Manifestations ostéoarticulaires des mucopolysaccharidoses et des glycogénoses

Manifestations ostéoarticulaires des mucopolysaccharidoses et des glycogénoses

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Revue du rhumatisme monographies 78 (2011) 254–261

Manifestations ostéoarticulaires des mucopolysaccharidoses et des glycogénoses Musculoskeletal manifestations of mucopolysaccharidosis and glycogenosis Gérard Chalès ∗ , Guillaume Coiffier , Pascal Guggenbuhl Service de rhumatologie, hôpital sud, 16, boulevard de Bulgarie, BP 90347, 35203 Rennes cedex 2, France

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : Accepté le 21 mars 2011 Mots clés : Mucopolysaccharidoses Raideur articulaire Retard de croissance Dysostose multiple Densité minérale osseuse Ostéoporose Glycogénoses Hyperuricémie Goutte Enzymothérapie substitutive

r é s u m é Les mucopolysaccharidoses (MPS) constituent un groupe d’affections métaboliques héréditaires dues à un déficit d’enzymes lysosomales spécifiques. La nature ubiquitaire des glucosaminoglycanes (GAG) dans le tissu conjonctif de l’organisme se traduit par un large spectre d’effets cliniques. On doit suspecter le diagnostic de MPS sur les complications musculosquelettiques : une raideur articulaire douloureuse et évolutive en l’absence d’inflammation ; un retard statural ; des anomalies radiologiques appelées dysostose multiple, associées à une densité minérale osseuse basse. Les glycogénoses (GSD) sont des maladies héréditaires affectant le métabolisme du glycogène qui est anormal en quantité et/ou en qualité. Les GSD hépatiques se traduisent habituellement par une hépatomégalie et une hypoglycémie. Les GSD musculaires se traduisent essentiellement par des crampes musculaires, une intolérance à l’effort, une fatigabilité musculaire et une faiblesse progressive. Les autres manifestations musculosquelettiques sont le retard de croissance (GSD I, III, VI, VII, IX), l’hyperuricémie et la goutte (GSD I, III, V et VII) et l’ostéoporose (GSD I, II, III). © 2011 Société franc¸aise de rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

a b s t r a c t Keywords: Mucopolysaccharidosis Joint contracture Growth failure Dysostosis multiplex Bone mineral density Osteoporosis Glycogen storage diseases Hyperuricemia Gout Enzyme replacement therapy

Mucopolysaccharidoses (MPS) are a group of inherited metabolic disorders caused by a deficiency of specific lysosomal enzymes. The ubiquitous nature of GAG within the connective tissue of the body results in a wide range of clinical effects. The suspicion of MPS disorder must be raised on musculoskeletal complications: evolving joint pain and joint contractures in the absence of inflammation; growth failure; radiographic abnormalities designated dysostosis multiplex associated with low bone mineral density. Glycogen storage diseases (GSD) are inherited disorders that affect glycogen metabolism. The glycogen found in these disorders is abnormal in quantity, quality or both. GSD that mainly affect the liver usually have hepatomegaly and hypoglycemia as the presenting features. The predominant clinical features of GSD that mainly affect the muscle are muscle cramps, exercise intolerance, susceptibility to fatigue, and progressive weakness. Other musculoskeletal manifestations are growth failure (GSD I, III, VI, VII, IX), hyperuricemia and gout (GSD I, III, V and VII) and osteoporosis (GSD I, II, III). © 2011 Société franc¸aise de rhumatologie. Published by Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Les manifestations ostéoarticulaires des mucopolysaccharidoses (MPS) et des glycogénoses (GSD, glycogen storage disease) sont dues à l’accumulation, respectivement, de glycosaminoglycanes (GAG) dans les tissus conjonctifs et de glycogène dans le foie et les muscles. Ces maladies héréditaires peuvent se rencontrer à l’âge adulte et concernent le rhumatologue [1,2] et l’interniste par leurs atteintes multifocales.

Des collaborations entre pédiatres et médecins d’adultes doivent se développer pour décrire l’histoire naturelle de ces maladies, d’une part pour favoriser le passage progressif des adolescents et jeunes adultes atteints de maladies chroniques dans des services de médecine d’adultes, d’autre part pour améliorer la qualité de la prise en charge multidisciplinaire au long cours.

1. Manifestations ostéoarticulaires des mucopolysaccharidoses ∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (G. Chalès).

Les MPS sont dues à l’un des onze déficits enzymatiques différents qui entraînent l’accumulation de GAG dans les lysosomes,

1878-6227/$ – see front matter © 2011 Société franc¸aise de rhumatologie. Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.monrhu.2011.03.008

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Tableau 1 Principales localisations et identifications des gènes et déficits enzymatiques des mucopolysaccharidoses. MPS

Nom

Localisation

Gène

Enzyme

ES

I II IIIA IIIB IIIC IIID IVA IVB VI VII IX

(Hurler/Scheie) Hunter San Philippo San Philippo San Philippo San Philippo Morquio Morquio Maroteaux-Lamy Sly

4p16.3 Xq27.3-q28 17q25.3 17q21.1 Xs 8 12q14 16q24.3 3p21.33 5p11.13 7q21q.22 3p21.3p21.2

IDA IDS HSS

␣-l-Iduronidase Iduronate-2-sulfatase Héparane sulfate sulfatase ␣-N-Ac-d-glucosaminidase ␣-glucosaminide-N-Ac-transférase N-Ac-glucosamine-6-sulfatase Galactose-6-sulfatase ␤-galactosidase arylsulfatase B ␤-glucuronidase Hyaluronidase

