L’isolement en pratique hospitalière*

L’isolement en pratique hospitalière*

FMC Mćd Mai Infeet. 1998; 28, Spćeial : 485-91 L'isolement en pratique hospitaliere* E. BOUVET** et G. BRUCKER*** RESUME Le principe de I'isolemen...

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FMC

Mćd Mai

Infeet. 1998; 28, Spćeial : 485-91

L'isolement en pratique hospitaliere* E. BOUVET** et G. BRUCKER*** RESUME

Le principe de I'isolement a I'h6pital a ete developpe pour eviter la diffusion des micro-organismes en etablissant des barrieres entre les patients et les sources de I'infection. II existe 2 types d'isolement : I'isolement septique qui vise a empecher la diffusion d'un germe a partir d'un patient infecte ou colonise et I'isolement protecteur destine a proteger un patient a risque vis-a-vis de l'infection. L'isolement septique comprend des mesures barrieres qui sont classees en isolement standard, precautions universelles, precautions pour la transmission manuportee, isolement respiratoire, precautions pour la transmission par les gouttelettes et precautions pour la transmission par contact. Les mesures d'isolement doivent faire I'objet d'une prescription medicale adaptee a la situation du patient. La mise en place de mesure d'isolement de contact permet de lutter efficacement contre la diffusion des bacteries multiresistantes a I'h6pital. L'application de ces regles s'impose a tous les personnels soignants qui doivent y etre formes.

Mots·cles : Isolement - Precautions de contact - Precautions respiratoires - Bacteries multiresistantes - Gouttelettes Precautions standard. La prevention des infections nosocomiales necessite en premier lieu de rompre la chaine de transmission des agents infectieux a partir des sources de contamination. Celles-ci ont principalement trois origines : les patients infectes ou colonises, les personnels hospitaliers, I'environnement. Le principe de I'isolement, qui associe des mesures geographiques et techniques, a pour objectif de prevenir la circulation des germes par la realisation de barrieres empechant toutes formes de contact possible entre les patients et les sources de colonisation. LES PRINCIPES

Le principe de I'isolement Le principe de I'isolement d'un patient infecte ou contagieux demeure un point essentiel de la prevention de la transmission des agents infectieux. Negligees ces 20 ou 30 dernieres annees pour de multiples raisons lićes a un manque d'espace dans la conception des nouveaux h6pitaux ou nouveaux services, a une mauvaise organisation du soin au sein des services, a une confiance aveugle dans une antibiotherapie que l' on croyait infaillible ou presque, les recommandations en matiere d'isolement des patients atteints de maladies transmissibles a I'hOpital ont fait I'objet d'une actualisation dans la plupart des pays industrialises en particulier aux Etats-Unis

* Re~u le 6.5.98. Aeeeptation dćfinitive le 13.5.98.

** Clinique de Rćanirnation des Maladies

Infectieuses, Hopital Bichat-Claude Bernard, 46 rue Henri Huchard - F-75018 Paris. *** Direction de la politique rnćdicale, Dćparternent de I'Information, de la Recherche et de I'Evaluation et de la Qualitć (DIREQ), Service Vigilance Hygiene et Prćvention (SVHP), 3 avenue Victoria - F-75 100 Paris RP.

par le CDC et en France par la Societe Fran~aise d'Hygiene Hospitaliere (SFHH) et par le Comite Technique National de Lutte contre les Infections Nosocomiales (CTIN) (1-3). Ces recommandations sont a la fois d'ordre geographique, isolement en chambre individuelle ou dans une unite geographique specifique, et d'ordre technique mettant en oeuvre tout un ensemble de mesures dites barriere qui visent a contr6ler les circuits et les flux de personnes ou de materieIs aliant vers le patient ou provenant de celui-ci. Ces mesures tiennent compte des modes de transmission des agents infectieux par les malades en fonction des maladies ou des sites colonises. ElIes permettent de definir des modalites d'isolement adaptees au risque de diffusion des germes. L'isolement ne doit ainsi plus etre entendu comme une mesure d'exclusion ou de rejet, mais comme un ensemble de regles dćterminant la qualitć et la sćcuritć des soins lors de la prise en charge des malades, visant a 'proteger tous les patients, les personnels, la communaute dans son ensemble, sans rupture de proximite ou de relation therapeutique.

