La mucoviscidose : transition de l’enfant à l’adulte

La mucoviscidose : transition de l’enfant à l’adulte

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Table ronde Mucoviscidose (2)

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La mucoviscidose : transition de l’enfant à l’adulte Cystic fibrosis: transition from child to adult

www.sciencedirect.com Mots clés : Mucoviscidose, Maladie chronique, Adolescence, Réseaux de soins

F. Brémont1*, M. Mittaine1, A. Martin-Blondel1, J.-L. Rittié1, E. Mas1, L. Tetu2, M. Murris2 1CRCM enfant Toulouse, pneumologie-allergogie, Hôpital des Enfants CHU Toulouse, 330, avenue de Grande-Bretagne, TSA 70034 - 31059 Toulouse cedex 9, France 2CRCM adulte Toulouse, Hôpital Larrey, 24, chemin de Pouvourville, TSA 30030, 31059 Toulouse cedex 9, France

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râce à une prise en charge globale et pluri-disciplinaire, le pronostic de la mucoviscidose ne cesse de s‘améliorer. L’organisation mise en place en France en 2001, avec la création des Centres de Ressources et de Compétences pour la Mucoviscidose (CRCM), travaillant étroitement dans le cadre de réseaux régionaux avec les soignants libéraux de proximité, a largement participé à cette amélioration. Ainsi, la très grande majorité des patients sont actuellement suivis dans un CRCM. Un peu plus de 40 % des patients sont âgés de plus de 18 ans [1], et « l’équilibre » en nombre de patients suivis dans les CRCM pédiatriques et les CRCM Adultes est bientôt atteint.

1. Pourquoi un transfert La poursuite de la prise en charge en milieu pédiatrique des jeunes adultes n’est pas souhaitable. L’environnement médical pédiatrique n’y est plus adapté. De plus, ces patients présentent des problématiques spécifiques, auxquelles les pédiatres sont moins habitués à être confrontés que les médecins d’adultes (entrée dans le milieu du travail, suivi obstétrical…).

2. Quel avenir pour ces futurs adultes La spécificité du travail des équipes pédiatriques et adultes est désormais différente. Le suivi post greffe, l’accompagnement de fin de vie, sont maintenant de la responsabilité des équipes adultes, alors que le dépistage de la maladie, l’anticipation des complications, l’acquisition de l’autonomie sont de la responsabilité des pédiatres. Le rôle des pédiatres est de préparer ou « armer » au mieux les patients à leur future vie d’adulte. Pour cela, les pédiatres doivent travailler avec en tête un certain nombre de réalités : – d’abord l’âge de décès de ces patients. Sur les dernières données publiées, l’espérance de vie à la naissance était de 47 ans, et l’âge moyen de décès des patients était de 24 ans en 2005 en France [1]. Néanmoins, le pronostic à l’échelon individuel est très variable et dépend surtout de l’identification du profil évolutif de chaque patient, même s’il peut y avoir des accidents de parcours ; * Auteur correspondant. e-mail : [email protected]

– ces patients présentent un handicap certain. Sur le plan fonctionnel 75 % des patients de plus de 18 ans ont un VEMS inférieur à 80 %, dont un tiers ont un VEMS inférieur à 40 % ! Sur le plan anthropomorphique, ces patients ont une taille (exprimée en Z score) de -0,77, et à l’entrée au CRCM Adultes présentent un poids (exprimé en Z score) pour les hommes de -1,09 et pour les femmes de -0,65 ; – certaines complications deviennent plus fréquentes avec l’allongement de la durée de vie ; le diabète concerne ainsi presque un tiers des patients ; – enfin en termes d’intégration sociale, on cite souvent la possibilité de mener à bien une grossesse chez ces jeunes femmes (25 grossesses en France par an), mais il ne s’agit que d’une réalité partielle. En effet, en termes de mode vie : 59 % vivent chez leurs parents, 20 % vivent seules et 19 % en couple ; 40 % travaillent, dont la moitié seulement à temps complet, et 40 % environ poursuivent des études. Leurs revenus sont pour plus de la moitié des aides sociales.

3. À quel moment L’expérience montre que l’âge optimal pour le transfert de la prise en charge de ces patients chroniques, et conformément aux définitions de la pédiatrie, est de 18 ans. Il faut cependant adapter le moment du transfert à chaque patient. Idéalement celui-ci doit se faire en période de stabilité de la maladie. Il est plus difficile en cas de maladie sévère et évolutive. Il existe au moment du transfert une augmentation du nombre de visites : dans l’expérience du CRCM Adultes de l’hôpital Cochin ce nombre augmente de 3,8 visites l’année précédente à 5,7 l’année suivante [2]. Un changement de vie est souvent un bon moment, comme l’entrée en faculté, le début d’une activité professionnelle, l’installation d’une vie en couple ou un déménagement.

