes sans geste associé.22 Les ponctions d’ascite sont exceptionnellement responsables d’infection.
Manifestations cliniques et biologiques Clinique Les tableaux cliniques de l’ILA sont très variables, allant d’un tableau infectieux typique avec fièvre, frissons, douleurs abdominales, syndrome subocclusif à des formes asymptomatiques dans environ 10 % des cas. La fièvre est à peu près constante et c’est le seul signe dans près de 50 % des cas.11 Dans les autres cas, la fièvre est associée à une aggravation de l’insuffisance hépatocellulaire avec encéphalopathie hépatique, insuffisance rénale, hémorragie intestinale et choc septique.6 La plupart des malades se plaignent de douleurs abdominales diffuses avec une distension abdominale. Cependant, les douleurs peuvent être localisées ou
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Figure 1 Pathogénie de l’infection du liquide d’ascite et des bactériémies chez le malade cirrhotique (ILA). BK : bacille de Koch.
absentes, en particulier chez les malades encéphalopathes. L’apparition d’une encéphalopathie, une altération de la fonction rénale ou une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles doit faire rechercher systématiquement une ILA. Le choc septique est rapidement fatal en quelques heures malgré un traitement adapté. Biologie sanguine Une hyperleucocytose avec augmentation des polynucléaires neutrophiles est le plus souvent présente mais il peut exister une neutropénie.23 Une augmentation des taux sériques de bilirubine et une diminution du temps de Quick sont habituelles.11 Une insuffisance rénale le plus souvent fonctionnelle survient dans un tiers des cas.6 En cas d’infection sévère sont souvent associées une acidose métabolique, une hypoxie et une hypoglycémie. Biologie de l’ascite Dès que l’on suspecte une ILA, une ponction d’ascite exploratrice doit être effectuée. De même, tout malade cirrhotique ascitique hospitalisé doit avoir une ponction d’ascite exploratrice dès son admission et répétée au 2e ou 3e jour en cas de doute vu le risque augmenté d’ILA en cours d’hospitalisation. L’ILA se définit par un chiffre de poly-
nucléaires neutrophiles supérieur à 250/mm3 et la présence d’un germe. Cependant, même avec la mise en culture du liquide d’ascite au lit du malade dans des flacons à hémoculture, les cultures sont négatives dans près de 50 % des cas d’ILA. Les ascites neutrocytiques à culture négative sont considérées équivalentes aux ILA et doivent être traitées de façon identique. La même bactérie est isolée dans l’ascite et dans le sang dans 30 à 40 % des cas.11 Dans près de 10 % des cas, on trouve une culture d’ascite positive sans signe clinique, ni biologique d’ILA. Ces bactériascites sont liées à un passage transitoire de bactéries dans l’ascite. Ces bactériascities réellement asymptomatiques évoluent rarement vers l’ILA et ne justifient pas une antibiothérapie.24 Cependant, il est recommandé d’effectuer un contrôle du liquide d’ascite à 48 à 72 heures. Dans certains cas, le compte de polynucléaires neutrophiles ne peut être obtenu en urgence en dehors des heures ouvrables du laboratoire. L’alternative proposée pourrait être l’utilisation de bandelettes réactives qui ont une bonne valeur prédictivie positive.25 Chez les malades sans signe clinique d’infection et hospitalisés pour prise en charge d’une ascite réfractaire avec paracentèse programmée, la prévalence de l’ILA est inférieure à 4 %. Ainsi, dans cette population,
Infections bactériennes et cirrhose alcoolique on pourrait utiliser la bandelette pour dépister l’infection sans mise en culture systématique du liquide d’ascite.26 Chez les autres malades, en cas de bandelette positive après avoir effectué la mise en culture du liquide d’ascite, un traitement antibiotique pourrait être proposé et en cas de résultat négatif, un contrôle serait effectué. Cependant, cette attitude n’est actuellement pas recommandée et nécessite d’être validée.
