Le cancer colorectal, physiopathologie et principaux symptômes

Le cancer colorectal, physiopathologie et principaux symptômes

dossier Le cancer colorectal Le cancer colorectal, physiopathologie et principaux symptômes Marianne PICARD-CROGUENNEC Hépato-gastroentérologue Clini...

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dossier Le cancer colorectal

Le cancer colorectal, physiopathologie et principaux symptômes Marianne PICARD-CROGUENNEC Hépato-gastroentérologue Clinique François-Chénieux, 18 rue du Général-Catroux, 87000 Limoges, France

Le cancer colorectal est le deuxième cancer le plus meurtrier après celui des poumons dans les pays occidentaux. Le dépistage joue un rôle fondamental dans sa détection précoce, évoluant en général à partir d’un polype bénin. La symptomatologie est typique avec des troubles digestifs plus ou moins importants qui imposent une consultation médicale dès qu’ils deviennent chroniques. Le pharmacien d’officine peut jouer un rôle essentiel de conseil pour prévenir les facteurs de risque. © 2018 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés

Mots clés - cancer colorectal ; côlon ; polype ; rectum ; symptôme digestif

Colorectal cancer, physiopathology and main symptoms. Colorectal cancer is the second most deadly form of cancer after lung cancer in western countries. Screening plays a crucial role in its early detection, evolving generally from a benign polyp. The symptomatology is typical with more or less serious digestive conditions which require medical attention as soon as they become chronic. The community pharmacist can play a key role in providing advice for preventing the risk factors. © 2018 Elsevier Masson SAS. All rights reserved

Keywords - colon; colorectal cancer; digestive symptom; polyp; rectum

A

vec environ 45 000 nouveaux cas par an en France, le cancer colorectal se situe au troisième rang chez l’homme (24 000 cas contre 48 000 pour le cancer de la prostate et 32 000 pour celui du poumon) et à la deuxième place chez la femme (21 000 cas) derrière le cancer du sein (59 000 cas). Il est responsable d’environ 18 000 décès par an et la survie à cinq ans est de 63 % [1].

Du polype au cancer Le cancer du côlon se développe toujours à partir d’un polype bénin, une excroissance évoluant au niveau de la muqueuse colique. Tous les polypes ne dégénèrent pas (seulement un sur cent), mais ce risque augmente avec leur taille (un sur dix lorsqu’elle excède plus de 1 cm). Classiquement, il s’agit d’un adénocarcinome développé à partir des glandes de Lieberkühn qui sécrètent le mucus de la paroi colique.

Cellules dysplasiques

Adresse e-mail : [email protected] (M. Picard-Croguennec).

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✦ Le premier stade est la transformation de cellules normales du côlon en cellules dysplasiques bénignes qui constitueront le polype. Celui-ci peut être pédiculé ou sessile selon sa forme. Sa taille varie de quelques millimètres à plusieurs centimètres. ✦ En fonction des atypies cellulaires visualisées au microscope, les polypes sont classés en adénomes, pouvant être des dysplasies de bas ou de haut grade.

© 2018 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés http://dx.doi.org/10.1016/j.actpha.2018.04.004

Adénorcarcinome ✦ Le stade suivant est celui de l’adénocarcinome in situ, puis, en grossissant, les cellules tumorales infiltrent les différentes parois (muqueuse, sous-muqueuse, musculeuse et séreuse). ✦ À partir du moment où les cellules tumorales atteignent les vaisseaux sanguins et lymphatiques de la sous-muqueuse, le cancer devient infiltrant et le risque métastatique apparaît. Les ganglions localisés aux environs de la tumeur sont d’abord atteints, des métastases pouvant ensuite envahir le foie, puis les poumons. ✦ Le pronostic de la maladie est directement lié au degré d’envahissement : plus le cancer est découvert précocement, meilleur il sera, d’où l’importance du dépistage.

Facteurs de risque et signes d’alerte Le principal facteur de risque de cancer colorectal est représenté par les antécédents familiaux (au premier, voire au second degré). Parmi les habitudes de vie, une alimentation trop riche en graisses animales, trop importante de viande rouge et un régime pauvre en fibres augmenteraient le risque. Le tabac, l’alcool, la sédentarité et le surpoids sont aussi incriminés.

Niveaux de risque Les recommandations définissent les différentes populations à risque [2].

Actualités pharmaceutiques • n° 577 • juin 2018 •

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✦ Le niveau de risque moyen est celui de la population dans son ensemble. Mesuré par le risque net moyen d’être atteint d’un cancer colorectal avant l’âge de 74 ans, il est estimé à 3,5 % en France. ✦ Le niveau de risque élevé est celui des sujets : • ayant des antécédents personnels d’adénome ou de cancer colorectal ; • dont un parent au premier degré de moins de 60 ans ou plusieurs parents au premier degré sont concernés par un cancer colorectal ou un adénome avancé (risque variant de 6 à 10 % avant 74 ans) ; • présentant une maladie inflammatoire de l’intestin (rectocolite hémorragique ou maladie de Crohn) ou une pancolite d’évolution prolongée (supérieure à dix ans). ✦ Le niveau de risque très élevé concerne les personnes appartenant à une famille atteinte de cancers à transmission héréditaire : polypose adénomateuse familiale (PAF), cancers héréditaires sans polypose (syndrome de Lynch).