Principes de contagiosite ou transmissibilite La transmission de I'infection dans I'h6pital dćpend de 3 ordres d'elements : - une source de micro-organismes infectants (iI peut s'agir de bactćries, le plus souvent mais aussi de virus ou de parasites et de champignons), - un h6te receptif, en general un malade hospitalisć ou qui frequente l' etablissement en consultation ou en h6pital de jour mais aussi un membre du personnel de l' etablissement, - et des voies de transmission pour le micro-organisme en question.

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La contagiosite represente la capacite du micro-organisme a coloniser ou a infecter un hote a partir d'une source, humaine ou environnementale. La colonisation est un etat de portage du micro-organisme dans ou sur un site de l'organisme habituellement non sterile. Celui-ci est habite par une tlore microbienne endogene qui caracterise l' ecologie bacterienne de l'individu (revetement cutane, tube digestif, cavite buccale). La colonisation s'oppose a l'infection qui se caracterise par la multiplication de l'agent infectieux dans un ou plusieurs sites. Celle-ci provoque des desordres pathologiques au niveau du tissu infecte. La densite bacterienne presente au site de l'infection est plus elevee que celle d'une colonisation et possede donc une capacite de transmission (ou contagiosite ) plus importante. La transmissiblite d'un agent infectieux depend ainsi de la densite microbienne (inoculum) et de sa capacite propre a etre transmis a un autre organisme. Dans une maladie infectieuse, la contagiosite est variable selon le stade d'evolution, ce qui est en rapport avec le facteur "inoculum". Ainsi dans l'hepatite B chronique active, la contagiosite est dependante de la charge virale plasmatique, elle-meme dependante de la gravite de l'atteinte hepatique. Dans l'infection bacterienne (a staphylocoque par exemple) le risque de transmission a un autre patient, le risque de contamination de I'environnement ou du personnel est superieur a celui d'une simple colonisation d'un patient avec le meme micro-organisme. Par ailleurs, chaque agent infectieux est caracterise par une transmissiblite ou contagiosite qui lui est propre et qui represente un parametre independant (taux d'attaque). Les sources de l'infection peuvent etre : les patients, le personnel ou dans certaines occasions les visiteurs. Les sujets contagieux peuvent etre des personnes atteintes d'une maladie aigue ou en phase d'incubation, des personnes qui sont colonisees par un micro-organisme mais ne sont pas atteintes d'une maladie apparente ou encore, des personnes qui sont porteuses chroniques d'un agent infectieux. Les autres sources d'agents infectieux infectants peuvent etre des objets inanimes de l'environnement et qui ont ete secondairement contamines (equipement, dispositifs medicaux, mobilier, medicaments...).

colonise et l'autre a un sujet susceptible. Ce type de transmission peut survenir lors de toutes les activitćs de soins ou de nursing qui comportent un contact physique direct entre deux personnes: pose d'un dispositif, change, transport, prelevement, nursing... Cette transmission de contact peut aussi se produire de fa~on indirecte, par I'intermediaire d'un objet inanimć qui sert de relais entre la source et I'hote receptif. La transmission par les gouttelettes est identifiee depuis peu et se distingue de la transmission respiratoire et de la transmission par contact. En effet, elle concerne la transmission a partir des gouttelettes de salive et des sćcretions des voies aeriennes respiratoires. Ces gouttelettes sont produites pendant la toux, l'eternuement, la parole et pendant certaines procedures telles que les fibroscopies, les aspirations, etc... La transmission peut survenir quand ces gouttelettes contenant I'agent infectieux sont transportees sur une courte distance et deposees sur les muqueuses conjonctivales, buccales ou nasales o'un hote susceptible, patient ou personnel. Ce mode de transmission n'est pas evite par le traitement de I'air et la ventiłation car ces gouttelettes ne sont pas en suspension dans l'air. II s'agit donc d'un mode de transmission different de la transmission aerienne. La transmission aerienne se produit par dissemination aerienne: - soit de gouttelettes de condensation (inferieures a 5 microns) qui sont les residus de gouttelettes plus grosses (celles-ci peuvent contenir des micro-organismes et rester en suspension dans l'air pendant un certain temps) - soit des particules de poussiere qui contiennent l' agent infectieux. L'inhalation des micro-organismes dissemines par cette voie par un hOte susceptible situe dans la meme piece ou aune distance plus grande selon des facteurs environnementaux peut conduire a l'infection. La manipulation de I'air et la ventilation sont necessaires pour maitriser ce type de transmission.

