66e Congrès de la Société nationale franc¸aise de médecine interne – 12 au 14 décembre 2012, Nice / La Revue de médecine interne 33S (2012) A90–A198
M. Michaud , C. Bonis , C. Conor , A. Inchauspe , S. Broussaud , C. Couteau , M.-J. Ferro , S. Fontaine , D. Garipuy , F. Gaches Service de médecine, hôpital Joseph-Ducuing, Toulouse, France Introduction.– Les formes cortico-dépendantes ou corticorésistantes de pseudo-polyarthrite rhizoméliques (PPR) posent parfois des difficultés de prise en charge. Le traitement par méthotrexate est inconstamment efficace ou peut donner lieu à des effets secondaires. Le tocilizumab, anticorps dirigé contre de récepteur de l’interleukine-6 (IL-6) est une alternative efficace dans cette situation. Patients et méthodes.– Nous rapportons le cas d’un patient présentant une PPR cortico-dépendante pour lequel le traitement par tocilizumab a été instauré en troisième ligne après rechute sous méthotrexate. Cas clinique.– M. B., 76 ans, consulte dans le service de médecine interne de l’hôpital Ducuing (Toulouse) en raison d’une altération de l’état général. L’examen clinique retrouve une symptomatologie typique de PPR avec des douleurs et une faiblesse d’horaire inflammatoire des ceintures scapulaire et pelvienne. Il n’y a pas de signe céphalique de maladie de Horton ni de souffle à l’auscultation des trajets artériels sous-claviers et huméraux. Le bilan biologique retrouve un syndrome inflammatoire avec une VS à 100 mm à la première heure et une CRP à 55 mg/L. Une biopsie de l’artère temporale est réalisée, ne retrouvant pas d’artérite giganto-cellulaire. Une corticothérapie à une posologie de 0,3 mg/kg par jour est instaurée avec une efficacité spectaculaire clinique et biologique. La décroissance de la corticothérapie est marquée par des rechutes en dessous de 15 mg/j. De plus, le patient présente des signes cliniques d’imprégnation cortisonique avec une prise de poids et une modification de la répartition des graisses. Un traitement par méthotrexate à visée d’épargne cortisonique est donc mis en place avec une efficacité initiale mais un échappement secondaire après six mois de traitement. Le tocilizumab est ensuite initié en relais du méthotrexate, à une posologie de 8 mg/kg administrée toutes les quatre semaines. Dès la première cure, nous observons une efficacité clinique et biologique avec une bonne tolérance du traitement et une diminution progressive de la corticothérapie. Discussion.– L’IL-6 joue un rôle clé dans la physiopathologie des vascularites des gros vaisseaux, telles que la maladie de Horton et de Takayasu. Le taux d’IL-6 semble d’ailleurs être corrélé à l’activité de ces maladies inflammatoires. De plus en plus de données suggèrent que le blocage du récepteur soluble de l’IL-6 est efficace chez les patients ayant une maladie de Horton ou de Takayasu résistante aux traitements habituels. Ceci a été moins étudié en cas de PPR. Néanmoins quelques études de faible effectif ont montré l’efficacité du tocilizumab dans des formes résistantes ou à visée d’épargne cortisonique. Conclusion.–Le tocilizumab paraît être un traitement prometteur des vascularites des gros vaisseaux et de la PPR. Néanmoins, en raison de son coût élevé, ce traitement doit être réservé aux cas de forme résistante, de contre-indication aux traitements habituels ou à visée d’épargne cortisonique. Des études randomisées complémentaires sont nécessaires ainsi qu’un suivi à long terme des patients sous tocilizumab. Pour en savoir plus Salvarani C, et al. Rheumatology 2012;51:151–6. Unizony S, et al. Arthritis Care Res 2012. [doi:10.1002/acr.21750]. Schäfer VS, et al. Curr Opin Rheumatol 2012;24:31–7. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2012.10.236 CA109
Le polymorphisme V/F 158 du Fc␥RIIIA est-il prédictif de la réponse au rituximab dans le purpura thrombopénique immunologique ?