Diagnostic différentiel Il faut toujours évoquer le diagnostic d’ILA chez un malade cirrhotique devant une fièvre, une encéphalopathie, une insuffisance rénale sans facteur déclenchant évident ou un choc non lié à une hypovolémie. La survenue de douleurs abdominales doit faire rechercher systématiquement une ILA. Devant l’un quelconque de ces signes, il est nécessaire de faire des prélèvements sanguins et ascitiques pour la cytologie et les cultures. Dans dix à 15 % des cas, il peut s’agir d’une péritonite secondaire liée à une infection intra-abdominale ou de contiguïté comme la perforation d’un organe creux ou de la vésicule ou une fuite au niveau d’une hernie ombilicale. Il faut suspecter une péritonite secondaire devant un chiffre de leucocytes intraascitiques supérieur à 10 000/mm3, des protides intra-ascitiques supérieurs à 10 g l–1. Le meilleur critère en faveur étant l’isolement de plusieurs germes à la culture du liquide d’ascite avec la présence de bactéries anaérobies.27 Un scanner abdominal est nécessaire dans cette situation pour rechercher la cause de cette péritonite.
Pronostic Depuis le début des années 1990, il existe une amélioration des taux de guérison de l’ILA passant de 50 à 87 % à 77 à 92 % et de la survie hospitalière passant de 38 à 74 % à 62 à 83 %24,28–32 Cette amélioration du pronostic est liée au diagnostic plus précoce d’infection dès la présence de plus de 250 polynucléaires neutrophiles dans l’ascite et à l’utilisation d’une antibiothérapie plus efficace, adaptée et non néphrotoxique. La réduction de la durée de l’antibiothérapie et la possibilité de traitement par voie orale permettent également de diminuer les durées d’hospitalisation et ainsi de réduire les infections nosocomiales. L’insuffisance rénale est le plus fort facteur prédictif indépendant de la mortalité hospitalière.6 Les autres facteurs sont le degré d’insuffisance hépatocellulaire évalué par le score de Child-Pugh ou par les taux sériques de bilirubine et du temps de Quick,31 le taux de polynucléaires neutrophiles dans l’ascite,11
311 une hémorragie digestive récente8 et l’âge.6,31 Après la guérison d’un premier épisode d’ILA, la probabilité de récidive de l’ILA est de 69 % à 1 an et de 74 % à 2 ans avec une probabilité de survie à 1 an de 38 %.33
Traitement Dans le traitement de l’ILA, on considère le traitement de l’infection active, la prophylaxie secondaire pour prévenir la récidive de l’ILA et la prophylaxie primaire pour prévenir le premier épisode d’ILA. Traitement de l’infection active (Fig. 2) L’ILA est une infection sévère nécessitant un traitement urgent. Il ne faut pas attendre le résultat des cultures, l’identification du germe et l’antibiogramme pour débuter l’antibiothérapie. Des hémocultures et un examen cytobactériologique des urines doivent être pratiqués avant d’instituer le traitement. Dans un premier temps, l’antibiothérapie est empirique en raison de la gravité de l’infection. Les antibiotiques utilisés doivent diffuser rapidement dans l’ascite avec des concentrations intra-ascites supérieures aux concentrations minimales inhibitrices des germes habituellement rencontrés comme les bacilles à Gram– et les cocci à Gram+ et en particulier les streptocoques. En 1985, l’antibiothérapie des infections sévères du cirrhotique s’est complètement modifiée,29 montrant que le céfotaxime était plus efficace que l’association ampicilline-tobramycine avec des taux de guérison de 86 % avec le céfotaxime sans aucun cas de néphrotoxicité comparé à 61 % avec l’association ampicilline-tobramycine avec 7 % de néphrotoxicité. À partir de cette date, le céfotaxime est devenu l’antibiotique de référence du traitement des ILA. Chez le malade cirrhotique, la demi-vie d’élimination du céfotaxime est allongée, permettant d’utiliser des doses de 2 g en i.v. toutes les 12 heures. Un traitement de 5 jours a une efficacité identique à celle d’un traitement de 10 jours.34 D’autres antibiotiques utilisables par voie i.v. et ayant des taux de guérison comparables à ceux du céfotaxime peuvent être utilisés : amoxicillineacide clavulanique (amoxicilline : 1 g, acide clavulanique : 0,2 g toutes les six heures ; 85 % de guérisons),30 ceftriaxone (1 g toutes les 12 heures ; 76 % de guérisons),35 céfonicide (2 g toutes les 12 heures ; 94 % de guérisons).36 L’aztréonam (0,5 g toutes les 8 heures) a été montré aussi efficace que le céfotaxime (1 g toutes les 6 heures) en termes de guérison, survie et tolérance mais il était responsable de 15 % de surinfections à streptocoques. Il ne
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Figure 2 Arbre décisionnel. Suspicion d’infection spontanée du liquide d’ascite. PNN : polynucléaire neutrophile.