+ +

GNS GALNS GLBI ARSB GUSB HYAL1

+

MPS : mucopolysaccharidose ; ES : enzymothérapie substitutive

expliquant l’atteinte multisystémique et en particulier, les atteintes du cartilage, de l’os et des tissus conjonctifs [3]. Bien que le déficit touche une variété d’enzymes différentes, les manifestations cliniques et en particulier radiologiques (dysostose multiple) sont similaires (Matériel complémentaire, Tableau S3). La localisation génétique et les gènes clonés des MPS sont connus (Tableau 1). La transmission se fait sur un mode autosomique récessif en dehors de la maladie de Hunter liée à l’X. L’aspect clinique est cependant très hétérogène selon l’activité enzymatique résiduelle ; cela est caricatural dans la MPS de type I allant de la forme très sévère (syndrome de Hurler), avec décès dans la première décennie, à la forme atténuée (syndrome de Scheie) où l’espérance de vie peut être normale. Le rhumatologue doit savoir reconnaître au plus tôt ces formes atténuées de MPS (Tableau 2), certaines pouvant bénéficier d’une enzymothérapie substitutive (I, II, VI). La précocité du traitement a une valeur pronostique. 1.1. Des raideurs articulaires non inflammatoires doivent faire rechercher une mucopolysaccharidose Dans les formes atténuées de MPS, le premier signe qui motive une consultation médicale est souvent l’apparition d’un enraidissement articulaire douloureux (dont le caractère évolutif va contre le diagnostic d’arthrogrypose), précédant le diagnostic dans 80 % des syndromes de Sheie et de Hurler-Scheie [4] ; il peut se voir dans tous les types de MPS, sauf les MPS IV (laxité) et IX. La diminution des amplitudes articulaires touche préférentiellement les mains (mains en griffe) [5] mais aussi les épaules ou n’importe quelle articulation. L’absence de rythme et de signes inflammatoires, l’atteinte des articulations interphalangiennes distales (IPD) permettent la distinction avec les rhumatismes inflammatoires et les connectivites et ce d’autant qu’il n’existe pas de syndrome inflammatoire biologique [6].

Tableau 2 Manifestations cliniques communes des formes atténuées de mucopolysaccharidose (I, II, IV, VI, VII). Atteinte articulaire sans inflammation Syndrome du canal carpien Dysostose multiple Retard statural Dysmorphie faciale Opacités cornéennes (sauf II) Hernies ombilicales et/ou inguinales Valvulopathies Infections ORL et bronchiques récidivantes Elévation du taux urinaire de GAG Et/ou profil anormal des GAG (IV) D’après [4], modifié. GAG : glucosaminoglycanes ; la MPS IV (Morquio) se distingue des autres MPS par une dysplasie spondyloépiphysaire sévère, une hypoplasie de l’odontoïde, une hyperlaxité ligamentaire et un profil anormal des GAG.

Des rétractions digitales peuvent faire discuter une fasciite palmaire, une sclérodermie, une maladie de Dupuytren, plus exceptionnellement une amylose à chaînes légères. Un algorithme diagnostique des formes atténuées de MPS a été proposé [4]. La raideur et les rétractions articulaires des MPS sont dues aux déformations métaphysaires par défaut de remodelage osseux et à l’épaississement des capsules articulaires et des tendons dû aux dépôts de GAG [6]. 1.2. Syndrome du canal carpien et doigts à ressaut Ils sont rares chez l’enfant et doivent faire penser à une MPS. Le syndrome du canal carpien (SCC) est fréquent dans les MPS I, II et VI mais il est rare chez l’enfant (60 % des SCC chez l’enfant sont dus à une MPS) ; il peut être associé à des doigts à ressaut, particulièrement dans les phénotypes atténués [6]. 1.3. Retard statural La taille est généralement réduite (moins de 150 cm) mais peut être normale dans les formes atténuées. Le développement axial est plus perturbé que le développement appendiculaire, en rapport avec un défaut d’ossification enchondrale du cartilage de conjugaison. Dans des modèles animaux de MPS VI (syndrome de MaroteauxLamy), le métabolisme anormal des GAG impactait plusieurs aspects de la fonction cellulaire, particulièrement dans le cartilage de conjugaison ; l’augmentation du taux de GAG partiellement dégradés pourrait contribuer à la dérégulation des voies de signalisation qui orchestrent normalement le développement du squelette, en particulier celles du transforming growth factor-ˇ (TGF-␤), favorisées par la dérégulation de l’homéostasie du chondroïtine sulfate [7]. 1.4. Dyostose multiple : des anomalies radiologiques qui doivent faire suspecter une mucopolysaccharidose Le terme dysostose multiple est utilisé pour décrire les anomalies squelettiques observées dans les MPS (Tableau 3, Matériel complémentaire, Fig. S1-S2) [8,9]. Il faut souligner que la MPS IV (maladie de Morquio) est caractérisée par un nanisme prédominant sur le tronc, une dysplasie spondyloépiphysaire sévère distincte de celle des autres MPS, une hyperlaxité ligamentaire source de déformations articulaires douloureuses, de fines opacités cornéennes et une intelligence préservée [10]. Le dermatane sulfate s’accumulant dans les MPS I, II, VI, VII et ayant des similitudes avec le lipopolysaccharide (LPS) bactérien, Simonaro et al. [11] ont fait l’hypothèse que l’accumulation progressive des GAG entraînait une augmentation de l’apoptose des chondrocytes via une activation des voies de signalisation du LPS et des récepteurs toll-like (TLR4), favorisant la production de cytokines