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C. Guillaud Danis a , F. Noizat-Pirenne b , S. Bastuji-Garin c , J.-F. Viallard d , O. Fain e , B. Godeau a , M. Michel a a Service de médecine interne, hôpital Henri-Mondor, Créteil, France b Île-de-France, établissement franc¸ais du sang, Créteil, France c Service de santé publique, hôpital Henri-Mondor, Créteil, France d Service de médecine interne et maladies infectieuses, hôpital Haut-Lévêque, Pessac, France e Service de médecine interne, hôpital Jean-Verdier, Bondy, France Introduction.– Le rituximab est un traitement du purpura thrombopénique immunologique (PTI) persistant ou chronique de l’adulte, avec un taux de réponse initiale de 40 à 50 % à un an et de 20 % à cinq ans [1]. Il s’agit d’un traitement n’ayant pas l’AMM dans le PTI et pour lequel il n’existe pas de facteur prédictif de réponse. Le polymorphisme V/F 158 du gène FCGR3A influe sur le degré d’affinité de liaison du Fc␥RIIIA au rituximab et de fac¸on indirecte sur la cytotoxicité (ADCC) médiée par le rituximab [2]. Plusieurs études ont démontré que l’allèle V 158 était associé à un meilleur taux de réponse au rituximab dans certaines hémopathies lymphoïdes, dans la polyarthrite rhumatoïde et dans les vascularites cryoglobulinémiques liées au virus de l’hépatite C. L’objectif de cette étude est d’évaluer si le variant V 158 du Fc␥RIIIA est associé à une meilleure réponse au rituximab dans le PTI de l’adulte. Patients et méthodes.– Les patients adultes présentant un PTI primaire persistant (entre trois et 12 mois d’évolution) ou chronique (> 12 mois) traités par rituximab, vus dans l’un des trois centres participants entre 2008 et 2011, et ayant un recul minimal de six mois ont été inclus. La réponse au rituximab était évaluée à 6 ± 2 mois, 12 ± 2 mois et 24 ± 2 mois du traitement. Selon les critères internationaux consensuels, une réponse (R) était définie par un taux de plaquettes entre 30 et 100 G/L avec doublement par rapport au taux de base, en l’absence d’autre traitement, et une réponse complète (RC) par un taux de plaquettes à plus de 100 G/L, en l’absence de traitement intercurrent. Le génotypage du FCGR3A V/F 158 était effectué à l’aide d’une PCR en temps réel SYBR Green. Les taux de réponses étaient comparés entre les différents génotypes en utilisant le test exact de Fischer. Un p < 0,05 était considéré comme significatif. Résultats.– Cent trois patients (71 % de femme) d’âge moyen égal à 50 ans, traités par rituximab et ayant au moins six mois de recul ont été inclus. La durée moyenne d’évolution du PTI était de 56 ± 71 mois. La durée moyenne de suivi était de 43 ± 31 mois, 90/103 patients étaient évaluables à 12 mois et 68/103 patients l’étaient à 24 mois. La répartition des génotypes du FCGR3A était la suivante : 35 (34 %) des patients étaient homozygote FF, 51 (50 %) étaient FV et 17 (16 %) étaient homozygotes VV. Cette distribution n’était pas significativement différente de celle de 50 sujets contrôles sains d’origine caucasienne. À 6 mois du traitement par rituximab, le taux de réponse globale était de 53 % incluant 37 (36 %) RC et 18 (17 %) R. À 12 mois, sur les 90 patients analysables, 30 (61 %) étaient en RC, 6 (12 %) R et 13 (27 %) étaient en échec. À deux ans, on observait une RC persistante chez 16 (23 %) des 68 patients analysables, une réponse chez 4 (6 %) patients et 48 (71 %) patients étaient non répondeurs. Malgré une tendance observée à un taux de réponse globale plus élevé chez les patients homozygotes VV, cette différence n’était pas statistiquement significative. Conclusion.– Même s’il existe une tendance à un taux de réponse au rituximab plus élevé chez les patients adultes atteints de PTI porteurs de l’allèle V158, sur une cohorte relativement importante de patients la différence n’est pas statistiquement significative. Ce résultat, contradictoire avec une publication récente [3], n’incite pas à la réalisation systématique du génotypage du polymorphisme V/F 158 du Fc␥RIIIA avant de décider d’un traitement par rituximab. Références [1] Godeau B, et al. Blood 2008;112:999–1004.