doit donc pas être prescrit en première intention.28 De même, les aminosides ne doivent pas être utilisés en raison de leur néphrotoxicité accrue chez le cirrhotique. Outre les traitements par voie parentérale, les traitements par voie orale apparaissent également efficaces et permettent d’éviter une voie i.v., porte d’entrée potentielle des infections hospitalières. Dans une première étude non randomisée, la péfloxacine par voie orale (400 mg 24 h–1) permettait la guérison de 87 % des épisodes d’ILA.37 Cette étude était confirmée par Navasa et al.31 qui ont comparé l’ofloxacine par voie orale (400 mg 24 h–1 et adapté à la fonction rénale) au céfotaxime par voie i.v. (2 g par 6 heures et adapté à la fonction rénale) avec une efficacité identique en termes de guérison (84 vs 85 % respectivement). La survie hospitalière était de 81 % dans chaque groupe. Outre la diminution du risque nosocomial, l’antibio-
thérapie par voie orale autorise un traitement en ambulatoire, après la ponction d’ascite de contrôle à 48 ou 72 heures, afin de vérifier la normalisation de la cytologie. L’antibiothérapie par voie orale n’est cependant envisageable que chez les malades n’ayant ni encéphalopathie, ni insuffisance rénale, ni choc, ni hémorragie digestive. La durée du traitement est controversée mais il apparaît qu’un traitement de 5 jours est aussi efficace qu’un traitement prolongé de 10 jours et c’est la durée de traitement qui est actuellement préconisée pour le céfotaxime et une durée moyenne de 7 jours pour l’amoxicilline-acide clavulanique en i.v. (1 g × 4 j–1) avec un relais oral possible après 24 h et l’ofloxacine per os ou i.v. (200 mg × 2 j–1).38 Une ponction d’ascite exploratrice est effectuée 48 à 72 heures après le début de l’antibiothérapie afin de vérifier que le chiffre de polynucléaires neutrophiles est inférieur à 250 mm–3 et l’antibiotique est
Infections bactériennes et cirrhose alcoolique stoppé 2 à 3 jours après ce contrôle. Lorsqu’une ILA survient chez un malade ayant une antibioprophylaxie par fluoroquinolones, les bacilles à Gram– et les streptocoques résistants sont les plus souvent identifiés39 et sont habituellement sensibles au céfotaxime. Les staphylocoques sont sensibles à la vancomycine.40 La survenue ou l’existence d’une insuffisance rénale étant le principal facteur prédictif de décès chez les malades ayant une ILA, il était particulièrement justifié de prévenir l’apparition de cette insuffisance rénale en cas d’infection. Dans une étude prospective, randomisée, les malades ont été traités par céfotaxime seul ou associé à deux perfusions i.v. d’albumine à la dose de 1,5 g kg–1 le 1er jour et 1 g kg–1 le 3e jour. Dans le groupe de patients ayant reçu l’albumine, le taux d’insuffisance rénale était significativement diminué (10 vs 33 %), ainsi que la mortalité hospitalière (10 vs 29 %) et la mortalité à 3 mois (22 vs 41 %). Les malades ayant le plus bénéficié de cette perfusion d’albumine étaient ceux ayant une atteinte hépatique plus sévère et ceux ayant déjà une insuffisance rénale.41 En raison de ces résultats, la perfusion d’albumine selon le même schéma est recommandée.38 Antibioprophylaxie de l’infection du liquide d’ascite La gravité du pronostic à distance et la fréquence des récidives des ILA doivent faire envisager un traitement prophylactique. Ce traitement est indiqué chez les malades atteints de cirrhose ayant un risque élevé d’infection. On distingue la prophylaxie secondaire