EMC-Dermatologie Cosmétologie 1 (2004) 165–187
http://france.elsevier.com/direct/EMCDC/
Manifestations cutanéomuqueuses des affections hépatobiliaires et pancréatiques Cutaneous and mucous manifestations in hepatobiliary and pancreatic affections E. Delaporte (Professeur des Universités, praticien hospitalier) *, F. Piette (Professeur des Universités, praticien hospitalier) Clinique de dermatologie, Centre hospitalier régional et universitaire, hôpital Claude Huriez, rue Michel Polonovski, 59037 Lille cedex, France
MOTS CLÉS Cirrhoses ; Cryoglobulinémies mixtes ; Glucagonome ; Hémochromatose ; Hépatites virales ; Lichen ; Panniculite ; Périartérite noueuse ; Porphyrie cutanée tardive ; Tumeurs pancréatiques
Résumé Les manifestations cutanées des affections hépatobiliaires et pancréatiques sont nombreuses et peuvent être révélatrices, ce qui fait tout leur intérêt pour le dermatologiste. Les fréquences d’observation sont très diverses et évoluent avec le temps pour certaines d’entre elles. Ainsi, l’association hépatite B-périartérite noueuse, qui était estimée entre 30 et 45 %, n’est plus actuellement que de 7 % environ suite aux campagnes de vaccination. À l’inverse, les affections liées à l’hépatite C, notamment les vasculites par cryoglobulinémies mixtes, sont en augmentation. En effet, la séroprévalence de l’hépatite C est voisine de 1 % en France d’où un nombre de sujets infectés estimé entre 500 000 et 600 000. Plus de la moitié d’entre eux ignorent cependant leur positivité, et contribuent à la dissémination du virus, surtout dans les milieux toxicomanes. La cirrhose éthylique demeure à l’origine de nombreux signes dermatologiques dont la plupart sont bien connus des hépatologues. Néanmoins, les syndromes carentiels, isolés ou combinés, qui y sont fréquemment associés peuvent être déroutants comme le syndrome du « pseudoglucagonome » observé dans les carences sévères en zinc. Les signes cutanés constatés au cours des autres cirrhoses sont le plus souvent de survenue tardive, sauf le prurit de la cirrhose biliaire primitive qui précède l’ictère cholestatique. Au cours des maladies pancréatiques, les manifestations cutanées sont classiques et souvent très évocatrices. Certaines sont fréquentes mais surtout connues des chirurgiens et des gastroentérologues, comme les hémorragies sous-cutanées des pancréatites aiguës sévères. D’autres comme les panniculites et les syndromes paranéoplasiques sont rares mais doivent absolument être reconnues. C’est ainsi que la nécessaire collaboration entre nos deux spécialités d’organe, sur laquelle nous avions insisté à propos de la prise en charge des affections du tube digestif (EMC, Dermatologie, 98 876-A-10, 2000), vaut également pour les maladies du foie et du pancréas. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
* Auteur correspondant. Adresse e-mail :
[email protected] (E. Delaporte). 1762-5696/$ - see front matter © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés. doi: 10.1016/j.emcdc.2004.10.001
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KEYWORDS Cirrhosis; Combined cryoglobulinaemia; Glucagonoma; Haemochomatosis; Viral hepatitis; Lichen; Panniculitis; Disseminating necrotizing periarteritis; Porphyria cutanea tarda; Pancreatic tumours
E. Delaporte, F. Piette Abstract Hepatobiliary and pancreatic affections may result in numerous cutaneous manifestations; these have often an indication value that makes them highly interesting for the dermatologist. Their frequency is variable and, in some of them, the evolution is progressive. The frequency of combined hepatitis B + disseminated necrotizing periarteritis which was estimated to be from 30% to 45% has been lowered to about 7% as a result of vaccination campaigns. Conversely, the frequency of the affections related to hepatitis C, in particular cryoglobulinaemia-induced angeitis, has increased. In France, hepatitis C seroprevalence is close to 1%, which indicates 500,000 to 600,000 infected individuals. However, over a half of them are not aware of such seropositivity, which contributes to virus dissemination, particularly in drug-addicted populations. Alcoholic cirrhosis induces numerous dermatologic signs well known by hepatologists. However, the frequently associated isolated or combined deficiency syndromes may be disconcerting, such as the pseudo-glucagonoma syndrome that is observed in severe zinc deficiency. The cutaneous signs observed with other types of cirrhoses are of later occurrence, except for the pruritus related to the primitive biliary cirrhosis that precedes cholestatic jaundice. In pancreatic diseases, cutaneous manifestations are common and, most of the time, indicative. Some of them are frequent but they are observed most of the time by surgeons and gastroenterologists; this is the case with the subcutaneous haemorrhage related to severe acute pancreatitis. Others, such as the panniculites and paraneoplastic syndromes, are rare but have to be detected. This is why a close collaboration between organ specialists is necessary, for the affections of the digestive tract as well as for the liver and pancreas diseases. © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.
Maladies hépatiques Hépatites virales Les hépatites virales (HV) sont des affections fréquentes qui constituent un réel problème de santé publique. Les manifestations extrahépatiques qui
leur sont associées, cutanées et autres, sont désormais bien identifiées, particulièrement dans les infections à VHC (Tableaux 1,2).1,2 Urticaires aiguës, exanthèmes maculopapuleux et plus rarement purpuras vasculaires sont des manifestations classiques mais rares, régulièrement citées dans les traités et les revues3 en association
Tableau 1 Manifestations dermatologiques et affections hépatopancréatiques. Manifestations dermatologiques Urticaire Vasculite urticarienne Périartérite noueuse forme systémique forme cutanée Purpura par cryoglobulinémie Porphyrie cutanée tardive Prurit Lichen plan Hyperpigmentation
Panniculite
Érythème nécrolytique migrateur
Affections hépatiques/pancréatiques associées HA (rare ++) HB (rare) HC HB (< 7 %) HC HC HC HB (rare ++) HC HB (rare) HC (15 %) Insuffisance hépatique (cholestase : penser à la cirrhose biliaire primitive [CBP]) HC (variations géographiques ++) Vaccination VHB (enfants ++) Hémochromatose CBP Maladie de Wilson (manifestation tardive) Pancréatite aiguë et chronique (éthylisme chronique > 60 %) Cancer du pancréas Déficit en alpha-1-antitrypsine Glucagonome Cirrhose éthylique Pancréatite chronique Syndrome de malabsorption HC (forme acrale)
Manifestations cutanéomuqueuses des affections hépatobiliaires et pancréatiques
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Tableau 2 Principales caractéristiques des hépatites A, B et C. A Parvovirus à ARN
B Hepadnavirus à ADN
Mode(s) de contamination
Orofécale
Parentéral Sexuel Maternofœtal
3
Populations exposées
Sujets jeunes – Tous pays
Toxicomanes Transfusés (risque quasi nul depuis 1988) Personnels de santé
4
Durée d’incubation Diagnostic sérologique en phase aiguë
2 à 6 semaines
1 à 6 mois
Ac anti-HA (IgM)
Ag HBS - Ac anti-HBC (IgM)
6
Marqueurs de guérison
Ac anti-HA (IgG)
7
Risque Non d’infection chronique Modes évolutifs Bénigne ++ Hépatite fulminante 1/100000
Ac anti-HBS – séroconversion E avec ADN viral négatif (efficacité du traitement) Oui
1
Type de virus
2
5
8
9 10
11
12
Vaccination Traitement de l’hépatite aiguë Traitement de l’hépatite chronique
Oui Non
Manifestations cutanées
Rares
Pas d’HA chronique
Chronicité 5 à 10 % - Cirrhose 20 – 30 % - Hépatocarcinome (incidence annuelle 3%) Oui Non
Analogues nucléosidiques 2 produits avec l’AMM (lamivudine, adéfovir) Interféron pendant 4 - 6 mois ??
aux HVA mais pour lesquelles les dermatologistes ne sont que très rarement sollicités. Elles ne seront donc pas détaillées. Par ailleurs, on ne connaît pas de manifestations cutanées associées aux hépatites D, E et G. Hépatite B Urticaires Le plus souvent il s’agit de manifestations à type de vasculite urticarienne s’intégrant dans un tableau de « pseudomaladie sérique » qui s’observe en phase préictérique (environ 6 semaines) dans 15 à 20 % des cas. S’y associent alors fièvre, arthralgies, protéinurie et/ou hématurie et parfois angio-
C Togavirus à ARN Hétérogénéité génétique ++ Parentéral Nosocomial Sexuel (risque très faible) Maternofœtal 3 % (risque augmenté si co-infection par VIH : 15 - 20 %) Toxicomanes ++, piercing et tatouages Transfusés (risque résiduel en 2000, 1/860000 dons, risque quasi maîtrisé depuis 2001) Personnels de santé Examens endoscopiques et interventions chirurgicales 2 à 8 semaines Ac anti-VHC (tardif) Prévalence séropositivité : - pays européens : 1,1 % - population mondiale : 3 % - (gradient Nord-Sud) Négativation de la PCR
Oui
Chronicité 50 – 70 % - Évolution cirrhogène 30 % - Hépatocarcinome 10 – 20 % Non Oui – Interféron à fortes doses
Interféron pégylé + ribavirine
15 – 20 %
œdème (4 %). Histologiquement, il existe une vasculite, lymphocytaire ou leucocytoclasique fonction de l’ancienneté de la lésion biopsiée. Bien que systématiquement mentionnées dans toutes les questions traitant du sujet, il est exceptionnel d’observer une vascularite urticarienne, voire une urticaire commune chronique, au cours d’une infection chronique par le VHB.4 Les références relatant ces associations sont d’ailleurs peu nombreuses et toutes anciennes. Dans une étude publiée en 1992 portant sur 72 cas de vascularite urticarienne, les auteurs ne trouvent aucun cas d’HB.5 Un cas d’urticaire neutrophilique révélateur d’une maladie de Still de l’adulte a récemment été rapporté chez un malade ayant une HB chronique.6
168 Syndrome de Gianotti-Crosti (SGC) Le SGC regroupe toutes les éruptions papuleuses à prédominance acrale, d’évolution spontanément favorable, essentiellement observées chez l’enfant (pic entre 2 et 6 ans) et réactionnelles à divers agents infectieux, principalement viraux. Le virus Epstein-Barr est désormais le plus fréquemment isolé, mais les virus des hépatites, surtout B et C doivent toujours être cherchés.7 L’hépatite, en règle anictérique, peut être contemporaine de l’éruption ou décalée de 1 à 2 semaines. Périartérite noueuse (PAN) On estime qu’approximativement 4 ‰ malades infectés par le VHB vont développer une PAN. À l’inverse, selon les séries, 30 à 50 % des malades présentant une PAN avaient un test positif pour l’AgHBs.8 Ce chiffre doit néanmoins être revu à la baisse du fait de la vaccination et actuellement la fréquence de l’association serait aux environs de 7 %.9 Les relations pathogéniques qui unissent cette angéite nécrosante systémique touchant les artères de petit et moyen calibres et l’HB ne sont pas totalement élucidées ; la médiation par les dépôts de complexes immuns circulants avec un rôle pathogène direct de l’antigène HBe est toujours évoquée. Les anticorps anticytoplasme des neutrophiles sont en règle générale négatifs et les PAN d’origine virale sont désormais individualisées de la forme commune d’origine essentiellement autoimmune.9 La PAN se révèle habituellement dans les 6 mois qui suivent la contamination mais peut apparaître simultanément.10 Les PAN associées au VHB se caractérisent par la fréquence des signes abdominaux, de l’insuffisance rénale, de l’hypertension artérielle maligne et de l’orchite. Les signes cutanés comprenant : purpura vasculaire plus ou moins nécrotique et ulcéré, livedo ramifié (Fig. 1) et nodules sous-cutanés douloureux, ne sont présents
Figure 1 Livedo ramifié (racemosa) diffus au cours d’une périartérite noueuse.