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66e Congrès de la Société nationale franc¸aise de médecine interne – 12 au 14 décembre 2012, Nice / La Revue de médecine interne 33S (2012) A90–A198
[2] Hatjiharissi E, et al. Blood 2007;110:2561–4. [3] Cooper N, et al. BJH 2012;158:539–47. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2012.10.237 CA110
Réponse prolongée après traitement par tocilizumab d’une polychondrite atrophiante E. Weber , J.-B. Gaultier , P. Cathébras Service de médecine interne, CHU de Saint-Étienne, Saint-Étienne, France Introduction.– La polychondrite atrophiante (PCA) est une maladie inflammatoire multisystémique rare qui par poussées successives peut entraîner des sténoses ou destructions cartilagineuses. Son traitement n’est pas codifié. Patients et méthodes.– Nous rapportons un cas de PCA corticodépendante et réfractaire à plusieurs lignes d’immunosuppresseurs avec une réponse prolongée au tocilizumab (anticorps anti-récepteur de l’IL6). Observation.– Un homme âgé de 38 ans avait pour antécédents une rectocolite hémorragique, un vitiligo, une thyroïdite de Hashimoto, et une dysautonomie auto-immune. Il présentait en février 2007 une polyarthrite récidivante traitée par corticostéroïdes puis méthotrexate. Un diagnostic de PCA était secondairement posé devant une nouvelle poussée inflammatoire accompagnée pour la première fois de chondrites laryngées, chondro-sternales, puis nasales. Le patient rec¸ut successivement, jusqu’en juin 2010, de l’etanercept, de l’adalimumab, de l’infliximab, du méthotrexate et du mycophénolate mofétil. Ces traitements restaient inefficaces sur les symptômes et le patient gardait une atteinte laryngée, des douleurs polyarticulaires inflammatoires, et un syndrome inflammatoire biologique. Devant la présence d’un taux d’IL-6 très élevé dans le sérum (> 200 ng/mL), un traitement par tocilizumab à la dose de 8 mg/kg/mois était proposé. Le traitement était débuté en juillet 2010, permettant d’obtenir une amélioration clinique dès le deuxième mois et une régression complète du syndrome inflammatoire biologique, autorisant une décroissance des immunosuppresseurs (méthotrexate à 7,5 mg/semaine) et une épargne cortisonique (prednisone à 5 mg/j). La rémission clinico-biologique était rapide et prolongée. Le patient reprenait une activité sportive et professionnelle à temps plein, sans poussée avec un recul de deux ans. Il gardait un trouble ventilatoire obstructif fixé mais aucune gêne laryngée ni de douleur articulaire ou chondrale. Discussion.– Le tocilizumab est un anticorps monoclonal recombinant humanisé dirigé contre le récepteur de l’IL6. Il est pour le moment indiqué en France dans le traitement de la polyarthrite rhumatoïde en association avec le méthotrexate après échec ou réponse inadéquate à au moins un traitement de fond classique ou anti-TNF alpha. Trois autres cas similaires au nôtre ont suggéré l’efficacité du tocilizumab dans des PCA sévères réfractaires au traitement conventionnel. Deux patients étaient porteurs d’une PCA avec atteinte laryngée nécessitant le recours à une trachéotomie [1]. Le premier cas s’était avéré réfractaire à plusieurs lignes d’immunosuppresseurs dont le cyclophosphamide et l’infliximab. Les taux d’IL-6 étaient élevés dans les deux cas au moment de l’introduction du tocilizumab, accompagnés d’un syndrome inflammatoire majeur. Une autre patiente présentait une PCA grave avec aortite histologiquement prouvée, qui semblait avoir préalablement bien répondu à un traitement par adalimumab [2]. Dans les trois cas, la réponse au tocilizumab était prolongée et permettait une épargne cortisonique. Aucun effet secondaire sévère n’est rapporté dans ces observations. Conclusion.– Ce nouveau cas suggère le potentiel du tocilizumab dans le traitement des polychondrites atrophiantes réfractaires.