pour les malades ayant guéri d’un premier épisode d’ILA et la prophylaxie primaire pour les malades n’ayant jamais eu d’ILA mais ayant des facteurs de risque d’infection. Les ILA étant liées à des germes essentiellement d’origine intestinale, il est apparu rationnel d’utiliser des antibiotiques non absorbables ou peu absorbés permettant une décontamination sélective du tube digestif.13 Une des premières études a été celle de Rimola et al.42 dans laquelle les cirrhotiques traités par antibiotiques non absorbables (gentamycine+ vancomycine+ nystatine ou néomycine+ colistine+ nystatine) présentaient cinq fois moins de septicémies et d’ILA que les malades non traités. Actuellement, la norfloxacine est la fluoroquinolone recommandée à la dose de 400 mg j–1.38 Cet antibiotique assure une décontamination intestinale sélective avec une tolérance correcte chez le malade cirrhotique. Sa diffusion systémique est faible, mais permet d’obtenir des concentrations plasmatiques suffisantes pour s’opposer à la survenue de bactériémies à entérobactéries.13 Dans les études
313 cliniques, la sélection de bactéries résistantes est rare, elles ne restent que transitoirement dans les selles et ne donnent pas lieu à des infections systémiques chez le malade porteur.13,42 Prophylaxie secondaire Chez les cirrhotiques ayant guéri d’une ILA, la norfloxacine (400 mg 24 h–1), comparée au placebo, diminue la probabilité de récidive des ILA à bacilles à Gram– (20 vs 68 %) sans différence pour les autres germes.43 Dans cette étude comme dans les autres études d’antibioprophylaxie, pour un suivi sous traitement de 6 mois, la mortalité et la survenue d’autres types d’infections n’étaient pas significativement différentes. La survie à 5 mois était cependant significativement améliorée dans la métaanalyse.44 Par ailleurs, cette prophylaxie par norfloxacine a été montrée coût-efficace.45 Les recommandations actuelles sont une antibioprophylaxie secondaire avec la norfloxacine jusqu’à disparition de l’ascite ou jusqu’à la transplantation lorsqu’elle est indiquée. Prophylaxie primaire Le risque d’ILA est élevé chez les malades ayant des protides intra-ascitiques inférieurs à 15 g l–1. Trois études ont montré une diminution significative du taux d’ILA sans modification significative de l’incidence des infections extrapéritonéales et de la mortalité. Rolachon et al.46 ont montré que l’incidence des ILA était six fois moindre chez les cirrhotiques traités par ciprofloxacine (750 mg une fois par semaine pendant 6 mois) par rapport aux malades non traités. Le traitement par norfloxacine (400 mg 24 h–1) durant l’hospitalisation des cirrhotiques ascitiques diminue aussi significativement l’incidence des ILA.12 Dans une autre étude, le cotrimoxazole donné 5 jours par semaine pendant 3 mois diminue significativement le risque d’ILA et de bactériémies.47 La prophylaxie primaire n’a pas été recommandée dans la dernière conférence de consensus.38 Il serait cependant intéressant de cibler certains malades à très fort risque d’infection mais également les malades en attente de transplantation pour lesquels, si le taux de protides intra-ascitiques est inférieur à 10 g l–1, l’antibioprophylaxie est justifiée. Chez les malades cirrhotiques ayant une hémorragie digestive, le risque d’infection étant élevé, une antibiothérapie apparaît justifiée.8 Les antibiotiques utilisés sont soit la norfloxacine (400 mg × 2 j–1 pendant 7 jours) avec quatre fois moins d’infections dans le groupe traité,48 soit l’ofloxacine (400 mg j–1 pendant 10 jours) associé à l’amoxicilline-acide clavulanique (1 g) avant chaque endoscopie effectuée pendant la période hémorragi-