E. Delaporte, F. Piette que dans 10 à 20 % des cas. Il n’y a pas de corrélation entre la sévérité de la PAN et celle de l’HB qui est souvent peu évolutive. L’association secondaire d’un traitement antiviral, après contrôle de la maladie par les corticoïdes et immunosuppresseurs, doit être systématique et permet d’obtenir une séroconversion dans plus de 50 % des cas. Certains auteurs recommandent même l’abandon des corticoïdes et des immunosuppresseurs au profit de la combinaison traitement antiviral-plasmaphérèses.9 La forme cutanée de la PAN est très rarement rapportée en association avec le VHB :11 aucun cas trouvé sur les 79 étudiés par Daoud et al. en 1997, qui mentionnaient en revanche 1 cas d’HC.12 Manifestations postvaccinales On estime actuellement que 28 millions de français ont bénéficié de la vaccination anti-HB . Celle-ci a fait couler beaucoup d’encre, non pas tant en raison des effets secondaires cutanés peu nombreux, mais surtout du risque éventuel de déclenchement d’une sclérose en plaques dont on sait désormais qu’il ne diffère pas de celui d’une population témoin.13 D’un point de vue dermatologique, si l’on fait abstraction des réactions locales transitoires à type d’érythèmes, d’indurations, voire de nodules, et des réactions immunoallergiques communes à l’ensemble des vaccins,14,15 diverses manifestations cutanées ont été rapportées de façon anecdotique : il s’agit d’érythème polymorphe, d’érythème noueux, de purpura thrombopénique, de lupus systémiques ou cutanés,16 de vasculites systémiques dont deux cas de PAN cutanées,17 de morphées,18 d’un cas de mastocytome apparu sur le site vaccinal,19 d’un cas de pemphigoïde de l’enfant20 et d’un cas de syndrome de Gianotti-Crosti.21 Est-il nécessaire de préciser que dans toutes ces observations, la relation de cause à effet est impossible à affirmer ? Il en va de même pour le lichen plan survenant notamment chez l’enfant, le plus souvent après la deuxième ou la troisième injection dans un délai variant de quelques jours à 3 mois. Une trentaine d’observations ont ainsi été rapportées.22 Autres associations L’association à un lichen plan, exceptionnellement rapportée,23 une porphyrie cutanée tardive (PCT) ou une cryoglobulinémie mixte (CM) est beaucoup plus rare qu’avec l’HC (cf infra). Concernant la PCT, l’implication du VHB ne peut être suspectée qu’après recherche du VHC (co-infection fréquente chez les malades espagnols) et du virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Le portage chronique
Manifestations cutanéomuqueuses des affections hépatobiliaires et pancréatiques du VHB est très faible au cours de la PCT variant selon les études entre 0 et 18 %.24 La prévalence des CM au cours de l’HB chronique est comprise entre 10 et 15 %, mais l’HB ne représente que 2 % des causes de CM.25 Hépatite C En France, la prévalence de sujets ayant des anticorps anti-VHC est voisine de 1 %. Cependant, les chiffres varient énormément selon les populations étudiées : 25 % chez les sujets infectés par le VIH, 25 % chez les détenus et 60 % chez les toxicomanes. À ce jour, 200 000 sujets sont dépistés, ce qui représente moins de la moitié des porteurs du VHC si l’on considère qu’en France ils sont entre 500 000 et 600 000. Seuls 30 000 à 40 000 d’entre eux sont traités et le nombre des traitements nouvellement institués n’est que de 10 000 à 15 000 par an. Ces 5 dernières années, de nombreuses revues générales traitant des manifestations extrahépatiques26 et notamment cutanées, ont été publiées.2,27 Le plus souvent, aucune classification n’est proposée et ces affections sont juste déclinées les unes à la suite des autres, en général par ordre de fréquence. Nous avons ici adopté le plan de P. Cacoub, expert de la conférence de consensus sur l’HC qui s’est tenue en 2002.28 Manifestations liées avec certitude à l’infection par le VHC Cryoglobulinémies mixtes (CM). Les cryoglobulines sont des immunoglobulines (Ig) qui précipitent lorsque la température est inférieure à 37 °C. Il en existe trois types : les cryoglobulines de type I sont constituées d’une Ig monoclonale unique alors que les cryoglobulines mixtes sont constituées d’Ig polyclonales associées (type II) ou non (type III) à une Ig monoclonale. Le VHC est la cause des CM dans 80 à 90 % des cas.25 Il s’agit de la plus fréquente des manifestations extrahépatiques puisqu’elle s’observe chez 40 à 80 % des malades, le risque de développer une CM étant plus élevé chez la femme et en cas de consommation d’alcool supérieure à 50 g/j,29 et augmentant avec la durée d’évolution de l’HC. À l’exception de l’Italie, où l’on observe une prévalence élevée du génotype 2, les liens entre CM et génotype viral sont discutés. Cependant, Cacoub et al. dans leur étude prospective chez 1 614 malades, notent une plus grande fréquence des génotypes 2 et 3.29 L’implication du VHC dans la survenue des CM repose sur plusieurs arguments : • la prévalence très élevée des CM chez les malades avec HC chronique (56 à 95 %) ;
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• la présence d’ARN du VHC dans le cryoprécipité ainsi que dans les cellules endothéliales des vaisseaux des organes lésés dont la peau ;30 • l’effet de l’interféron. Les mécanismes physiopathogéniques de l’expansion polyclonale des lymphocytes B induite par l’infection virale commencent à être décryptés.31,32 Une des premières étapes est la fixation de la protéine E2 de l’enveloppe virale au CD81 des cellules B, molécule qui forme un complexe avec le CR2, le CD19 et le CMH de classe II. L’activation de ce complexe abaisse le seuil de stimulation antigénique des cellules B et augmente leur durée de vie via l’activation du proto-oncogène bcl-2.31 Par ailleurs, il vient d’être montré que chez les malades présentant une CM symptomatique, le taux des cellules T immunorégulatrices CD4+ CD25+ impliquées dans le contrôle de l’auto-immunité, était significativement abaissé comparativement aux malades sans CM ou avec CM asymptomatique.32 Le tableau clinique qui ne s’observe que chez 20 à 30 % des sujets présentant une CM, comprend purpura nécrotique (Fig. 2), ulcère, livedo, syndrome de Raynaud, arthralgies et asthénie diversement associés à une atteinte rénale, voire du système nerveux périphérique ou central. Dans plus de la moitié des cas, l’évolution clinique est bénigne,25 l’atteinte multiviscérale ne s’observant que chez 2 à 3 % des malades.29 Le traitement est celui de l’hépatopathie avec une nette supériorité de l’association interféronribavirine, par rapport à l’interféron seul, tant sur les signes cutanés (60 à 100 % de réponses) que rénaux (35 à 60 %) et neurologiques (25 à 80 %), pour peu que le malade soit répondeur virologique.28 De même, il existe une relation nette entre les réponses biologique et virologique puisque la CM disparaît chez 60 % des répondeurs contre 30 % des non-répondeurs. En revanche, il n’existe pas de corrélation systématique entre les réponses clinique et biologique puisque l’on peut observer la disparition du purpura malgré la persistance de la CM. À l’arrêt du traitement, le risque de récidive de la CM et des symptômes qui s’y rapportent est lié à la réapparition de la virémie. L’association à une corticothérapie générale ou à des plasmaphérèses n’apporte rien. Il faut signaler cet article récent qui rapporte pour la première fois l’aggravation d’une vasculite systémique (atteinte cutanée, rénale et neurologique) liée à une CM, par l’interféron pégylé.33 D’autres molécules ont également été utilisées dans quelques cas d’inefficacité ou de contreindication des anti-viraux, avec des résultats aléatoires pour l’infliximab,34 mais peut-être plus prometteurs pour le rituximab (anticorps monoclonal anti-CD20).35
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E. Delaporte, F. Piette
Figure 2 Purpura infiltré et nécrotique par cryoglobulinémie.
