Cancer/Radiothérapie 7 (2003) 166–171 www.elsevier.com/locate/canrad
Enquête
Irradiation corporelle totale en France au cours des 20 dernières années Total body irradiation in France in the past twenty years S. Hoffstetter a,*, C. Marchal a, P. Bordigoni b, le groupe ICT 1 b
a Centre Alexis-Vautrin, avenue de Bourgogne, 54511 Vandoeuvre-les-Nancy, France Hôpital d’enfants, centre hospitalier universitaire (CHU) de Brabois, 54511 Vandoeuvre-les-Nancy, France
Reçu le 2 septembre 2002 ; accepté le 23 décembre 2002
Résumé Afin de faire le point sur l’activité et les techniques d’irradiation corporelle totale en France, le groupe des radiothérapeutes de centres a adressé un questionnaire à tous les services de radiothérapie des Centres de lutte contre le cancer ou des hôpitaux publics effectuant ce type d’irradiation. Trente-six questionnaires ont été envoyés et 31 centres ont répondu. Trois n’en pratiquent pas. Cinq centres n’ont pas répondu. Les résultats portent sur l’activité des 28 centres qui ont accepté de nous répondre de façon claire et détaillée. Ces résultats ont été présentés à la réunion des radiothérapeutes de centres en janvier 2000. Un total de 10 630 irradiations corporelles totales a été répertorié ; entre 850 et 900 irradiations corporelles totales sont réalisées chaque année depuis 1995. Les irradiations corporelles totales non fractionnées, dont la fréquence diminue, ne sont actuellement utilisées que dans cinq centres. Pour les irradiations corporelles totales fractionnées, les techniques commentées ici sont celles pratiquées en 1999, au moment de l’envoi du questionnaire. La majorité (78 %) des équipes utilisent des accélérateurs linéaires. Les résultats de la synthèse de ces données sont présentés sous forme de tableaux. En 2002, les irradiations corporelles totales non fractionnées sont d’indication exceptionnelle et les irradiations corporelles totales sont généralement fractionnées en six séances à raison de 2 Gy j–1 avec ajout de protections pulmonaires limitant la dose entre 6 et 11 Gy selon les centres et la pathologie. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Abstract A review of the activity and techniques of total body irradiation (TBI) in France in the last 20 years is presented. In order to have on overall view of the activity and techniques of total body irradiation in France, the group of cancer centre radiation oncologists sent a questionnaire to all the cancer centres or public hospitals radiotherapy departments dealing with this treatment. Thirty-six questionnaires were sent and thirty-one departments answered. Three departments do not offer this treatment. Five departments did not answer. Results, therefore, concern the activity of the 28 departments that agreed to give detailed and clear answers. A total of 10 630 TBIs have been documented, 850 to 900 TBI have been done each year since 1995. Single fraction TBIs are used in only five centres and are being progressively abandonned. For multiple-fraction TBIs, the techniques described here are the ones used in 1999, at the time the questionnaires were sent. A majority (98%) of
1
Liste des participants, par ordre selon le nombre de patients traités : T. Girinsky, institut Gustave-Roussy, Villejuif ; I. Martel-Lafay, centre Léon-Bérard, Lyon ; Y. Belkacémi, hôpital Tenon, Paris ; JP. Lebourgeois, hôpital Henri-Mondor, Créteil ; P. Richaud, institut Bergonié, Bordeaux ; MA Mahé, centre René-Gauducheau, Nantes ; C. Alzieu, institut Paoli-Calmettes, Marseille ; A. Pons, centre Claudius-Regaud, Toulouse ; JM. Cosset, institut Curie, Paris ; B. Prévost, centre Oscar-Lambret, Lille ; M. Urbajtel, hôpital d’Argenteuil, Argenteuil ; M. Bolla, hôpital A.-Michallon, Grenoble ; GM. Jung, centre Paul-Strauss, Strasbourg ; C. Kerr, centre Paul-Lamarque, Montpellier ; B. Vie, centre François-Baclesse, Caen ; Y. Graic, centre Henri-Becquerel, Rouen ; E. Leprise-Fleury, centre Eugène-Marquis, Rennes ; JL. Achard, centre Jean-Perrin, Clermont-Ferrand ; P. Pabot du Chatelard, centre Paul-Papin, Angers ; JL. Lagrange, centre Antoine-Lacassagne, Nice ; J. Merrer, hôpital du Val-de-Grâce, Paris ; O. Le Floch, hôpital Bretonneau, Tours ; P. Maingon, centre Georges-F.-Leclerc, Dijon ; JP. Malhaire, hôpital Auguste-Morvan, Brest ; T. Schmitt, hôpital Bellevue, St Etienne ; TD. Nguyen, centre Jean-Godinot, Reims ; JL. Floiras, centre René-Huguenin, St Cloud et la collaboration de JP. Vernant, groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris et des physiciens de chaque service. * Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (S. Hoffstetter). © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. DOI: 10.1016/S1278-3218(03)00005-2