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Tableau 3 Caractéristiques radiologiques de la dysostose multiple. Crâne

Macrocéphalie, fermeture prématurée de la suture sagittale, épaississement de la voûte crânienne, mastoïdes et sinus paranasaux peu développés, condyles mandibulaires aplatis, malformation des dents, selle turcique allongée en forme de J avec hypertrophie des apophyses clinoïdes

Thorax

Court, clavicules courtes et épaisses, côtes élargies, en forme de rame, effilées à leur insertion vertébrale

Rachis

Hypoplasie antérosupérieure des corps vertébraux de la charnière thoracolombaire, vertèbres « en éperon » (Matériel complémentaire, Fig. S1), corps vertébraux ovales, diminués de hauteur ou aplatis, cyphose thoracolombaire secondaire

Bassin

Petit et rétréci ; hypoplasie de la région acétabulaire supérieure (cotyle élargi avec un toit à l’obliquité accentuée), coxa-valga, têtes fémorales dysplasiques (Matériel complémentaire, Fig. S2)

Os longs

Élargissement métaphysaire et diaphysaire, retard de l’ossification épiphysaire, amincissement cortical ; aspect effilé des portions distales du radius et de l’ulna, genu valgum secondaire

Métacarpiens/métatarsiens : (du 2e au 5e )

Extrémité proximale effilée, phalanges proximales et intermédiaires courtes et trapues, phalanges terminales hypoplasiques ; os du carpe, petits et déformés

pro-inflammatoires (TNF-␣, IL-1␤), de chémokines et de métalloprotéases (MMP). Il en résulte une dégradation de la matrice cartilagineuse, majorée par les contraintes mécaniques. Cela a été démontré uniquement dans des modèles animaux de MPS VI et VII, sans doute applicables à toutes les MPS. La perturbation de la formation osseuse endochondrale, majorée dans les sites soumis à des contraintes articulaires, pourrait expliquer le défaut focal d’ossification de certains sites cartilagineux à l’origine de la cyphose thoracique, de la dysplasie acétabulaire et du genu valgum [6]. 1.5. Modifications de la densité minérale osseuse Un nombre très limité d’études concerne le statut osseux des MPS. Ces patients ont une insuffisance staturo-pondérale, des troubles de la marche, une mobilité limitée, et partant, une diminution de l’activité physique, des périodes d’immobilisation postchirurgicale, des troubles nutritionnels (déficit en vitamine D) ; ils sont donc à risque de fracture de fragilité osseuse, comme l’ont montré quelques observations isolées [12]. L’évaluation du statut osseux par dual-energy X-ray absorptiometry (DXA) corps entier est rendue difficile (nanisme disproportionné, macrocéphalie, épaississement des os, matériel d’ostéosynthèse, difficultés de positionnement dues aux rétractions articulaires). Quelques observations de MPS III et IV suggéraient que la densité minérale osseuse (DMO) était diminuée [13,14], mais la taille du patient n’était pas prise en compte [12]. Dans une étude récente [12], la DMO était évaluée par scanner et DXA dans deux séries distinctes comprenant dix patients avec une MPS VI (sept femmes de sept à 21 ans) et quatre hommes avec une MPS II (huit à 35 ans).