clips (agrafes) au niveau du saignement ou injecter du sérum physiologique adrénaliné, afin d’obtenir l’hémostase. L’autre risque de la coloscopie est la perforation digestive (1/1 000) dont le traitement peut être endoscopique (fermeture de la paroi avec un volumineux clip type “piège à loup”) ou chirurgical. ✦ Le plus difficile pour le patient reste la préparation colique, indispensable puisque la propreté du côlon est un élément majeur pour permettre la détection des polypes. Différents protocoles ont vu le jour ces dernières années. Le type de préparation proposée au patient dépend de son âge, de son type de transit (une préparation à base de polyéthylèneglycol [PEG] à un patient constipé plutôt qu’un picosulfate de sodium, dont la prise est plus facile mais qui risque de ne pas suffisamment vider l’intestin) et les éventuelles contreindications (cardiopathie, âge, insuffisance rénale). ✦ La purge est précédée de quelques jours de régime sans résidus car ces derniers ont tendance à rester dans les replis de la muqueuse et s’évacuent mal.

Références [1] Institut national du cancer (INCa). Cancer du côlon : quelques chiffres. www.e-cancer.fr/ Patients-et-proches/Lescancers/Cancer-du-colon/ Quelques-chiffres [2] Institut national du cancer (INCa). Les niveaux de risque de cancer colorectal. www.e-cancer.fr/ Professionnels-de-sante/ Depistage-et-detectionprecoce/Depistage-du-cancercolorectal/Niveaux-de-risquechez-les-patients [3] Le Duc-Banaszuk AS. Le dépistage organisé du cancer colorectal. Act Pharm. 2018;577(57):24-6.

Symptômes digestifs ✦ Il faut se méfier de la présence de sang dans les selles à partir de 45 ans. Ces saignements, très fréquemment attribués aux hémorroïdes par les intéressés, proviennent parfois d’un polype, voire d’un cancer bas situé dans le rectum. Il faut donc conseiller aux patients d’en parler à leur médecin traitant. ✦ Les autres symptômes qui doivent alerter sont une modification récente du transit, une douleur inhabituelle qui persiste, une perte de poids ou d’appétit.

Dépistage, en fonction du risque Deux types de dépistage sont proposés en fonction du niveau de risque [2]. En l’absence de symptômes et d’antécédents, un test immunologique est remis par le médecin traitant aux patients afin qu’ils le réalisent à leur domicile grâce à un prélèvement de selles envoyé, dans un second temps, en laboratoire d’analyses médicales [3]. Les patients présentant un niveau de risque élevé (antécédents personnel ou familial d’adénome ou de cancer colorectal) ou très élevé doivent bénéficier d’une coloscopie en première intention tous les cinq ans en moyenne (tous les deux ans en cas de syndrome de Lynch).

Coloscanner D’autres examens à visée diagnostique peuvent être proposés si la coloscopie classique est risquée, par exemple chez un sujet fragile sur le plan anesthésique. ✦ Le coloscanner à l’air n’évite pas la préparation colique mais ne requiert aucune anesthésie. Une canule est mise en place au niveau du rectum, puis de l’air est insufflé pendant qu’un scanner est réalisé. À l’aide d’un logiciel spécifique, le côlon est reconstitué en trois dimensions permettant au radiologue d’analyser les images. Cette technique détecte des polypes supérieurs à 5 mm. ✦ Le coloscanner à l’eau, avec lequel le côlon est inondé d’eau et non d’air, est une autre solution. Cet examen est plutôt indiqué pour rechercher des lésions plus volumineuses (polype supérieur à 1 cm, tumeur). ✦ Enfin, la vidéo-capsule colique est une sorte d’appareil photographique de la taille d’une grosse gélule qui prend des images du côlon. Cet examen nécessite une préparation plus scrupuleuse que la coloscopie ou le coloscanner et seule la vidéo-capsule du grêle est prise en charge par la Sécurité sociale.

Conclusion Coloscopie ✦ La coloscopie, réalisée la plupart du temps en ambulatoire, s’effectue sous anesthésie générale et dure environ 15 à 20 minutes, plus s’il y a des polypes à réséquer. Le patient doit consulter l’anesthésiste dans les jours qui précèdent l’examen. ✦ Le rapport bénéfice-risque de la coloscopie est largement favorable, même s’il est possible d’observer un saignement (1,6 %) lors de l’ablation d’un polype. Le gastro-entérologue peut alors mettre en place des

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Le cancer colorectal est une pathologie de bon pronostic si elle est prise en charge précocement. La coloscopie reste l’examen de référence dans le dépistage. Elle est proposée aux patients ayant eu un cancer du côlon ou un polype adénomateux ainsi qu’à leurs enfants, frères et sœurs. Les personnes présentant des symptômes d’alarme ou un test positif de recherche de sang dans les selles doivent aussi en bénéficier. Le dépistage est proposé à partir de 50 ans ou plus tôt en présence d’antécédents particuliers. ◗

Déclaration de liens d’intérêts L’auteur déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.

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