314 que avec trois fois moins d’infections dans le groupe traité,49 soit avec la ciprofloxacine (200 mg j–1 pendant 10 jours) associée à l’amoxicilline-acide clavulanique (1 g j–1 pendant 10 jours) avec quatre fois moins d’infections dans le groupe traité.50 Une méta-analyse a mis en évidence une réduction significative de l’incidence des infections sévères ainsi qu’une augmentation significative de la survie à court terme.7 Le schéma recommandé est la norfloxacine à la posologie de 400 mg 12 h–1 pendant 7 jours.38 Points forts Les infections du liquide d’ascite doivent impérativement être traitées. Le céfotaxime peut être utilisé par voie intraveineuse à la dose de 2 g i.v. toutes les 12 heures. La péfloxacine par voie orale à la dose de 400 mg 24 h–1 pendant 5 jours constitue une alternative en évaluation.
Septicémies La prévalence des septicémies chez le malade cirrhotique est de l’ordre de quatre à 20 % avec une incidence moyenne de 4,5 % par an, soit cinq fois supérieure à celle constatée chez les malades hospitalisés non cirrhotiques.5,51 Quelle que soit l’étiologie de la cirrhose, l’incidence est identique mais elle augmente en fonction de la gravité de la cirrhose avec un taux de 17 % dans les cirrhoses sévères.52 Dans plus de la moitié des cas, cette septicémie survient au cours de l’hospitalisation.51 Les germes habituellement en cause sont identiques à ceux responsables des ILA. Il s’agit surtout de bactéries à Gram– dans près de 75 % des cas.21 Une porte d’entrée urinaire, pulmonaire ou digestive est trouvée dans 30 à 60 %. La mortalité globale est de 50 % avec une mortalité liée pour moitié à la bactériémie et pour moitié à l’insuffisance hépatocellulaire. La mortalité augmente en fonction de la gravité de la cirrhose avec un taux de près de 70 % dans les cirrhoses sévères.52 La fièvre est presque constante au cours des bactériémies et peut être isolée dans près de 50 % des cas.51 Devant l’apparition d’une encéphalopathie hépatique sans facteur déclenchant évident, d’une aggravation de l’insuffisance hépatocellulaire ou d’un choc non dû à une hypovolémie, il faut toujours rechercher une bactériémie et une porte d’entrée infectieuse. Il existe le plus souvent une hyperleucocytose à polynucléaires neutrophiles mais une leucopénie
C. Silvain, C. Chagneau-Derrode n’est pas rare.23 Dès qu’une bactériémie est suspectée, il faut effectuer des hémocultures, un examen cytobactériologique des urines et une radiographie pulmonaire. Le traitement antibiotique doit être débuté dès que l’infection est suspectée sans attendre le résultat des hémocultures. Il repose, comme pour les ILA, sur les céphalosporines de troisième génération, les fluoroquinolones et l’amoxicilline-acide clavulanique. La durée du traitement n’est pas différente de celle des malades non cirrhotiques. Il faut rappeler que les aminosides ne sont pas indiqués chez le malade cirrhotique. Une antibiothérapie est préconisée chez les malades cirrhotiques ayant une hémorragie digestive car elle permet de réduire le taux d’infections et la mortalité.53 Il a été montré que l’antibiothérapie par ofloxacine 12 h–1 en i.v. pendant 2 jours suivie de 200 mg 12 h–1 per os diminuait significativement le risque de récidive hémorragique en diminuant les infections