S. Hoffstetter et al. / Cancer/Radiothérapie 7 (2003) 166–171
167
the teams used linear accelerators. The collected data are synthesised in tables. Nowadays, single fraction TBIs are only indicated in exceptional cases. Most of the TBIs are fractionated in six twice-daily fractions with pulmonary shielding to limit the dose between 6 and 11 Gy depending on departments’ protocols and pathologies. © 2003 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Irradiation corporelle totale ; Dose unique ; Dose fractionnée ; Dose pulmonaire Keywords: Total body irradiation; Single fraction; Multiple-fraction; Pulmonary dose
1. Introduction
de centre hospitalier régional (CHR) ou de centre hospitalier universitaire (CHU) (Amiens, Besançon, Poitiers, Mulhouse et Marseille) n’ont pas répondu. Les résultats portent sur l’activité des 28 centres qui ont répondu au questionnaire. Dans un second temps, après la réunion de synthèse des résultats du 21 janvier 2000, il a été demandé à chaque site de détailler précisément la forme des caches pulmonaires pour chaque situation clinique.
Afin de faire le point sur l’activité et les techniques d’irradiation corporelle totale en France utilisées depuis le début des années 1980, le groupe des radiothérapeutes de centres a adressé un questionnaire à tous les services de radiothérapie des Centres de lutte contre le cancer ou des hôpitaux publics effectuant ce type d’irradiation. Ce questionnaire avait pour objectif de connaître les différentes techniques actuellement utilisées et souvent spécifiques de chaque centre et de faire le point sur cette activité en France au cours des 20 dernières années.
3. Résultats Un total de 10 630 irradiations corporelles totales a été effectué dans ces 28 centres durant la période allant d’avant 1980 à 1998 (Tableau 1). Certains centres ont eu des difficultés à recenser de façon précise et exhaustive cette activité, surtout avant 1990 et certaines réponses, trop vagues en ce qui concerne le fractionnement ou les années, n’ont pas été prises en compte. Pour un tiers (3455 patients), le type de greffe (allo ou auto) n’est pas précisé. La répartition de cette activité, par centre, sur 20 ans, est hétérogène, en moyenne de
2. Patients et méthodes À partir de l’annuaire des radiothérapeutes de l’Acrim [8] (annexe 1), nous avons recensé 36 centres spécialisés dans la pratique des irradiations corporelles totales auxquels nous avons envoyé un questionnaire. Trois centres ne pratiquent pas d’irradiations corporelles totales. Cinq services recensés Tableau 1 Récapitulatif de l’activité irradiations corporelles totales en France sur 20 ans Année avant 1980 1980 1981 1982 1983 1984 1985 1986 1987 1988 1989 1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998 Total 10630
ALLO DU 1 12 30 26 36 62 50 34 44 22 17 21 16 13 16 19 18 12 4 23 476
DF
3 24 41 61 117 159 171 169 170 159 164 221 204 183 224 239 253 243 2805
Total 1 12 33 50 77 123 167 193 215 191 187 180 180 234 220 202 242 251 257 266 3281
AUTO DU 2 5 12 9 21 28 33 40 31 25 21 36 30 44 41 36 32 22 7 17 492
DF 4 4 12 18 56 76 103 121 113 129 130 202 237 268 267 395 435 452 380 3402
Total 2 9 16 21 39 84 109 143 152 138 150 166 232 281 309 303 427 457 459 397 3894
SAI DU 100 42 23 68 85 98 134 133 115 100 108 93 99 99 76 66 59 69 53 55 1675
DF
7 17 54 47 56 74 114 151 158 177 149 208 158 158 128 124 1780
Total 100 42 23 68 92 115 188 180 171 174 222 244 257 276 225 274 217 227 181 179 3455
Total Total par année DU 103 103 63 59 72 65 139 103 208 142 322 188 464 217 516 207 538 190 503 147 559 146 590 150 669 145 791 156 754 133 779 121 886 109 935 103 897 64 842 95 2643 10630
DU : ICT à dose unique de 7,5 à 10 Gy ; DF : ICT à dose fractionnée ; AUTO : autogreffe, ALLO : allogreffe, SAI : Sans autre indication.