LES DIFFERENTES FORMES D'ISOLEMENT

Deux ordres de situations radicalement differentes peuvent conduire al'isolement : - soit ił s'agit d'un patient porteur d'une infection bacteLES MODES DE TRANSMISSlON rienne ou virale, ou colonise par un germe, qui constitue un La transmission des micro-organismes a l'hopital peut se risque pour les autres patients ou pour le personnel. Son isofaire selon differentes voies. On considere qu'il existe 5 voies lement est necessaire pour prevenir la diffusion, la transmisprincipales de transmission : transmission par contact, trans- . sion de cette infection ou de ce germe : ił s'agit d'un mission par les gouttelettes, transmission aerienne qui est isolement septique; maintenant consideree comme distincte de la transmission - soit il s'agit au contraire d'un patient a haut risque d'etre par les gouttelettes, la transmission par un vehicule commun infecte par l'environnement hospitalier, par les autres patients, ou meme par des visites. Cela concerne surtout les tels que I'eau, I'alimentation, les medicaments, les dispositifs patients severement immunodeprimes, par une maladie ou et enfin, tres rarement dans les pays developpes, la transmission par des vecteurs vivants tels que les moustiques, les par un traitement, neutropenique ou en aplasie medullaire : il s'agit d'un isolement protecteur aseptique. rats, etc... La transmission par contact consiste en un transfert d'un micro-organisme apartir d'un contact physique direct entre 2 surfaces corporelles, I'une appartenant a un sujet infecte ou

Les deux types d'isolement supposent des mesures differentes; dans le premier cas, les mesures barrieres concernent surtout les sorties de la chambre venant du malade isole pour

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TABLEAU I: Types d'isolemcnt (cnc Guidclinc) Indications (exemples) 1. Precautions standards (voir tableau) 2. Transmission aerienne precautions standards + mesures specifiques (voir tableau) 3. Transmission par gouttelettes = precautions standards + mesures specifiques (voir tableau) 4. Transmission par contact precautions standards + mesures specifiques

Tous patients Rougeole Varicelle Zona generalise Tuberculose

Coqueluche Mycoplasme (pneumonie) Diphterie Meningite a meningocoque Infection aH. illjluellwe Grippe - Colonisation par germes multi-resistants - Infections enteriques C. difficile Shigelles, salmonelles Hepatite A - Infections cutanees Herpes Impetigo Zona - Conjonctivite hemorragique

proteger l'environnement et les autres patients, dans le deuxieme cas les protections s'exercent surtout sur les entrees dans la chambre pour proteger le malade isole. Certaines pathologies offrent des exemples particulierement complexes d'isolement ou les deux problemes se posent, parfois a des temps differents de l'evolution clinique. C'est le cas notamment des grands brfiles qu'il faut absolument proteger de tout risque infectieux par des regles d'isolement et d'asepsie draconiennes, mais qui sont malheureusement tres souvent colonises et infectes, ne seraient-ce que par leur propre f1ore, apres quelques semaines, et qu'jJ faut alors mettre en isolement septique au sein de l'unite des brfiles.