Très peu d’études ont en revanche été effectuées pour apprécier la prévalence des CM-VHC positives au cours des vasculites leucocytoclasiques. Les résultats d’une petite étude contrôlée (2 sur 25) plaident en faveur de la recherche du VHC et d’une CM en présence d’une vasculite d’origine indéterminée.36 Porphyrie cutanée tardive (PCT). Caractérisée par un déficit en uroporphyrinogène décarboxylase, cette porphyrie peut être familiale à transmission autosomique dominante, ou sporadique. Dans cette dernière forme, plus fréquente, le déficit hépatocytaire ne devient symptomatique que sous l’effet de divers facteurs déclenchants dont les infections virales et en particulier l’HC. Cliniquement, il existe une fragilité cutanée prédominant en zones photoexposées, une hypertrichose associée à une hyperpigmentation des zones temporomalaires (Fig. 3) et dans les formes évoluées, un état sclérodermiforme de la tête et du cou chez 30 % des malades. Les études de prévalence font état d’un gradient Nord-Sud avec des chiffres compris entre 8 et 18 % pour les pays du Nord de l’Europe et allant jusqu’à 95 % pour les pays du Sud de l’Europe.28 À l’inverse, au sein d’une population infectée par le VHC, la prévalence de la PCT est de 3 à 5 %. Le rôle physiopathogénique du VHC dans la survenue de la PCT n’est pas connu. Des anomalies du métabolisme du fer ainsi que l’action d’autres cofacteurs tels que l’alcool et certains médicaments sont incriminées. À ce propos, l’augmentation de fréquence des mutations génétiques de l’hémochromatose chez les malades PCT-VHC positifs mérite d’être soulignée. En effet, ces muta-
tions (C282Y et H63D) du gène HFE sont des facteurs précipitants et aggravants chez ces malades.37 Outre la suppression des facteurs déclenchants et la photoprotection, le traitement de première intention est la déplétion ferrique par saignées répétitives.38 Le traitement antiviral ne sera discuté qu’en seconde intention, ce d’autant qu’il peut aggraver la PCT39 mais surtout parce que la PCT semble être un facteur de mauvaise réponse à l’interféron.40 Syndrome sec. La grande hétérogénéité des critères cliniques et histologiques retenus selon les auteurs explique l’extrême variabilité des chiffres que l’on trouve dans la littérature traitant du sujet.41 Ainsi, selon la provenance des études, l’association varie de 0 à 57 % et va de la simple atteinte histologique asymptomatique à type de sialadénite
Figure 3 Porphyrie cutanée tardive et alcoolisme « mondain ». Hypertrichose majeure et hyperpigmentation des zones temporomalaires.
Manifestations cutanéomuqueuses des affections hépatobiliaires et pancréatiques lymphocytaire, au véritable syndrome de GougerotSjögren (G-S).42 De l’ensemble de ces publications, il ressort que : • un syndrome sec clinique, plus souvent buccal qu’oculaire, est observé chez 10 à 20 % des malades VHC positifs ;1 • la sialadénite lymphocytaire associée au VHC est péricapillaire et sans destruction des canaux glandulaires contrairement au syndrome de G-S dans lequel elle est péricanalaire et destructrice ; • le syndrome de G-S est exceptionnellement associé à l’infection par le VHC ; • le syndrome sec ne s’améliore pas sous traitement antiviral. Manifestations peut-être liées à l’infection par le VHC Lymphomes non hodgkiniens (LNH). Tout comme pour le syndrome sec et le lichen plan (cf infra), il existe une grande discordance de résultats selon les études, le lien épidémiologique entre LNH et VHC ayant principalement été avancé par les auteurs italiens.25 Ceci n’est pas confirmé en France puisque la prévalence des anticorps anti-VHC chez les malades ayant un LNH est de 2 à 4 % et donc non significativement différente par rapport aux groupes témoins.43 Il s’agit de proliférations lymphocytaires B qui pourraient être une conséquence de l’expansion clonale B décrite au cours des cryoglobulinémies mixtes.31 Les localisations extraganglionnaires (foie, parotide, estomac, cerveau, rate) sont fréquentes tandis que l’atteinte cutanée est beaucoup plus rare.44 Vasculites systémiques. Dans l’étude prospective de Cacoub portant sur 1 614 malades, les vasculites non cryoglobulinémiques étaient trouvées dans 1 % des cas.29 PAN systémique et cutanée. La prévalence des anticorps anti-VHC chez les malades ayant une PAN varie de 5 à 12 %.28 En présence d’une vasculite systémique, les critères suivants permettent de distinguer une vasculite par CM d’une PAN associée au VHC :45 franche altération de l’état général avec fièvre et amaigrissement, mononeuropathie sensitivomotrice multifocale sévère, hypertension artérielle maligne, angéite cérébrale, douleurs abdominales ischémiques, microanévrysmes hépatiques ou rénaux, syndrome inflammatoire et insuffisance rénale. L’atteinte histologique est également différente puisqu’il s’agit, dans la PAN, d’une vasculite nécrosante des artères de moyen calibre et non des petits vaisseaux (veinules, capillaires et artérioles). Dans l’étude de Cacoub, une rémission complète a été obtenue dans 68 % des cas avec une bithérapie
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antivirale (interféron-ribavirine) prolongée (18 à 24 mois) précédée d’une corticothérapie (1 mois) associée à des échanges plasmatiques.45 La PAN cutanée paraît plus fréquemment associée à l’HC46 qu’à l’HB.12 Dans une étude rétrospective, Soufir et al. trouvent cinq malades VHC positifs sur 16 présentant une PAN cutanée.46 Dans tous les cas, la contamination par le VHC a précédé la survenue de la PAN. Trois cas sur cinq avaient une CM et les auteurs concluaient sur la possibilité que certaines PAN cutanées puissent être une expression d’une CM associée au VHC. Vasculite urticarienne. D’authentiques vasculites urticariennes parfois hypocomplémentémiques ont été décrites en association à l’HC.3 Elles peuvent être révélatrices de l’infection.47 Prurit. Outre le fait qu’il puisse être révélateur de l’HC,48 le prurit peut constituer la principale manifestation de l’hépatopathie. Il s’observe dans approximativement 15 % des cas d’HC chronique et n’est corrélé ni à une cholestase biologique ni au traitement antiviral.28 Dans 70 % des observations, on note des lésions peu spécifiques associées à type de lésions eczématiformes, de xérose ou de prurigo.49 Il s’agit d’un symptôme qui requiert toute notre attention car il peut être très invalidant et entraîner un syndrome dépressif réactionnel.50 En dehors des soins locaux (émollients ++) qui doivent toujours être proposés ainsi que des chélateurs des sels biliaires et des antihistaminiques très souvent prescrits sans grande efficacité, on peut avoir recours à la photothérapie UVB,51 voire à des systèmes d’épuration extrahépatique dans les cas les plus sévères.50 Lichen plan (LP). Contrairement à Cacoub qui classe le LP dans les manifestations dont l’association à l’infection par le VHC paraît fortuite (cf infra), nous pensons qu’en dépit des incertitudes qui pèsent encore sur le sujet, le LP a peut-être plus sa place dans ce sous-chapitre. La fréquence accrue des hépatopathies chroniques chez les malades ayant un lichen est débattue depuis le début des années 1980.41 Depuis 1992, les très nombreuses publications contradictoires concernant l’association LP-HC n’ont fait qu’alimenter la controverse. Dans une revue très complète, Carrozzo et Gandolfo colligent ainsi pas moins de 33 études émanant de 11 pays et totalisant 2 177 malades. Trois autres études très récentes totalisant 144 malades méritent également d’être répertoriées.52–54 La prévalence des anticorps anti-VHC chez les sujets présentant un LP est extrêmement variable en fonction des pays, et d’une étude à l’autre pour un même pays : 0 à 55 % aux États-Unis, 0 pour la Grande-Bretagne, les Pays-Bas et le Népal,52 3,8 %
172 dans l’Est de la France (2,6 % pour le groupe contrôle), 9 à 44 % en Espagne,54 9 à 35 % en Italie, 16 % au Nigeria,53 21 % en Égypte et jusque 62 % au Japon. On retrouve ici le gradient Nord-Sud de prévalence de l’HC et l’on peut conclure de ces études que l’association LP-HC est dépendante de l’origine géographique des malades et qu’elle doit être systématiquement cherchée dans les pays d’Europe du Sud, en Afrique et au Japon, surtout s’il s’agit d’un lichen buccal érosif (Fig. 4).41,54 Cette hétérogénéité géographique pourrait s’expliquer en partie du fait de différences génétiques des populations étudiées. L’allèle HLA-DR6 est ainsi significativement trouvé chez les malades italiens présentant l’association lichen buccal-HC.41 L’analyse des données expérimentales fait suggérer que le VHC est impliqué dans la pathogénie du LP via l’induction locale d’une réponse immune spécifique.41 La détection du génome viral dans les lésions qui constituerait un argument de poids en faveur de l’association n’a néanmoins jamais été rapportée. Manifestations dont l’association à l’infection par le VHC paraît fortuite Ce sous-chapitre concerne toute une série de manifestations qui n’ont été décrites que sous forme de cas cliniques isolés et dont le caractère anecdotique n’est pas discuté. Nous ne ferons donc que les citer et n’en référencerons que quelques-unes. Pour les autres, nous renvoyons les lecteurs aux revues générales récentes :2,3,26,27 urticaire chronique,55 syndrome des doigts rouges,56 malakoplakie,
E. Delaporte, F. Piette érythème polymorphe, érythème noueux, maladie de Behçet, pyoderma gangrenosum, syndrome de Sweet,57 érythème nécrolytique acral (syndrome du pseudoglucagonome), maladie de Still, panniculite lobulaire... Manifestations liées ou associées au traitement antiviral Dans pratiquement toutes les observations c’est l’interféron, seul ou en association à la ribavirine, qui est impliqué. La ribavirine seule a cependant été incriminée dans la survenue d’éruption maculopapuleuse58 et de réaction photoallergique.59 Sarcoïdose. Depuis 1987, date à laquelle a été rapportée la première observation de sarcoïdose survenue après traitement par interféron, une cinquantaine d’observations ont été publiées dont une quarantaine dans le cadre du traitement d’une HC chronique.60,61 L’atteinte cutanée, souvent à l’origine du diagnostic, est notée dans la moitié des cas, isolée ou associée à des manifestations systémiques. Le délai d’apparition varie de 15 jours à 30 mois (3 à 4 mois en moyenne) et la régression spontanée des lésions en quelques mois est observée dans la plupart des cas, sans que l’interféron soit nécessairement arrêté ou diminué. Divers. Mis à part les réactions locales aux points d’injection à type d’inflammation,62 de réactions bulleuses ou de vasculite, diverses manifestations ont été décrites : réactions eczématiformes à prédominance acrale62 ou nummulaires,63 hyperpigmentation cutanéomuqueuse,64 érythème facial, hypertrichose,65 modifications des cheveux,66 aggravation ou déclenchement de psoriasis, de LP, de vitiligo ou de lupus érythémateux,67 et aggravation d’une vasculite systémique liée à une CM par l’interféron pégylé.33 Ces effets secondaires peuvent entraîner l’arrêt du traitement, comme cela a été le cas pour la moitié des malades de la série de Dereure,62 mais sont en général résolutifs en quelques mois à l’arrêt du traitement.