Total DF 4 7 36 66 134 247 309 348 356 413 440 524 635 621 658 777 832 833 747 7987
168
S. Hoffstetter et al. / Cancer/Radiothérapie 7 (2003) 166–171 Tableau 2 Débits de dose et doses pour les irradiations corporelles totales non fractionnées
Fig. 1. Répartition de l’activité ICT déclarée par site.
380 par an, avec des extrêmes de 36 à 1251 (Fig. 1). Les données issues du centre René-Huguenin (Saint-Cloud) sont incomplètes du fait d’une indisponibilité des données antérieures à 1993. L’activité annuelle durant ces vingt dernières années a constamment augmenté avec une inversion du type de greffe sur les 7175 dossiers où elle a été précisée (Fig. 2). Si dans les années 1980, les indications d’allogreffes étaient prépondérantes, depuis une dizaine d’années une augmentation des indications d’autogreffe est constatée. Six équipes utilisent les photons du cobalt (dont trois appareils exclusivement dédiés aux irradiations corporelles totales : Créteil, institut Curie, Tenon), quatre équipes utilisent un accélérateur de particules avec des photons de 4 à 6 MV, trois des faisceaux de photons de 10 MV et les autres des faisceaux de photons de plus de 15 MV, généralement dégradés par une plaque de plexiglas. En dehors du centre Bergonié (Bordeaux), qui utilise une technique spécifique (arcthérapie) [11] et une distance source–peau (DSP) de 128 cm, les autres services traitent par deux faisceaux opposés à une DSP variant de 280 à 464 cm, pour une moyenne de 380 cm. La majorité (90 %) traite par des faisceaux antéropostérieurs par rapport au patient qui est en décubitus dorsal pour sept sites et en décubitus latéral dans 18 sites.
Fig. 2. Répartition allogreffe/autogreffe.
Centre
Dose (Gy)
Marseille Nancy Nice (arrêt en 1985) Argenteuil Créteil Tenon
8 7,5 10 10 10 10
Débit de dose par rapport à 5 cGy min–1 < > < < < < >
Dose sous cache pulmonaire 4 7 8 8 8 8
Les irradiations corporelles totales non fractionnées de 7,5 à 10 Gy, dont la fréquence diminue, ne sont plus, en 1999, utilisées que dans cinq centres ; celui de Nice a arrêté en 1985. Quatre centres traitent avec un débit de dose inférieur à 5 cGy min–1 et deux à un débit supérieur, les doses délivrées varient de 7,5 à 10 Gy (Tableau 2). Elles étaient dues à des raisons logistiques et à l’inclusion de patients dans des protocoles anciens actuellement fermés. Pour les irradiations corporelles totales fractionnées, les techniques commentées ici sont celles pratiquées en 1999, au moment de l’envoi du questionnaire. Quatre équipes effectuent une simulation classique, 22 la simulation au poste de traitement ; douze équipes utilisent le scanneur pour effectuer les mesures d’épaisseur des différentes parties du corps en particulier au niveau pulmonaire pour un calcul prévisionnel de la dose. Cinq centres utilisent une contention spécifique. Les caches pulmonaires sont personnalisés pour tous les sites. Ils sont dessinés sur les clichés de simulation ou sur les gammagraphies. Leur forme est spécifique selon le service et le type d’hémopathie traitée (Fig. 3). Seul le centre de Tours utilise des compensateurs. Le détail des caches pulmonaires utilisés a été précisé par 12 centres. Les centres de Lyon et de l’hôpital Tenon ont des caches pulmonaires différents selon que l’irradiation corporelle totale est réalisée pour le