L'isolcment septique L'isolement septique est l'ensemble des mesures barrieres visant a maitriser la diffusion des germes dont le malade est porteur. Le plus souvent cet isolement comporte une mesure d'isolement geographique en chambre individuelle. Un ensemble d'autres mesures techniques est defini en fonction du risque infectieux. Jusque dans les annees 1990, on distinguait: - l'isolement cutane, - l'isolement entćrique, -l'isolement respiratoire, mis en oeuvre en fonction du type de maladie dont le sujet prćsumć contagieux ćtait atteint.

L'isolement sanguin visait a prćvenir les risques lies aux prelevements sanguins, a leur transport et leurs manipulations dans les laboratoires. Un pastillage rouge fut meme propose, en particulier chez les patients atteints d'une hepatite B ou porteurs chroniques de VHB. Avec l'apparition du SIDA ce concept d'isolement sanguin a ćte radicalement transforme. Compte tenu de la frequence des porteurs asymptomatiques du VIH, meconnus lors de leur prise en charge, le concept de precautions universelles a prevalu sur celui des indications de l'isolement sanguin. II pose le principe que tout patient peut etre porteur meconnu d'un agent infectieux dans le sang en particulier du VIH, du VHB ou du VHC, et que, en consequence, les prćcautions liees au risque de prelevement, transport, manipulation du sang ou de tout produit biologique doivent etre mises en oeuvre de fa~on systematique. L'actualisation des recommandations en matiere d'isolement septique conduit aujourd'hui a distinguer (tableau I) : -les precautions d'isolement standard (IS), -les precautions universelles (PU), - les precautions pour la transmission aeroportee, - les precautions pour la transmission par gouttelettes, - les precautions pour la transmission par contact. • Les pricautiolls stalldards II s'agit des mesures d'hygiene generale visant a prevenir les risques de transmission des germes, pathogenes ou commensaux dont les patients sont porteurs connus ou presumes. Ces principes, conformes aux mesures de base, s'appliquent a tous les patients, comme les mesures universelles pour les liquides biologiques. Elles concernent non seulement le sang, les produits biologiques ainsi que tout contact avec une peau lesee ou des muqueuses. Ces prćcautions standards sont rappelees dans le tableau II. • /soleme1lt sallguill et precautiolls II1liverselles L'isolement sanguin (ou precautions sanguines) s'applique a tous les patients et dans tous les cas ou ił existe un risque de contact avec le sang d'un patient. II s'integre dans les "precautions standards". II est destine a eviter une transmission, a partir du sang d'un patient, au personnel ou aun autre patient, lors d'un accident exposant au sang (AES). Un AES est defini par tout contact avec du sang ou ul} Iiquide contenant du sang et comportant une effraction cutanee (piqfire ou coupure) ou une projection sur une muqueuse ou une peau lesee (plaie, eczema, excoriation...). Les agents infectieux qui peuvent etre transmis par voie sanguine sont nombreux; ce sont tous les agents infectieux qui peuvent etre presents dans le sang d'un patient.

Cependant, en pratique, le risque principal concerne le VIH, le virus de l'hćpatite B (VHB) et le virus de l'hepatite C (VHC) car ces virus se caractćrisent par un risque de portage chronique dans le sang des patients infectes. La prevention des AES consiste a: - faire attention pour eviter les blessures en cas d'utilisation d'aiguilles, de bistouris et autres instruments piquants ou tranchants: pendant l'utilisation, apres et pendant les phases de nettoyage et d'elimination.