Références [1] Kawai M, et al. Rheumatology 2009;43:318–9. [2] Narshi CB, et al. Rheumatology 2012;51:952–3. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2012.10.238 CA111
Syndrome d’hyperimmunoglobulinémie D et anakinra : à propos de 2 cas S. Dufour , S. Riviere , A. Schiffmann , A. Forestier , P. Guilpain , A. Le Quellec Service de médecine interne, CHU Saint-Éloi, Montpellier, France Introduction.– Le syndrome d’hyperimmunoglobulinémie D (SHID) est une maladie auto-inflammatoire liée à un déficit partiel en mévalonate kinase (MK) longtemps resté sans traitement efficace. L’avènement des biothérapies ciblées sur les cytokines pro-inflammatoires au début des années 2000, a été une révolution thérapeutique. Après les anti-TNF␣, l’anakinra (anti-IL1) a été décrit comme efficace. Nous rapportons deux cas de SHID traités par anakinra. Patients et méthodes.– Cas 1.– Un homme né en 1972, présente depuis l’âge de onze ans des accès fébriles mensuels avec douleurs abdominales, diarrhées et éruptions cutanées, spontanément résolutifs en trois à sept jours. Le diagnostic de SHID est confirmé génétiquement en 2001. Un traitement par colchicine de 1998 à 2000 puis pentoxifylline en 2001 puis simvastatine en 2007 se sont avérés inefficaces. En mai 2010, l’anakinra en continu a permis une réduction spectaculaire de l’intensité et de la fréquence des crises. Une recrudescence des accès fébriles lors des interruptions thérapeutiques a été observée, résolutive à la reprise du traitement. Cas 2.– Un homme né en 1985, présente depuis l’âge de trois mois, des épisodes fébriles mensuels accompagnés de vomissements, myalgies et parfois urticaire généralisée. Le SHID est confirmé génétiquement en 2003. En 2001, la colchicine prise pendant 18 mois est inefficace. En juillet 2011, il débute un traitement par anakinra en continu avec une rémission totale de la maladie après un an de recul. Une rupture thérapeutique involontaire a également entraîné la reprise des symptômes, à nouveau contrôlés par la réintroduction du traitement. Résultats.– Le SHID est une maladie auto-inflammatoire d’origine génétique. Le risque d’amylose secondaire est peu important (2,9 %) mais le handicap socioprofessionnel est majeur [1]. Dès 1995, plusieurs médiateurs pro-inflammatoires dont l’interleukine 1 étaient retrouvés à des taux très élevés lors des accès fébriles. En 2004 sont décrits les premiers cas d’utilisation de l’anakinra dans le SHID. À ce jour, une cinquantaine d’observations sont rapportées dans la littérature. Dans environ 80 % des cas, l’anakinra permet une réduction voire une disparition de l’intensité et de la fréquence des crises. Curieusement 1 observation en 2012 [2] évoque une aggravation des symptômes sous ce traitement. La tolérance de l’anakinra est bonne mais l’injection quotidienne reste une contrainte non négligeable chez ces jeunes patients, entraînant des problèmes d’observance. L’administration à la demande paraît une alternative. Elle permet une diminution de la durée et de l’intensité des crises mais pas de leur fréquence [3]. Les cas récents publiés sur le canakinumab (anti-IL1) en injection toutes les 4 à 8 semaines, pourraient être une autre solution. Par ailleurs, notons que les effets secondaires de l’anakinra au très long court restent inconnus. Conclusion.– Nos observations confirment l’efficacité spectaculaire de l’anakinra dans le SHID avec une bonne tolérance. Cependant, elles rappellent les difficultés d’observance et l’absence de recul sur les effets secondaires de l’anakinra au très long court. Références [1] Van der Hilst JC, et al. Medicine 2008;87:301–10. [2] Hiba M, et al. Rheumatol Int 2012;32:249–51. [3] Bodar EJ, et al. Ann Rheum Dis 2011;70:2155–8. http://dx.doi.org/10.1016/j.revmed.2012.10.239