4. Vers quel CRCM Adulte 4.1. Un centre Adulte Les patients qui connaissent parfaitement leur maladie, sont exigeants vis-à-vis de leurs soignants en termes de compétences, de disponibilité, d’écoute. Il existe un véritable examen de passage

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F. Brémont et al.

pour que s’établisse une réelle confiance, même si le transfert est bien préparé. Ces difficultés peuvent être majorées lorsque l’organisation et la prise en charge du centre Adulte sont peu « rodées » ; ce qui était parfois le cas dans des centres avec de petits effectifs. Cet argument peut être soutenu pour le maintien de centre mixte, mais avec l’augmentation démographique des patients adultes, les centres mixtes devraient progressivement disparaître. Enfin, il importe de favoriser une prise en charge globale et de ne pas multiplier les intervenants. Cette prise en charge avec un médecin dit « référent » est importante. Le pneumologue et l’interniste, qui sont souvent les médecins d’adultes impliqués dans cette pathologie, doivent être avant tout des spécialistes de la mucoviscidose et reconnus comme tels par les patients.

4.2. Des liens étroits entre CRCM enfants et CRCM adultes Lorsque les contacts sont étroits et réguliers entre le CRCM enfants et le CRCM Adultes, la manière de travailler, le savoir-faire, les protocoles, l’organisation deviennent souvent très proches [3]. Certains correspondants peuvent être même identiques (diabétologue, ORL, …). Le dossier patient (informatisé) peut être le même et poursuivi à l’âge adulte. Tous ces éléments sont autant de liens visibles par les patients, ce qui facilitera la confiance dans leur nouvelle équipe soignante. Il en sera de même pour les correspondants libéraux qui parfois seront toujours les mêmes et recevront des informations homogènes.

5. Comment ? 5.1. Fixer un cadre Cette préparation concerne à la fois l’adolescent et ses parents. Le transfert adulte doit être préparé de longue date. Connaître l’existence d’un centre Adultes c’est déjà se préparer, et reconnaître aussi que le patient deviendra un adulte. Ce qui parfois n’a pas toujours été intégré par les familles avec la notion d’une pathologie mortelle à brève échéance. Préciser très longtemps à l’avance la période ou l’âge, auquel se fera ce transfert, c’est permettre également à chacun de pouvoir s’y préparer.

5.2. Acquisition de l’autonomie Intégrer le centre Adultes est le témoin de l’acquisition d’une certaine autonomie. Il y a donc un transfert progressif dans la gestion de la maladie à effectuer par les parents au profit du futur patient adulte. Au moment de l’adolescence, l’acquisition de cette autonomie peut se heurter au conflit parents-enfants par refus de l’autorité parentale souvent observé à cet âge. Il s’agit de plus d’une période où l’on préfère cacher ses différences de peur d’être rejeté, et donc de cacher sa maladie. De fait, il s’agit d’un

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moment où l’observance est parfois médiocre. L’apprentissage de l’autonomie doit donc débuter dès l’enfance ; les parents doivent encourager leur enfant dès que possible à participer activement aux soins. Le jeune patient sera de plus en plus l’interlocuteur des soignants y compris dans les choix et projets thérapeutiques. Dès 12-14 ans il est important de garder un temps de consultation privilégié entre l’adolescent et son médecin en l’absence de ses parents. Ainsi préparé, c’est souvent l’adolescent qui proposera lui même d’aller vers un centre Adultes. Ce projet est parfois vécu avec inquiétude par les parents qui jusqu’à présent s’étaient très fortement impliqués dans la prise en charge de leur enfant. Cette crainte peut être limitée par la démonstration de l’adolescent de l’acquisition de son autonomie à se soigner et par un accompagnement des parents lors de l’entrée au centre Adultes. Les parents sont alors souvent présents lors des premières visites au CRCM adultes, mais aidés par la confiance en la nouvelle équipe, leurs venues s’espacent rapidement.

5.3. Les moyens Avec l’expérience, outre le fait d’en parler très longtemps à l’avance, la préparation concrète va se faire selon les modes de fonctionnement de chaque CRCM (types de relations établies entre les centres enfants et adultes, distance géographique,…). Il peut s’agir de la venue en pédiatrie d’un membre de l’équipe Adultes, d’une visite du CRCM adultes organisée avec les patients et les parents, de la remise d’une plaquette d’informations. Après le transfert il peut parfois y avoir un accompagnement par un membre de l’équipe pédiatrique ; néanmoins cela peut apporter une certaine confusion pour les patients, et il est très important de fixer une date précise de changement d’équipe et de médecin référent.

6. Conclusion L’objectif des pédiatres n’est donc pas d’amener ces patients au centre Adultes en « état de perdition », mais de transférer des patients autonomes, dans le meilleur état physique possible et le mieux armé possible pour s’intégrer dans le monde adulte !

Références 1. Registre Français de la Mucoviscidose. Bilan des données 2005 de l’ONM. Vaincre la Mucoviscidose Paris 2007 (http://www.vaincrelamuco.org/e-upload/pdf). 2. Duguépéroux I, Tamalet A, Sermet-Gaudelus, et al. Clinical changes of patients with cystic fibrosis during transition from pediatric to adult care. J Adolesc Health 2008;43:459-65. 3. Wallaert B, Turk D. La mucoviscidose : transition de l’enfant à l’adulte. Les enjeux et les défis. Rev Mal Respir 2002;19:401-3.