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TABLEAU II: Precautions standards et mesures barrieres Lavage des mailIs - avec un savon antiseptique en cas d'isolement septique, - se10n une technique codifiee, - avant et apres tout contact avec un patient ou apres manipulation d'un produit biologique, - meme en cas de port de gants, immediatement apres leur enlevement. Gallts - non steriles pour tout contact avec le sang et les produits biologiques, (prelevements, dechets), - steriłes au contact des plaies et pour les soins aseptiques, - toujours changes entre chaque patient, - otes des apres usage et suivis d'un lavage des mains. Masqlles, 11lllelteS, visieres - portes par les soignants en cas de risque de projection lors des soins et actes medicaux, - indiques egalement (masques) pour la transmission aeroportee (tuberculose) ou par gouttelettes, - parfois necessaire (masques) chez certains patients lors de leurs deplacements (tuberculose). Blollses et sarralls - une surblouse peut €lre necessaire en cas d'exposition a des projections de sang ou de liquides biologiques. Les proprietes des textiłes sont precises en fonction des usages, - l'isolement septique ne fait a priori pas appel a des blouses steriles, - les blouses sont, en cas d'isolement septique, changees entre chaque patient. Matiriels IIlMicallX et dichets - les materieIs potentiellement contamines apres usage doivent etre transportes ou elimines selon des filieres definies et dans des conditions de securite pour l'environnement, - les dechets des patients en isolement septique suivent une filiere specifique a risque infectieux.

TABLEAU III: Precautions pour la transmission aerienne et par gouttelettes TrallSlllissioll airie1l11e 1. Chambre - Isolement en chambre individuelle. - Pression negative de la chambre. - Six a douze renouvellements d'air par heure. - Elimination de l'air a l'exterieur ou filtration si recyc1age. - Porte de la chambre fermee. 2. Masque - Port de masque a usage unique pour tout entrant dans la piece pour certaines affections. - Masque a pouvoir filtrant a 0,1 (en cas de tuberculose). 3. Transport - Limitation des deplacements du patient au strict necessaire. o Trallslllissioll par gOlllteleltes Les precautions sont du meme ordre mais s'appliquent selon le CDC en cas de proximite a un metre du patient (et non des l'entree dans la chambre). o

- Ne jamais recapuchonner les aiguilles usagees. - Ne jamais manipuler les aiguilles et instruments tranchants usages a 2 mains, ne pas desadapter a la main. - Utiliser des techniques a "une main" pour proteger l'aiguille usagee ou des dispositifs de secuńte qui protegent l'aiguille usagće.

- Deposer immediatement apres usage les objets piquants ou tranchants dans des conteneurs de securite adaptes. - Porter des gants s'il existe un risque de contact avee du sang ou des liquides biologiques eontenant du sang. - Le port de gants sera systematique pour tout soignant atteint de lesions eutanees des mains. Toute plaie sera pansee et eouverte, partieulierement au niveau des mains. - Porter une surblouse et/ou un masque etanche et/ou des lunettes lorsque les soins ou les manipulations exposent a des projections de sang ou de liquide sanglant : endoseopie, aeeouehement, stomatologie, aspiration bronchique... - Se laver les mains avant et apres ehaque soin et les desinfeeter ensuite en eas de souillure avee du sang. - Transporter les prelevements dans des saes plastiques jetables et/ou des reeipients lavables et desinfeetables ou a usage unique, hermetiquement cIos. o L'isolemellt respiratoire (trallslllissioll aerielllle) (tableau III) II est destine a eviter la transmission par voie aerienne de micro-organismes transmis par les gouttelettes de eondensation qui peuvent rester en, suspension dans l'air pendant une longue periode et etre dispersees dans la pieee et dans d'autres zones plus eloignćes selon la ventilation. L'objectif est de proteger les autres patients et le personnel de I'inhalation des particules infectieuses. II s'applique aux patients eonnus ou suspects de maladie a transmission aerienne en particulier la tuberculose. Le patient doit etre place dans une chambre individuelle et dont I'air est en pression negative par rapport aux zones adjacentes, avec 6 a 12 renouvellements horaires et une evacuation de I'air apres filtration sans recirculation dans d'autres zones de l'etablissement. La porte de la ehambre doit rester fermee et le patient doit rester dans la ehambre. Les personnes qui penetrent dans la chambre doivent porter un masque de protection respiratoire qu'ils mettent en place avant de rentrer. Dans le eas de.la rougeole et de la vańcelle, les personnes qui sont immunisees ne doivent pas porter de masque. Les mouvements du patient hors de sa chambre doivent etre limites au maximum. Si le patient doit sortir de sa chambre, il portera un masque pour minimiser le .risque de dispersion des gouttelettes infectieuses. Dans le eas de la tuberculose, d'autres mesures peuvent etre preconisees : traitement de l'air par filtration et par les ultra-violets. o Les pricalltiolls pour la trallslllissioll par gOlllteleltes Elles sont dćfinies pour les maladies dont les agents infectieux sant dissemines sur des gouttelettes plus grosses que les prćcedentes (> 5), a I'occasion de toux ou d'eternuement. Les precautions sont semblables a celles definies pour la transmission aćrienne, mais s'appliquent seulement pour les soins a proximitć (moins de I metre) du malade, et non des l'entree dans la chambre.