La vitamine D était inférieure à 30 ng/mL dans 85,5 % des cas. Le Zscore taille était bas avec un déficit de taille plus important dans les MPS VI. Les Z-scores (DMO) du rachis et corps entier par DXA étaient normaux pour l’âge chez toutes les MPS II (et après correction pour la taille) et chez toutes (sauf une) les MPS VI. La seule limitation de l’étude était que tous les patients étaient sous enzymothérapie substitutive (pas de DMO avant l’institution du traitement) qui pourrait jouer un rôle sur la DMO. Il existe une absence de consensus concernant le rôle des ostéoclastes dans l’ostéopénie des MPS VI, certaines études suggérant que le nombre des ostéoclastes est réduit ou inchangé, d’autres suggérant qu’il est augmenté [7,15]. Enfin, un travail récent [16] a suggéré que l’accumulation des GAG dans l’os d’un modèle murin de MPS I avait un effet inhibiteur sur l’activité de la cathepsine K, entraînant une altération de l’activité ostéoclastique et une diminution de la résorption du cartilage, ce qui pourrait contribuer à la pathologie osseuse observée dans les MPS. 1.6. Influence des traitements sur les manifestations ostéoarticulaires des mucopolysaccharidoses L’allogreffe de moelle osseuse (MPS I, MPS VI) n’a aucun impact sur les déformations osseuses [17]. Les MPS de type I (maladies de Hurler et de Scheie), II (syndrome de Hunter) et VI (maladie de Maroteaux-Lamy) bénéficient désormais d’enzymothérapies substitutives par laronidase (Aldurazyme® ), idursulfase (Elaprase® ) et galsulfase (Naglazyme® ) (Tableau 4) qui réduisent l’hépatosplénomégalie et améliorent les capacités physiques et respiratoires des patients avec un profil de sécurité globalement acceptable [18]. Le traitement doit être supervisé par un médecin ayant l’expérience de la prise en charge des patients atteints de maladies métaboliques héréditaires (consulter le site http://www.orpha.net pour avoir les adresses des centres de compétences des maladies héréditaires du métabolisme, des maladies lysosomiales). Dans la MPS I, plusieurs essais cliniques ont montré un effet variable sur la croissance, sur la mobilité articulaire et la capacité physique, avec une stabilité dans le temps [19,20]. L’efficacité de l’␣-l-iduronidase recombinante (laronidase) sur la limitation articulaire des membres supérieurs a été étudiée chez dix patients atteints de MPS I (Hurler) âgés d’un à dix ans et sept patients (2,5 à 39 ans) avec un phénotype Hurler/Scheie ou Scheie [21]. L’introduction précoce de l’enzymothérapie substitutive a conduit a une progression plus lente des symptômes, avec amélioration de la mobilité passive chez tous les patients, après un suivi de 52 à 208 semaines ; dans les phénotypes atténués, l’amélioration a porté sur la mobilisation active, lorsque l’enzymothérapie était associée à une prise en charge rééducative (mobilisation active et passive, massages, entretien à domicile par les familles), confirmant une étude en double insu (26 semaines puis phase d’extension de 3,5 ans) sur 45 patients (16 ans de moyenne d’âge) avec un phénotype atténué [22]. Des recommandations ont été publiées [23]. L’efficacité de l’idursulfase (une perfusion hebdomadaire pendant un an) a été étudiée en ouvert chez dix adultes (21–53 ans) avec un phénotype atténué de syndrome de Hunter (MPS II) ; l’amélioration a porté sur le test de marche de six minutes (+37,4 %) et la mobilité articulaire (+8,1–19◦ pour la flexion et l’abduction de l’épaule, flexion du genou et de la hanche, extension du coude) [24]. Elle permet également une meilleure croissance staturale chez ces patients, en particulier lorsqu’elle est initiée avant l’âge de dix ans [18]. Des recommandations ont été publiées [25]. La croissance a été étudiée chez 56 patients atteints de MPS VI (âgés de cinq à 29 ans), avant et après 240 semaines de perfusions hebdomadaires d’arylsulfatase B recombinante (galsulfase). La taille moyenne augmentait de 2,9 cm après 48 semaines et

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Tableau 4 Posologie et coût annuel des enzymothérapies substitutives. DCI Aglucosidase Laronidase Idursulfase Galsulfase

Nom ®

Myozyme Aldurazyme® Elaprase® Naglazyme®

Maladie

Incidence

Posologie IV

Prix UCDa (D)

Côut HT/an

Pompe MPS I MPS II MPS VI

1/40 000 (100 pF) 1/80 000 (100 pF) 1/80 000 (100 pF) 1/340 000 (26 pF)

20 mg/kg/15j 100 U/kg/s 0,5 mg/kg/s 1 mg/kg/s

575 700 2925 1445

120–360 kD 146–510 kD 304–913 kD 300 kD–1 MD

UCD : unité commune de dispensation ; pF : nombre de patients en France ; MPS : mucopolysaccharidose ; coût HT/an variant avec le poids (20–70 kg). a http://www.datapressepremium.com/RMDIFF/1683/Dossier documentaire medicaments orphelins AFM Genethon.pdf.

Tableau 5 Récapitulatif des manifestations-rhumatologiques devant faire évoquer une mucopolysaccharidose type 1, type 6 et une maladie de Pompe (Tableau 2 et Matériel complémentaire, Tableau S3 pour les manifestations extra-rhumatologiques). MPS type I

MPS type VI

Maladie de Pompe

Dysmorphie faciale discrète Mains en griffe Doigts à ressaut Raideurs articulaires multiples Syndrome du canal carpien Flexum articulaire Dysplasie hanche ou du cotyle Genu valgum Pieds varus, hallux valgus Douleurs dorso-lombaires Troubles statiques rachidiens Kystes osseux

Petite taille par rapport à l’âge Mains en griffe Contractions des doigts Raideurs articulaires Syndrome du canal carpien Dysostose multiple (anomalies squelettiques ou rachidiennes)

Décollement des omoplates Déformations évolutives du rachis Scoliose Camptocormie Hyperlordose lombaire Syndrome du rachis raide Rachialgies Faiblesse de la ceinture pelvienne Crampes, contractures

Consulter le site http://www.orpha.net pour avoir les adresses des centres de compétences des maladies héréditaires du métabolisme, des maladies lysosomiales, des maladies neuromusculaires.

de 4,3 cm après 96 semaines d’enzymothérapie ; l’impact sur la taille était plus important sur les patients de moins de 16 ans [26]. Plusieurs essais ont montré l’augmentation de la capacité d’endurance (périmètre de marche à six et 12 minutes, nombre de marches d’escalier) [27]. Des recommandations ont été publiées [28]. L’efficacité de l’enzymothérapie substitutive sur les complications osseuses des MPS reste à démontrer. La préservation de la fonction nécessite bien sûr une prise en charge multidisciplinaire [29]. En conclusion, le rhumatologue doit penser à une MPS (Tableau 5) devant une raideur articulaire non inflammatoire, un syndrome du canal carpien chez l’enfant, un retard statural associé à une dysostose multiple, avec retentissement sur la densité minérale osseuse.