traitement d’un lymphome ou celui d’une leucémie ou d’un myélome. La dose maximale pulmonaire varie de 8 à 11 Gy selon la dose délivrée au corps entier et selon les sites. Des caches laryngés ou au niveau des extrémités sont utilisés par certaines équipes. Des compléments de dose peuvent être délivrés dans le crâne, l’abdomen, la rate ou les testicules selon les indications et la technique d’irradiation utilisée. Les contrôles du positionnement des caches sont obtenus par des gammagraphies. Seul le centre de Reims effectuait en 1999 ses contrôles par imagerie portale électronique. La correction de positionnement reste manuelle pour tous les sites. Depuis 1999, d’autres centres utilisent l’imagerie portale. Celle-ci permet un contrôle continu pendant la totalité de la séance. Le calcul prévisionnel de la dose d’irradiation est pratiqué pour 22 sites, le point de référence est abdominal et se situe à hauteur de L4. Tous les services effectuent des mesures in vivo au moyen de 4 à 10 diodes (moyenne 5), placées au point
S. Hoffstetter et al. / Cancer/Radiothérapie 7 (2003) 166–171
169
Fig. 4. Leucémies : doses pulmonaires.
de centrage et au minimum en regard des poumons et de la tête. Huit d’entre eux utilisent en complément des mesures in vivo par pastilles thermoluminescentes. Il y a une bonne corrélation entre les mesures par semiconducteurs (données immédiates) et par thermoluminescence (données retardées). Pour le traitement des leucémies, si les irradiations non fractionnées étaient fréquentes avant 1990, c’est essentiellement le fractionnement d’irradiation en six séances en 3 jours qui devient la référence (18 services sur 26), six autres sites irradient à la dose de 12 Gy en 4 ou 5 fractions et 2 ou 4 jours, les 2 derniers délivrent 12,5 Gy. La dose pulmonaire sous les caches varie plus, mais se situe à 8–9 Gy. (Fig. 4). Dans les myélomes, la dose totale est plus faible, certainement du fait d’une étude prospective qui évaluait l’intérêt d’une greffe après irradiation corporelle totale à 8 Gy en 4 séances et 4 jours (17 centres sur 25). Sept sites ne participant pas à cet essai irradient à 12 Gy en 4 à 6 fractions et 2 à 5 jours, un seul délivre 10 Gy en 8 séances et 4 jours. La dose pulmonaire sous les caches est de 8 Gy dans la très grande majorité des cas (Fig. 5). Il n’y a plus actuellement de protocole thérapeutique proposant une irradiation corporelle totale dans cette pathologie. Pour les lymphomes, 16 centres sur 24 délivrent 12 Gy en 3 à 6 fractions et 2 à 3 jours ; 4 participant au protocole LNH 94, actuellement fermé, irradient à une dose de 10 Gy en 5 fractions et 3 jours ; pour les 4 autres sites les doses varient de 8 à 12 Gy. La dose pulmonaire sous les caches est comprise entre 7,5 et 9,5 Gy dans la grande majorité des cas (Fig. 6).
Fig. 3. Doses et caches pulmonaires selon l’indication de l’irradiation corporelle totale.
Dix-huit services imposent une présence médicale systématique au cours du traitement. Pour quatre autres, le radiothérapeute n’est présent que pour la mise en place des caches. Un physicien est systématiquement présent pendant l’irradiation corporelle totales dans 25 sites sur 28.
170
S. Hoffstetter et al. / Cancer/Radiothérapie 7 (2003) 166–171
Fig. 5. Myélomes : doses pulmonaires.
Fig. 6. Lymphomes : doses pulmonaires.