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TABLEAU IV: Mesures barrieres et traitement des patients infectes ou colonises par les SARM I. Isolement des patients colonises et infectes - unite isolee avec equipe soignante specifique ou chambre individuelle porte fennee, - toiłettes separees individuelles.

2. Soins aux patiems et circulation des personnes - acces a la chambre ou a l'unite apres autorisation, - mesures barrieres : • lavage antiseptique des mains systematique avant et apres tout contact avec le patient ou avec son environnement, • port de blouse (soignant et visiteur) pour tout contact avec le patient (Ies blouses a manches courtes sont necessaires pour le respect d'un lavage correct des mains), • port de gants pour manipuler objets et linge dans la chambre (gants a usage unique non steriles), • port de masques uniquement lors des soins susceptibles de generer des aerosols (aspiration), • materiel medical de base reserve (thennometre, stetoscope, bassin, petit materiel de soin).

• La prevelltiOIl de la trallslllissioll par COlltaCt Elle requiert avant tout des mesures barrieres : port de gants et lavage des mains sont essentiels ainsi que l'usage d'une blouse a revetir avant l' entree dans la chambre. Comme toujours les deplacements du patiem doivent etre evites. Le recours au materiel a usage unique sera privilegie et les materiels utilises reserves a l'usage exclusif du patient en situation d 'isolement.

LES GERMES MULTI-RESISTANTS Les patients porteurs de gennes multi-resistants doivent faire l'objet d'un depistage et d'un isolement pour limiter la transmission de ces bacteries duram leur hospitalisation. Ces mesures concement avant tout les porteurs de staphylocoques resistants a la methicilline (SARM) et de klebsielles productrices de betalactamase a spectre elargi (KBLSE). Elles peuvent, selon les programmes de lutte vis-a-vis de germes resistants, etre etendues aux PseudolIIonas ou aux Acilletobacter, ou bien aux enterocoques vanco-R. Les strategies de maitrise de la diffusion de ces gerrnes comportent generalement trois etapes (tableau IV) : I. identification des malades colonises ou infectes, 2. isolement geographique et technique, 3. traitement eventuel de I'infection ou de la colonisation. L'identification des malades colonises Elle implique deux mesures essentielles: - depistage des malades connus ou suspects dans les unites a haut risque (unite de soins intensifs), mais aussi depistage des malades transferes des unites en situation endemo-epidemiques. - signalisation claire, simple, visible sur la porte de la chambre du patient, et sur son dossier pennettant a chaque soignant d'adopter les mesures de prevention. L'isolement des patients colonises ou infectes necessite - le recours a une chambre individuelle, - ou le regroupement des patients colonisćs dans une meme unitć gćographique.