Insuffisance hépatique et cirrhoses
Figure 4 Lichen érosif lingual chez une malade VHC positive.
Les manifestations cutanées pouvant être observées en cas d’insuffisance hépatique, quelle que soit son étiologie, sont bien connues et particulièrement fréquentes dans la cirrhose éthylique68 : • les angiomes stellaires et les télangiectasies sont fréquents et prédominent sur le visage et la partie supérieure du tronc ; • l’érythème palmaire ; • les modifications d’origine endocrinienne liées à une hyperœstrogénie relative avec atrophie testiculaire : la peau est fine et dépilée et une gynécomastie peut apparaître ;
Manifestations cutanéomuqueuses des affections hépatobiliaires et pancréatiques • la circulation veineuse collatérale abdominale due à l’hypertension portale ; • le prurit et l’ictère en rapport avec la présence de sels biliaires dans la peau du fait de la cholestase intra- ou extrahépatique. Le prurit, noté dans 40 à 50 % des cas est d’intensité variable selon les étiologies (cf infra). Il n’est pas corrélé aux taux plasmatiques des sels biliaires ; • l’hyperpigmentation, diffuse ou localisée, n’est pas de mécanisme univoque. Hypermélanocytose et/ou hypersidérémie sont diversement associées en fonction des étiologies ; • l’hippocratisme digital et la leuconychie totale ou signe des ongles blancs de Terry due à un épaississement des tissus du lit unguéal. En dehors de ces signes communs qui ne sont pas toujours présents, certaines manifestations s’observent plus particulièrement selon qu’il s’agit d’une cirrhose éthylique (principale cause en France), biliaire (cirrhose biliaire primitive) ou métabolique (hémochromatose et maladie de Wilson – le déficit en alpha-1-antitrypsine est traité dans le chapitre des affections pancréatiques). Cirrhose éthylique La liste des signes cliniques en relation avec l’éthylisme chronique est impressionnante68 et nous n’en détaillerons que quelques-uns. Syndromes carentiels Les multiples carences (vitamines, protéines, acides gras essentiels [AGE], oligoéléments...) sélectives ou plus souvent combinées sont fréquentes chez l’éthylique chronique. Les manifestations cutanéomuqueuses sont très variées, évocatrices dans certains cas mais parfois trompeuses. La glossite et la chéilite sont communes à plusieurs déficits mais il existe en général une manifestation dominante qui permet d’orienter le diagnostic. - Éruption photodistribuée dans la pellagre (déficit en vitamine PP) dont le tableau peut se compléter de signes digestifs (diarrhée, épigastralgies) et de façon plus tardive de manifestations psychiques (apathie, démence). - Hyperkératose folliculaire (HF) dans les déficits en vitamines A et C. Dans la carence en rétinol, l’HF des faces d’extension des membres et des extrémités, ainsi que la xérose généralisée sont évocatrices mais moins spécifiques et précoces que l’atteinte ophtalmologique (baisse de la vision crépusculaire et xérophtalmie). Dans le scorbut, l’HF du tronc, des fesses et des membres s’associe à un purpura pétéchial périfolliculaire avec poils en « tire-bouchon ».69 L’existence d’une gingivite hypertrophique hémorragique est également un signe très évo-
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cateur. Les complications hémorragiques, avec en particulier les placards ecchymotiques, surviennent plus tardivement dans un contexte d’asthénie, d’arthralgies et de myalgies. - Dermite d’aspect séborrhéique et/ou dermite eczématiforme avec atteinte périorificielle dans les carences en vitamines du groupe B, en zinc et/ou en AGE. Dans les déficits en zinc, on observe des lésions érythématosquameuses péribuccales, palpébrales, périnarinaires, génitales et périanales où l’évolution est souvent érosive avec extension à la face interne des cuisses et à la région sacrofessière. Des placards eczématiformes ou psoriasiformes des membres sont parfois associés. Dans les formes sévères, un tableau d’érythème nécrolytique migrateur (syndrome du pseudoglucagonome) peut être noté (Fig. 5).70 Les manifestations muqueuses (stomatite, glossite, perlèche, conjonctivite parfois) sont très fréquentes et d’un grand intérêt diagnostique dans les formes mineures où les lésions sont plus discrètes à type d’eczéma craquelé (Fig. 6) ou d’intertrigo des régions génitales. Les carences en AGE sont rarement isolées. Le tableau clinique est peu spécifique et évoque volontiers une dermite microbienne ou séborrhéique avec des lésions érythématosquameuses des grands plis, du visage, du cuir chevelu, voire généralisées. La peau est sèche, atrophique et des aspects ichtyosiformes ou d’eczéma craquelé, du purpura par fragilité capillaire peuvent être notés. Les atteintes périorificielles sont parfois présentes et soulèvent la question du diagnostic différentiel et/ou de l’association possible avec une carence en zinc. Lipomatose de Launois-Bensaude Bien que le rôle de l’alcool ne soit pas exclusif et demeure mal compris, cette lipomatose multiple symétrique est très fréquemment associée à l’intoxication alcoolique. Il s’agit de volumineuses masses adipeuses siégeant préférentiellement dans la région cervicale postérieure (bosse de bison) (Fig. 7), les creux sus-claviculaires, la racine des bras (aspect en « manches bouffantes ») et la partie supérieure du tronc. Des localisations linguales ont également été décrites. Le préjudice esthétique ainsi que la gêne vestimentaire sont souvent majeurs. Il faut également mentionner la possibilité de complications à type de compressions cervicales, médiastinales ou rachidiennes, et de syndrome d’apnée du sommeil. Le traitement repose sur les liposuccions ou l’exérèse chirurgicale chez un patient sevré et sans trouble de la coagulation car le risque de lésions vasculaires est important surtout avec les liposuccions.
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E. Delaporte, F. Piette
Figure 5 Carence sévère en zinc chez une éthylique chronique. Dermatose érosive étendue à type d’érythème nécrolytique : « pseudoglucagonome ».
Figure 7 Lipomatose de Launois-Bensaude. Volumineuses masses graisseuses symétriques des régions cervicales et parotidiennes.
Figure 6 Eczéma craquelé étendu par carence en zinc chez un éthylique chronique.