2. Manifestations ostéoarticulaires des glycogénoses Les GSD réunissent plus de 14 entités cliniques hétérogènes d’affections héréditaires dues à des anomalies des enzymes régulant la synthèse ou la dégradation du glycogène, entraînant une accumulation intracellulaire de glycogène ; elles ont été classées par un numéro (GSD I à GSD XIV) dans l’ordre chronologique de découverte du déficit enzymatique (Fig. 1). Il est plus utile de les classer en glycogénoses hépatiques, plus fréquentes chez l’enfant, et en glycogénoses musculaires, plus fréquentes chez l’adulte [30,31]. La fréquence des GSD en Europe est de 1 : 25 000 naissances. La majorité des GSD se transmet selon le mode récessif autosomique à l’exception du déficit en phosphoglycérate et phosphorylase kinase qui est lié au sexe. Tous les gènes codant les enzymes en cause sont maintenant clonés et séquencés (Tableau 6) et la possibilité d’un diagnostic moléculaire a considérablement modifié la stratégie diagnostique [32]. Les manifestations ostéoarticulaires et/ou musculosquelettiques des glycogénoses sont d’ordre musculaire (dysfonctionnement énergétique musculaire portant sur le métabolisme glucidique), métabolique (hyperuricémie) et osseux.

2.1. Dysfonctionnement énergétique musculaire Quelle qu’en soit la cause (métabolisme glucidique, métabolisme lipidique, chaîne respiratoire mitochondriale), le dysfonctionnement énergétique musculaire se manifeste par deux syndromes : une intolérance à l’effort, des myalgies, souvent ponctuées d’épisodes récurrents et réversibles de myolyse (rhabdomyolyse, myoglobinurie) ; un déficit musculaire subaigu ou chronique [33,34]. 2.1.1. Glycogénoses entraînant des symptômes musculaires réversibles (intolérance à l’effort, myalgies, myoglobinurie) 2.1.1.1. Glycogénoses V (maladie de McArdle). C’est la plus fréquente des myopathies génétiques. Le diagnostic doit être suspecté s’il existe une intolérance à l’effort depuis l’enfance, avec ou sans

GSDII

AMPc

Maltase acide

Glycogène GSDV Phosphorylase M Glucose Phosphorylase F Enz. branchante GSDIV PLD GSDVI UDPG Enz. débranchante lysosome

GSD XIV Glucose-1-P Phosphogluco mutase Glucose-6-P GSD VII

Fructose-6-P Phosphofructokinase

Protéine kinase A GSD VIII (M) IX (F) Phosphorylase b kinase

GSDIII

Phosphorylase a Phosphorylase b

Glucose Glucose-6-phosphatase 3-phosphoglycérate GSD I GSD X Phosphoglycérate mutase

Fructose-1,6-P GSDXII

2-phosphoglycérate

Aldolase

Glyceraldehyde-3-P

GSD XIII

Phosphoenolpyruvate

3-phosphoglycérolphosphate (GSD IX)

Phosphoglycérate kinase 3-Phosphoglycérate

B-enolase

Pyruvate GSD XI

Lactate deshydrogénase Lactate

Fig. 1. Principales localisations et identifications des gènes et déficits enzymatiques des glycogénoses (GSD : glycogen storage disease) ; enz : enzyme ; M : muscle ; F : foie ; : mutation.

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Tableau 6 Caractéristiques des principales glycogénoses. GSD

Enzyme

Glycogénoses hépatiques ou hépatomusculaires Ia G6Pase Ib G6PT Von Gierke III Forbes ED IV VIb IX

Andersen Hers

0 Glycogénoses musculaires II Pompe V McArdle VII Tarui VIII

Gène

Tissus

HM HJ LJ

G6PC-17q21 SLC37A411q23.3 AGL-1p21

F

+

++ ↑↑





↑↑↑ ↑↑ ↑↑

↑↑ N

+

±

N



±

↑↑

↑↑ ±

↑↑ ↑↑

+



+



N



N

±

±

N

↑↑ N



±

N





N

N

N

N

N



↑↑

EB

GBE-3p12.3

FMCa Fb FM

GPH PHK ␣L/VIa ␥TL ␤ GYS

PYG-14q21-22

F

PHKA2-Xp22 PHKG2-16p11.2 PHKB16q12q13 GYS-12p12.2

F F FM F

MA

GAA 17q25.3

MC

LPP CJ TGY CT AU T

CK

PHM

PYGM-11q13

M

–E

↑↑

↑↑↑

PFKM

PFKM-12q13

M

–E

↑↑

↑↑

PHK␣M

PHKA1-Xq13.1

M

↑↑

D’après [32] modifié. GSD : glycogen storage disease ; enz : enzyme ; HM : hépatomégalie ; HJ : hypoglycémie à jeun ; LJ : lactate à jeun ; LPP : lactate post-prandial ; CJ : cétonémie à jeun ; TGY : triglycérides : CT : cholestérol ; AU : acide urique ; T : transaminases ; CK : créatine kinase ; G6Pase : Glucose-6-phosphatase ; G6PT : Glucose-6-phosphatase-translocase ; ED : enzyme débranchante ; EB : enzyme branchante ; GPH : glycogène phosphorylase hépatique ; PHK : phosphoprylase b kinase, sous-unité ␣L, ␥TL, ␤, ␣M ; GYS : glycogène synthétase ; MA : maltase acide ; PHM : phosphorylase musculaire ; PFKM : phosphofructokinase musculaire ; PHK␣M : phosphorylase b kinase ; F : foie ; M : muscle ; C : coeur N : normal ; E : effort.