Les mesures d'isolement techniques (mesures barrieres) sont conformes aux precautions standards, complćtees par les mesures de prevention de la transmission par contact. Le lavage des mains avant et apres chaque soin et chaque geste apparait comme la mesure clć pour limiter la diffusion de ces gennes multiresistants (4, 5). L' Assistance PubliqueHópitaux de Paris a, en 1990, constitue un groupe de travaił pour la definition d'une strategie maitrise de la diffusion des staphylocoques dores resistants a la methicilline (SARM) et des klebsielles productrices de betalactamase a spectre elargi (KBLSE). Cette strategie reprend en priorite les principes de depistage et d'isolement L'analyse de l'evolution des taux de germes multiresistants pour les hópitaux de l' AP-HP confmne l'impact de ces mesures. Une reduction significative du taux des SARM et des KBLSE a ete obtenue entre 1993 et 1996 dans les hópitaux d'aigus. Les SARM sont ainsi passes de 39,7 % a 33 % et les KBLSE de 23,9 % a 9,8 %. En revanche, ił n'a pas ete obtenu de reduction des taux dans les hópitaux de long sejour ou la mise en oeuvre des mesures d'isolement se heurte a de nombreuses difficuItes d'organisation des soins mais aussi d'impact psychologique ou de reserves d'ordre ethique. LES FIEVRES HEMORRAGIQUES VIRALES Dans le cas de fievre hemorragique virale, des mesures d'isolement absolu sont a mettre en oeuvre (1). Les principales mesures de prevention reposent sur (tableau V) : • l'identification precoce des cas : en pratique, malade de retour d'une zone epidemique, mais l'apparition de cas sp 0radiques survenant en dehors de situation d'epidemie declaree est possible; • l'isolement des malades et des cas suspects : - isolement geographique : chambre seule avec acces protege ou le personnel peut s'habiller, preparer les soins, decontaminer les matćriels et les dechets; - isolement technique : application stricte des precautions universelles vis-a-vis de l'exposition au sang, limitation des prelevements biologiques au strict necessaire, laboratoire prevcnu, inactivation viralc quand c'est possible. Tous les prćlcvcments seront tcchniques sous haute securite (tenue de protection, hotte a flux).

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TABLEAU V: Mesures ił prendre face ił un'malade suspect de fievre hemorragique ił virus Ebola Diagnostic sllspecte si - retour de zone ou sevit l' epidemie, - depuis moins de 3 semaines, presence m:vre, signes digestifs, atteinte cutaneomuqueuse, signes hemorragiques, signes de choc. Mesllres immediates aprendre - hospitalisation en urgence, - isolement en chambre seule avec sas et lavabo equipe, - limiter au maximum les transferts du malade. Precalltions pOllr fe persollnef - habillement protecteur jetable obligatoire pour toute per-' sonne dans la chambre (masque, gants, blouse, lunettes), - mise de tout vetement et linge du malade et du personnel dans sac etanche a autoc1aver, - elimination des dechets, excretats et produits biologiques du malade dans un fut hermetique dec1are septique place a l'interieur de la chambre, - effectuer tous les prelevements diagnostiques en double sachet en indiquant "hautement contagieux" et prevenir le responsable du laboratoire de ces envois, - limiter le nombre de prelevements au strict necessaire, - limiter le nombre de personnes presentes dans la chambre simultanement (si possible une seule)o Confirmation dll diagnostic - prevenir le laboratoire du Centre de Reference des Fievres Hemorragiques a l'Institut Pasteur a Paris, - effectuer deux serologies a 8 jours d'intervalle, - eliminer une autre pathologie infectieuse d'importation (paludisme, diarrhee infectieuse, 0.0)0

Seul un personnel forme, informe et experimente doit etre au contact des patients et des prelevements biologiqueso