4. Discussion Le précédent rapport français sur l’activité irradiations corporelles totales, publié en 1987, faisait état de 1499 patients traités [2,4]. Le travail actuel avait pour objectif d’actualiser ces données en 2000 devant la croissance des indications. Bien que non-exhaustive, l’étude montre l’importance croissante des indications et si ce type d’irradiation ne représente que quelques patients pour certains services, les conséquences pourraient, à terme, être importantes lorsque l’on considère le pourcentage de la population globale irradiée sur la totalité du corps. Les aspects techniques généraux ont été peu modifiés au cours des années dans chaque service. Hormis Bordeaux, qui irradie avec une technique d’arcthérapie [11], tous les autres
centres traitent par deux faisceaux opposés avec quelques variantes sur le nombre de points de calcul [3,5,6]. Les diverses techniques avaient été discutées par Quast en 1987 [10] et par Leer et al., en 1990 [9]. Le nombre de dosimètres varie entre trois et dix sur chaque face. L’abdomen, point de centrage, les poumons et l’encéphale sont indispensables, les mesures au niveau des membres servent à documenter la distribution de la dose pour corréler à un éventuel signe clinique. Le nombre de patients irradiés avant autogreffe augmente plus rapidement que celui des patients irradiés pour allogreffe sur les 2/3 de la série. Les indications d’autogreffes concernent principalement des maladies (tumeurs solides, lymphomes hodgkiniens et non hodgkiniens) dont le conditionnement ne comporte qu’une chimiothérapie lourde et le myélome dont les indications sont en augmentation. Dans la leucémie aiguë les indications en situation autologue diminuent fortement. La dose pulmonaire est toujours réduite en interposant des caches placés partiellement durant l’irradiation afin de minimiser le risque de complications pulmonaires [1]. Il n’y a pas de consensus sur la forme de ces caches ou le fait d’irradier ou non la clavicule selon qu’il s’agisse de lymphomes ou leucémies; en cas de lymphome, les caches sont plus facilement réduits au niveau des hiles pour irradier le médiastin. Selon les équipes, d’importantes différences sont notées en ce qui concerne la dose pulmonaire acceptable ; certaines équipes, comme celle de Nantes, ont réduit cette dose à 8 Gy à la suite d’études systématiques de la fonction respiratoire [12]. D’autres limitent cette dose à 6 Gy afin d’être sûr de n’avoir aucune pneumopathie radique. Cependant, certaines équipes, comme celle de Nancy, délivrent 11 Gy car elles estiment que le risque de récidive peut être en partie lié à une trop forte réduction de dose au niveau thoracique [1]. L’équipe de Nantes [12] a montré que le taux de complications pulmonaires augmentait en fonction de la position du patient (décubitus dorsal–décubitus latéral) et de l’énergie utilisée (15 MV–9 MV) ; il n’y a pas de lien avec la dose et les patients ont reçu 8 Gy en 1 fraction et 9 Gy en 6 fractions. Par ailleurs, la dernière étude de l’institut Gustave-Roussy a montré que la réduction de la dose pulmonaire de 8 à 6 Gy entraînait une augmentation significative du taux de rechute de la maladie [7]. La dose pulmonaire et à un moindre degré, la forme des caches pulmonaires mériteraient un débat avec les hématologues. Les indications d’irradiation corporelle totale pourraient s’étendre pour des doses uniques plus faibles. Les greffes allogéniques après conditionnement non myélo-ablatif sont en augmentation. Actuellement, dans le protocole en cours de la Société française de greffe de moelle, 4 conditionnements sont prévus. Un seul comporte une irradiation corporelle totale à 2 Gy associée à de la fludarabine. Ce type de conditionnement est actuellement réservé aux sujets de plus de 50 ans ce qui ne modifie que peu le nombre absolu d’irradiations corporelles totales, puisque la plupart des greffes sont
S. Hoffstetter et al. / Cancer/Radiothérapie 7 (2003) 166–171
administrées à des patients de moins de 50 ans. Aussi, il est probable que progressivement, la plupart des centres, y compris pédiatriques, abandonne les conditionnements myéloablatifs.