fatigabilité musculaire excessive, les manifestations cliniques étant cependant variables. Il s’agit d’une intolérance à l’effort court (exercice statique ou dynamique intense) avec apparition de crampes ou de contractures douloureuses, particulières car pouvant disparaître si l’effort est poursuivi (phénomène de second souffle) [35,36], parfois associées une faiblesse musculaire marquée (rhadomyolyse) et des épisodes de myoglobinurie pouvant entraîner une insuffisance rénale aiguë. Le début est rarement très précoce, avec hypotonie, faiblesse musculaire et insuffisance respiratoire progressive [31]. La révélation de la maladie peut être tardive, après 50 ans, par une intolérance à l’effort ou un déficit des ceintures. La créatine kinase (CK) [37] est élevée lors des épisodes de rhabdomyolyse ou lors d’une épreuve d’effort, sans production d’acide lactique lors de l’effort (épreuve de l’ischémie de l’avant-bras). Le diagnostic ne peut être affirmé que sur une biopsie musculaire, orientée par l’IRM (surcharge glycogénique, déficit en phosphorylase). Le bénéfice de la thérapie par l’exercice a été démontré par un grand nombre d’essais cliniques, illustré d’exemples d’activités physiques adaptées (exercices aérobiques d’intensité faible à modérée), de conseils d’alimentation (ingestion de glucose rythmée par les périodes d’exercices) et des exercices à proscrire (exercices excentriques, statiques ou concentriques intenses, ou trop rapides) [38]. 2.1.1.2. Glycogénoses VII (maladie de Tarui). La symptomatologie, débutant dans l’enfance, est semblable, en plus sévère, à celle de la maladie de McArdle [31] ; l’association à une anémie hémolytique (hyperbilirubinémie non conjuguée) est caractéristique. Les enzymes musculaires sont élevées. Il existe une forme à début tardif (GSD VIIb), sans myopathie dans l’enfance, avec apparition d’une faiblesse musculaire au cours de la cinquième décennie, pouvant conduire à un handicap sévère [39]. Il n’y a pas de traitement spécifique et il faut éviter les exercices musculaires intenses. 2.1.1.3. Glycogénoses IX. Il existe aussi une forme musculaire de l’adulte, voisine de la maladie de McArdle, avec une intolérance à

l’effort depuis l’enfance, avec ou sans myolyse et surtout élévation de la lactacidémie au test d’effort [35]. 2.1.1.4. Déficits enzymatiques exceptionnels. Ils sont à l’origine de symptômes voisins de ceux observés au cours de la maladie de McArdle [31] : phosphoglycérate kinase (parfois nommée à tort GSD IX), phosphoglycérate mutase (GSD X), lactate déshydrogénase (GSD XI), aldolase A (GSD XII), ␤-énolase (GSD XIII), phosphoglucomutase (GSD XIV) (Fig. 1). 2.1.2. Glycogénoses entraînant une myopathie progressive et une faiblesse musculaire persistante 2.1.2.1. Glycogénoses II (maladie de Pompe). La maladie de Pompe appartient au groupe des maladies lysosomales et des myopathies. Cette glycogénose est très hétérogène cliniquement et biologiquement [40], depuis une forme précoce dans les premiers mois de la vie jusqu’à une forme de l’adulte. La forme adulte [41] peut devenir symptomatique après 20 ou 50 ans sous forme d’une myopathie progressive proximale (membres inférieurs) et axiale (associée à des déformations du rachis), indolore, évocatrice lorsqu’elle est modérée et associée à une insuffisance sévère des muscles respiratoires ; la proportion de patients nécessitant l’utilisation d’un fauteuil roulant et d’une ventilation assistée augmente avec la durée de la maladie : plus de 60 % d’entre eux sont concernés 15 ans après l’apparition des premiers symptômes [42]. C’est dire l’importance d’un diagnostic précoce. La créatine kinase et les transaminases sont élevées. L’IRM musculaire montre une infiltration graisseuse et une atrophie surtout visible au niveau des muscles de la cuisse. La capacité vitale forcée assise est souvent diminuée. La biopsie musculaire révèle un aspect vacuolaire de surcharge lysosomale et un excès de glycogène. Le diagnostic repose sur le dosage de l’activité de l’alphaglucosidase acide dans le sang (lymphocytes et leucocytes) ou sur une goutte de sang séché sur papier buvard (Guthrie), confirmé par un dosage sur biopsie cutanée ou musculaire ou un génotypage. L’alpha-glucosidase (Myosyme® ), enzyme recombinante, est indiquée dans le traitement enzymatique substitutif à long terme des patients ayant une maladie de Pompe confirmée. Chez les