Psoriasis Bien qu’il n’y ait pas vraiment de consensus sur la question, de nombreuses études font état d’une plus grande prévalence de buveurs excessifs d’alcool chez les malades psoriasiques,71 ce qui est très largement confirmé par notre expérience à Lille. Ceci se traduit par une aggravation et une pérennisation du psoriasis, ainsi qu’une nette résistance
aux traitements locaux bien conduits (dans le cadre d’une hospitalisation). À l’inverse, des améliorations franches s’observent en période d’abstinence, en l’absence de tout traitement. Le rôle de l’alcool et celui du tabac dont la consommation importante est souvent associée, ne sont pas connus.72 Syndrome du pseudoglucagonome (cf infra) Hémochromatose héréditaire (HH) Il s’agit d’une maladie autosomique récessive dont la prévalence en France est de 1/300, ce qui en fait
Manifestations cutanéomuqueuses des affections hépatobiliaires et pancréatiques la plus fréquente des maladies génétiques. Elle résulte d’une hyperabsorption du fer alimentaire qui entraîne une surcharge ferrique des organes : foie, pancréas, cœur, glandes endocrines, articulations et peau.73 La découverte en 1996 du gène HFE (H pour hémochromatose et FE pour fer) situé sur le bras court du chromosome 6 et de sa mutation C282Y trouvée à l’état homozygote chez 80 à 96 % des malades nord-européens,74 a transformé la prise en charge diagnostique de l’HH qui reposait initialement sur des critères phénotypiques clinicobio-histologiques parfois pris en défaut. À côté de la forme HFE 1 correspondant à la mutation C282Y, cinq autres entités ont été individualisées75 et l’on parle désormais des « hémochromatoses génétiques ». L’affection s’exprime généralement entre 30 et 40 ans chez l’homme et plus tardivement chez la femme relativement protégée par la déplétion ferrique due aux règles et aux grossesses. La maladie évoluée qui était décrite comme une « cirrhose bronzée avec diabète » ne s’observe plus que dans moins de 10 % des cas au moment du diagnostic, en raison des dépistages systématiques des parents des malades. Peuvent s’observer de façon très diversement associée du fait d’une faible expressivité : asthénie (70 %), cirrhose, arthropathies multiples (chondrocalcinose ou arthropathie souschondrale), diabète insulinodépendant, insuffisance gonadohypophysaire, cardiomyopathie non obstructive et mélanodermie. Cette dernière est observée tardivement mais son aspect gris verdâtre avec accentuation sur les zones photoexposées, les cicatrices, les organes génitaux et les muqueuses est très évocateur. Elle résulte d’une stimulation de la mélanogenèse par l’hémosidérine. À ce stade, les signes cutanés d’insuffisance hépatocellulaire sont également observés et il existe parfois une koïlonychie. L’augmentation du coefficient de saturation de la transferrine supérieur à 45 % est le test biologique le plus sensible car il reflète l’hyperabsorption digestive. Il n’est toutefois pas spécifique car il est élevé dans d’autres causes de surcharge en fer comme la cirrhose alcoolique, l’HC chronique et la PCT au cours de laquelle la fréquence des mutations du gène HFE est élevée.76 Le traitement repose sur la déplétion ferrique par saignées itératives et poursuivies à vie de façon à maintenir la ferritinémie en-dessous de 50 mg/ml,73 et bien sûr l’éviction de l’alcool.74 L’avenir est probablement à l’utilisation de nouvelles molécules chélatrices ou de transporteurs spécifiques du fer comme la ferroportine.77
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Maladie de Wilson (MW) La MW ou dégénérescence hépatolenticulaire est une maladie génétique autosomique récessive provoquée par une accumulation de cuivre dans l’organisme résultant d’une anomalie des protéines transporteuses, ATP7A et ATP7B. Les mutations des gènes codant ces deux ATPases de type P ont été récemment identifiées.78 S’il était classiquement admis qu’il fallait évoquer la MW chez des sujets de moins de 30 ans, on sait désormais qu’elle peut se révéler tardivement, chez des sujets de plus de 60 ans. Les principaux signes cliniques sont neurologiques et hépatiques.79 Les signes d’insuffisance hépatocellulaire peuvent être révélateurs.80 Les troubles de la pigmentation peuvent être marqués mais sont tardifs et ne s’observent plus guère : hyperpigmentation brunâtre prédominant à la face antérieure des jambes liée à un dépôt de mélanine le long de la jonction dermoépidermique, coloration bleutée des lunules par dépôt de cuivre dans les ongles. L’anneau vert péricornéen de Kayser-Fleischer, pathognomonique mais inconstant (80 % des cas), est révélé par l’examen à la lampe à fente. Les marqueurs biologiques sont la baisse de céruloplasminémie < 0,2 g/l et l’augmentation de la cuprurie présentes respectivement dans 80 % et 85 % des cas. Il faut noter que dans 10 % des cas manquent l’anneau de KayserFleischer et ces deux stigmates biologiques. La D-pénicillamine, chélateur du cuivre et traitement historique de la MW, est progressivement remplacée par le zinc, la trientine et le tétrathiomolybdate77. Cirrhose biliaire primitive (CBP) Cette maladie est due à la destruction progressive des canaux biliaires portaux de petit et moyen calibre par un processus inflammatoire chronique. L’asthénie et le prurit, important et permanent, sont les deux symptômes qui doivent faire évoquer le diagnostic chez une femme entre 40 et 50 ans.81,82 Ils précèdent parfois de plusieurs mois l’ictère par cholestase intrahépatique. Les autres signes cutanés sont la mélanodermie (Fig. 8) qui prédomine sur les zones photoexposées et les xanthomes plans ou tubéreux et/ou xanthélasma liés à l’hypercholestérolémie secondaire à la cholestase.83 La présence d’anticorps antimitochondries dans 90 % des cas, et particulièrement des anti-M2, considérés comme les plus spécifiques, ainsi que l’association fréquente à d’autres maladies autoimmunes (sclérodermie, vitiligo, lichen plan, pemphigoïde, syndrome de Gougerot-Sjögren...) sont autant d’arguments en faveur de l’origine autoimmune de la CBP.83,84 Le pronostic est conditionné
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E. Delaporte, F. Piette pression et de stase. La rareté de l’affection dans les pancréatites aiguës sévères, sa survenue lors d’affections pancréatiques à lipasémie normale montrent cependant que le mécanisme exact de l’atteinte cutanée n’est pas totalement élucidé.86
Figure 8 Cirrhose biliaire primitive. Mélanodermie étendue et lésions de prurit (excoriations et lichénifications) du thorax.
par l’évolution inexorable vers la cirrhose mais aussi les maladies associées, notamment la sclérodermie.84,85 La colestyramine et l’acide ursodésoxycholique, chélateurs des sels biliaires, sont les principaux traitements du prurit. La puvathérapie, la rifampicine82 et les plasmaphérèses ont également été proposées.
Maladies pancréatiques
Manifestations cliniques La panniculite pancréatique touche avec prédilection l’homme entre 50 et 70 ans et n’est constatée que chez 2 à 3 % des malades atteints d’affection pancréatique. Les lésions cutanées sont des nodules érythémateux profondément enchâssés dans la peau, de 1 à 3 cm de diamètre, siégeant le plus souvent sur les membres inférieurs et plus particulièrement dans les régions périarticulaires (mais des atteintes disséminées touchant parfois le visage sont possibles). On peut observer également des plaques inflammatoires localisées aux extrémités ou aux points de pression, en particulier les fesses. Ces éléments qui dans 40 % des cas précèdent les manifestations pancréatiques de quelques semaines ou mois sont habituellement très douloureux et peuvent se fistuliser avec émission d’un liquide brun jaunâtre huileux. Ils évoluent sur 2 à 8 semaines et laissent une cicatrice pigmentée parfois déprimée (Fig. 9).87 Les poussées de panniculite qui surviennent dans un contexte d’altération de l’état général s’accompagnent souvent de fièvre et d’arthralgies (mono-, oligo- ou polyarthrite). Des atteintes osseuses (cytostéatonécrose médullaire en particulier des os des doigts, du carpe ou des pieds entraînant d’importantes douleurs, nécroses aseptiques des têtes fémorales), des nécroses adipeuses de la sousmuqueuse intestinale, des thromboses vasculaires, des épanchements séreux sont également possibles. Examens paracliniques Le bilan biologique permet de suspecter l’origine pancréatique de cette panniculite. Il existe un syn-
Manifestations cutanées des pancréatites (Tableau 1) Panniculite pancréatique Encore appelée cytostéatonécrose d’origine pancréatique ou adiponécrose cutanée nodulaire (le terme « maladie de Weber-Christian d’origine pancréatique » doit être abandonné86), cette panniculite décrite en 1883 par Chiari est due à la libération dans la circulation d’enzymes pancréatiques, en particulier de lipase, qui détruisent le tissu graisseux. La trypsine a également une part de responsabilité en altérant la perméabilité des vaisseaux cutanés, ce qui pourrait expliquer la localisation préférentielle des lésions dans les zones de
Figure 9 Panniculite pancréatique. Cicatrices déprimées, cupuliformes et pigmentées.
Manifestations cutanéomuqueuses des affections hépatobiliaires et pancréatiques drome inflammatoire lors des poussées, une hyperleucocytose avec polynucléose neutrophile et de façon inconstante une éosinophilie. Celle-ci est considérée comme très évocatrice. Dans 90 % des cas, les taux sanguins de lipase et/ou d’amylase sont élevés (de manière souvent dissociée) et leur excrétion urinaire (lipasurie et amylasurie) est augmentée. Le dosage de l’alpha-1-antitrypsine est normal. Faite au bistouri, la biopsie large et profonde d’une lésion nodulaire récente montre des foyers de nécrose des cellules graisseuses dont il persiste des fragments de membrane épaissie avec parfois des microcalcifications précoces. C’est l’image caractéristique des cellules « fantômes ». En bordure des foyers de nécrose graisseuse, l’infiltrat inflammatoire neutrophile initial devient secondairement granulomateux avec lipophagie et évolution finale vers la fibrose. Étiologies et pronostic L’atteinte pancréatique associée est variable. Dans près de deux tiers des cas, il s’agit d’une pancréatite aiguë ou chronique dont les étiologies sont multiples : lithiase biliaire, traumatisme abdominal, ischémie, médicaments,88 pancreas divisum, tumeur intracanalaire papillaire et mucineuse,89 primo-infection par le VIH avec syndrome hémophagocytaire mais surtout éthylisme chronique noté chez plus de 60 % des malades. Au cours de ces pancréatites qui peuvent évoluer sans douleurs abdominales et se compliquer de pseudokystes et/ou de fistules (habituellement pancréaticoportales90 et plus rarement pancréaticopleurales), les nodules de cytostéatonécrose sont en règle peu nombreux, généralement moins d’une dizaine.87 L’existence d’une panniculite au cours d’une pancréatite est considérée comme un facteur de mauvais pronostic et la mortalité survient dans plus de 40 % des cas. Lorsqu’un traitement chirurgical étiologique est possible, une guérison cutanée est souvent constatée. Sur le plan symptomatique, on peut proposer des anti-inflammatoires non stéroïdiens. Dans 30 % des cas de panniculite, l’affection pancréatique associée est un cancer. De façon beaucoup plus rare, la pathologie pancréatique associée peut être un pseudokyste posttraumatique. Enfin, dans certains cas, aucune pathologie pancréatique n’est découverte. Cette situation est cependant exceptionnelle, tout comme celle récemment rapportée de panniculite au cours de laquelle c’est un cancer hépatique primitif qui a été diagnostiqué.91 L’hypothèse d’un processus inflammatoire réactionnel et/ou d’une compression pancréatique ayant entraîné une libération massive d’enzymes a été avancée.