171
semblait le mieux indiqué. Le recensement n’a pas la prétention d’être totalement exhaustif sur tous les sites. Il est vrai que si des sites sont absents, cela ne devrait pas remettre en cause la conclusion car le nombre d’irradiations corporelles totales non décomptées sera faible et donc marginal.
5. Conclusion L’irradiation corporelle totale demande plusieurs heures de présence aux médecins, physiciens et manipulateurs pour chaque patient. Cette enquête a permis un état des lieux en 2000 bien qu’elle n’ait pas été totalement exhaustive par manque de transmission des données par certains services. Le fichier national des greffes de moelle est complémentaire. Ces techniques hautement spécialisées sont actuellement mal valorisées par le PMSI (Programme de médicalisation du système d’information) si le patient n’est pas hospitalisé dans l’établissement où se déroule l’irradiation mais le nombre élevé de patients et la technicité doivent les faire mieux prendre en charge. Les différences les plus importantes entre services sont observées pour les doses pulmonaires et peut-être également la forme des caches. Ce point mériterait une étude spécifique (complications, rechutes) afin d’optimiser la dose pulmonaire. Dans le proche avenir, il semble que le nombre d’irradiations corporelles totales augmente mais qu’incluse dans un conditionnement non myéloablatif la dose soit limitée à 2 Gy. Annexe 1 L’annuaire de l’Acrim recense de façon exhaustive tous les services de radiothérapie de France. Il est actualisé régulièrement par les services eux-mêmes à la demande des auteurs. Notre but est de connaître l’activité de chaque service de radiothérapie, la technique et les doses utilisées pour les irradiations corporelles totales et c’est pourquoi cet annuaire, même s’il n’est apparemment pas exhaustif, nous
Références [1]
Aletti P. Summary of the discussion on lung shielding. J Eur Radiother 1982;4:255–6. [2] Aletti P, Daly N, Bey P. Irradiations corporelles totales en vue de greffe de moelle osseuse. Résultats d’une enquête nationale sur les protocoles suivis et les conditions de leur réalisation, 2e partie : aspects dosimétriques. J Eur Radiother 1987;8(2):90–3. [3] Aletti P, Noel A, Bey P, Hoffstetter S. Total body irradiation technique at Nancy. J Eur Radiother 1982;4:202–3. [4] Daly N, Bey P, Aletti P. Irradiations corporelles totales en vue de greffe de mœlle osseuse, Résultats d’une enquête nationale sur les protocoles suivis et les conditions de leur réalisation, 1re partie : aspects médicaux et logistiques. J Eur Radiother 1987;8(2):85–9. [5] Dutreix A, Bridier A, Briot E, Dutreix J. Technique and dosimetry of TBI at Villejuif. J Eur Radiother 1982;4:204–7. [6] Ginestet C, Dutou L, Lacroze M. Dosimetry and techniques of total body irradiation at Lyon. J Eur Radiother 1982;4:200–1. [7] Girinsky T, Socie G, Ammarguellat H, Cosset JM, Briot E, Bridier A, et al. Consequences of two different doses to the lungs during a single dose of total body irradiation: results of a randomized study on 85 patients. Int J Radiat Oncol Biol Phys 1994;30(4):821–4. [8] Laugier A, Truong LHT. Annuaire de la cancérologie/radiothérapie des imageries médicales en France 1, cancérologie/radiothérapie, ISSN 1242.3327. [9] Leer JWH, Broerse JJ, De Vroome H, Noordijk EM, Dutreix A. Techniques applied for total body irradiation. Radiother Oncol 1990; 18(Suppl. 1):10–5. [10] Quast U. Total body irradiation: Review of treatment techniques in Europe. Radiother Oncol 1987;9(2):91–106. [11] Richaud P, Chemin A, Cowen D, Landriau S, Marit G, Reiffers J. Irradiation corporelle totale en arcthérapie : aspects techniques et dosimétriques. Bull. Cancer Radiothérapie 1993;80:70–5. [12] Thomas O, Mahe M, Campion L, Bourdin S, Milpied N, Brunet G, et al. Long term complications of total body irradiation in adults. Int J Radiat Oncol Biol Phys 2001;49(1):125–31.