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patients atteints de la forme tardive de la maladie de Pompe, la preuve de son efficacité est maintenant établie, mais elle reste limitée [42]. Le traitement doit être supervisé par un médecin ayant l’expérience de la prise en charge des patients atteints de maladies métaboliques héréditaires et neuromusculaires (consulter le site http://www.orpha.net pour avoir les adresses des centres de compétences des maladies héréditaires du métabolisme et des maladies neuromusculaires). 2.1.2.2. Glycogénoses III, maladie de Cori-Forbes. Le déficit en enzyme débranchante du glycogène, localisé au foie et aux muscles (type IIIa), ou uniquement (15 %) au foie (type IIIb) entraîne une faiblesse musculaire sévère et une hépatopathie [31,43]. Cette glycogénose est similaire à celle de type I (mais l’hypoglycémie n’est pas associée à une hyperlactacidémie), avec une symptomatologie neuromusculaire et/ou cardiaque moins sévère, essentiellement hépatique et métabolique chez l’enfant (dont les symptômes s’amendent souvent à la puberté), musculaire à l’âge adulte ; les CK sont augmentées et les transaminases très élevées. L’atteinte musculaire se limite à une faiblesse diffuse permanente et à une amyotrophie. En revanche, le déficit distal des membres est au premier plan dans la forme tardive de l’adulte, qui peut devenir invalidante, gênant la marche ou entraînant des complications orthopédiques ; il faut surveiller la fonction myocardique, respiratoire et hépatique. Le traitement repose sur un régime diététique spécifique permettant une nutrition adéquate et un encouragement à l’exercice physique. Des recommandations ont été publiées [44]. 2.1.2.3. Glycogénoses IV (maladie d’Andersen). Cette glycogénose rare (0,3 %), très hétérogène conduit au décès avant l’âge de cinq ans dans la forme classique cirrhotique. Chez le jeune adulte, il existe une forme myopathique et une forme neurologique appelée maladie à corps de polyglucosan. Il n’y a pas de profil biologique caractéristique. Il n’existe pas de traitement spécifique [31]. 2.2. Les complications métaboliques liées à l’hyperuricémie Une hyperuricémie est commune aux glycogénoses de type I (50 % des cas) III, V et VII. 2.2.1. Goutte et glycogénoses hépatiques : glycogénoses I (maladie de von Gierke) et III (maladie de Cori-Forbes) La maladie de von Gierke est un groupe de maladies autosomiques récessives [45]. Les patients atteints de GSD I ont une organomégalie (foie, rein) et un phénotype métabolique associant hépatomégalie, néphromégalie, hypoglycémie, hyperlipidémie, hyperlactatémie, hyperuricémie chronique (50 à 89 %) compliquée de goutte (50 %), rarement avant la puberté, parfois révélatrice de la glycogénose [45–47]. La baisse de concentration hépatique en phosphates et la déplétion en ATP stimulent la voie de dégradation des purines et la clairance de l’acide urique est diminuée du fait de la compétition avec l’acide lactique [32]. La complication la plus fréquente à l’âge adulte est l’atteinte rénale (lithiases uratique ou calcique [48], glomérulopathie, tubulopathie proximale, néphrocalcinose), associée ou non à une hypertension artérielle [31]. L’hépatomégalie persiste chez l’adulte avec apparition d’adénomes multiples. Les patients atteints de GSD-Ib ou de déficit en G6Pase-␤ ont un phénotype myéloïde commun caractérisé par une neutropénie chronique [45] et une dysfonction neutrophile qui s’accompagne d’une hypercellularité de la moelle osseuse (hyperplasie myéloïde), entraînant une modification de l’aspect de la moelle osseuse à l’IRM [49]. Ces patients (GSD-Ia, GSD-Ib) sont traités par régime pour corriger les anomalies métaboliques ; la correction de la dysfonction myéloïde nécessite

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un traitement par G-CSF. Des recommandations ont été publiées en 2002 [50]. Des cas de goutte ont été rapportés dans la GSD III [46]. 2.3. Goutte et glycogénoses musculaires Plusieurs cas de goutte ont été rapportés dans la GSD V (McArdle) [36,46] et VII (Tarui) [46]. L’exercice physique entraîne une augmentation de l’ammoniémie, de l’inosine et de l’hypoxanthine sanguines par augmentation de la dégradation musculaire des purines à l’origine d’une hyperuricémie « myogénique », ces anomalies étant réversibles par supplémentation en glucose uniquement dans la GSD V [51]. 3. Les complications osseuses Les glycogénoses entraînent le plus souvent un retard statural global (I, III, VI, VII, IX), un retard de l’âge osseux sauf dans le type II et une ostéoporose rapportée initialement à un défaut de formation osseuse, notamment dans la GSD I [52] ; celle-ci se traduit par une raréfaction de la trame osseuse, la réduction de l’épaisseur de la corticale des os longs ou des os de la main et par des stries d’arrêt de croissance [8]. 3.1. Glycogénoses I (maladie de von Gierke) L’insuffisance staturale (retard de la puberté) est une des complications au long cours, précisée par une étude européenne rétrospective [53]. La densité minérale osseuse du radius est diminuée chez les enfants non pubères [54] ; une ostéopénie et une ostéoporose fracturaire ont été mises en évidence chez 33 % des patients [55] et une ostéoporose densitométrique, mesurée par DXA, peut se voir chez l’adulte, avec parfois un découplage formation-résorption [56]. Une étude longitudinale [57] a montré que la densité minérale osseuse (surfacique et volumique) était normale chez l’enfant non pubère et diminuée chez l’adolescent et l’adulte (reflet d’une diminution de l’accrétion [DMO] durant l’enfance ou reflet des différences historiques de la prise en charge thérapeutique ?). Plusieurs facteurs ont été incriminés : acidose chronique, hypercalciurie, anomalies métaboliques et endocriniennes (retard pubertaire), dénutrition, défaut de stimulation mécanique due à une diminution de la force musculaire [55]. 3.2. Glycogénoses II (maladie de Pompe) Une ostéopathie fragilisante fracturaire a été récemment rapportée dans la maladie de Pompe (19 fractures chez 14 enfants sous enzymothérapie) ; l’augmentation du risque fracturaire est attribuée à une combinaison de facteurs incluant une diminution de la résistance osseuse due à des facteurs nutritionnels, un pic de masse osseuse anormal, une diminution de l’activité musculaire et de la mise en charge et peut-être les effets métaboliques de la dysfonction lysosomale [58]. L’étude de la DMO par DXA [59] a montré que celle-ci était significativement plus basse chez les patients atteints de maladie de Pompe (36 adultes, dix enfants) que chez les témoins ; 67 % avaient un Z-score inférieur à 1 ; 36 % des patients étaient classés comme ostéoporotiques ; l’ostéopénie et l’ostéoporose étaient plus fréquentes chez les patients en fauteuil roulant mais s’observaient aussi chez les patients ambulatoires ; la force musculaire proximale était significativement corrélée à la DMO corps entier, expliquant l’atteinte prédominante du col fémoral, l’os cortical étant plus sensible aux facteurs mécaniques (gravité, masse et force musculaire). L’effet de l’enzymothérapie sur l’os à long terme n’est pas connu, mais on peut attendre des effets positifs si la force musculaire