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Diagnostic différentiel Le principal diagnostic différentiel de la panniculite pancréatique est la panniculite par déficit en alpha-1-antitrypsine (A1AT).92 C’est l’un des déficits héréditaires les plus fréquents. La symptomatologie clinique est variable selon les phénotypes homozygotes et hétérozygotes qui ont été décrits dans cette affection. Dans les formes sévères de phénotype homozygote Pi (protease inhibitor) ZZ,93 ce sont les atteintes pulmonaires, avec un emphysème panlobulaire débutant précocement et aggravé par le tabac, et hépatiques avec hépatopathie chronique évoluant vers la cirrhose, qui dominent le tableau. C’est également dans ces formes que s’observent la plupart des panniculites dont l’intérêt est qu’elles peuvent être révélatrices du déficit.94 Les lésions siègent préférentiellement sur le tronc et les parties proximales des membres. L’association à une fièvre et à des douleurs articulaires n’est pas rare et les nodules inflammatoires évoluent classiquement vers l’ulcération. L’image histologique est celle d’une panniculite lobulaire aiguë avec infiltration massive de neutrophiles, évoluant vers la nécrose. Le diagnostic repose sur le dosage du taux sérique d’A1AT qui peut toutefois être normal dans les déficits qualitatifs qui requièrent alors l’identification de la mutation. La Disulone® constitue le traitement de première intention à la dose de 100 mg/j pendant 1 à 3 mois. Les cyclines à raison de 200 mg/j peuvent également être efficaces. Néanmoins, les formes sévères peuvent justifier la prescription d’A1AT purifié d’origine humaine94 ou recombinante. Hémorragies sous-cutanées Elles s’observent dans 1 à 3 % des pancréatites aiguës et sont la traduction de la diffusion selon des trajets anatomiques de l’hémorragie par nécrose du pancréas.95 La diffusion à partir de l’espace rétropéritonéal vers les muscles de la paroi abdominale latérale se manifeste par une ecchymose des flancs encore appelée signe de Grey Turner. L’ecchymose peut être également périombilicale (signe de Cullen) lorsque la diffusion s’est faite le long du ligament rond vers l’ombilic. Ces deux signes sont parfois associés chez un même malade (Fig. 10). Ils sont exceptionnellement inauguraux et apparaissent après 2 à 3 jours d’évolution de la pancréatite. Ils sont considérés comme un marqueur de gravité avec une mortalité de l’ordre de 40 %. Il est à signaler que le signe de Cullen n’est pas spécifique. Il a été décrit initialement au cours d’une rupture de grossesse extra-utérine. Depuis,
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Figure 10 Placards ecchymotiques des flancs (signe de Grey Turner) et de la région ombilicale (signe de Cullen) au cours d’une pancréatite aiguë sévère.
on l’a rapporté dans de nombreuses circonstances : carcinome hépatique, abcès hépatique, après biopsie hépatique, rupture d’anévrisme aortique, perforation d’ulcère duodénal... Livedo réticulaire L’existence d’un livedo réticulaire asymptomatique latérothoracique et/ou de l’abdomen et des cuisses associé à une pancréatite aiguë est un fait exceptionnellement rapporté. Désigné sous le terme de « signe de Walzel », ce livedo qui est parfois unilatéral a été également remarqué dans les 24 à 48 heures précédant des poussées de pancréatite chronique éthylique.96 Syndrome du pseudoglucagonome Il est traité dans un sous-chapitre (infra).
Manifestations cutanées des carcinomes pancréatiques Panniculite pancréatique Les carcinomes pancréatiques peuvent se compliquer d’une panniculite. La tumeur est un adénocarcinome canalaire ou beaucoup plus souvent un carcinome à cellules acineuses. Bien que ce dernier type tumoral ne représente que 10 % de l’ensemble des carcinomes pancréatiques, il est en effet en cause dans plus de 80 % des cas de panniculite associée au cancer. Celle-ci peut être révélatrice et son expression est souvent diffuse, extensive, volontiers à évolution fistulisante. Les manifestations articulaires et, à un degré moindre, osseuses y
sont fréquentes. Sur le plan biologique, on relève habituellement une forte élévation de la lipasémie alors que les taux d’amylase sont normaux. La tumeur parfois difficilement repérable à l’examen tomodensitométrique du fait de sa petite taille est déjà souvent métastasée au moment de l’apparition des signes cutanés.97 De ce fait, le pronostic est constamment péjoratif avec une survie moyenne de 6 mois. Outre les adénocarcinomes et les carcinomes à cellules acineuses, il existe dans la littérature quelques observations de panniculite associée à un carcinome neuroendocrine pancréatique non fonctionnel98 ou de type insulinome, dans tous les cas au stade métastatique lors du diagnostic. Syndromes paranéoplasiques Dermatoses paranéoplasiques exceptionnellement associées Les carcinomes pancréatiques peuvent être responsables de dermatoses paranéoplasiques variées : acanthosis nigricans, hypertrichose lanugineuse acquise, erythema gyratum repens, signe de LeserTrélat. Pour chacune de ces dermatoses, même s’il y a des associations préférentielles, les néoplasies sous-jacentes sont très diversifiées et la probabilité qu’il puisse s’agir d’une tumeur pancréatique est extrêmement faible. À l’inverse, deux autres syndromes paranéoplasiques imposent la recherche d’une néoplasie du pancréas : les thrombophlébites superficielles migratrices et le syndrome « fasciite palmaire-polyarthralgies ». Il faut signaler égale-
Manifestations cutanéomuqueuses des affections hépatobiliaires et pancréatiques ment la nécessité de chercher ce type de néoplasme profond dans certaines familles atteintes de syndrome du naevus atypique et présentant une mutation du gène CDKN2A.99 Thrombophlébites superficielles migratrices De physiopathologie multifactorielle (l’une des dernières hypothèses avancées est celle d’une relation possible entre l’état d’hypercoagulabilité et l’hypoxie tumorale100), elles intéressent un court segment de veine superficielle, le plus souvent des membres inférieurs, sans pathologie variqueuse associée. La localisation au dos du pied est caractéristique. Les membres supérieurs peuvent être intéressés ainsi que plus exceptionnellement la nuque et les parois thoracique et abdominale. L’atteinte unique ou d’emblée multiple est à type de nodules cutanés inflammatoires cylindriques centrés sur la veine ou de cordon induré douloureux de quelques centimètres de longueur. La régression spontanée s’effectue en 2 à 3 semaines. Très rarement associée à une phlébite profonde, l’affection qui est accompagnée de pics fébriles évolue par poussées et peut être révélatrice ou le prélude d’un trouble de l’hémostase, d’une maladie de système (maladie de Behçet ou de Buerger) ou surtout d’une néoplasie.101 Ces thrombophlébites superficielles migratrices et paranéoplasiques, désignées sous le terme de syndrome de Trousseau, sont avant tout en relation avec un carcinome pancréatique (30 % des cas), gastrique ou pulmonaire, plus rarement colique ou génital et peuvent précéder l’apparition de la tumeur de plusieurs mois ou années. Ceci justifie le suivi régulier des thrombophlébites superficielles dites idiopathiques, en particulier chez les sujets de plus de 40 ans. Syndrome « fasciite palmaire-polyarthralgies » Il touche de façon symétrique les paumes et les doigts où, après une phase érythématoœdémateuse douloureuse, s’installe une rétraction de l’aponévrose palmaire conduisant à une flexion irréductible des doigts en griffe. Une fasciite plantaire est également possible. Une cyanose, une hypersudation peuvent être notées mais il n’y a jamais de phénomène de Raynaud. Sur le plan histologique, il existe une prolifération fibroblastique du derme et du fascia associée à un infiltrat inflammatoire périvasculaire modéré.102 Les arthrites atteignent surtout les métacarpophalangiennes et les genoux et une capsulite rétractile de l’épaule bilatérale est souvent inaugurale. Dans près de 50 % des cas, ce syndrome révèle un carcinome ovarien généralement au stade métastatique. Parmi les autres néoplasies possibles, les carcinomes pancréatiques et pulmonaires paraissent les plus fré-
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quents et doivent être cherchés en priorité. Notons enfin qu’un autre type d’atteinte des mains a été rapporté en association à un carcinome pancréatique. Il s’agit d’un tableau d’œdème induré touchant initialement la paume et le dos d’une seule main. Il a été considéré comme une variante de l’exceptionnel syndrome « fasciite-panniculite associée au cancer »103. Métastases cutanées Les métastases des carcinomes pancréatiques sont habituellement ganglionnaires, hépatiques, péritonéales mais rarement cutanées, et sur le plan histologique la tumeur primitive est un adénocarcinome. Ainsi, dans l’étude rétrospective portant sur plus de 4 000 patients atteints de carcinome au stade métastatique, 107 d’entre eux avaient une tumeur pancréatique104 et dans deux cas seulement, elle était à l’origine de lésions secondaires cutanées (1,9 %). Une revue très récente de la littérature portant sur 11 observations de métastases cutanées de carcinome pancréatique mentionne que pour sept malades, la lésion était unique et chez six d’entre eux de localisation ombilicale,105 réalisant le classique « nodule de sœur Marie-Joseph ». L’ombilic est une topographie de prédilection pour les métastases des néoplasies intra-abdominales. Celles-ci sont avant tout gastrointestinales, à l’origine de 55 % des nodules chez l’homme, et gynécologiques dans 45 % des cas féminins.106 Le pancréas est également un site primitif de cancer assez souvent en cause, à l’origine de 18 % des nodules chez l’homme et de 8 % chez la femme. Le caractère révélateur de la métastase ombilicale est variable selon les séries (14 à 45 % des cas) mais il existe une unanimité pour considérer qu’il s’agit d’un facteur de très mauvais pronostic avec une survie qui excède rarement 10 mois. En dehors de l’ombilic, les métastases cutanées de cancer pancréatique, uniques ou multiples, peuvent être constatées dans des topographies à distance de la tumeur primitive : scalp, visage, région axillaire, membre supérieur, fesse,107 gros orteil. Elles peuvent également siéger sur le site d’implantation percutané d’un cathétérisme biliaire.108
Manifestations cutanées des tumeurs pancréatiques endocrines Érythème nécrolytique migrateur, syndromes du glucagonome et du pseudoglucagonome Tumeur endocrine le plus souvent maligne du pancréas développée aux dépens des îlots alpha de Langerhans, le glucagonome se manifeste sur le plan cutanéomuqueux par une éruption très caractéristique que Wilkinson en 1973 a proposé d’appe-
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Figure 11 Syndrome du glucagonome. Érythème nécrolytique migrateur.