bactériennes, mais sans amélioration de la survie.54 Le traitement retenu est la norfloxacine à la dose de 400 mg × 2 j–1 per os pendant 7 jours.38 Chez certains malades cirrhotiques, des infections à des germes résistants aux quinolones mais aussi à d’autres antibiotiques peuvent survenir en conséquence à l’antibioprophylaxie. Chez les malades ayant une antibioprophylaxie de plus courte durée, le risque de bactéries résistantes est plus faible.55 Chez les malades ayant une infection par un germe résistant aux quinolones, la gravité de l’infection n’est pas différente de celle liée à un germe sensible et les germes restent sensibles au céfotaxime55 ou à l’amoxicilline-acide clavulanique.56
Infections urinaires Leur prévalence est près de dix fois supérieure à celle de la population générale. La répartition des germes en cause ne diffère pas de celle des malades non cirrhotiques, E. coli étant le germe le plus souvent trouvé, vient ensuite Enterococcus faecalis.57 Cette infection urinaire serait à l’origine de 5 à 15 % des septicémies,51 15 % des ILA5 et quelques cas isolés d’endocardites. Une prévalence plus élevée liée à l’âge et à la gravité de l’insuffisance hépatocellulaire est discutée.58 Dans une étude récente,57 elles représentent 19 % des infections. Leur pathogénie, mal connue, pourrait faire intervenir un trouble fonctionnel de la vidange vésicale dû à l’ascite. Elles sont souvent peu symptomatiques, la fièvre étant le principal signe clinique. Le traitement n’est pas différent de celui des malades non cirrhotiques.
Infections bactériennes et cirrhose alcoolique
Complications infectieuses pleuropulmonaires Empyème L’infection spontanée du liquide pleural, empyème spontané bactérien, correspond le plus souvent à une infection d’un hydrothorax préexistant. L’infection est définie par un nombre de polynucléaires supérieur à 250/mm3 et par une culture positive ou par un nombre de polynucléaires neutrophiles supérieur à 500/mm3, ou un tableau clinique compatible.59 Une ILA n’est pas toujours associée.59 Les germes le plus souvent mis en évidence sont E. coli et Klebsiella pneumoniae.59 Le traitement repose sur l’antibiothérapie : ceftriaxone et/ou céfotaxime et ampicilline ou amoxicilline-acide clavulanique.60 La gravité de l’empyème spontané bactérien avec une mortalité hospitalière de 20 %59 et le risque de récidive doivent faire discuter la transplantation hépatique.
Pneumopathies Chez les malades cirrhotiques non alcooliques, les infections pulmonaires ne sont pas différentes de celles observées dans la population générale. Chez le cirrhotique alcoolique, leur prévalence est estimée entre 6 et 10 %.3 Cette prévalence est probablement liée directement à l’alcoolisme. Le principal germe responsable et associé à l’alcoolisme est le pneumocoque. Cependant le malade alcoolique, cirrhotique ou non, serait particulièrement exposé aux pneumopathies à bacilles à Gram– et notamment Klebsiella pneumoniae, Haemophilus influenzae et E. coli et ce, en raison de la forte prévalence de la flore Gram–. Ces pneumopathies nosocomiales sont favorisées par l’intubation trachéale, le tamponnement œsophagien ou l’encéphalopathie hépatique. La mortalité serait de 30 à 40 %, liée à l’alcoolisme et à la gravité de l’insuffisance hépatocellulaire.5 En raison de la fréquence des infections à Haemophilus, l’amoxicilline-acide clavulanique, voire le ceftriaxone doivent être préférés à l’amoxicilline seule ou aux macrolides.