une tenue specifique avant d'entrer dans la chambreo II facilite le contróle du traitement de l'air pour les chambres en surpression. - Le traitement de l'air : l'isolement protecteur pour etre efficace doit comporter un systeme du traitement de l'air. La premiere mesure eonsiste a faire beneficier la ehambre de surpression par rapport au couloir et au sas si bien que lors de l'ouverture des portes c'est l'air de la chambre qui passe a l'exterieur et non l'inverse. Le respect de eette mesure suppose une porte toujours maintenue fermćeo Un haut renouvellement d'air filtre est necessaire avec un filtre absolu terminal. Au mieux les patients beneficient d'une mise sous tlux laminaire qui eonstitue une mesure aujourd'hui validee pour les greffes de moelle pendant toute la durće de l'aplasie. En de tels cas, l' essentiel est de respecter au mieux la protection liee au tlux et d'eviter toute "rupture de tlux" du fait des soins. - Le lav,age des mains est toujours un lavage antiseptiqueo - Les materieIs mćdicaux, tensiometre, stethoscope, thermometre doivent etre individuels, a usage unique, ou reserves a une seule chambre, un seul patient. - Le linge doit etre sterile pour les unites de greffe de moelle. - La vaisselle fait l'objet d'une procedure de desinfection. - Le point essentiel est eonstitue par l'organisation des soins par un personnel specifiquement informe et forme a la gestion des risques infectieux et au respect absolu des mesures d'hygiene en particulier vis-a-vis du lavage des mains et du respect des tenues du pers,onnel : usage de gants, masque, surblouse a usage unique. - Les visites sont supprimees ou strictement reglementeeso Diverses mesures ont ete prises permettant des visites au travers de couloirs de circulation specifiques et proteges par des baies vitreeso L'humanisation des conditions d'hospitalisation peut ici etre tres directement eontradictoire avec la securite des patients si la gestion des circuits visiteurs n'a pas ete programmee. - L'eau doit faire l'objet d'une grande vigilance lorsque eelle-ci est filtree, le contrOle et le ehangement des filtres doivent etre tres regulierso Des contrOles bacteriologiques trimestrieIs sont neeessaires. La maintenance de la robinetterie (detartrage etjavellisation doivent faire l'objet d'un protocole ecrit).

Isolement protecteur ou absolu Cet isolement a pour objectif de proteger le patient de tout apport de germes venant de l' exterieuro Les indications sont strictement limitees a des patients hautement receptifs a l'infection du fait d'une pathologie ou d'un traitement induisant une immunodepression severe. II s'agit principalement CONCLUSION de patients presentant une agranulocytose (neutropenie < 500/mm3) ou de patients subissant une greffe de moelle La maitrise de la diffusion des agents infectieux en milieu ou une transplantation d'organe. Les grands briHes doivent . hospitalier passe nćeessairement par la prevention des modes egalement beneficier d'un isolement protecteur. Les mesures de transmission directe ou indircete, a l' oecasion des soins, prises comportent plusieurs aspects essentiels. Cet isolement ou du fait de la circulation des personnels de sante et des geographique fait appel non seulement au principe d'une patients. L'identification des infections ou des eolonisations chambre individuelle, mais aussi a un espace beneficiant de doit etre precoce afin que les mesures d'isolement nćees­ mesures de contróles pour toutes les sources possibles de saires soient prises d'emblee. La formation de tous les percontamination du patient : air, eau, dispositifs medicaux et sonnels, a ces regles, y eompris le personnel medical, est un prealable au respeet des recommandations en matiere d'isomateriel medical, circulation des personneso lement. Cependant, une retlexion s'impose egalement sur les - La chambre doit, chaque fois que cela est possible, com- concepts architecturaux des services, et sur les equipements, porter un sas qui presente plusieurs avantageso Le sas limite la afin que puisse etre mise en place l' organisation des soins circulation des personnes, i1 permet au personnel de revetir permettant la qualite et la securite pour tous les patientso

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ISOLATlON PRECAUTIONS IN HOSPITALS

SUMMARY

Isolation precautions in hospitals have been observed since the nineteenth century, so as to prevent spread of infection from the source to patients. There are 2 types of isolations: septic isolation, for patients known or suspected to be infected or colonized by transmissible pathogens, and. protective isolation for patients highly susceptible to infection. "Standard Precautions" are used as the primary strategy for a successful control of nosocomial infection. Other "transmission based precautions" are used to stop transmission according to each case: precautions against airborne transmission, against droplet transmission. and against contact transmission. Isolation precautions must be prescribed by a physician. Isolation precautions are one of the means used to controlling the spread bf multiresistant bacteria. All health care workers should be trained to apply those recommendations. Key-words: Isolation precautions - Airborne transmission - Droplet transmission - Contact transmission Multiresistant bacteria.

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