ler « érythème nécrolytique migrateur » (ENM). Trente ans auparavant, Becker et al., dans une revue sur les manifestations cutanées des néoplasies internes, avaient déjà décrit l’association d’un carcinome pancréatique et d’une dermatose prurigineuse, érythémateuse, papulovésiculeuse, à disposition annulaire. Ce n’est qu’ultérieurement, en 1966, que Mc Gavran et al. établissent la relation entre cette éruption particulière et une tumeur pancréatique sécrétrice de glucagon. L’ensemble des signes cliniques et biologiques imputables à cette prolifération tumorale est en 1974 appelé par Mallinson et al. « syndrome du glucagonome ». La même année cependant, Thivolet et al. remettent en cause la spécificité du tableau cutané en décrivant le premier cas d’érythème nécrolytique migrateur sans glucagonome mais associé à une pancréatite chronique. Depuis, d’autres types d’association ont été rapportés. Le diagnostic de pseudoglucagonome ne doit cependant être envisagé qu’après avoir recherché et éliminé une tumeur pancréatique sécrétante. Érythème nécrolytique migrateur Cette dermatose évolue par poussées et rémissions spontanées. Elle est composée de macules érythémateuses au centre desquelles apparaissent rapidement des bulles flaccides, très fragiles, qui après rupture vont laisser place à des érosions et des croûtes (Fig. 11). Les lésions ont une évolution centrifuge avec processus de cicatrisation initialement central, ce qui leur donne un aspect annulaire
arciforme parfois serpigineux. L’ensemble de ce processus évolutif qui laisse une pigmentation résiduelle dure de 8 à 15 jours mais l’évolution de l’ensemble des lésions n’est pas synchrone, ce qui confère à la dermatose un aspect polymorphe. Elle est également remarquable par sa topographie qui intéresse les régions périorificielles (visage, périnée), les plis où les lésions sont parfois très érosives et douloureuses,109 la partie basse de l’abdomen, les fesses, les cuisses, les extrémités des membres. Le prurit est très fréquent et souvent intense mais il peut être remplacé par une sensation de cuisson au niveau des zones évolutives. Dans certains cas, l’éruption peut prendre un aspect d’eczéma craquelé110 ou de dermite psoriasiforme étendue.111 La présence d’une kératodermie palmoplantaire a également été rapportée. Des manifestations muqueuses sont en général associées à l’atteinte cutanée :110 stomatite, glossite atrophique douloureuse, chéilite angulaire, anite, balanite ou vulvite. Des altérations unguéales non spécifiques à type de fragilité, de striations longitudinales ou d’hyperpigmentation, une finesse des cheveux, voire une alopécie sont parfois également notées. L’examen histologique est hautement évocateur pourvu que la biopsie soit effectuée sur une lésion récente. Sous une parakératose, on observe un processus de nécrose du tiers supérieur de l’épiderme avec dégénérescence vacuolaire et pycnose alors que les assises épidermiques inférieures sont respectées ou parfois le siège d’une discrète spongiose. C’est la très classique image de « tranche napolitaine ». Le décollement bulleux qui apparaît
Manifestations cutanéomuqueuses des affections hépatobiliaires et pancréatiques est donc très superficiel, sans acantholyse, et l’immunofluorescence directe est négative. Syndrome du glucagonome Le glucagonome est une tumeur extrêmement rare (incidence estimée à 1 cas pour 20 millions par an) qui touche des sujets dont l’âge moyen se situe entre 50 et 60 ans mais des cas ont été décrits dès la vingtième année.112 L’atteinte préférentielle des femmes (60 % des malades) notée dans les séries anciennes paraît en réalité très inconstante.113 Manifestations cliniques. Signe majeur, l’ENM est présent chez la quasi-totalité des malades à un moment de l’évolution et inaugural dans près de 70 % des cas.113 L’atteinte cutanée est parfois le seul signe d’appel et lorsque sa présentation est atypique, psoriasiforme par exemple, le diagnostic de glucagonome peut n’être évoqué qu’après plusieurs années.109,110,113,114 L’altération de l’état général est très fréquente avec amaigrissement chez 70 % des malades lors du diagnostic, le plus souvent sans anorexie. D’autres manifestations sont inconstamment associées : diarrhée dans 15 à 30 % des cas, douleurs abdominales plus rarement, troubles psychiatriques (syndrome dépressif ou confusionnel) dans 20 % des cas, baisse de l’acuité visuelle et surtout thromboses veineuses profondes avec risque d’embolie pulmonaire. Ces manifestations thromboemboliques sont notées d’emblée chez 11 à 14 % des malades et jusqu’à 30 % d’entre eux au cours de l’évolution de leur tumeur. Elles sont par ailleurs une cause fréquente de décès.115 Manifestations biologiques. Elles font partie des critères diagnostiques. Le diabète (ou parfois l’hyperglycémie modérée à jeun) est présent dans 90 % des cas et inaugural dans près de 40 % des cas, pouvant précéder de plusieurs années l’ENM chez les patients développant ces deux manifestations.113 Il est classiquement considéré comme modéré mais la nécessité d’un recours à l’insuline a été soulignée dans plusieurs séries.113 L’apparition d’un trouble glycorégulateur sur un terrain inhabituel, à savoir chez un patient amaigri, âgé, sans antécédents familiaux, en association à des signes cutanés et/ou de la diarrhée doit attirer l’attention et faire penser à la possibilité d’une tumeur pancréatique sous-jacente. L’absence de diabète après plusieurs années d’évolution d’un ENM est rarement rapportée et de physiopathologie toujours très discutée.109 Il existe fréquemment une anémie modérée typiquement normochrome normocytaire, proportionnelle à la sévérité du syndrome, ainsi qu’un syndrome inflammatoire. L’hypoaminoacidémie est quasiment toujours présente. Une hypoprotidémie avec hypoalbuminémie, une hypocholestérolémie
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sont souvent notées. En revanche, la zincémie est habituellement,112 mais inconstamment, normale.109,110,114 Le dosage du glucagon plasmatique permet d’établir le diagnostic. Son taux est généralement supérieur à 1000 pg/ml113 (valeurs normales comprises entre 50 et 150 pg/ml) et peut même dans certains cas dépasser les 50 000 pg/ml (à noter que la glucagonémie peut être légèrement augmentée mais toujours inférieure à 500 pg/ml dans certaines situations : jeûne prolongé, pancréatite, cirrhose, insuffisance rénale, diabète décompensé, hyperglucagonémie familiale...).112 À l’inverse, dans d’authentiques syndromes du glucagonome, le taux de glucagon peut être normal ou très légèrement élevé. Il est alors nécessaire de renouveler le dosage car la glucagonémie peut être variable d’un prélèvement à un autre. On peut également demander un dosage des précurseurs mais il ne s’agit pas encore d’un examen de routine. Enfin, les taux plasmatiques d’autres sécrétions hormonales peuvent être augmentés.113 Tumeur pancréatique. Elle est le plus souvent unique, de grande taille (de 2 à plus de 5 cm au moment du diagnostic)113,116 et localisée généralement dans la queue du pancréas (47 à 75 % des cas).112,117 Pour la mettre en évidence, on réalise en première intention un examen tomodensitométrique sans et avec produit de contraste. Cet examen permet également d’apprécier un éventuel envahissement des structures adjacentes : adénopathies, métastases hépatiques (celles-ci peuvent être également visualisées par une simple échographie transpariétale). Si la tumeur n’est pas localisée grâce à la tomodensitométrie, on demande en seconde intention une échoendoscopie. Celle-ci remplace maintenant l’artériographie cœliaque sélective qui est pratiquement abandonnée. Une imagerie par résonance magnétique pourra également être pratiquée. À ces investigations est associée une scintigraphie à l’octréotide marqué qui permet une exploration fonctionnelle en visualisant l’hyperfixation de la tumeur et de ses lésions secondaires éventuelles. Dans l’avenir, la tomographie d’émission de positons aura probablement une place notable dans la prise en charge de ce type de pathologie.118 Comme la plupart des tumeurs endocrines, le diagnostic de malignité n’est pas toujours aisé à établir, plusieurs caractéristiques histologiques des processus néoplasiques étant souvent manquantes. Aussi, pour certains, seule la mise en évidence de métastases est un critère de certitude. Il existe donc dans la littérature une certaine disparité avec des pourcentages de malignité qui varient de 60 à presque 100 et de métastases lors du diagnostic
182 initial comprises entre 52 et 90.112,117 Ces données statistiques plaident en faveur de la malignité ou du potentiel malin de tous les glucagonomes et de leur risque métastatique majeur mais non obligatoire. Si ces lésions secondaires apparaissent, elles sont avant tout hépatiques et ganglionnaires, le plus souvent cœliaques. D’autres localisations sont également possibles : osseuses, surrénaliennes, rénales, pulmonaires. La tumeur pancréatique dont la plupart des cellules sont marquées avec l’anticorps dirigé contre le glucagon peut parfois exprimer d’autres peptides. Dans ces tumeurs endocrines mixtes,109 les contingents cellulaires sécrétant ces autres peptides sont cependant le plus souvent silencieux sur le plan clinique et biologique. L’insuline est la sécrétion la plus fréquemment associée à celle du glucagon puis vient ensuite la gastrine qui peut entraîner l’apparition d’ulcères multiples et récidivants, habituellement du duodénum (syndrome de ZollingerEllison). Ce syndrome a été trouvé dans 10 % des cas de certaines séries de glucagonomes112 et doit être recherché systématiquement. De façon plus exceptionnelle, la tumeur pancréatique peut exprimer d’autres hormones115 comme l’adrenocorticotrophic hormone (ACTH), la somatostatine, le VIP (vasoactive intestinal peptide) ... Le glucagonome peut enfin s’intégrer dans une néoplasie endocrinienne multiple de type I (NEM1 ou syndrome de Wermer). Ce syndrome héréditaire a souvent une expression cutanée avec présence d’angiofibromes, de collagénomes et plus rarement de macules dyschromiques ou de lipomes. Suite à la découverte d’un glucagonome, la recherche des différentes atteintes endocriniennes possibles de ce syndrome est cependant rarement nécessaire car si elles existent, elles sont en général diagnostiquées avant la tumeur pancréatique. Physiopathologie. Le rôle du glucagon dans la physiopathologie des lésions cutanées est toujours discuté mais l’hypothèse la plus communément admise incrimine son effet catabolique protidique, ce qui induit une hypoaminoacidémie. Celle-ci entraîne une déplétion protidique épidermique responsable des nécroses cellulaires. Deux constatations cliniques plaident en faveur de ce mécanisme : d’une part l’amélioration de l’état cutané chez certains malades après perfusion d’acides aminés,119 et d’autre part la remontée des taux d’aminoacides après traitement du glucagonome. Le glucagon favorise également l’augmentation de l’acide arachidonique épidermique qui pourrait, par activation des médiateurs de l’inflammation, entraîner des signes cutanés. Il n’est pas exclu par ailleurs qu’il ait une part de responsabilité dans l’apparition des thromboses veineuses.