315 de Listeria monocytogenes. Chez les malades ayant un diabète associé à la cirrhose, une prédominance d’infection à Klebsiella pneumoniae a pu être mise en évidence.62 Le tableau clinique est dominé par un coma fébrile sans raideur méningée dans 30 % des cas. La sévérité du pronostic est liée au germe causal et à la sévérité de l’insuffisance hépatocellulaire avec une mortalité de 80 % de mortalité chez les malades ayant une cirrhose sévère.61 Comme pour les autres infections, le pronostic est aussi lié à la rapidité du traitement. Dès qu’une méningite est suspectée, après avoir effectué la ponction lombaire, une antibiothérapie empirique doit être débutée. Étant donné les germes responsables, un traitement par ampicilline, associé à une céphalosporine de troisième génération, est recommandé. La prévalence des endocardites bactériennes chez le malade cirrhotique n’est pas plus importante que celle de la population générale.63 Dans une étude rétrospective, l’atteinte de la valve mitrale était le plus souvent en cause et le germe était le plus souvent un Staphylococcus aureus.64 Le pronostic était très sévère avec 80 % de décès. Les infections cutanées sont fréquentes, trouvées dans 12 % des cas.3 Elles sont liées à une augmentation du liquide interstitiel ou à une distension des tissus cutanés et sous-cutanés. Les cocci à Gram+ sont le plus souvent en cause et un traitement antibactérien chez les malades cirrhotiques doit couvrir ces germes. La cirrhose, en particulier énolique, peut être trouvée comme facteur favorisant de certaines monoarthrites ou oligoarthrites bactériennes. Les atteintes du genou sont le plus souvent décrites. Dans les atteintes sternoclaviculaires, un abcès rétrosternal peut être associé et un scanner thoracique est indiqué. Les germes mis en évidence sont surtout des streptocoques et Escherichia coli mais aussi plus rarement : Yersinia enterocolitica, Brucella mellitensis et Pasteurella. L’antibiothérapie n’est pas différente que celle prescrite chez le malade non cirrhotique. L’indication du drainage chirurgical peut être proposée chez certains malades.65,66
Tuberculose Autres infections Les méningites bactériennes sont rarement rapportées chez le malade cirrhotique même si l’alcool est un facteur prédisposant. Les méningites à pneumocoque étaient décrites comme étant les plus fréquentes5 mais une étude récente61 trouve une prédominance de bacilles à Gram–, surtout E. coli et
Dans les études épidémiologiques, la cirrhose n’apparaît pas en tant que facteur de risque. L’alcoolisme est trouvé chez 20 à 40 % des malades tuberculeux, mais fait partie intégrante des conditions socioéconomiques, nutritionnelles ou géographiques liées à la tuberculose. Pour les péritonites tuberculeuses, la prévalence de la cirrhose varie entre 5 et 40 %.67 Le diagnostic de tuberculose
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C. Silvain, C. Chagneau-Derrode
péritonéale est difficile car les signes cliniques et les caractéristiques biochimiques et cytologiques sont peu spécifiques. Le dosage de l’activité adénosine déaminase n’est pas un test assez sensible chez les cirrhotiques pour le diagnostic de tuberculose péritonéale.68 Le « gold standard » reste la culture du liquide d’ascite ou du péritoine obtenu par laparoscopie. Cependant, plusieurs semaines sont nécessaires pour les résultats des cultures, entraînant un retard au traitement. Le diagnostic doit être évoqué chez le malade cirrhotique ascitique avec une altération de l’état général, une fièvre persistante et une augmentation du chiffre de polynucléaires, supérieure à 500/mm3, sans prédominance de polynucléaires neutrophiles ne répondant pas à l’antibiothérapie à large spectre.68 La réponse aux agents antituberculeux des malades cirrhotiques ayant une tuberculose péritonéale est habituellement bonne. La posologie de l’isoniazide et de la rifampicine doit être adaptée à l’insuffisance hépatocellulaire avec un contrôle des concentrations sériques.
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