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augmente d’où l’intérêt d’un entretien musculaire permanent par exercice physique. Dans une petite série de six patients traités par enzymothérapie (huit à 52 mois), il n’y avait pas de modifications significatives de la DMO, quelle que soit la durée du traitement ; la masse grasse était augmentée chez la plupart des patients [60]. L’effet des bisphosphonates n’est pas connu dans la maladie de Pompe [59]. 3.3. Glycogénoses III, maladie de Cori-Forbes La DMO étudiée chez 15 patients (10 à 34 ans), mesurée par DXA, était diminuée à tous les sites, plus d’un patient sur deux ayant un T-score supérieur à −2 (corps entier, rachis lombaire) [61]. Le mécanisme est multifactoriel (déficit musculaire, anomalies métaboliques et nutritionnelles). 4. Conclusion En conclusion, la démarche diagnostique devant une myopathie métabolique [33,35] doit être connue du rhumatologue ; la découverte d’une hyperuricémie ou d’une goutte chez un sujet jeune doit faire penser aux erreurs innées du métabolisme des purines (maladie de Nesch-Lyhan, néphropathie juvénile familiale, glycogénoses). Tous les patients avec une altération de la force musculaire devraient avoir une mesure de la DMO par DXA qu’ils soient en fauteuil roulant ou ambulatoires. Déclaration d’intérêts Les auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts en relation avec cet article. Annexe A. Matériel complémentaire Le matériel complémentaire (Fig. S1, S2 et Tableau S3) accompagnant cet article est disponible sur http://www.sciencedirect.com et doi:10.1016/j.monrhu.2011.03.008. Références [1] Chalès G, Guggenbuhl P. Mucopolysaccharidoses et oligosaccharidoses. EMC, Appareil locomoteur. Paris: Elsevier SAS; 2004; 14-274-B10:1–7. [2] Chalès G, Guggenbuhl P. Troubles du métabolisme des glucides, acides aminés et lipides/manifestations ostéoarticulaires. EMC, Appareil locomoteur. Paris: Elsevier SAS; 2004; 14-274-A-10:1-9. [3] Feillet F, Journeau P, Straczek J, et al. Mucopolysaccharidoses. EMC, Pédiatrie. Paris: Elsevier SAS; 2006; 4-059-V-20:1–12. [4] Cimaz R, Coppa GV, Koné-Paut I, et al. Joint contractures in the absence of inflammation may indicate mucopolysaccharidosis. Pediatr Rheumatol Online J 2009;7:18. [5] Mankin HJ, Jupiter J, Trahan CA. Hand and foot abnormalities associated with genetic disease. Hand 2011;6:18–26. [6] Aldenhoven M, Sakkers RJ, Boelens J, et al. Musculoskeletal manifestations of lysosomal storage disorders. Ann Rheum Dis 2009;68:1659–65. [7] Alliston T. Chondroitin sulfate and growth factor signaling in the skeleton: possible links to MPS VI. J Pediatr Rehabil Med 2010;3:129–38. [8] Maroteaux P, Le Merrer M. Les maladies osseuses de l’enfant. 4e ed. Paris: Médecine-sciences Flammarion; 2002. [9] Lachman R, Martin KW, Castro S, et al. Radiologic and neuroradiologic findings in the mucopolysaccharidoses. J Pediatr Rehabil Med 2010;3:109–18. [10] Prat C, Lemaire O, Bret J, et al. Syndrome de Morquio : diagnostic chez l’adulte. Rev Rhum 2008;75:680–3. [11] Simonaro CM. Cartilage and chondrocyte pathology in the mucopolysaccharidoses: the role of glycosaminoglycan-mediated inflammation. J Pediatr Rehabil Med 2010;3:85–8. [12] Fung EB, Johnson JA, Madden J, et al. Bone density assessment in patients with mucopolysaccharidosis: a preliminary report from patients with MPS II and VI. J Pediatr Rehabil Med 2010;3:13–23. [13] Rigante D, Caradonna P. Secondary skeletal involvement in Sanfilippo syndrome. QJM 2004;97:205–9. [14] Rigante D, Buonuomo PS, Caradonna P. Early-onset osteoporosis with high bone turnover in children with Morquio-Brailsford syndrome. Rheumatol Int 2006;26:1163–4.

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