E. Delaporte, F. Piette Celles-ci, classiquement en rapport avec une possible sécrétion tumorale de facteur X,115 ont en effet été constatées chez des patients ayant développé un ENM après traitement d’hypoglycémies paranéoplasiques par perfusions de glucagon.120 Il existe néanmoins des glucagonomes totalement asymptomatiques, ce qui laisse penser que si le glucagon a une responsabilité très probable, d’autres facteurs étiologiques doivent être incriminés comme les déficits en zinc et/ou en acides gras essentiels.112 Ceux-ci sont considérés comme des mécanismes majeurs de l’ENM sans tumeur pancréatique mais dans certains cas de glucagonome, la correction de ces éventuels déficits s’est révélée très efficace. L’hyperglucagonémie est également responsable du diabète. La sévérité du trouble glycorégulateur n’est cependant pas corrélée à l’importance de la sécrétion hormonale tumorale. L’absence de diabète reste une particularité peu rapportée dans la littérature et de physiopathologie toujours obscure. L’hypothèse d’une production par la tumeur d’une forme immature de glucagon qui engendrerait un hypercatabolisme sans induire d’hyperglycémie a été avancée. Dans certains cas, la glycémie à jeun peut même être basse et se révéler trompeuse. Cette situation paradoxale doit conduire à la recherche d’une sécrétion insulinique ou proinsulinique associée à celle du glucagon.109 Traitement. L’exérèse chirurgicale complète de la tumeur pancréatique est l’unique traitement curatif. Plusieurs types d’intervention sont possibles : pancréatectomie gauche, splénopancréatectomie caudale, duodénopancréatectomie céphalique, pancréatectomie subtotale ou totale associée à une résection des métastases hépatiques si elle est techniquement possible et/ou exploration peropératoire hépatique et des chaînes ganglionnaires de voisinage avec curage si envahissement. L’amélioration cutanéomuqueuse est notée dès la 48e heure après l’intervention. La résolution complète de l’éruption est généralement obtenue en moins de 15 jours en même temps que se normalise la glucagonémie. Le diabète en revanche disparaît de façon plus inconstante. Dans les cas où la tumeur n’a pu être enlevée en totalité ou s’il s’agit de lésions inopérables ou de récidives ou de métastases, on propose une chimiothérapie par voie générale. La streptozocine (Zanosar®) est de moins en moins utilisée et le traitement de première ligne à l’heure actuelle est la dacarbazine (Déticène®) administrée toutes les 4 semaines pour une durée pouvant atteindre parfois 1 ou 2 ans. Depuis de nombreuses années, on y associe de l’octréotide (Sandostatine®). Cet analogue de la somatostatine qui inhibe la synthèse de nombreuses hormones digestives116 et notamment du glucagon (mais qui
Manifestations cutanéomuqueuses des affections hépatobiliaires et pancréatiques n’inhibe cependant pas la croissance tumorale) permet d’envisager des traitements palliatifs de longue durée. L’octréotide peut être également utilisé en préopératoire avec une efficacité rapide (dès le deuxième jour)114 mais inconstante sur l’ENM. Les perfusions d’acides aminés, la supplémentation orale en zinc et acides gras essentiels,119 le régime hyperprotidique représentent un traitement symptomatique d’appoint intéressant. Le contrôle du diabète et la prévention des thromboses veineuses périphériques seront également associés. Pronostic. Bien que la plupart des cas soient diagnostiqués à un stade avancé, le glucagonome a un pronostic variable dépendant de la réponse au traitement. La médiane de suivi après diagnostic est souvent donnée comprise entre 2 et 3 ans.115 En fait, en raison de la lenteur de la croissance tumorale, plus de la moitié des patients ont une espérance de vie qui dépasse les 5 ans et peut même atteindre 10 ans, voire plus, malgré des interventions chirurgicales incomplètes. Des évolutions prolongées sont également possibles en cas de métastases hépatiques. Les décès sont avant tout dus aux complications thromboemboliques et à un degré moindre aux infections et saignements digestifs.112 Après traitement, un suivi clinique régulier et prolongé est nécessaire, à la recherche de récidives qui peuvent apparaître après plusieurs années avec parfois une expression clinique très limitée et trompeuse.121 Ce suivi comprend également un contrôle annuel des taux plasmatiques des différentes hormones sécrétées par le pancréas endocrine (possibilité d’apparition secondaire d’un syndrome de Zollinger-Ellison ou d’un VIPome par exemple) ainsi qu’une recherche d’autres tumeurs endocrines s’intégrant dans une NEM 1112. Syndrome du pseudoglucagonome Si l’ENM doit faire rechercher un glucagonome, il n’est cependant pas pathognomonique et peut être constaté dans d’autres états pathologiques, le plus souvent carentiels. Leur point commun essentiel est un déficit en zinc122 auquel s’ajoute probablement mais de façon plus marginale une carence en acides gras essentiels.123 Ces pseudoglucagonomes sont avant tout observés au cours des pancréatites chroniques, des syndromes de malabsorption (maladie cœliaque, maladie de Crohn) et surtout des cirrhoses éthyliques.122 Dans celles-ci, le déficit en zinc est bien connu124 et lié à la réduction des apports, la majoration des pertes, la baisse de la sérumalbumine, le déficit de stockage hépatique ainsi qu’à la malabsorption. En général cependant, cette carence est asymptoma-
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tique ou limitée à un eczéma craquelé et/ou une perlèche angulaire et une glossite.70 Lorsque la carence devient sévère, le tableau d’ENM s’installe rapidement et de façon diffuse avec atteinte des muqueuses buccales et anogénitales. La zincémie plasmatique qui ne représente pourtant qu’1 % du pool zincique est effondrée alors que le zinc érythrocytaire peut rester dans des valeurs normales (longue demi-vie des érythrocytes). La supplémentation zincique parentérale (zinc injectable Aguettant®) se révèle spectaculairement efficace en quelques jours mais ne dispense pas d’une vérification de la normalité de la glucagonémie (rappelons cependant que dans ces causes principales de pseudoglucagonome, le glucagon peut être parfois légèrement augmenté). D’autres étiologies d’ENM sans glucagonome sont également possibles :125 adénocarcinome jéjunal ou rectal, tumeurs pancréatiques endocrines autres que le glucagonome (insulinome, gastrinome), carcinomes hépatocellulaires ou bronchiques, hémochromatose, pancréatite post-traumatique, toxicomanie à l’héroïne, perfusions de glucagon (traitement d’hypoglycémies paranéoplasiques...).120,125 Signalons enfin que plusieurs cas d’érythème nécrolytique ont été rapportés au cours d’hépatites C actives.126,127 Si sur le plan histologique leur aspect est identique à celui de l’ENM, sur le plan clinique la présentation est différente puisque la dermatose ne touche que les extrémités, en particulier le dos des pieds. Cet érythème nécrolytique acral nous semble donc assez éloigné du tableau de pseudoglucagonome et paraît davantage se rapprocher des lésions érosives et localisées parfois constatées en cas de déficit chronique en zinc chez les cirrhotiques éthyliques.124 L’hypothèse d’une forme limitée d’ENM n’est cependant pas exclue, ce d’autant que chez ces patients atteints d’hépatite C, la zincémie paraît normale et que sous traitement supplétif, l’amélioration n’est que partielle. Syndrome carcinoïde Il est lié à la sécrétion de peptides vasoactifs (sérotonine, histamine, prostaglandine, bradyquinine, kallikréine, VIP). Dans ce syndrome, les chances de découvrir la tumeur au niveau pancréatique sont cependant extrêmement faibles (0,55 % dans l’analyse de plus de 8 000 cas de tumeur carcinoïde128) comparativement à la fréquence des localisations gastro-intestinales (73,7 %) et bronchopulmonaires (25,1 %). Lorsqu’elles sont symptomatiques, ces tumeurs carcinoïdes pancréatiques sont au stade métastatique ou compressif et les signes d’appel sont avant tout des douleurs abdominales ou de la diarrhée. Les épisodes de flush sont inconstamment notés.121,129,130
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Syndrome de Cushing En rapport avec la sécrétion ectopique la plupart du temps de pro-opiomélanocortine (précurseur de l’ACTH) et/ou beaucoup plus rarement de CRH (corticotrophin releasing hormone), le syndrome de Cushing paranéoplasique survient le plus fréquemment au cours des carcinomes bronchiques à petites cellules et des tumeurs carcinoïdes bronchiques. Les tumeurs endocrines pancréatiques sont également souvent en cause. Dans la revue récente de 530 cas de syndrome de sécrétion ectopique de pro-opiomélanocortine rapportés dans la littérature, 16 % sont d’origine pancréatique contre 27 % pour les carcinomes bronchiques à petites cellules et 25 % pour les carcinoïdes bronchiques.131 L’expression clinique du syndrome de Cushing paranéoplasique est généralement différente de la maladie de Cushing avec une dysmorphie qui peut manquer, mais en revanche la présence fréquente d’une mélanodermie.
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Métastases cutanées La majorité des métastases de carcinome pancréatique sont ombilicales et en rapport avec un adénocarcinome (cf supra). De façon rare, il peut s’agir également d’une tumeur endocrine, parfois de type carcinoïde.132 Manifestations non spécifiques Les tumeurs de type insulinome, gastrinome, VIPome, somatostatinome n’ont pas d’expression cutanée directement liée à leur sécrétion hormonale.116 Les atteintes dermatologiques parfois constatées sont non spécifiques, en rapport avec les carences secondaires aux manifestations diarrhéiques.
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